Vigilance sur l’optimisation fiscale du PEA

Publié le 01/07/2021
Vigilance sur l’optimisation fiscale du PEA
philippe Devanne / AdobeStock

Produit d’épargne réglementée, le PEA jouit d’une fiscalité très avantageuse. Cependant, l’administration fiscale contrôle avec vigilance les exonérations fiscales liées à la détention de titres au sein d’un PEA.

Ouvert pour une durée de 8 ans minimum, le plan d’épargne en actions (PEA), réservé aux contribuables fiscalement domiciliés en France, permet d’acquérir un portefeuille d’actions tout en bénéficiant, sous certaines conditions, d’une exonération d’impôt sur les dividendes et les plus-values.

Conditions d’ouverture

Le PEA est accessible à toute personne physique majeure dont le domicile fiscal est situé en France. Le transfert de domicile fiscal du détenteur du PEA à l’étranger n’entraîne plus la clôture automatique de celui-ci, sauf si ce transfert a lieu à destination d’un État ou territoire non coopératif. Une même personne ne peut être titulaire que d’un seul plan d’épargne en actions. Il est cependant possible d’en ouvrir plusieurs par foyer fiscal. Un couple marié ou pacsé peut donc ouvrir deux PEA, une option qui permet d’optimiser le plafond d’investissement actuellement limité par la loi à 150 000 € par PEA. Ce plafond ne prend pas en compte les gains réalisés depuis l’ouverture du plan. Un enfant majeur rattaché au foyer fiscal peut également ouvrir un PEA s’il est âgé de moins de 21 ans ou de moins de 25 ans et qu’il justifie de la poursuite d’études (PEA jeunes). Dans ce cas, il lui est appliqué un plafond spécifique d’investissement de 20 000 € jusqu’à la fin du rattachement, puis porté à 150 000 €. Outre le PEA, il est également possible d’opter pour un PEA-PME, dédié aux petites et moyennes entreprises, permettant d’investir sur des petites et moyennes valeurs qui bénéficient des mêmes avantages fiscaux que le PEA, avec un plafond d’investissement de 225 000 €. Le PEA et le PEA-PME sont cumulables à condition de respecter un plafond global d’investissement de 225 000 €.

Titres éligibles

Conformément aux règles impératives de fonctionnement des PEA, les titulaires de PEA effectuent des versements en numéraire sur le compte espèces du PEA. Ces sommes sont ensuite utilisées pour acquérir des titres éligibles qui sont alors inscrits sur le compte-titres du PEA. Cette enveloppe fiscale à fiscalité privilégiée permet d’acquérir un portefeuille d’actions d’entreprises européennes. Il est possible d’y loger des produits financiers aussi divers que des actions européennes, des certificats d’investissements, des parts de SARL, des trackers ou des parts d’organismes de placements collectifs (OPCVM, Sicav, FCP, etc.). Sont éligibles les actions et titres assimilés de sociétés dont le siège social est situé en France ou dans un État membre de l’Union européenne, en Islande ou en Norvège et qui sont soumises à l’impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent ainsi que des Sicav et FCP investis à 75 % en actions et titres assimilés. Les sommes versées sur un PEA ne peuvent pas servir à l’acquisition de titres détenus hors de ce plan par le titulaire du plan, la personne avec laquelle elle vit en couple, ses ascendants ou descendants.

Après 5 ans : une fiscalité favorable

L’imposition des revenus d’un plan d’épargne en actions est conditionnée par la date d’ouverture de ce dernier. En cas de clôture ou de retrait après cinq ans, les revenus produits et plus-values ne sont pas imposables à l’impôt sur le revenu. C’est pour cette raison qu’on préconise généralement d’ouvrir rapidement un PEA, quitte à n’y investir qu’une petite somme d’argent, afin de prendre date. C’est en effet le premier versement qui détermine la date fiscale d’ouverture du plan. En revanche, les revenus du PEA restent soumis aux prélèvements sociaux (17,20 %). Cependant, les dividendes et produits assimilés procurés par des placements effectués en actions ou parts de sociétés qui ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé ne sont exonérés annuellement que jusqu’à 10 % du montant de ces placements. Au-delà, la fraction des revenus est imposable dans les conditions de droit commun.

La loi Pacte (L. n° 2019-486, 22 mai 2019) a assoupli les règles de sortie du PEA. Dans la mesure où le PEA a été créé depuis plus de cinq ans, il est possible d’effectuer des retraits partiels sans que celui-ci soit clôturé. Il est également possible d’effectuer de nouveaux versements sur le PEA, dans la limite du plafond de versement.

