1re commission : Famille

L’adoption de l’enfant de l’autre membre du couple

Publié le 08/09/2017

À la faveur d’une reconnaissance sociologique du phénomène des familles recomposées, l’adoption est la voie royale pour la création de liens entre le nouveau conjoint et ses beaux-enfants. Le mariage est l’acte fondateur de la famille ou de sa recomposition. Mais la formation d’un concubinage ou la conclusion d’un pacte civil de solidarité n’est-elle pas significative d’une recomposition familiale ? Lorsqu’il existe des enfants issus de différents lits, les notaires sont maintenant sollicités par des parents qui souhaitent partager équitablement leurs biens entre les enfants de la nouvelle famille recomposée. Certes. Mais tout n’est pas toujours possible…

La famille. La famille a longtemps été une structure forte, contraignante et hiérarchisée, plaçant ses membres sous l’autorité du chef de famille1. En moins d’un siècle, la famille a beaucoup évolué. Encore ancré dans les esprits, le paradigme dit « traditionnel » de la famille désigne en effet un couple marié vivant avec des enfants, ces derniers nés de cette union. Cette conception s’est en partie estompée pour laisser place à de nouvelles structures. Ce qui était autrefois contraire aux normes sociales est devenu courant, en lien avec le développement considérable des unions de fait. Pourtant créé pour les personnes homosexuelles, le pacte civil de solidarité (pacs) attire de plus en plus de couples hétérosexuels2 depuis sa création par la loi du 15 novembre 19993. Le pacs est un partenariat contractuel entre deux personnes majeures quel que soit leur sexe, ayant pour objet d’organiser leur vie commune. Il établit un cadre juridique, à la différence du concubinage, simple union de fait dépourvue de tout statut. En ouvrant le pacs aux homosexuels, la loi a mis fin aux demandes, jugées comme constituant un détournement d’adoption, formulées par une personne homosexuelle d’adopter l’enfant de son concubin du même sexe.

Alors que les enfants nés hors mariage étaient auparavant montrés du doigt, ils se fondent aujourd’hui dans le paysage des bonnes mœurs et le droit a dû s’adapter au fait. La hiérarchie entre enfants naturels4 et enfants légitimes a ainsi progressivement été abolie. La famille chrétienne indissoluble n’accordant pas de place aux « bâtards » se mue au cours des siècles en une famille éclatée, recomposée où se côtoient enfants légitimes, enfants naturels et enfants adoptés.

L’adoption de son enfant adultérin. La loi du 3 janvier 19725 a posé le principe de l’égalité des filiations en permettant l’établissement de la filiation adultérine6 à l’égard du parent marié. Toutefois, l’égalité instaurée entre enfants légitimes et enfants naturels n’était pas parfaite car le législateur de 1972 avait maintenu en position d’infériorité l’enfant naturel adultérin, lorsqu’il venait à la succession de son auteur en concours avec le conjoint ou les enfants, victimes de l’adultère. L’enfant adultérin7 voyait alors ses droits successoraux réduits de moitié. À cette époque, la seule possibilité pour le conjoint auteur de l’adultère de rétablir une vocation successorale normale à ces enfants était de recourir à l’adoption8. L’enfant adopté acquerrait alors le statut d’enfant légitime du mari, puisque l’adoption avait pour effet de conférer les mêmes droits à l’adopté et les mêmes obligations qu’un enfant légitime9. Cette assimilation de l’enfant adopté à l’enfant légitime était totale, car la Cour de cassation
avait décidé que l’enfant adopté par un couple marié pouvait bénéficier des dispositions des articles 759, 760 et 915 du Code civil, protégeant l’enfant légitime issu du mariage, en concours avec l’enfant adultérin du mari ou de l’épouse. Ainsi, « poussé à son extrême, le principe de l’égalité successorale des enfants légitimes et adoptifs permet[tait] à ceux, parmi les enfants adultérins d’un même individu, qui [avaient] eu la chance d’être adoptés, pour des raisons diverses, de se prévaloir de cette “supériorité” pour diminuer la part successorale ab intestat et la part de réserve des autres enfants adultérins (…). L’adoption, utilisée de plus en plus fréquemment pour tout faire, secrét[ait] des conséquences imprévues qui heurt[aient] le bon sens et permet[taient] tous les calculs »10.

Finalement, le droit des successions a été réformé par une loi du 3 décembre 200111, laquelle a instauré une égalité complète entre enfants légitimes et enfants naturels y compris adultérins12. L’article 733 du Code civil dispose désormais que « la loi ne distingue pas entre la filiation légitime et la filiation naturelle pour déterminer les parents appelés à succéder ». Le législateur a ainsi mis un terme à ces difficultés, en permettant aux parents ou aux enfants d’obtenir ce dont ils étaient privés auparavant, sans avoir recours à l’adoption.

