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Du nouveau dans les fusions transfrontalières

Publié le 11/09/2023
Du nouveau dans les fusions transfrontalières
Feodora/AdobeStock

L’ordonnance est prise sur le fondement de la loi du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture. Elle transpose la directive (UE) n° 2019/2121 du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) n° 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières. L’ordonnance entend faciliter les opérations de fusions et scissions des entreprises au sein de l’Union européenne et permet à la France de se doter d’un cadre juridique harmonisé avec celui des États membres de l’Union européenne. Les règles transposées visent, d’une part, à introduire en droit national les procédures de scissions et transformations transfrontalières et, d’autre part, à transposer les nouvelles dispositions relatives aux fusions transfrontalières.

Ord. n° 2023-393, 24 mai 2023, portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales

I – Les dispositions relatives aux fusions, scissions, et apports partiels d’actifs

A – Les fusions

Concernant les fusions, précise le rapport au président de la République, est ajouté à l’article L. 236-3 du Code de commerce un cas dans lequel la fusion est réalisée sans échange de parts ou d’actions de la société bénéficiaire contre des parts ou actions des sociétés qui disparaissent, lorsque ces parts ou actions sont détenues « dans les mêmes proportions dans toutes les sociétés qui fusionnent par les associés des sociétés qui fusionnent, lorsque ces proportions sont conservées à l’issue de l’opération ».

Ce cas nouveau, simplifiant les opérations concernées, correspond à l’extension au droit national des dispositions de transposition de l’article 119 d) in fine de la directive applicable aux opérations transfrontalières.

En outre, est ajoutée une précision à l’article L. 236-6 permettant de clarifier le fait que le projet de l’opération est mis à la « disposition du public », ce qui nécessite, en France, de l’annexer au registre du commerce et des sociétés.

Par ailleurs, on peut relever, notamment, que « l’article L. 236-10 du Code de commerce est complété d’un paragraphe IV permettant de préciser que lorsque l’approbation de l’opération par l’assemblée générale de la société absorbante n’est pas requise, le rapport doit être fourni un mois au moins avant la date de l’assemblée générale de l’autre ou des autres sociétés qui fusionnent ». En outre, « à l’article L. 236-11-1, renuméroté en L. 236-12, deux précisions sont apportées : d’une part, la mise en conformité du calcul du seuil de 90 % qui y est prévu avec l’article 113 de la directive (UE) n° 2017/1132, qui doit concerner les parts et les autres titres conférant un droit de vote, et non les droits de vote eux-mêmes ; d’autre part, la clarification que ce régime simplifié peut s’appliquer aux cas dans lesquels la société mère détient la totalité de l’une ou plusieurs des sociétés qui fusionnent et plus de 90 % de l’une ou des autres ».

B – Les scissions

1 – Les scissions des sociétés commerciales

L’article L. 236-18 du Code de commerce rappelle la définition des scissions, et le second, l’article L. 236-19, indique le régime applicable en procédant par renvoi à celui des fusions réalisées entre sociétés commerciales.

Ainsi, précise l’article L. 236-18, une société peut, par voie de scission, transmettre son patrimoine à plusieurs sociétés existantes ou à plusieurs sociétés nouvelles. Cette faculté est ouverte aux sociétés en liquidation à condition que la répartition de leurs actifs entre les associés n’ait pas fait l’objet d’un début d’exécution.

Les associés des sociétés qui transmettent leur patrimoine dans ce cadre reçoivent des parts ou des actions des sociétés bénéficiaires et, éventuellement, une soulte en espèces dont le montant ne peut dépasser 10 % de la valeur nominale des parts ou des actions attribuées.

