Le régime de la gestion des droits de réservation de logements locatifs sociaux est précisé
Présentation du décret n° 2020-145 du 20 février 2020 relatif à la gestion en flux des réservations de logements locatifs sociaux.
L’article 114, IV, de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite ELAN1, a généralisé la gestion en flux des réservations de logements locatifs sociaux, à savoir la réservation d’un flux annuel de logements par les réservataires que sont notamment l’État, les collectivités territoriales ou encore Action logement services, et non d’un « stock » de logements. Il prévoit que les conventions de réservation conclues entre les bailleurs et les réservataires avant la publication de la loi ELAN et ne portant pas exclusivement sur un flux annuel de logements doivent être mises en conformité, dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État et, au plus tard, dans un délai de 3 ans à compter de la promulgation de la loi. C’est chose faite avec le décret n° 2020-145 du 20 février 2020 relatif à la gestion en flux des réservations de logements locatifs sociaux2, entré en vigueur le 22 février 2020. Le décret prévoit donc un nouveau régime applicable aux réservations (I) et aménage la mise en conformité des conventions de réservations antérieures (II).
I – Le nouveau régime de réservation (art. 2)
Les conventions de réservation de logements locatifs sociaux conclues après la publication de la loi ELAN doivent répondre au nouveau dispositif.
A – Le régime de droit commun
1 – Les bénéficiaires des réservations (CCH, art. R. 441-5, I, al. 1)
Les bénéficiaires des réservations de logements locatifs sociaux (v. CCH, art. L. 441-1, al. 35 et 37) peuvent être :
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l’État ;
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les collectivités territoriales ;
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leurs établissements publics ;
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les établissements publics de coopération intercommunale ;
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les employeurs ;
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la SAS Action logement service ;
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les organismes à caractère désintéressé.
2 – La convention de réservation
a – Caractère impératif de la convention (CCH, art. R. 441-5, I, al. 2 et 3)
Une convention de réservation est obligatoirement signée entre tout bénéficiaire de réservations de logements locatifs sociaux et l’organisme bailleur.
Il ne peut être conclu qu’une seule convention de réservation par organisme bailleur et par réservataire à l’échelle d’un département.
À noter que l’exigence d’une convention-type fixée par arrêté pour les logements des fonctionnaires est supprimée (D. n° 2020-145, 20 févr. 2020, art. 1 anc. ; CCH, art. R. 314-4, al. 2 anc.).
b – Objet de la convention (CCH, art. R. 441-5, I, al. 2, 3 et 12)
Elle définit les modalités pratiques de la mise en œuvre de la réservation.
Elle porte sur l’ensemble du patrimoine locatif social de l’organisme bailleur dans ce département.
Sur les territoires concernés (v. CCH, art. L. 441-1, al. 23), la convention de réservation précise les modalités de mise en œuvre des attributions, dont les flux annuels de logements exprimés en pourcentages, de façon compatible avec les orientations définies en la matière dans le cadre de la conférence intercommunale du logement ou, pour la ville de Paris, de la conférence du logement, et les engagements souscrits dans le cadre de la convention intercommunale d’attribution ou, pour la ville de Paris, de la convention d’attribution.
c – Bénéficiaires des logements (CCH, art. R. 441-5, I, al. 12)
Le cas échéant, la convention de réservation est actualisée annuellement pour adapter le calcul des réservations mises à disposition du réservataire sur le territoire concerné, en fonction des mises en service de programmes intervenues l’année précédente et de l’échéance des droits de réservation.
d – Transmission de la convention (CCH, art. R. 441-5, I, al. 12)
Toute nouvelle convention signée est transmise sans délai par l’organisme bailleur au préfet de département ainsi que, sur les territoires concernés (v. CCH, art. L. 441-1, al. 23), au président de l’établissement public de coopération intercommunale ou au président de la métropole de Lyon ou au président de l’établissement public territorial concerné de la métropole du Grand Paris ou au maire de Paris.
e – Objet des réservations
Flux annuel de logements (CCH, art. R. 441-5, I, al. 4)
Les réservations prévues par la convention portent sur un flux annuel de logements exprimé en pourcentage du patrimoine locatif social de l’organisme bailleur, à l’exception de celles faites au profit des services relevant de la défense nationale ou de la sécurité intérieure qui portent sur des logements identifiés dans des programmes.
Calcul du flux de logements (CCH, art. R. 441-5, I, al. 5)
Pour le calcul du flux annuel de logements, ne sont pas pris en compte, pour une année donnée, les logements nécessaires :
-
aux mutations de locataires au sein du parc social de l’organisme bailleur ;
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aux relogements de personnes dans le cadre d’une opération :
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de rénovation urbaine,
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de renouvellement urbain,
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de requalification de copropriétés dégradées,
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de vente de logements locatifs sociaux (v. CCH, art. L. 443-7 et s.).
