Immobilier du Grand Paris : « Nous souhaitons accélérer le processus de dématérialisation »

Publié le 27/05/2020

Les acteurs du monde de l’immobilier s’organisent face à la crise sanitaire et économique. Ils viennent d’annoncer le lancement de l’Alliance des professionnels de l’urbanisme et de l’immobilier du Grand Paris (APUI-GP). À travers ce nouvel outil, ils espèrent relancer rapidement le marché de l’immobilier du Grand Paris et proposent notamment de soutenir les collectivités dans leur démarche de digitalisation. Détails et perspectives avec Bertrand Savouré le président de la Chambre des notaires de Paris.

Les Petites Affiches : Pourquoi avez-vous décidé de créer cette alliance ?

Bertrand Savouré : Deux raisons principales ont motivé la réalisation de cette alliance. D’abord nous nous sommes rendu compte, durant cette crise totalement inédite, qu’il était essentiel que nous trouvions des réponses concertées, entre les acteurs de la chaîne de l’immobilier, aux problèmes rencontrés pendant la période de confinement. Promoteurs, notaires, agents immobiliers ou architectes, chacun à ses propres difficultés, et ne perçoit pas forcément l’intérêt d’une bonne coopération avec les autres intervenants. Cette alliance nous permet ainsi, à court terme, de nous parler et de nous rencontrer plus régulièrement pour mettre ensuite en place les solutions adéquates et les plus fluides.

Le deuxième intérêt de cette alliance se situe à plus long terme. Nous souhaitons unir nos forces, coordonner nos réflexions, et ainsi affirmer et réussir notre mission en tant qu’acteurs du Grand Paris. Nous avons notamment pour objectif de présenter des offres de services auprès des collectivités ou de l’État pour avancer ensemble dans cette construction du projet structurant qu’est le Grand Paris.

LPA : Vous ne voulez plus subir la crise actuelle ?

B. S. : C’est effectivement un impératif pour nous. Et nous souhaitions surtout agir collectivement. Chacun dans nos métiers, nous avons pris des mesures depuis la mi-mars pour continuer à travailler. Or, nous avons constaté que nous ne pouvions pas le faire chacun de notre côté, en silo. Pour être efficaces, nous avons besoin des promoteurs, des architectes, des notaires, de l’État, de la région, de l’ensemble des acteurs du Grand Paris.

LPA : Avez-vous déjà des propositions pour relancer le marché de l’immobilier du Grand Paris ?

B. S. : Dans l’immédiat nous souhaitons accélérer le processus de dématérialisation des dossiers immobiliers. Autorisations d’urbanisme, permis de construire, déclarations préalables de travaux, instructions des dossiers, toutes ces démarches prennent du temps et nécessitent de nombreux intervenants. Nous proposons donc aux collectivités nos services et nos expériences pour accélérer une digitalisation du traitement  de ces dossiers qui s’impose.

La loi ELAN (L. n° 2018-1021, 23 nov. 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique : JO n° 0272, 24 nov. 2018, texte n° 1) a imposé à toutes les collectivités de plus de 3 500 habitants l’obligation de dématérialiser leurs procédures d’instruction de permis au 1er janvier 2022. Or, la crise sanitaire que nous sommes en train de vivre a montré que cette tendance forte à la digitalisation répond à un vif besoin de la population. Les professionnels de l’immobilier et de l’urbanisme – disposent d’un savoir-faire qu’il est utile de coordonner et de faire partager.  Dans nos métiers, nous sommes déjà largement habitués à travailler ainsi. En témoigne l’appropriation rapide par les notaires de la comparution à distance, des procurations numériques, des espaces de travail partagés avec les promoteurs concernant les DIA.

À plus long terme, nous portons aussi l’ambition de soutenir le dynamisme économique de l’immobilier dans la région du Grand Paris et la transition écologique. Nous présenterons bientôt une série de propositions en la matière pour les pouvoirs publics.

LPA : Dans quel état est le marché de l’immobilier après deux mois d’arrêt forcé ?

B. S. : Nous avons fait des comparaisons avec les crises précédentes pour élaborer des modèles de sortie de crise, en vain. La période actuelle est totalement déroutante, bien qu’elle se rapproche dans sa soudaineté de la crise financière de 2008.

Nous annonçons, par exemple, 80 % de baisse de signature pour les notaires en avril, du jamais-vu. Le mois de mai s’annonce aussi très difficile, le nombre de transactions va brutalement chuter. La question qui se pose est celle de « l’après ». Le marché va-t-il redémarrer rapidement ou non ? Avec suffisamment de confiance ou pas ?

Le marché de l’immobilier est un marché qui nécessite de la confiance. Bien sûr, il y aura toujours des personnes qui déménageront, qui changeront de résidence principale ou de ville. Mais qu’en sera-t-il des investisseurs qui ont besoin d’un équilibre économique ? Tout dépendra de la sortie de crise et de la reprise macroéconomique. Si celle-ci est réelle, le marché de l’immobilier suivra. À titre personnel, je suis relativement confiant sur le rythme et l’ampleur de cette reprise.

LPA : Le marché de l’immobilier pourrait-il se restructurer du fait de la crise avec une nouvelle attente d’espace et de verdure ?

B. S. : Cette crise est à l’évidence accélératrice de beaucoup des évolutions sociétales que nous avons enregistrées ces dernières années. La préoccupation dont vous faites mention existait déjà avant la crise sanitaire et le confinement mais elle se trouve renforcée aujourd’hui. Avoir un jardin, plus d’espace, un balcon, ces envies se font encore plus pressantes. De la même manière, le recours au télétravail s’est renforcé ces dernières semaines et questionne l’immobilier. Peut-on, pour autant, en déduire que le marché va fondamentalement changer ? Personne ne peut l’affirmer à ce jour. Il y a tellement de paramètres à prendre en compte… La réponse d’aujourd’hui n’est pas celle de l’après grève des transports au sujet des retraites.

Un facteur me paraît tout de même important, c’est celui de la mobilité. Aller habiter ailleurs pour avoir plus grand et un balcon, c’est parfait à condition de pouvoir aisément aller travailler, se déplacer facilement. Mobilité et immobilier sont très liés. C’est le sens des projets du Grand Paris notamment.

LPA : Appelez-vous à un assouplissement des contraintes juridiques pour l’immobilier ?

B. S. : Notre volonté est d’insister sur la dématérialisation pour rendre beaucoup plus fluide le traitement des dossiers et la signature des actes. Évidemment, il y a aussi des propositions à faire pour simplifier certaines normes et contraintes mais ce n’est pas notre objectif d’aujourd’hui. C’est un travail à plus long terme. D’abord dématérialisons pour accélérer les processus, cela nous semble essentiel.

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