« Rien n’est jamais acquis »
Le conseil de Paris et l’assemblée générale de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris Ile-de-France ont signé une convention de partenariat pour renforcer le rayonnement économique de la capitale. Les deux institutions vont unir leurs forces et travailler de concert pour faire de Paris une ville encore plus attractive dans les secteurs du tourisme, du commerce et de l’enseignement supérieur. Étienne Guyot, directeur général de la CCI Paris Ile-de-France, nous dévoile les grands axes de cette convention.
LPA – En quoi consiste cette convention signée entre la mairie de Paris et la Chambre de commerce ?
Étienne Guyot – C’est la première fois que la ville de Paris et la CCI Paris Ile-de-France s’associent pour un partenariat global. Elles affirment leur volonté de travailler ensemble au rayonnement de Paris et de la région capitale. Nous avons des compétences complémentaires, il est logique que nous unissions nos forces. Paris est aujourd’hui une place très attractive, et la première destination touristique au monde. Mais rien n’est jamais acquis. La concurrence avec d’autres métropoles internationales est très forte.
Des métropoles comme Londres, New-York, San Francisco, Shanghai ou Pékin attirent elles aussi. D’autres destinations cherchent à valoriser leur patrimoine. Les États-Unis viennent de lancer un plan pour développer le tourisme international, la Russie met en avant la destination « Moscou » … Il faut faire attention à ce qui se passe autour de nous. Pour conserver sa position de leader, Paris doit prendre des initiatives. C’est dans cette optique que nous avons établi cette convention pluriannuelle. Il s’agit d’accroître le rayonnement métropolitain de Paris, et en premier lieu, faire en sorte que Paris garde sa position de leader mondial dans le secteur du tourisme.
LPA – Paris a-t-elle du souci à se faire ?
É. G. – Notre capitale a des atouts indéniables. Si elle est le leader mondial des destinations touristiques, ce n’est évidemment pas pour rien. C’est une ville qui jouit d’une grande richesse patrimoniale, et qui a en outre une tradition d’accueil à la française qui la rend très attractive. Cela dit, on peut encore améliorer les prestations. Les attentes des touristes augmentent, il faut qu’ils trouvent dans notre ville tout ce qu’ils attendent. L’attractivité de notre capitale a par ailleurs été fragilisée par les attentats de novembre dernier, qui ont eu des répercussions négatives dans le secteur touristique, en entraînant une baisse de la fréquentation des restaurants, hôtels et lieux de concerts. Il faut regagner ce qui a été perdu. La campagne « Paris est une fête », lancée au mois de juin dernier, vise à cela.
LPA – Comment allez-vous procéder pour augmenter la qualité de l’accueil ?
É. G. – Nous allons par exemple mener des campagnes pour sensibiliser les commerçants à l’impact du tourisme, et leur proposer des formations pour leur permettre d’offrir un meilleur accueil. Paris a une multitude de petits commerces, qui font son charme, mais qui peuvent encore améliorer leur accueil. Cela passe par exemple par une meilleure maîtrise des langues étrangères. Nous avons déjà lancé l’opération « Do you speak tourist ? », sous le label CCI Paris Ile-de-France, pour inciter les entreprises à mieux connaître et accueillir leur clientèle touristique. On peut imaginer une déclinaison de cette campagne en différentes langues, compte tenu du fait que de nouvelles nationalités viennent visiter Paris. Le tourisme chinois, notamment, est en plein essor.
LPA – La Chambre et la Ville disent vouloir mettre en avant le « made in Paris ». De quoi s’agit-il ?