-
Territorialisation des flux (CCH, art. R. 441-5, I, al. 6)
En cas de nécessité dûment justifiée par le réservataire au regard des contraintes particulières relatives à certains demandeurs de logement social, la convention de réservation peut prévoir une territorialisation des flux à une échelle infra-départementale sans qu’un programme puisse être identifié.
f – Proposition de candidats (CCH, art. R. 441-5, I, al. 8)
Le réservataire peut confier au bailleur le soin de proposer des candidats pour son compte à la commission d’attribution. À défaut, la convention précise les modalités et délais selon lesquels le réservataire propose des candidats à l’organisme bailleur.
g – Concertation (CCH, art. R. 441-5, I, al. 9)
La convention de réservation précise les modalités de la concertation que l’organisme bailleur organise avec l’ensemble des réservataires concernés relativement aux désignations sur les logements mis en location lors de la première mise en service d’un programme.
h – Bénéficiaires des logements (CCH, art. R. 441-5, I, al. 10)
Les termes de la convention de réservation permettent aux réservataires concernés d’atteindre l’objectif légal d’attribution en faveur des personnes prioritaires aux logements sociaux (v. CCH, art. L. 441-1, al. 3 à 18).
3 – Information des réservataires (CCH, art. R. 441-5, I, al. 5)
Les réservataires sont informés avant le 28 février de chaque année :
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du nombre prévisionnel de logements soustraits du calcul du flux de l’année en cours, de leur affectation par catégorie d’opération ;
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du bilan des attributions réalisées l’année précédente au titre de ces relogements.
4 – Exercice de la réservation (CCH, art. R. 441-5, I, al. 7)
Les réservations s’exercent dès la première mise en location des logements et au fur et à mesure qu’ils se libèrent.
5 – Le bilan (CCH, art. R. 441-5-1)
Avant le 28 février de chaque année, l’organisme bailleur transmet à l’ensemble des réservataires un bilan annuel des logements proposés, ainsi que des logements attribués au cours de l’année précédente, par réservataire et par typologie de logements, type de financements, localisation hors et en quartier politique de la ville, par commune et période de construction.
Sur les territoires concernés, ce bilan est aussi transmis au président de l’établissement public de coopération intercommunale ou au président de la métropole de Lyon ou au président de l’établissement public territorial concerné de la métropole du Grand Paris ou au maire de Paris, le bilan étant soumis à la conférence intercommunale du logement ou, pour la ville de Paris, à la conférence du logement, avant le 31 mars.
Sur proposition du président de l’établissement public de coopération intercommunale ou de la métropole ou du maire de Paris, cette conférence peut procéder à une évaluation de l’évolution pluriannuelle des flux de réservation.
6 – Les réservations supplémentaires (CCH, art. R. 441-5-4)
En contrepartie d’un apport de terrain ou d’un financement, des réservations supplémentaires peuvent être consenties :
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à l’État ;
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aux collectivités territoriales ;
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aux établissements publics les groupant par les organismes d’habitations à loyer modéré.
B – Les régimes spécifiques de réservation
1 – L’État réservataire (CCH, art. R. 441-5-2)
a – Part des logements réservés (CCH, art. R. 441-5-2, I)
Lorsque le bénéficiaire des réservations de logements locatifs sociaux est l’État, la part des logements réservés par le préfet de département dans le cadre de la convention de réservation représente 30 % au plus du flux annuel total de logements de chaque organisme bailleur, dont au plus 5 % au bénéfice des agents civils et militaires de l’État.
Toutefois, afin de permettre le logement des personnels chargés de mission de sécurité publique ou pour répondre à des besoins d’ordre économique, un arrêté du préfet peut, à titre exceptionnel, déroger à ces limites, pour une durée déterminée qui ne peut excéder 1 an.
b – Flux annuel (CCH, art. R. 441-5-2, II)
Sauf stipulation contraire, la part du flux annuel de logements réservés par le préfet s’applique uniformément dans chacune des communes où l’organisme bailleur dispose de logements locatifs sociaux.
Sauf stipulation contraire, la part du flux annuel de logements réservés par le préfet sur le patrimoine du bailleur situé en dehors des quartiers prioritaires de la ville ne peut être inférieure à 30 %.
c – Convention de réservation (CCH, art. R. 441-5-2, III)
Outre les informations générales (v. CCH, art. R. 441-5 et CCH, art. L. 441-5-2, I et II), la convention de réservation conclue par le préfet définit aussi la nature et les modalités des échanges d’informations nécessaires à sa mise en œuvre.
Un arrêté du ministre chargé du Logement fixe la liste minimale des matières qui doivent être réglées par cette convention.
d – Sanctions (CCH, art. R. 441-5-2, IV)
En cas de non-respect par le bailleur de ses engagements, le préfet peut résilier la convention après une mise en demeure restée sans suite pendant 2 mois.