La famille recomposée. Le phénomène de la recomposition familiale se développe de plus en plus. Sous l’expression « familles recomposées » est visée la situation d’adultes – concubins, pacsés ou mariés – et d’enfants n’étant pas issus des deux partenaires, vivant au sein d’un même foyer. Plus précisément, constitue une hypothèse de recomposition familiale « toute situation dans laquelle après séparation des père et mère d’un enfant, l’un des parents fonde, en mariage ou hors mariage, un nouveau foyer qui prend en charge cet enfant, de façon permanente si le parent en question est celui qui exerce seul l’autorité parentale ou chez lequel a été fixée la résidence habituelle ou de façon occasionnelle, dans le cadre des droits de visite ou d’hébergement qui lui ont été reconnus »13.

Parallèlement à ce phénomène, une revendication émane parfois du partenaire du parent de l’enfant aux fins d’une reconnaissance de sa nouvelle fonction auprès de l’enfant. Le conjoint, concubin ou partenaire pacsé du père ou de la mère de l’enfant qui participe à l’éducation de l’enfant, n’a pas en effet d’existence juridique. L’idée d’un statut du tiers, qui aurait notamment concerné le beau-parent, a été rejetée par le législateur, lequel a préféré assouplir, dans la loi du 4 mars 200214, les règles de la délégation de l’autorité parentale. Pourtant, lorsque la cohabitation avec le parent d’origine persiste, il peut sembler naturel que le partenaire du parent de l’enfant désire obtenir un statut.

La recomposition familiale après un mariage. En cas de mariage, le conjoint qui voudrait disposer des droits et des devoirs traduisant la réalité du rôle qu’il joue peut choisir de créer un lien de filiation avec l’enfant. L’adoption se présente alors comme une option pertinente : elle crée un lien de filiation solide, à l’abri de toute contestation. À la faveur d’une reconnaissance sociologique du phénomène dit des « secondes familles », l’adoption offre par conséquent la voie impériale de la création de liens entre le nouveau conjoint et ses beaux-enfants.

La recomposition familiale après un concubinage ou un pacs. Toutefois, la question dépasse le cadre du mariage : la recomposition peut survenir après un concubinage ou un pacs. Nombre d’hommes et de femmes qui se sont remariés ou qui vivent en concubinage avec un partenaire ayant eu des enfants d’une précédente union, qu’ils aient eux-mêmes ou non des descendants, souhaiteraient transmettre leur patrimoine à ceux qu’ils considèrent comme leurs enfants. Il ne s’agit d’ailleurs pas nécessairement d’un simple désir de transmission du patrimoine, mais d’un souhait de « légaliser » une situation de pur fait. À cet égard, que peut proposer le notaire à défaut d’adoption ?

Des conséquences importantes de l’adoption en droit des successions. Cette évolution du droit de la famille ces dernières années s’est accompagnée d’une profonde mutation du droit des successions, ce dernier devant en effet se conformer aux nouvelles situations et à l’évolution des mentalités. D’une ancienne institution destinée à assurer la survie et la solidarité de la famille, la succession est devenue un instrument au service d’une meilleure exploitation économique des biens transmis. Le droit successoral soulève des difficultés tant matérielles qu’affectives, ce qui explique que le contentieux y soit si important. En effet, un bon nombre de successions se trouvent bloquées, notamment lorsqu’il y a des conflits d’intérêts entre les héritiers. Les conflits peuvent être de différentes natures. Notre étude se limitera aux conflits suscités par l’adoption de l’enfant du conjoint et ses conséquences juridiques.

Si l’adoption de l’enfant du conjoint dans sa forme plénière (I), comme dans sa forme simple (II) suscite réserves et interrogations, il n’en reste pas moins que l’adoption de l’enfant du concubin ou du partenaire pacsé relève quasiment de l’impossible (III).

I – L’adoption plénière de l’enfant du conjoint

L’adoption ouverte au conjoint. L’adoption de l’enfant du conjoint15 figure sans doute parmi les manifestations les plus emblématiques de la mutation du droit de la famille de ces dernières années. Résultat de la légitimation des « secondes familles », l’adoption de l’enfant de son époux ou de son épouse favorise l’intégration de cet enfant dans une famille recomposée. Elle trouve son fondement dans « un désir de donner une forme juridique à une relation sociale quasi-filiale déjà créée »16. Bénéficiant d’une grande sollicitude législative, l’adoption de l’enfant du conjoint représente la part la plus importante des adoptions intrafamiliales17.

