Les CDD successifs d’un joueur de rugby

Publié le 30/09/2022

Un joueur de rugby, engagé en CDD, prolongé par deux avenants et un nouveau CDD saisit la juridiction prud’homale de demandes en requalification de la relation contractuelle en CDI et en paiement de diverses sommes au titre de la rupture de la relation de travail.

La CJUE a jugé que la notion de raisons objectives de recours au CDD doit être entendue comme visant des circonstances précises et concrètes caractérisant une activité déterminée et, partant, de nature à justifier dans ce contexte particulier l’utilisation de ces contrats. Elle a précisé que si un État-membre est en droit de tenir compte des besoins particuliers d’un secteur spécifique, ce droit ne saurait toutefois être entendu comme lui permettant de se dispenser de respecter, à l’égard de ce secteur, l’obligation de prévoir une mesure adéquate pour prévenir et, le cas échéant sanctionner, le recours abusif aux CDD successifs.

En l’état du droit antérieur à la loi n° 2015-1541 du 27 novembre 2015, qui a organisé le recours à un CDD spécifique pour l’engagement des sportifs professionnels, la demande de renvoi préjudiciel propose une interprétation de la directive n° 1999/70/CE de nature à entraîner une régression du niveau général de protection des salariés concernés. Cette demande de question préjudicielle n’apparaît donc pas pertinente, faute d’influence sur la solution du litige.

Il n’y a, en conséquence, pas lieu de saisir la CJUE d’une question préjudicielle.

Les dispositions prévues par les articles L. 1242-1 et suivants du Code du travail, relatives au CDD, ont été édictées dans un souci de protection du salarié, qui seul peut se prévaloir de leur inobservation.

Selon l’article L. 222-2-6 du Code du sport, le règlement de la fédération sportive ou, le cas échéant, de la ligue professionnelle peut prévoir une procédure d’homologation du contrat de travail du sportif et de l’entraîneur professionnels et déterminer les modalités de l’homologation ainsi que les conséquences sportives en cas d’absence d’homologation du contrat.

Le contrôle des conditions de recours au CDD n’entre pas dans le champ des vérifications effectuées par une fédération ou une ligue professionnelle, qui, dans le cadre de sa mission de service public relative à l’organisation des compétitions, procède à l’homologation d’un contrat de travail.

S’il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du Code du travail que dans les secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des CDD lorsqu’il est d’usage constant de ne pas recourir à un CDI, en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des CDD successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en œuvre par la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999, qui a pour objet, en ses clauses 1 et 5, de prévenir les abus résultant de l’utilisation de CDD successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.

D’abord, la cour d’appel de Toulouse retient que les justifications avancées par l’employeur et relatives à l’incapacité physique pour un joueur de rugby professionnel d’exercer son métier au-delà d’un certain âge et les évolutions affectant ses performances, avancées par l’employeur, qui sont liées à la personne même du salarié et non à l’emploi concerné, ne sont pas de nature à établir le caractère par nature temporaire de cet emploi.

Ensuite, l’employeur s’étant borné à invoquer des justifications d’ordre général, tenant notamment aux évolutions du projet tactique de l’entraîneur et des objectifs sportifs et économiques fixés par la direction du club, la cour d’appel, qui retient que l’employeur n’établit pas le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné, peut décider que la relation de travail doit être requalifiée en CDI.

Sources :
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