Importance de la notion de discrimination directe ou indirecte dans la responsabilité pénale

Publié le 14/06/2021

Le directeur du service départemental d’incendie et de secours (SDIS) est cité par le ministère public devant le tribunal correctionnel du chef de discrimination, à la suite de plaintes d’un sapeur-pompier, soutenant avoir fait l’objet d’une discrimination faute d’avoir pu être promu au grade d’adjudant. Il reproché au prévenu d’avoir élaboré une note de service édictant pour la promotion au grade d’adjudant des sapeurs-pompiers un critère tenant à la durée des services effectués au sein du seul SDIS de la localité considérée à l’exclusion des autres SDIS ce qui revient, selon la prévention, de fait à empêcher toute promotion à ceux qui ont effectué tout ou partie de leur carrière hors de cette localité et peuvent ne pas en être originaires.

C’est à juste titre que le moyen relève que le prévenu, qui dispose d’un pouvoir de gestion administrative en application de l’article L. 1424-32 du Code général des collectivités territoriales, et a établi par une note de service les critères d’avancement contestés, a pu engager sa responsabilité pénale.

En effet, en premier lieu, il ne résulte pas de l’article 225-1 du Code pénal que le fait pour quiconque d’opérer une distinction se traduisant par une discrimination prohibée implique qu’il la mette directement en œuvre.

En second lieu, il suffit que ladite distinction ait été proposée par une personne participant, de par ses fonctions, au pouvoir de direction de la personne morale qui met en œuvre la mesure discriminatoire, ou de l’un de ses organes, pour que cette personne physique soit susceptible de faire l’objet de poursuites à raison de ces textes.

La Cour de cassation, cependant, a le pouvoir de substituer un motif de pur droit à un motif erroné ou inopérant sur lequel se fonde la décision attaquée et de justifier ainsi ladite décision, dès lors que ledit motif a été mis dans le débat.

Elle est en mesure de dire, dans la présente espèce, que les faits poursuivis ne sont pas punissables au titre des dispositions de l’article 225-1 du Code pénal.

En effet, il résulte de l’article 225-2 du Code pénal que seules sont punissables les discriminations fondées sur l’un des critères limitativement énumérés aux articles 225-1 à 225-1-2. Ces textes, qui doivent être interprétés strictement, ne répriment que la discrimination directe.

La notion de discrimination directe se comprend par opposition à celle de discrimination indirecte, qui consiste en une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner, pour un motif fondé, notamment, sur l’un des critères énumérés à l’article 225-1 du Code pénal, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés.

Parmi les critères énumérés par le Code pénal figure l’origine de l’intéressé mais non la durée d’emploi dans une région particulière. A supposer que l’arrêté litigieux conduise à favoriser les personnes originaires d’une localité au détriment des autres, et qu’une telle discrimination soit punissable, celle-ci serait le résultat d’une constatation statistique selon laquelle les personnes ayant été en service pendant une durée importante à La Réunion sont le plus souvent originaires de ce territoire. D’une telle constatation, extrinsèque au libellé de l’arrêté, on ne pourrait déduire que l’existence d’une discrimination indirecte.

Sources :
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