L’adoption de l’enfant du conjoint a, en général, la faveur du législateur. Les conditions d’âge de l’adoptant18, de différence d’âge avec l’adopté19, de remise de l’enfant de moins de 2 ans à l’Aide sociale à l’enfance20 sont moins contraignantes qu’en d’autres hypothèses. Les conditions relatives à l’adoptant sont minimales. L’adoptant paraît échapper tant aux règles conçues pour les adoptants individuels que celles établies pour les couples. L’adoptant n’a guère besoin de solliciter, ni d’obtenir un agrément administratif. Aucun âge minimum et aucune condition de durée de mariage ne sont requis à son encontre. En principe, tout adoptant doit avoir au moins 15 ans de plus que l’adopté, mais pour lui, la limite est ramenée à 10 ans, voire moins, s’il existe de « justes motifs »21. Si cette adoption paraît conforme à l’intérêt de l’enfant dans la mesure où elle favorise son intégration dans une nouvelle famille, il n’en reste pas moins que le tribunal juge de l’opportunité d’une telle adoption en appréciant les conséquences qu’elle pourrait avoir sur les enfants biologiques22.

L’adoption plénière de l’enfant du conjoint n’est autorisée que dans les cas limitativement énumérés à l’article 345-1 du Code civil. L’idée générale est que la branche familiale destinée à être supprimée à raison de l’adoption n’existe pas ou est défaillante.

La rupture des liens du sang. Depuis la loi du 5 juillet 199623, l’adoption plénière de l’enfant du conjoint n’est possible24 que dans trois hypothèses25 : « l’enfant n’a de filiation établie qu’à l’égard de ce conjoint ; l’autre parent que le conjoint s’est vu retirer totalement l’autorité parentale ; cet autre parent est décédé et n’a pas laissé d’ascendants au premier degré, ou lorsque ceux-ci se sont manifestement désintéressés de l’enfant »26. L’article 345-1, 3° du Code civil protège exclusivement les grands-parents. Faisant fi des autres membres de la famille pourtant dignes de considération, cette disposition laisse songeur. Sont ainsi exclus les éventuels arrières grands-parents, les frères et sœurs, les oncles et tantes… En toute hypothèse, même en l’absence de grands-parents, le mineur peut avoir intérêt à conserver sa filiation d’origine. Prenons un exemple : un homme a des enfants ; sa première épouse décède ; la seconde souhaiterait les adopter. Les parents de la première épouse prennent soin de leurs petits-enfants27. L’adoption plénière par la seconde épouse n’est pas possible.

L’adoption plénière de l’enfant du conjoint ne présente pas de spécificité par rapport à une adoption plénière ordinaire28, sous réserve de la question du nom de l’adopté29. Elle intègre en effet pleinement l’enfant dans la nouvelle famille et l’adopté recueillera donc les biens de son parent adoptif selon les mêmes règles civiles et fiscales que tout autre enfant.

Le consentement du parent autre que le conjoint de l’adoptant. L’adoption plénière de l’enfant par le nouveau conjoint n’est possible, en principe, qu’avec l’accord de l’autre parent. En effet l’article 348, alinéa 1er, du Code civil prévoit s’agissant de l’adoption plénière que « lorsque la filiation d’un enfant est établie à l’égard de son père et de sa mère, ceux-ci doivent consentir l’un et l’autre à l’adoption ». Toutefois, il est des hypothèses dans lesquelles le consentement du conjoint de l’adoptant est suffisant. Aux termes de l’article 348, alinéa 2, « si l’un des deux est mort ou dans l’impossibilité de manifester sa volonté, s’il a perdu ses droits d’autorité parentale, le consentement de l’autre suffit ». Il en est de même lorsque l’enfant n’a de filiation établie qu’à l’égard du conjoint de l’adoptant30.

Or, la plupart31 de ces hypothèses ont justement été reprises par le législateur lorsque celui-ci a déterminé les cas dans lesquels une adoption plénière de l’enfant du conjoint pouvait être prononcée. L’article 345-1 du Code civil prévoit, on l’a vu, que l’adoption de l’enfant du conjoint est permise « 1° Lorsque l’enfant n’a de filiation légalement établie qu’à l’égard de ce conjoint ; 1° bis Lorsque l’enfant a fait l’objet d’une adoption plénière par ce seul conjoint et n’a de filiation établie qu’à son égard ; 2° Lorsque l’autre parent que le conjoint s’est vu retirer totalement l’autorité parentale ; 3° Lorsque l’autre parent que le conjoint est décédé (…) ». Il en résulte que l’adoption plénière de l’enfant du conjoint peut dans la majorité des cas être prononcée sans que le consentement du parent d’origine, autre que le conjoint de l’adoptant, ne soit requis.