Attention aux retraits avant 5 ans

Les retraits effectués avant la fin de la cinquième année entraînent la clôture du PEA. Dans ce cadre, les gains nets sont soumis au régime de droit commun du prélèvement forfaitaire unique (PFU) : impôt sur le revenu au taux de 12,8 % (sauf option pour le barème progressif), auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux tels que CSG ou CRDS (17,20 %), soit un taux global de 30 %. Le gain net correspond à la différence entre la valeur liquidative du PEA à la date de retrait et le montant des versements effectués sur le plan depuis son ouverture. Toutefois en cas de décès du titulaire du PEA, les retraits anticipés bénéficient d’une exonération d’impôt sur le revenu. En revanche, ils seront soumis aux prélèvements sociaux quelle que soit la durée de détention du plan. De même, en cas de création ou de reprise d’une entreprise, les retraits ou retraits partiels anticipés n’entraînent pas la clôture du plan et les gains issus de ces retraits ou du rachat ne sont pas imposés à l’impôt sur le revenu mais restent en revanche soumis à prélèvements sociaux. Dans ce cadre, il n’est pas possible en revanche d’effectuer de nouveaux versements sur le PEA. Les retraits ou rachats partiels anticipés doivent être affectés dans les trois mois à la création ou la reprise d’une entreprise que dirige le titulaire du PEA, son conjoint ou partenaire pacsé, un ascendant ou descendant. De même, les retraits ou retraits partiels anticipés n’entraînent pas la clôture du plan et les gains issus de ces retraits ou du rachat ne sont pas imposés à l’impôt sur le revenu mais restent en revanche soumis à prélèvements sociaux en cas de licenciement, d’invalidité (CSS, art. L. 341-4) ou de la mise à la retraite anticipée du titulaire du plan ou de son époux ou partenaire lié par un pacs. Dans ce cadre, les nouveaux versements restent possibles dans la limite du plafond de versement.

Des risques d’abus de droit

L’administration fiscale se montre vigilante quant à la mise en place et l’utilisation des PEA et peut remettre en cause l’existence d’un PEA pour abus de droit dans la mesure où celui-ci a été mis en place à des fins exclusivement ou principalement fiscales. Lorsqu’elle identifie un montage abusif, l’administration fiscale utilise la procédure de répression des abus de droit codifiée à l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales (LPF). Cette procédure, qui lui permet d’écarter tout montage artificiel réalisé à des fins fiscales, constitue pour l’administration fiscale un outil puissant. Elle aboutit à la remise en cause des avantages conférés par le PEA et, par voie de conséquence, à la clôture du PEA à la date des opérations litigieuses, additionnée à de lourdes sanctions financières puisque l’abus de droit est sanctionné par le rétablissement de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux éludés sur les produits et plus-values de cessions de titres figurants sur le plan, majorés par des pénalités de retard (4,8 % par an) et par l’application d’une pénalité spéciale égale à 80 % des droits rappelés. L’introduction dans le cadre de la loi de finances pour 2019 (L. n° 2018-1317, 28 déc. 2018) d’une nouvelle règle anti-abus codifiée à l’article L. 64 A du CGI (qualifiée de mini-abus de droit) et permettant à Bercy de remettre en cause une opération qui aurait pour objectif principal d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales de l’intéressé vient encore renforcer les moyens d’action de l’administration fiscale.

Des pratiques abusives

L’administration fiscale a listé un certain nombre d’utilisations abusives. Ainsi, dans sa cartographie des pratiques et montages abusifs (https://www.economie.gouv.fr/dgfip/carte-des-pratiques-et-montages-abusifs), l’administration fiscale a référencé plusieurs montages renvoyant à l’utilisation abusive d’un PEA afin de prévenir les contribuables des risques potentiellement encourus. L’administration fiscale se montre particulièrement vigilante en cas de transfert dans un PEA de rémunérations ou d’honoraires déguisés en dividendes d’actions ou de parts sociales, d’inscription dans un PEA de titres non cotés à une valeur de convenance ou de titres de sociétés ayant des participations supérieures à 25 % dans d’autres sociétés, dont les titres ne seraient pas éligibles au PEA. Ces opérations ne respectent pas les objectifs poursuivis par le législateur qui réserve les avantages fiscaux attachés au PEA aux opérations portant sur des titres souscrits lors d’une constitution de société ou d’une augmentation de capital ou d’une acquisition de titres grâce à un apport en numéraire sur cette enveloppe fiscale, à l’exclusion des opérations portant sur des titres transférés depuis le patrimoine préexistant du contribuable ou de ses proches vers le PEA. Autant d’opérations dans la ligne de mire de l’administration fiscale.