2 – Les scissions comportant la participation de sociétés par actions ou de sociétés à responsabilité limitée

Comme l’indique le rapport au président de la République, les articles L. 236-20 à L. 236-26 du Code de commerce reprennent l’ensemble des dispositions consacrées aux scissions prévues dans les articles des sections 1 et 2 actuelles du chapitre VI du titre III du livre II du Code de commerce et qui en ont été supprimées à l’article 3 de la présente ordonnance. Cette reprise est effectuée à droit constant, sous réserve de deux exceptions :

• la première consiste à étendre aux scissions, au sein du nouvel article L. 236-21, l’application de l’article L. 236-11 permettant d’appliquer un régime simplifié aux opérations réalisées au bénéfice de sociétés détenues à 100 % ;

• la seconde consiste à étendre, au sein du second alinéa du nouvel article L. 236-25, les dispositions de l’article 160 undecies paragraphe 2 de la directive, permettant de plafonner le montant de la responsabilité solidaire de toute société concernée par la scission à la valeur des actifs nets qui lui sont attribués.

C – L’apport partiel d’actifs

L’article L. 236-27 du Code de commerce permet de reprendre les dispositions actuelles consacrées aux apports partiels d’actifs aux articles L. 236-6-1 et L. 236-22, indiquant qu’il est possible de les soumettre au régime des scissions. Il précise que de tels apports ne comprennent pas nécessairement d’élément de passif, et autorise explicitement leur réalisation simultanée au bénéfice d’une ou plusieurs sociétés existantes ou nouvelles, sur le modèle de ce que permet la directive.

Cet article introduit, en outre, et sur le modèle de la directive, la figure que cette dernière appréhende sous la dénomination de « scission partielle », qui constitue une déclinaison de l’apport partiel d’actifs. Elle consiste à prévoir, dans le projet d’une opération d’apport partiel d’actifs, que les parts ou actions de l’apporteuse, de la ou des bénéficiaires ou à la fois de l’apporteuse et de la ou des bénéficiaires représentant la contrepartie de l’apport seront attribuées directement aux associés de la société apporteuse.

Cette figure peut se réaliser en prévoyant que ces parts ou actions seront attribuées directement aux associés de la société apporteuse selon une répartition et dans des proportions que le projet doit déterminer1.

L’article L. 236-28, quant à lui, permet de maintenir le régime de l’apport partiel d’actifs simplifié, qu’il est proposé, en outre, d’étendre aux opérations impliquant des SARL.

Par ailleurs, précise l’ordonnance, « la ou les sociétés bénéficiaires des apports et la société qui apporte une partie de son actif sont débitrices solidaires des obligataires et des créanciers non obligataires de la société qui apporte une partie de son actif, en lieu et place de celle-ci sans que cette substitution emporte novation à leur égard ».

Le montant maximal de la responsabilité solidaire de toute société concernée par la scission est limité à la valeur, à la date à laquelle l’opération prend effet, des actifs nets qui lui sont attribués2.

Enfin, « par dérogation aux dispositions de l’article L. 236-29, l’article L. 236-30 précise qu’il peut être stipulé que les sociétés bénéficiaires de l’apport ne seront tenues que de la partie du passif de la société qui apporte une partie de son actif mise à leur charge respective et sans solidarité entre elles.

[Dans] ce cas, les créanciers non obligataires des sociétés participantes peuvent former opposition à l’opération dans les conditions et sous les effets prévus aux deuxième à dernier alinéas de l’article L. 236-15 ».

II – Les opérations transfrontalières

Ainsi que l’indique le rapport au président de la République, l’article 6 de l’ordonnance « permet de remplacer l’actuelle section 4 du chapitre VI du titre III du livre II du Code de commerce actuellement consacrée aux seules fusions transfrontalières, par les nouvelles dispositions de la directive. Cette nouvelle section 4 est composée de quatre sous-sections, dédiées respectivement aux fusions transfrontalières, aux scissions transfrontalières, aux apports partiels d’actifs transfrontaliers et aux transformations transfrontalières ».

A – La fusion transfrontalière

La fusion transfrontalière est l’opération par laquelle une ou plusieurs sociétés par actions ou sociétés à responsabilité limitée ayant leur siège social en France fusionnent avec une ou plusieurs sociétés relevant du champ d’application du paragraphe 1 de l’article 2119 de la directive (UE) n° 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, relative à certains aspects du droit des sociétés et relevant du droit de l’un ou plusieurs autres États membres de l’Union européenne.