L’adoption d’un enfant ayant déjà fait l’objet d’une adoption. À présent, imaginons qu’une femme célibataire adopte un enfant en la forme plénière, puis qu’elle se marie. Jusqu’à la loi du 17 mai 201332, il était impossible que son nouveau conjoint adopte l’enfant, et cela en application du principe « adoption sur adoption ne vaut ». Dorénavant, l’époux ou l’épouse de la femme peut adopter l’enfant. Cette possibilité est intéressante pour les familles homosexuelles : « Jusqu’à [2013] les couples homosexuels ne pouvant se marier, un seul d’entre eux pouvait prendre un enfant en adoption. Si le couple se marie, il sera possible de “régulariser” en quelque sorte la situation de l’enfant, et le conjoint qui n’avait pu adopter, contrairement à son souhait, pourra procéder à l’adoption plénière »33. L’adoption plénière de l’enfant ayant déjà fait l’objet d’une adoption étant autorisée, il convenait d’ouvrir la même opportunité lors d’une adoption simple34.

L’adoption plénière des enfants issus d’une procréation médicalement assistée. S’agissant de la procréation médicalement assistée (PMA), la question a porté principalement sur l’adoption par une femme homosexuelle de l’enfant né par PMA de sa compagne. Elle a longtemps opposé les juridictions du fond avant que la Cour de cassation ne donne une réponse favorable35. La Cour de cassation a, en effet, sur la demande d’avis formulée le 23 juin 2014 par le tribunal de grande instance de Poitiers, estimé que : « Le recours à l’assistance médicale à la procréation, sous la forme d’une insémination artificielle avec donneur anonyme à l’étranger, ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption, par l’épouse de la mère, de l’enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant »36. L’adoption de l’enfant né de cette pratique est donc admise. Si cette position n’est pas à l’abri de critiques37, elle contraste de surcroît avec la sévérité de la haute juridiction à l’égard de la gestation pour autrui (GPA)38.

L’impossible adoption plénière des enfants issus d’une gestation pour autrui. La Cour de cassation a rendu l’un de ses plus célèbres arrêts en matière d’adoption en rejetant des demandes introduites par des couples postérieurement à une gestation pour autrui, considérant qu’il s’agissait d’un « détournement de l’institution de l’adoption », qu’il s’agisse d’une demande d’adoption plénière39 ou d’adoption simple40. Toutefois, depuis les avis rendus par la Cour de cassation le 22 septembre 2014, approuvant l’adoption d’enfants issus de PMA, on pouvait se demander si la position de la jurisprudence à l’égard des adoptions d’enfants issus de GPA était amenée à changer. Dans les deux d’hypothèses, le recours à l’adoption permet en effet d’atteindre le résultat escompté lors du recours à la PMA/GPA interdite. La jurisprudence ultérieure a longtemps résisté41 jusqu’au récent revirement de jurisprudence42, lequel est destiné à mettre le législateur en face de ses responsabilités.

L’adoption plénière de l’enfant du conjoint, une solution peu adaptée. Moyen d’éviction de la famille biologique43, l’adoption plénière de l’enfant du conjoint n’est pas toujours, tant s’en faut, une solution adaptée à la reconnaissance du statut de beau-parent dans les familles recomposées si l’enfant a encore son parent biologique. L’adoption simple serait la solution la plus opportune, la bienveillance du législateur à l’égard de l’adoption plénière pouvant conduire à négliger l’intérêt de l’enfant qui est de conserver son héritage familial.

II – L’adoption simple de l’enfant du conjoint

L’absence de rupture avec la famille par le sang. Aux termes de l’article 345-1 du Code civil, si l’enfant a une filiation légalement établie à l’égard de l’un de ses parents, que celui-ci est vivant et en pleine possession de l’exercice de l’autorité parentale, seule l’adoption simple est envisageable. Permise quel que soit l’âge de l’adopté44, l’adoption simple emporte une filiation additive laissant coexister la parenté par le sang45 et révocable pour motifs graves46.

Cette adoption a la particularité de laisser subsister les liens entre l’enfant et sa famille d’origine, d’ailleurs l’ex-conjoint doit y consentir si l’enfant est mineur 47. L’enfant adopté simple reste dans sa famille d’origine et y conserve tous ses droits48, il acquiert en plus, de par l’adoption, les droits qui sont ceux d’un enfant légitime. Cependant, même si les liens de l’enfant adopté restent intacts avec sa famille d’origine, seul l’adoptant « est investi à l’égard de l’adopté de tous les droits d’autorité parentale (…) »49 qui seront exercés à l’identique comme pour un enfant biologique50.

