Véronique Poitou : « Dans le Réseau Entreprendre du Val-de-Marne il y a de la collaboration et de la coopération »

Publié le 22/12/2023

Réseau Entreprendre du Val-de-Marne a été créé en 2012. Aujourd’hui, cette association réunit 110 dirigeants adhérents et environ 90 entrepreneurs lauréats soutenus dans leur parcours entrepreneurial. Ces chefs d’entreprise lauréats sont soutenus et financés pour créer, maintenir ou développer des emplois. Au total, près de 200 sociétés du département sont intégrées au sein de ce réseau val-de-marnais dont le siège est situé à Créteil. Depuis 2021, l’organisme bénéficie également d’un espace de 600 m2 au parc Icade de Rungis avec des bureaux mis à disposition des adhérents. La directrice de Réseau Entreprendre du Val-de-Marne, Véronique Poitou, fait le point sur l’évolution de l’association et sur la situation des sociétés dans le département. Rencontre.

Actu-Juridique : Comment a évolué Réseau Entreprendre du Val-de-Marne depuis sa création en 2012 ?

Véronique Poitou : Réseau Entreprendre 94 a bien évolué notamment concernant une de nos valeurs phares qui est la réciprocité. C’est aussi un élément fondamental dans notre business model. Les lauréats qui bénéficient de l’accompagnement et du financement sont invités à adhérer en retour à l’organisme. Ainsi, ils participent au financement du réseau qui repose essentiellement sur du financement privé à hauteur de 80 %. Nous bénéficions à la marge de quelques subventions ce qui reste important sur le plan relationnel et politique à travers des partenariats avec les intercommunalités ou encore BpiFrance. La réciprocité est aussi importante d’un point de vue moral. Les chefs d’entreprise aguerris accompagnent ceux qui débutent. C’est dans cet esprit que le Réseau Entreprendre du Val-de-Marne évolue.

AJ : Combien de projets accompagnez-vous en moyenne chaque année ?

Véronique Poitou : Nous avons en moyenne 20 projets en accompagnement. Ce n’est pas une volonté car nous aurions la capacité d’en accueillir davantage. Mais Réseau Entreprendre est un peu élitiste sur la catégorie du projet et non pas sur les entrepreneurs en eux-mêmes. Nous accueillons des lauréats diplômés et des autodidactes. En revanche, il n’y a pas beaucoup de projets correspondant à nos critères qui sont assez exigeants sur le plan du développement économique.

AJ : Quels sont les critères sur lesquels vous vous appuyez pour sélectionner les projets accompagnés ?

Véronique Poitou : Le critère fondamental dans les trois catégories de projets accompagnés est la création d’emplois. D’abord, nous accompagnons des projets de création d’entreprise. Ces sociétés doivent être déjà existantes avec un apport en fonds propre de 15 000 euros et qui ont un besoin de financement d’environ 70 000 euros. Dans le business plan, nous devons avoir en prévision la création de cinq à dix emplois sur les trois à cinq ans. Dans ces situations-là, nous prêtons entre 15 000 et 50 000 euros. Ensuite, nous avons des projets de reprise d’entreprise. Le projet doit au moins maintenir l’emploi de la société concernée. Nous pouvons engager un prêt entre 15 000 et 80 000 euros. Enfin, nous accompagnons des entreprises en développement. Ces sociétés réalisent plus de 500 000 euros de chiffre d’affaires. Elles doivent avoir un projet de croissance du nombre de collaborateurs et du chiffre d’affaires à travers un besoin en financement entre 50 000 et 100 000 euros.

AJ : Sur les 200 entreprises en lien avec le Réseau Entreprendre du Val-de-Marne, quelle est la typologie de ces sociétés et où sont-elles situées ?

Véronique Poitou : Nous avons vraiment des entreprises totalement différentes. Quand je suis arrivé au sein du réseau, les sociétés étaient très orientées vers le numérique, des activités autour de logiciels et d’applications. Ce n’est plus du tout le cas. La diversité des domaines de nos sociétés permet d’avoir une certaine complémentarité qui amène à être plus constructif dans l’accompagnement. Nos entrepreneurs adhérents sont situés équitablement dans les trois établissements publics territoriaux (EPT) du département : Grand-Orly Seine Bièvre, Grand Paris Sud Est Avenir et Paris Est Marne & Bois. Jusqu’à maintenant, il y avait une concentration des projets accompagnés sur Paris Est Marne & Bois et sur Grand-Orly Seine Bièvre. Depuis l’année dernière, il y a eu un rattrapage sur l’EPT Grand Paris Sud Est Avenir.

AJ : Quel constat faites-vous sur l’année 2023 concernant la création d’entreprise et la situation de vos adhérents ?

Véronique Poitou : En 2023, nous accompagnons moins de projets car il y a eu une baisse des créations d’entreprise. Une conséquence du recul des banques qui sont très frileuses pour prêter de l’argent. C’est un vrai frein à l’entrepreneuriat même si nous essayons de travailler avec nos banques partenaires. Les entreprises en création ou en développement ont des difficultés à avoir accès à des emprunts bancaires. Les délais d’étude pour les demandes de crédits se sont nettement allongés. Ensuite, pour les sociétés existantes, il y a la question des prêts garantis par l’État (PGE). Ils ont certes aidé durant la crise sanitaire en mettant sous perfusion des entreprises. Mais aujourd’hui, ces prêts sont des dettes pour plusieurs entreprises. Cette aide passagère n’arrange pas la situation de certaines sociétés aujourd’hui.

AJ : Comment pouvez-vous caractériser la conjoncture économique de 2023 à votre niveau ?

Véronique Poitou : Économiquement, l’année 2023 est très molle et assez morose. Malgré tout, le point positif est l’entraide. Dans le réseau, il y a de la collaboration et de la coopération. Les entrepreneurs de notre réseau ont le réflexe de s’aider les uns et les autres. Ils sont courageux, battants et positifs. Ils ont une énergie incroyable avec la volonté d’y croire. Si ce n’était pas le cas, ils ne se seraient pas engagés dans l’entrepreneuriat. C’est un état d’esprit commun entre nos membres et nos lauréats.

AJ : Pour conclure, quel regard avez-vous sur l’entrepreneuriat des femmes ?

Véronique Poitou : Nous regardons l’entrepreneuriat féminin comme les autres entrepreneurs. Il y a un bémol sur l’écriture des business plans des femmes entrepreneures. Ils vont être moins époustouflants qu’un business plan réalisé par un homme. Les objectifs vont être plus réalistes et plus atteignables par rapport à ceux d’un homme qui va partir plus facilement dans des chiffres moins réalistes qu’une femme. Je constate le même phénomène dans la gestion de l’entreprise. Cependant, il y a des femmes dans Réseau Entreprendre 94 mais malheureusement pas assez ! Elles sont souvent associées. L’an dernier, nous avons eu de nombreux projets mixtes. Par exemple sur les dix projets accompagnés cette année, deux sociétés sont dirigées par des femmes avec une reprise et une phase de développement.

Plan
X