L’ordonnance précise que ne sont pas soumises au régime de ces fusions transfrontalières :

1° les sociétés en liquidation dans la mesure où la répartition de leurs actifs entre les associés a fait l’objet d’un début d’exécution ;

2° les sociétés soumises aux procédures mentionnées aux articles L. 613-49 à L. 613-58-1 du Code monétaire et financier ;

3° les organismes de placement collectifs agréés conformément à la directive (UE) n° 2009/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 ainsi qu’aux fonds d’investissement alternatifs tels que définis par la directive (UE) n° 2011/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2011.

L’article L. 236-33, quant à lui, reprend à droit constant l’actuel article L. 236-26 du Code de commerce permettant d’inclure les opérations comprenant une soulte supérieure à 10 % de la valeur nominale ou du pair comptable des titres attribués.

L’ordonnance précise aussi que « le projet de fusion transfrontalière doit être publié postérieurement à l’avis rendu par les instances représentatives du personnel consultées en application des articles L. 2312-8 et, le cas échéant, L. 2341-4 du Code du travail ».

En outre, selon l’article L. 236-35, un avis doit être établi par chacune des sociétés participant à la fusion transfrontalière informant les associés, les créanciers et les délégués du personnel ou, à défaut, les salariés eux-mêmes qu’ils peuvent lui présenter, jusqu’à cinq jours ouvrables avant la date de l’assemblée générale, des observations concernant le projet de fusion transfrontalière.

Cet avis doit être déposé au greffe du tribunal de commerce du siège desdites sociétés, pour être annexé au registre du commerce et des sociétés, et fait l’objet d’une publicité dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d’État.

L’article L. 236-36 reprend l’actuel article L. 236-27 relatif à l’établissement du rapport des dirigeants, en l’adaptant aux nouvelles exigences de la directive, en ce que ce rapport ne peut être publié avant la finalisation de l’avis des représentants des salariés.

L’article L. 236-37, quant à lui, complète le rapport du ou des commissaires à la fusion qui doit indiquer également :

1° la ou les méthodes utilisées pour déterminer le montant de l’offre de rachat envisagée au titre de l’article L. 236-40 ;

2° le caractère adéquat de la ou des méthodes précitées ainsi que les valeurs auxquelles chacune de ces méthodes conduit, un avis étant donné sur l’importance relative donnée à ces méthodes dans la détermination de la valeur retenue et, si différentes méthodes sont utilisées dans les sociétés qui fusionnent, la justification de l’utilisation de méthodes différentes ;

3° les difficultés particulières d’évaluation s’il en existe.

Pour l’évaluation du montant de l’offre de rachat, le ou les commissaires à la fusion doivent prendre en considération le prix de marché des actions dans la ou les sociétés participant aux opérations avant l’annonce du projet de fusion ou la valeur de la ou des sociétés sans tenir compte de l’effet de la fusion envisagée, déterminée selon les méthodes d’évaluation généralement acceptées.

Par ailleurs, comme l’indique le rapport au président de la République, l’article L. 236-38 permet de respecter les règles de majorité imposées par la directive, qui demande que la décision soit prise par l’organe compétent à une majorité comprise entre deux tiers et 90 % des voix pour les opérations de scissions et de transformations transfrontalières (86 nonies, § 3 et 160 nonies, § 3). « Compte tenu du principe de liberté statutaire s’agissant de la majorité requise pour la modification des statuts des sociétés par actions simplifiées (SAS), il est proposé de laisser aux statuts le soin de définir la majorité applicable sous réserve que celle-ci soit comprise entre deux tiers et 90 %. Dans la même logique, il est proposé de plafonner à 90 % la majorité possible dans les SARL. En outre, il est proposé que cette règle soit applicable aux trois opérations, par souci d’harmonisation et de lisibilité, bien que le plafond de 90 % ne soit pas prévu par la directive en matière de fusions transfrontalières ».

Concernant le droit de retrait des associés ou des actionnaires, l’ordonnance prévoit que les associés ayant voté contre l’approbation du projet de fusion transfrontalière, les porteurs d’actions sans droit de vote et les associés dont les droits de vote sont temporairement suspendus bénéficient du droit de céder leurs actions, sous réserve que le projet de fusion prévoie qu’ils détiennent, à l’issue de l’opération, des actions dans une société régie par le droit d’un autre État membre.