Les possibilités en matière d’exercice en commun de l’autorité parentale. Si l’adoption simple apparaît souvent comme la solution la plus adaptée au cas des familles « recomposées », avant la loi du 4 mars 2002, elle n’était pourtant pas sans susciter certaines interrogations. En effet, jusqu’en 2002, l’adoption simple prononcée à l’égard de l’enfant du conjoint était loin d’avoir des effets satisfaisants en matière d’autorité parentale, l’ancien article 365, alinéa 1, in fine, disposant que : « L’adoptant a l’autorité parentale concurremment avec son conjoint, mais celui-ci en conserve l’exercice ». Le prononcé d’une adoption simple emportait le transfert de tous les droits d’autorité parentale à l’adoptant, lequel se trouvait, dans ces conditions, titulaire de ces droits à l’égard de l’adopté. Toutefois, le conjoint de l’adoptant, donc le parent biologique, conservait seul l’exercice de l’autorité parentale.

La loi du 4 mars 200251 a corrigé cette « anomalie particulièrement malvenue »52. Aujourd’hui, la seule hypothèse dans laquelle l’adoption simple n’entraîne pas le transfert automatique de l’autorité parentale est celle de l’adoption des enfants de son conjoint. En effet, dans ce cas de figure, si l’adoptant se voit attribuer l’autorité parentale concurremment avec son conjoint, ce dernier en conserve seul l’exercice, sous réserve d’une déclaration conjointe devant le greffier du tribunal de grande instance aux fins d’un exercice en commun de l’autorité parentale. Aujourd’hui, un exercice en commun de l’autorité parentale de l’adoptant et du parent biologique de l’enfant est possible, subordonné à la seule déclaration conjointe des deux titulaires de l’autorité parentale53.

À cet égard, l’adoption simple semble revalorisée. Elle permet à la fois de créer un lien de filiation sans effacer la première filiation, tout en ouvrant la possibilité d’un partage de la titularité et de l’exercice de l’autorité parentale entre l’adoptant et son conjoint.

Les avantages fiscaux de l’adoption simple. L’adoption simple de l’enfant du conjoint présente un intérêt majeur d’un point de vue fiscal. En principe, on le sait, le fisc ne prend pas en compte les liens créés par l’adoption simple. Les risques de fraude fiscale sont en effet trop grands. L’Administration applique en conséquence les droits de mutation à titre gratuit entre étrangers, et tous les efforts pour essayer de remettre en cause cette règle ont échoué54. Mais la règle connaît de nombreuses exceptions, notamment lorsqu’il s’agit de l’adoption d’un enfant issu d’un premier mariage du conjoint de l’adoptant55. Dans cette hypothèse, l’enfant adopté est assimilé du point de vue fiscal à un enfant du disposant. Par exception au principe restrictif de l’article 786 du Code général des impôts56, « les enfants issus du premier mariage du conjoint de l’adoptant sont totalement assimilés aux enfants légitimes pour la mise en œuvre des droits de mutation à titre gratuit »57. Affranchi de toutes conditions de soins58, cet avantage méconnaît la dimension affective de l’adoption et favorise son intérêt fiscal. La diligence du législateur va même jusqu’à en faire profiter les descendants des beaux-enfants par adoption, perpétuant ainsi le lien d’adoption59. Toutefois, cette bienveillance législative ne prive pas le juge de tout pouvoir d’appréciation. Aux termes de l’article 353, alinéa 3, du Code civil, le tribunal se doit de vérifier que : « L’adoption n’est pas de nature à compromettre la vie familiale ». Et l’adoption de l’enfant du conjoint pourrait bien semer le trouble dans cette vie de famille. Autant sur un plan psychologique, affectif, fiscal que patrimonial, l’enfant adopté entre en concurrence avec les potentiels enfants biologiques de l’adoptant. Si la seconde famille fait l’objet de toutes les attentions du législateur fiscal, sur le plan successoral, elle permet de surcroît de transmettre ses biens à l’enfant de son conjoint60, devenu aussi juridiquement le sien, tout en laissant subsister les droits de succession dans la famille d’origine.

Illustration du contentieux successoral en matière d’adoption simple. Dans un arrêt du 9 juillet 201461, la Cour de cassation a retenu que la révocation de l’adoption de l’enfant du conjoint, postérieurement au décès du parent, ne restaurait pas l’action en retranchement.