É. G. – Il y a aujourd’hui une forte demande de « tourisme de savoir-faire », orienté vers les savoir-faire traditionnels, la production de certaines spécialités… La région Ile-de-France est pour le moment mal positionnée sur ce créneau, puisqu’elle n’est qu’au 17e rang européen. La demande de visite d’entreprises dans notre région est pourtant importante. L’idée est donc de promouvoir les visites d’entreprise, d’inciter les entreprises à ouvrir leurs portes aux publics en vue d’attirer une clientèle supplémentaire. Cela se fait déjà dans un certain nombre de villes, et permet aux entreprises de générer du chiffre d’affaires supplémentaire, en vendant les produits fabriqués à l’issue des visites. C’est aussi un outil de communication qui permet de faire connaître l’entreprise. C’est un secteur sur lequel nous avons tout intérêt à nous positionner dans des domaines comme ceux de la mode, du design, des métiers d’art…
LPA – La Chambre et la Ville entendent également tirer parti des grands événements accueillis en région parisienne…
É. G. – Nous allons en effet repérer les grands événements des trois années à venir, et mener des actions concertées pour que ces événements bénéficient au maximum à la métropole. Prenez l’exemple de l’Euro : un événement tel que celui-là amène des milliers de personnes dans la capitale. Il faut mener des actions en direction des commerces, des transports, pour que ce type d’événements ait le maximum de répercussions économiques sur la région. Nous allons réfléchir ensemble à ce qu’il convient de faire, en termes de démarchage, de communication, de formation, pour tirer le meilleur parti des sommets, événements culturels ou sportifs accueillis dans notre ville. Ces actions seront pilotées par le comité de gouvernance de la convention.
LPA – Paris est également un pôle attractif pour les affaires, grâce à sa capacité d’accueil de congrès et de salons. Cette activité va-t-elle être renforcée ?
É. G. – La région Ile-de-France est la première place de congrès et de salons en Europe. Nous avons en région parisienne une possibilité d’accueil de congrès et de salons exceptionnelle : pas moins de dix sites d’exposition, parmi lesquels des sites prestigieux comme le Palais des congrès de la porte Maillot, les parcs des expositions de la porte de Versailles et de Villepinte, le carrousel du Louvre, l’espace Champerret… En tout, ce sont 720 000 mètres carrés de surface couverte qui sont à disposition des exposants. C’est une activité essentielle à l’économie de la région. Nous accueillons chaque année 400 salons professionnels et 1 000 congrès en Ile-de-France. Vingt-et-un milliards d’euros de contrats sont signés sur ces salons. Cela représente, pour la métropole, 12 millions de visiteurs et plus de 5 milliards de retombées économiques. En termes d’emploi, c’est également considérable : 90 000 équivalents temps plein sont générés par ces salons. Un des objectifs de la Chambre et de la Ville sera de faire venir encore plus de congrès et de salons. Pour cela, la CCI Paris Ile-de-France et la Ville veilleront à être présentes conjointement sur ces congrès en envoyant chacune des élus. La maire de Paris profitera de ses déplacements pour rappeler que Paris est une place d’accueil importante. Enfin, nous améliorons les équipements d’accueil. Le parc des expositions de la porte de Versailles doit être totalement rénové pour 2024, et un nouveau centre des congrès y sera inauguré dès 2018.
LPA – En marge de ces salons, il y a un tourisme d’affaires à développer…
É. G. – Tout à fait. Les participants à ces réunions viennent souvent avec leur conjoint, profitent de l’occasion pour passer une semaine dans notre capitale. Nous allons travailler en lien avec l’office du tourisme et des congrès de Paris pour inciter les visiteurs des salons et congrès d’Ile-de-France à rester et à revenir dans notre capitale. Il faut que tout soit fait pour leur permettre d’associer un séjour touristique à leur déplacement professionnel.
LPA – La convention prévoit également une coopération sur le front de l’emploi…
É. G. – La Chambre et la Ville vont en effet s’unir sur le front de l’emploi également. Elles vont prospecter conjointement pour organiser des recrutements ciblés afin de trouver des solutions pour les métiers en tensions, comme l’industrie créative et l’hôtellerie-restauration qui manquent de postulants. La Chambre s’engage à participer à l’opération « 1 000 parrains pour 1 000 emplois », rencontres régulières entre et employeurs et demandeurs d’emploi organisées par la mairie de Paris. La Chambre participera également aux ateliers de « Paris initiative emploi » lancés par la mairie de Paris.
Les deux institutions ont par ailleurs la volonté de favoriser l’apprentissage. La Chambre forme 15 000 apprentis par an, dans ses vingt-trois écoles. De son côté, la ville de Paris prend 500 apprentis par an. La Ville et la Chambre vont s’unir pour sensibiliser les chefs d’entreprise aux avantages de prendre un apprenti. Les deux institutions seront présentes au Forum de l’alternance (organisé généralement en mai) et vont organiser conjointement des sessions de recrutement.