À noter. Sous réserve qu’il n’ait pas eu ou qu’il n’ait pas exercé le droit de céder ses actions conformément à l’article L. 236-40 du Code de commerce, un associé de société qui fusionne, s’il estime que le rapport d’échange des titres, parts ou actions est insuffisant, peut le contester en demandant que la société verse une soulte en espèces, sans que cela fasse obstacle à la prise d’effet de la fusion transfrontalière.

Par ailleurs, l’article L. 236-42 transpose le dispositif de contrôle dans l’État membre de départ. Ce contrôle est confié au greffier du tribunal de commerce.

Ainsi, à peine de nullité de la fusion transfrontalière, le greffier du tribunal dans le ressort duquel la société participant à la fusion transfrontalière est immatriculée doit contrôler, dans un délai fixé par décret en Conseil d’État, la légalité de l’opération ainsi que la conformité des actes et des formalités préalables à la fusion transfrontalière.

Pour ce faire, le greffier, sous sa responsabilité, est chargé :

1° d’examiner l’ensemble des documents et information transmis par la société participant à l’opération ;

2° de vérifier que l’opération n’est pas réalisée à des fins abusives ou frauduleuses menant ou visant à se soustraire au droit de l’Union européenne ou au droit français ou à le contourner, ou à des fins criminelles. À cette fin, le greffier doit tenir compte de l’ensemble des faits et circonstances dont il a connaissance dans le cadre des opérations de contrôle, peut solliciter des autorités compétentes toute information qu’il estime nécessaire, y compris auprès de l’autorité chargée de contrôler la légalité de l’opération dans l’État membre de destination, et faire appel à un expert indépendant qu’il désigne et dont la rémunération est prise en charge par la société ;

3° de vérifier que l’opération n’est pas réalisée aux fins de priver les salariés de leurs droits en matière de participation.

À noter. Le secret professionnel ne peut être opposé au greffier en charge du contrôle en ce qui concerne les informations nécessaires à l’exercice de sa mission.

Au terme de son contrôle, lorsqu’il constate que la fusion transfrontalière respecte les conditions et procédures vérifiées, le greffier doit délivrer un certificat de conformité.

Le décret n° 2023-4303, quant à lui, fixe les modalités de l’obtention de ce certificat préalable auprès du greffier du tribunal de commerce.

Lorsqu’il constate que ces conditions et procédures ne sont pas respectées, le greffier doit informer la société des motifs du refus de délivrance du certificat. Si cela est possible, le greffier doit autoriser la société à régulariser la situation, dans un délai fixé par décret en Conseil d’État.

Le certificat de conformité doit être partagé au moyen du système d’interconnexion des registres avec les autorités désignées par les États membres pour procéder au contrôle de légalité mentionné à l’article 128 de la directive (UE) n° 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017, relative à certains aspects du droit des sociétés.

À noter. Le greffier du tribunal dans le ressort duquel sont immatriculées, selon le cas, la ou les sociétés issues de la fusion transfrontalière, la scission transfrontalière ou la transformation transfrontalière doit notifier sans délai la prise d’effet de l’opération ainsi que l’immatriculation des sociétés au greffier ou à l’autorité compétente du siège de chaque société ayant participé à l’opération.

En outre, l’article L. 236-43 du Code de commerce reprend l’actuel article L. 236-30, qui porte sur le contrôle de légalité effectué dans l’État membre de destination. Ce contrôle est confié au greffier du tribunal de commerce, conformément à l’habilitation décidée par le Parlement.

Par ailleurs, concernant les règles relatives à la date de la prise d’effet de l’opération, l’article L. 236-44 du Code de commerce précise que la fusion transfrontalière prend effet :

« 1° en cas de création d’une société nouvelle ;

2° en cas de transmission du patrimoine à une société existante, selon les dispositions du projet de fusion.

Toutefois, la date d’effet ne peut être ni postérieure à la date de clôture de l’exercice en cours de la société bénéficiaire pendant lequel a été réalisé le contrôle de légalité, ni antérieure à ce contrôle ou à la réception par l’autorité compétente du siège de chaque société ayant participé à l’opération du certificat de contrôle préalable ».