En l’espèce, M. et Mme X initialement mariés sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts, ont adopté le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale des biens communs au profit du conjoint survivant. Les époux ont deux enfants : un fils d’un premier lit du mari, ayant fait l’objet d’une adoption simple par l’épouse, et une fille commune. Trois ans après le décès de son conjoint, Mme X demande la révocation de l’adoption, laquelle est prononcée en 2009. Mme X décède en 2010. Le fils de son défunt mari assigne alors sa sœur en liquidation et partage de la succession de leur père et en retranchement des avantages matrimoniaux excédant la quotité disponible. La cour d’appel déclare l’action irrecevable. La Cour de cassation rejette le pourvoi et approuve ainsi la cour d’appel d’avoir retenu « que la nature et l’étendue des droits successoraux des héritiers s’apprécient au regard de leur situation à l’ouverture de la succession, de sorte que M. Jean-Claude X avait, à cette date, les mêmes droits que l’enfant né du mariage des deux époux », et d’en avoir conclu que « par une exacte application des articles 1527, alinéa 2, et 368 du Code civil, et sans violer l’article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (…), que l’action en retranchement ne lui était pas ouverte ».

Si la révocation de l’adoption simple paralyse les effets de l’adoption pour l’avenir, elle n’entraîne aucune remise en cause du passé62. En l’espèce, s’agissant de la succession du père, puisque ce dernier n’est pas l’adoptant, la révocation de l’adoption simple n’a aucune incidence : les deux enfants de lits différents y sont traités à l’identique. Toutefois, la clause d’attribution intégrale au conjoint survivant bouleverse la dévolution successorale. Au décès du conjoint survivant, bénéficiaire de la communauté universelle, seul l’enfant commun des époux est successible du fait de la révocation de l’adoption. Par ricochet, il bénéficie indirectement des biens de la première succession. L’adoption simple de l’enfant du conjoint s’est ainsi retournée contre l’enfant du premier lit.

Si ces objectifs fiscaux et/ou successoraux recherchés dans l’adoption simple sont respectables en ce qu’ils incitent à la reconnaissance de la famille recomposée, il n’en reste pas moins que le procédé peut engendrer un détournement de l’institution. L’adoption peut ne pas être motivée uniquement par la dimension affective qui – normalement – la caractérise ; les considérations d’ordre fiscal et l’appât pécuniaire y sont trop importants pour ne pas attirer l’attention. L’adoption simple utilisée comme un instrument de fiscalité fait l’objet d’un certain contentieux. Cela est d’autant plus vrai lorsque l’adoption simple concerne l’enfant majeur du conjoint.

L’adoption simple de l’enfant majeur du conjoint. Lorsque l’adoption simple de l’enfant du conjoint concerne un mineur, le consentement nécessaire du parent autre que le conjoint du requérant à l’adoption63 limite inéluctablement son aboutissement. Pour cette raison, il n’est pas rare que l’adoptant et l’adopté soient d’un âge avancé.

L’adoption de majeurs a été admise en France depuis le Code civil de 1804. Le droit positif, après en avoir admis le principe, est resté silencieux s’agissant de ses conditions. Un majeur peut faire l’objet d’une adoption simple par toute personne ayant plus de 15 ans de plus que lui. Étant donné que l’adopté majeur n’est plus sous l’autorité de ses parents ou sous la tutelle d’un conseil de famille, il suffit qu’il consente lui-même à son adoption64 : aucun consentement n’est requis de sa famille. Malgré cette facilité, l’adoption des majeurs est toujours restée exceptionnelle, encore qu’elle tende à se développer dans le cadre de l’adoption de l’enfant du conjoint. L’adoption simple est ainsi utilisée afin de concrétiser légalement une prise en charge affective, éducative et matérielle de l’adopté par un tiers. Elle est une façon pour l’enfant devenu adulte, lorsqu’il consent à son adoption, d’accepter comme nouveau parent celui qui a montré un intérêt manifeste à son égard. Cependant, d’autres fois, l’adoption simple n’est demandée que pour des motifs successoraux ou fiscaux. Cet usage ne peut en soi être critiqué. Il correspond d’ailleurs à la finalité première de l’adoption telle qu’elle était conçue historiquement. Dans cette hypothèse, l’adoptant souhaite consacrer juridiquement les liens d’affection noués durant de longues années dans le but essentiel de faire ses héritiers les enfants de son conjoint aux côtés éventuellement de ses propres enfants65. Peuvent ainsi éclater des querelles entre l’adoptant et ses descendants. Le juge saisi pour arbitrer le conflit doit alors vérifier deux conditions. Il lui revient de contrôler si l’adoption projetée est conforme à l’intérêt de l’adopté66 et, en présence d’enfants de l’adoptant, si elle n’est pas de nature à compromettre la vie familiale67. C’est sur ces conditions soumises à l’appréciation souveraine des juges du fond que se concentre essentiellement le contentieux relatif à l’adoption simple de l’enfant majeur du conjoint68. Ce contentieux de l’adoption simple est compréhensible. Dans l’hypothèse où l’adoption poursuit un but principalement successoral, elle repose toujours sur une affection entre l’adoptant et l’adopté. En y recourant, le futur de cujus ne fait qu’anticiper une succession dont l’ordre de dévolution reflète ses volontés. Pourtant, il est normal que l’enfant biologique de l’adoptant se sente menacé par l’adoption envisagée. Malgré tout, la jurisprudence s’est prononcée en faveur de cette adoption. Cette orientation générale est-elle la bienvenue ? Ne faudrait-il pas brider davantage la pratique de l’adoption de l’enfant majeur du conjoint ? Un encadrement plus strict de la pratique de l’adoption simple de l’enfant majeur du conjoint pourrait être proposé. Dans cette perspective, l’adoption simple serait envisagée strictement, à l’aune de sa finalité institutionnelle. L’adoption ne serait accordée qu’en autant qu’elle est destinée à consacrer juridiquement un lien de filiation réel entre l’adoptant et l’adopté.

