Recours contre une sentence arbitrale : la mission de la cour d’appel et l’ordre public international
Le Gouvernement libyen et une société concluent un accord pour fixer le montant de la créance de celle-ci et mettre fin à leur différend concernant l’exécution d’un contrat de construction.
Pour obtenir paiement de sa créance, la société engage une procédure d’arbitrage, sous l’égide de la Chambre de commerce international (la CCI), sur le fondement du traité bilatéral de protection des investissements entre la France et la Libye. En cours d’instance, elle sollicite l’homologation d’un protocole transactionnel. Une sentence partielle, rendue en France accueille cette demande, condamne la Libye à payer une certaine somme dans un certain délai et prévoit qu’en cas de défaillance cet État serait tenu de payer un montant supérieur.
La sentence partielle n’ayant pas été exécutée dans le délai imparti, le tribunal arbitral rend une sentence finale condamnant la Libye au paiement de la somme majorée et répartissant les frais d’arbitrage.
Le respect de l’ordre public international de fond ne peut être conditionné par l’attitude d’une partie devant l’arbitre.
La cour d’appel, devant laquelle il est allégué que l’exécution de la sentence avait pour effet de permettre à la société de retirer les bénéfices d’un protocole transactionnel obtenu par corruption, n’est pas tenue de procéder à la recherche inopérante selon laquelle l’État libyen aurait fait preuve de déloyauté en n’invoquant pas ce grief devant les arbitres, de sorte qu’elle justifie légalement sa décision de ce chef.
Et l’article 1520 du Code de procédure civile dispose que le recours en annulation n’est ouvert que si le tribunal arbitral s’est déclaré à tort compétent ou incompétent ou le tribunal arbitral a été irrégulièrement constitué ou le tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été confiée ou le principe de la contradiction n’a pas été respecté ou la reconnaissance ou l’exécution de la sentence est contraire à l’ordre public international.
Si la mission de la cour d’appel, saisie en vertu de ce texte, est limitée à l’examen des vices que celui-ci énumère, aucune limitation n’est apportée à son pouvoir de rechercher en droit et en fait tous les éléments concernant les vices en question.
Saisie d’un moyen tiré de ce que la reconnaissance ou l’exécution de la sentence heurterait l’ordre public international en ce que la transaction qu’elle homologuait avait été obtenue par corruption, la cour d’appel vérifie à bon droit la réalité de cette allégation en examinant l’ensemble des pièces produites à son soutien, peu important que celles-ci n’aient pas été précédemment soumises aux arbitres.
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