À noter. La nullité d’une fusion transfrontalière ne peut pas être prononcée après la prise d’effet de l’opération.

Enfin, l’article L. 236-45 du code précité reprend l’actuel article L. 236-32, qui précise que lorsque la société issue de la fusion est soumise à un régime de participation des salariés, cette dernière doit adopter une forme juridique permettant l’exercice de cette participation.

Le décret n° 2023-430 du 2 juin 2023, quant à lui, précise que le projet de fusion transfrontalière est arrêté par l’organe de gestion, d’administration ou de direction de chacune des sociétés participant à l’opération et doit contenir, notamment, les indications suivantes4 :

« 1° la forme, la dénomination et le siège social des sociétés participantes, ainsi que ceux de la société issue de la fusion transfrontalière ;

2° les motifs, buts et conditions de la fusion transfrontalière ;

3° le rapport d’échange des titres, parts ou actions représentatifs du capital social et, le cas échéant, le montant de la soulte ;

4° les modalités de remise des titres, parts ou actions de la société issue de la fusion transfrontalière, la date à partir de laquelle ces titres, parts ou actions donnent droit aux bénéfices ainsi que toute modalité particulière relative à ce droit ;

5° la date à partir de laquelle les opérations des sociétés qui fusionnent seront, du point de vue comptable, considérées comme accomplies pour le compte de la société issue de la fusion transfrontalière… »

En outre, précise l’article R. 236-22 du Code de commerce, les sociétés participant à l’opération de fusion qui sont immatriculées en France doivent déposer au greffe du tribunal de commerce de leur siège un avis relatif au projet de fusion transfrontalière.

Cet avis doit contenir les indications suivantes :

« 1° la raison sociale ou la dénomination sociale de chaque société participante suivie, le cas échéant, de son sigle, sa forme, l’adresse de son siège où peut être consulté le projet de fusion, du montant de son capital ainsi que, pour les sociétés participantes immatriculées en France, des mentions prévues aux 1° et 2° de l’article R. 123-237 ;

2° le registre auprès duquel chaque société participante a procédé à la publicité requise par l’article L. 236-6 ou les dispositions équivalentes de sa loi nationale, ainsi que le numéro d’inscription de la société dans ce registre ;

3° la raison sociale ou la dénomination sociale de la société nouvelle qui résulte de l’opération de fusion transfrontalière suivie, le cas échéant, de son sigle, de sa forme, de l’adresse de son siège, du montant de son capital ou du montant de l’augmentation du capital des sociétés existantes ;

4° l’évaluation de l’actif et du passif de chaque société participante dont la transmission à la société nouvelle ou absorbante est prévue ;

5° le rapport d’échange des droits sociaux dans chaque société participante ;

6° le montant prévu de la prime de fusion pour chaque société participante ;

7° la date du projet de fusion transfrontalière ainsi que, pour les sociétés participantes immatriculées en France, la date et le lieu du dépôt au registre du commerce et des sociétés prévu au deuxième alinéa de l’article L. 236-6 ;

8° l’indication, pour chaque société participante, des modalités d’exercice des droits des créanciers, des salariés et des associés ainsi que l’adresse à laquelle peut être obtenue sans frais une information exhaustive sur ces modalités ;

9° un avis informant les associés, les créanciers et les délégués du personnel ou, à défaut, les salariés eux-mêmes qu’ils peuvent présenter à la société, jusqu’à cinq jours ouvrables avant la date de l’assemblée générale, des observations concernant le projet de fusion ;

10° le cas échéant, le site internet sur lequel peut être obtenu sans frais le projet de fusion transfrontalière ainsi que l’avis mentionné au 9° ».

L’avis doit être transmis par le greffe du tribunal de commerce compétent pour publication dans un support habilité à recevoir des annonces légales du département du siège social des sociétés ainsi qu’au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales.