Voie royale des transferts patrimoniaux dans les familles recomposées, l’adoption simple risque cependant de ne pas être toujours possible en pratique : l’enfant voudra-t-il d’être adopté ? Même si le procédé est exposé comme une pure technique patrimoniale, ne risque-t-il pas d’être ressenti comme une « trahison » vis-à-vis de la famille d’origine ? Mais les obstacles ne sont pas seulement d’ordre psychologique : ils sont également d’ordre juridique.

La prohibition des adoptions croisées. A priori, il ne devrait pas être défendu qu’un enfant soit adopté par les conjoints de chacun de ses deux parents. Pourtant, dans une décision de 2011, la Cour de cassation a refusé que la nouvelle épouse d’un père adopte l’enfant que le nouveau mari de la mère avait déjà adopté69. Une partie de la doctrine a relevé qu’il était anormal que, dans cette situation, l’adoption soit uniquement le prix de la course. Pour refuser cette adoption croisée, la Cour de cassation s’est fondée exclusivement sur l’article 346 du Code civil, lequel prohibe l’adoption par deux personnes – si ce n’est deux époux.

Une analyse de la situation s’avère nécessaire. Pour plus de simplicité, il convient de partir du postulat que les deux parents biologiques sont vivants ou, dans la négative, que l’enfant a des ascendants présents dans les deux branches de sa famille, ce qui écarte toute adoption plénière. Quid de l’obligation alimentaire ? L’adoption est perçue comme un avantage pour l’adopté, mais il ne faut pas oublier que cette double adoption lui attribuerait une quadruple obligation alimentaire, ce qui semble fort problématique. Inextricable serait la question du nom si l’adopté devait porter les noms de ses parents biologiques et adoptifs – ou si dans le cadre de la seconde adoption, il était décidé de revenir sur la décision prise lors de la première. Enfin, l’autorité parentale pourrait également engendrer un contentieux important. Par la première adoption, le parent non-conjoint de l’adoptant perd en effet l’autorité parentale alors que l’adoptant l’acquiert, tout en n’acquérant son exercice que sur déclaration au greffier en chef du tribunal de grande instance. Comment justifier alors que le second adoptant acquiert l’exercice d’une autorité parentale que son conjoint a perdu lors de la première adoption ? Les incidences incertaines d’un tel procédé commandent d’approuver la solution retenue par la jurisprudence. Dans sa forme simple, l’institution n’est pas adaptée aux désirs des couples qui veulent non pas un transfert, mais un partage de cette autorité. En vain, tout a été essayé pour que ce souhait soit exaucé.

L’illégalité de l’adoption d’un enfant par le demi-frère de sa mère. L’adoption par un parent de son enfant naturel a été admise de bonne heure par la Cour de cassation. À l’époque, l’intérêt d’une telle démarche reposait sur la volonté d’assurer une meilleure situation successorale à l’enfant et de lui conférer une sorte de légitimité hors mariage. Avec l’instauration de l’égalité entre les filiations légitime et naturelle, par la loi du 3 janvier 1972, la question avait été pratiquement vidée de son intérêt, s’agissant des enfants naturels simples. Le débat a pourtant été relancé il y a quelques années, à l’occasion d’une demande d’adoption d’un enfant naturel issu d’un inceste. En l’espèce, un enfant était né des relations charnelles entre un homme et une femme, frère et sœur consanguins. La mère avait reconnu l’enfant avant sa naissance ; le père l’avait reconnu ultérieurement, mais sa reconnaissance avait été annulée sur le fondement de l’article 334-10 du Code civil. Le père avait donc formé une demande d’adoption simple de l’enfant. Peut-on recourir à l’adoption simple pour établir d’un côté la filiation d’un enfant né d’un inceste « absolu » alors que, de l’autre, la filiation maternelle se trouve déjà établie ? Telle a été la question posée à la première chambre civile de la Cour de cassation qui, par un important arrêt du 6 janvier 200470, donne lieu à une réponse négative71. L’enfant reconnu par sa mère ne peut pas avoir un lien de filiation paternel naturel légalement établi à l’égard du demi-frère consanguin de celle-ci : l’article 334-10 du Code civil prohibe la révélation d’une filiation incestueuse dans les cas d’incestes les plus graves, où précisément la loi interdit le mariage entre les auteurs de l’enfant et sans possibilité de dispense. La prohibition fulminée par l’article 334-10 du Code civil ne saurait être contournée par le biais de l’adoption simple. Le législateur l’a bien compris en entérinant cette jurisprudence.