À défaut de signature de la convention ou en cas de résiliation de celle-ci, le préfet règle par arrêté les modalités pratiques de mise en œuvre des réservations dont bénéficie l’État.
La méconnaissance des règles d’attribution et d’affectation des logements prévues dans une convention de réservation relative aux réservations dont bénéficie le préfet ou dans l’arrêté préfectoral pris à défaut de convention est passible de sanctions pécuniaires (v. CCH, art. L. 342-14, I, 1°).
2 – Les communes et établissements publics réservataires (CCH, art. R. 441-5-3)
Lorsque le bénéficiaire des réservations de logements locatifs sociaux est une commune ou un établissement public de coopération intercommunale ou un établissement public territorial de la métropole du Grand Paris ou la métropole de Lyon ou la ville de Paris, la convention de réservation porte sur le patrimoine locatif social du bailleur situé sur son territoire, sauf si ce réservataire dispose de réservations sur un autre territoire.
La part des logements réservés dans le cadre de la convention en contrepartie de l’octroi de la garantie financière des emprunts par les réservataires ne peut alors représenter globalement plus de 20 % du flux annuel sur leur territoire.
II – Mise en conformité des conventions antérieures à la loi ELAN (art. 5)
Les conventions de réservation de logements locatifs sociaux conclues avant le 24 novembre 2018 et ne portant pas exclusivement sur un flux annuel de logements doivent être mises en conformité.
A – Délai de mise en conformité
Les conventions de réservation de logements locatifs sociaux conclues avant le 24 novembre 2018, qui ne portent pas exclusivement sur un flux annuel de logements, doivent être mises en conformité au plus tard le 24 novembre 2021.
B – Information des bénéficiaires
Afin d’assurer l’information de l’ensemble des bénéficiaires de réservations de logements locatifs sociaux, préalablement à la mise en conformité des conventions de réservation, chaque organisme bailleur leur transmet simultanément les données relatives à la localisation, au nombre et à la typologie des logements sociaux réservés en l’état des conventions conclues, réservataire par réservataire, pour l’ensemble de son patrimoine locatif social, sur un département donné.
Sur les territoires concernés (v. CCH, art. L. 441-1, al. 23), ces informations sont transmises au président de l’établissement public de coopération intercommunale ou au président de la métropole de Lyon ou au président de l’établissement public territorial concerné de la métropole du Grand Paris ou au maire de Paris. Sur proposition du président de l’établissement public intercommunal ou de la métropole ou du maire de Paris, la conférence intercommunale du logement ou, pour la ville de Paris, la conférence du logement (v. CCH, art. L. 441-1-5) peut formuler des préconisations relatives au contenu des conventions à modifier ou à conclure.
C – Convention de réservation
En l’absence d’accord des parties à la convention de réservation, le flux annuel de logements, exprimé en pourcentages (v. CCH, art. R. 441-5, I), mis à disposition d’un bénéficiaire de réservations, est calculé en fonction :
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du nombre de logements identifiés dans des programmes ou du flux annuel de logements réservés par le bénéficiaire sur le patrimoine de l’organisme bailleur dans le cadre de la convention qui doit être mise en conformité ;
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du nombre total de logements sociaux au sein du patrimoine de l’organisme bailleur.
Sauf accord du préfet de département, la mise en conformité de la convention de réservation conclue par ce dernier pour la détermination du flux de logements qui lui est réservé intervient préalablement à la mise en conformité des autres conventions de réservation conclues par l’organisme bailleur. Toutes dispositions doivent être prises pour que les conventions avec les autres réservataires soient conclues concomitamment.
D – Transmission des conventions
Les conventions modifiées ou conclues sont transmises sans délai au préfet de département ainsi que, sur les territoires concernés (v. CCH, art. L. 441-1, al. 23), au président de l’établissement public de coopération intercommunale ou au président de la métropole de Lyon ou au président de l’établissement public territorial concerné de la métropole du Grand Paris ou au maire de Paris.
À défaut de transmission au préfet d’une nouvelle convention de réservation ou d’une convention de réservation modifiée avant le 24 novembre 2021, les logements réservés en stock dans le cadre de la convention existante à cette date s’ajoutent au flux annuel de logements réservés par ce préfet jusqu’à conclusion par les parties d’une convention conforme.
Notes de bas de pages
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1.
Pour une présentation de la loi ELAN, v. Battistini P., La loi ELAN décryptée pour les professionnels de l’immobilier, 15 fiches pour appréhender les nouveautés majeures de cette réforme, 2019, Gualino, coll. Droit en Poche ; Battistini P., Logement social, construction, urbanisme… ce que change la loi ELAN, 21 fiches pour décrypter la réforme, 2019, Gualino, coll. Droit en Poche. Pour une présentation des textes d’application, v. Battistini P., La loi ELAN, 1 an après, à paraître, Gualino, coll. Droit en Poche.
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2.
JORF n°0044, 21 févr. 2020, texte n° 47.