En outre, le dépôt au greffe du projet de fusion transfrontalière prévu à l’article L. 236-6, de l’avis prévu à l’article L. 236-35 (v. supra, II, A), ainsi que la publicité prévue à l’article R. 236-22 précité doivent être réalisés au moins un mois avant la date de l’assemblée générale appelée à statuer sur l’opération ou, le cas échéant, pour les opérations mentionnées à l’article L. 236-11, trente jours au moins avant que l’opération ne prenne effet.

B – La scission transfrontalière (possibilité pour une société de se scinder en plusieurs sociétés immatriculées dans des États membres différents)

La scission transfrontalière est l’opération par laquelle une société par actions ou une société à responsabilité limitée ayant son siège social en France participe à une scission avec une ou plusieurs sociétés relevant du champ d’application du paragraphe 1 de l’article 160 ter de la directive (UE) n° 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017, relative à certains aspects du droit des sociétés et relevant du droit de l’un ou de plusieurs autres États membres de l’Union européenne.

À noter. Son régime comprend des dispositions spéciales tout en procédant à un renvoi au régime de la fusion transfrontalière et à celui des scissions domestiques.

L’ordonnance précise aussi que les éléments d’actifs et de passif non expressément attribués par le projet de scission transfrontalière à l’une ou l’autre des sociétés participant à l’opération de scission transfrontalière doivent être répartis, lorsque l’interprétation du projet de scission ne permet pas de décider de leur répartition, proportionnellement à l’actif net attribué à chacune des sociétés bénéficiaires.

Selon le décret n° 2023-430 précité, outre les informations mentionnées à l’article R. 236-21 du Code de commerce, le projet de scission transfrontalière doit contenir les indications suivantes :

« 1° le calendrier indicatif envisagé pour la scission transfrontalière ;

2° la ou les dates à partir desquelles les opérations de la société scindée sont considérées du point de vue comptable comme étant celles des sociétés bénéficiaires ;

3° les statuts des sociétés bénéficiaires ;

4° une description précise des éléments d’actif et de passif de la société scindée et une description de la répartition de ces éléments entre les sociétés bénéficiaires ;

5° les informations concernant l’évaluation des éléments d’actif et de passif alloués à chaque société ;

6° la date d’arrêté des comptes de la société scindée ».

C – L’apport partiel d’actifs transfrontaliers

L’apport partiel d’actifs transfrontaliers est l’opération par laquelle une société par actions ou une société à responsabilité limitée ayant son siège social en France participe à une opération d’apport d’une partie de l’actif et, le cas échéant, du passif avec une ou plusieurs sociétés relevant du champ d’application du paragraphe 1 de l’article 160 ter de la directive (UE) n° 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017. Dans son troisième alinéa, l’article L. 236-48 définit aussi la scission partielle transfrontalière.

À noter. Le régime de cette opération est soumis, outre à des dispositions spéciales, à celles prévues pour les scissions transfrontalières et les apports partiels d’actifs domestiques.

L’article L. 236-49 transpose l’article 160 vicies de la directive précitée, qui demande d’exclure le dispositif du droit de retrait pour les apports partiels d’actifs transfrontaliers, mais non pour les scissions ou les scissions partielles transfrontalières.

III – La transformation transfrontalière (possibilité de transférer son siège dans un autre État membre tout en conservant sa personnalité juridique)

La transformation transfrontalière est l’opération par laquelle une société par actions ou une société à responsabilité limitée immatriculée en France, sans être dissoute ou liquidée ou mise en liquidation, se transforme en une société de forme juridique relevant du droit d’un autre État membre de l’Union européenne – figurant en annexe II de la directive (UE) n° 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, relative à certains aspects du droit des sociétés – et transfère au moins son siège statutaire dans cet autre État membre, tout en conservant sa personnalité juridique.

À noter. Le régime de cette opération est soumis, outre à des dispositions spéciales, à celles prévues pour les scissions transfrontalières et les apports partiels d’actifs domestiques.

Concernant les effets de cette opération, l’ordonnance précise qu’à compter de la réalisation de la transformation transfrontalière :

« 1° l’ensemble des éléments d’actif et de passif de la société résultant de la transformation sont ceux de la société à l’origine de la transformation ;

2° les associés ou actionnaires de la société à l’origine de la transformation continuent d’être associés ou actionnaires de la société résultant de la transformation, à moins qu’ils n’aient cédé leurs parts sociales ou actions ;

3° les droits et obligations des contrats de travail de la société résultant de la transformation existant à la date à laquelle la transformation transfrontalière prend effet sont ceux de la société à l’origine de la transformation ».

Par ailleurs, précise le rapport au président de la République précité, l’article L. 236-52 du Code de commerce permet de respecter les règles de majorité imposées par la directive, qui demande que la décision soit prise par l’organe compétent à une majorité comprise entre deux tiers et 90 % pour les opérations de scissions et de transformations transfrontalières (86 nonies, § 3).

« Compte tenu du principe de liberté statutaire s’agissant de la majorité requise pour la modification des statuts des SAS, il est proposé de laisser aux statuts le soin de définir la majorité applicable sous réserve que celle-ci soit comprise entre deux tiers et 90 %. Dans la même logique, il est proposé de plafonner à 90 % la majorité possible dans les SARL.

En outre, il est proposé que cette règle soit applicable aux trois opérations, par souci d’harmonisation et de lisibilité, bien que le plafond de 90 % ne soit pas prévu par la directive en matière de fusions transfrontalières ».

Enfin, « est exclu le II de l’article L. 236-9, lequel permet à l’assemblée générale, dans certaines conditions, de déléguer sa compétence ou le pouvoir aux dirigeants pour décider ou mettre en œuvre une fusion-absorption »5.

À noter. La transformation transfrontalière prend effet à la date d’immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés.

Quoi qu’il en soit, le décret n° 2023-430 du 2 juin 2023, quant à lui, précise que le projet de transformation transfrontalière doit contenir les indications suivantes :

« 1° la forme, la dénomination et le siège social de la société transformée dans l’État membre de l’Union européenne de départ et dans l’État membre de destination ;

2° les statuts de la société dans l’État membre de destination ;

3° le calendrier indicatif envisagé pour la transformation transfrontalière ;

4° les droits accordés par la société aux associés ayant des droits spéciaux et aux porteurs de titres autres que des actions ou des parts représentatifs du capital social ou les mesures proposées à leur égard ;

5° tous avantages particuliers attribués aux membres des organes d’administration, de direction, de surveillance ou de contrôle ;

6° le cas échéant, des informations sur les procédures selon lesquelles sont fixées les modalités relatives à l’implication des travailleurs dans la définition de leurs droits de participation dans la société résultant de la transformation transfrontalière ;

7° les effets probables de la transformation transfrontalière sur l’emploi ;

8° les modalités d’attribution d’une offre de rachat aux associés conformément à l’article L. 236-40 ;

9° les garanties offertes aux créanciers, telles que les cautionnements et les gages ;

10° si une mesure d’incitation ou une subvention a été reçue par la société dans l’État membre de départ au cours des cinq dernières années ».

Pour conclure, on peut noter que l’ordonnance contient également des dispositions qui modifient le Code du travail et qui consistent à appliquer aux scissions et transformations transfrontalières le dispositif qui avait été prévu à l’occasion de la directive (UE) n° 2005/56 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières de sociétés de capitaux dans le titre VII du livre III du Code du travail. Ce dispositif est repris pour être appliqué à ces deux nouvelles opérations.

Le seuil de déclenchement de l’un des critères conduisant à ne pas appliquer les règles de participation des salariés dans l’État membre de destination est modifié par la directive : le changement opéré à l’article L. 2372-1 remplace le seuil actuel de 500 salariés par celui du nombre moyen de salariés équivalent à quatre cinquièmes du seuil à partir duquel les règles relatives à la participation des travailleurs sont applicables dans l’État membre de départ6.

Notes de bas de pages

  • 1.
    Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023, portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales : JO n° 0120, 25 mai 2023.
  • 2.
    C. com., art. L. 236-29.
  • 3.
    D. n° 2023-430, 2 juin 2023, portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales : JO, 3 juin 2023.
  • 4.
    C. com., art. R. 236-21.
  • 5.
    Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023, portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales : JO n° 0120, 25 mai 2023.
  • 6.
    Rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023, portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales : JO n° 0120, 25 mai 2023.
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