Le consentement du majeur protégé à sa propre adoption. S’agissant de l’adoption du majeur protégé lui-même, il ne peut s’agir par hypothèse que d’une adoption simple72. Mais, les articles 360 et 361 du Code civil relatifs à l’adoption simple ne soufflent mot du consentement du majeur protégé en ce domaine. Avant 2007, on avait pu déduire de l’article 360, alinéa 2, lequel exige le consentement du mineur de plus de treize ans à sa propre adoption, le caractère obligatoire du consentement du majeur protégé. Désormais, le voile est levé par l’article 458 du Code civil : le consentement à sa propre adoption est un acte strictement personnel. Le consentement du majeur protégé lui-même est donc une condition substantielle de son adoption. S’il n’est pas apte à consentir, l’acte ne se fera pas. Or, il est des hypothèses dans lesquelles il peut être de l’intérêt du majeur protégé de faire l’objet d’une adoption.

La Cour de cassation73 a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la question. Cette décision avait fait l’objet de nombreuses critiques dans la mesure où elle rendait impossible l’adoption de la personne majeure protégée inapte à exprimer un consentement et ne laissait « aucune latitude »74 aux juges alors même que l’adoption pouvait être bénéfique à l’adopté. Cet arrêt a été qualifié de « choquant »75, « injuste »76 et finalement « irréaliste »77. En l’espèce, le père d’une jeune femme autiste souhaitait que celle-ci soit adoptée par son épouse. Puisqu’il ne pouvait lui-même consentir à cette adoption, il avait sollicité la désignation d’un administrateur ad hoc pour donner ce consentement. La cour d’appel refuse cette désignation au motif qu’aucun texte ne permet au juge des tutelles de désigner un tiers pour suppléer à l’impossibilité de la personne protégée de consentir à son adoption. Anticipant la réforme tout en se fondant sur les textes encore en vigueur jusqu’au 31 décembre 2008, la Cour de cassation rejette les arguments du pourvoi contre cette décision. Elle retient que le consentement à l’adoption d’un majeur protégé à sa propre adoption constitue un acte strictement personnel, qui ne peut être donné à sa place par son tuteur et que le juge des tutelles peut seulement autoriser le majeur, sur le fondement de l’article 501 ancien du Code civil78, à consentir lui-même à son adoption, éventuellement avec l’assistance de son tuteur ou la personne qui en tient lieu. Dans cet arrêt, la Cour de cassation constate que le majeur est incapable d’exprimer sa volonté. Au fond, si seul l’article 501 du Code civil permet au juge des tutelles d’accorder au majeur une capacité ponctuelle, la Cour de cassation retient en l’espèce que cette disposition n’est pas applicable. En l’état du droit positif, nul ne peut adopter un handicapé mental inapte à consentir à son adoption. Cette solution apparaît regrettable79 !

Ainsi l’adoption de l’enfant du conjoint n’est pas toujours possible, alors pourtant qu’elle a les faveurs de la loi, dit-on. Force est de constater que l’adoption de l’enfant du concubin ou du partenaire pacsé relève quant à elle du domaine de l’impossible.

III – L’adoption de l’enfant du concubin ou du partenaire pacsé

Les obstacles à l’adoption de l’enfant du concubin ou du partenaire pacsé. Lorsqu’il existe des enfants issus de différents lits, les notaires sont de plus en plus souvent sollicités par des parents qui souhaitent partager équitablement leurs biens entre les enfants de la nouvelle famille recomposée80. Mais tout n’est pas possible, et si l’adoption d’un enfant est une visée regardée positivement, c’est à la condition de s’inscrire aujourd’hui comme hier dans un certain type de famille…

La mise à l’écart du concubin et du partenaire pacsé ne résulte pas d’une impossibilité légale mais d’un obstacle de fait. Le partenaire non marié peut a priori adopter l’enfant naturel ou d’un premier lit de son concubin ou de son partenaire pacsé, aucune disposition légale n’interdisant directement cette adoption. Les effets de l’adoption simple ou plénière ont cependant été aménagés par le législateur uniquement dans l’hypothèse dans laquelle l’adoptant serait marié avec le parent. Le lien préexistant à l’adoption entre le parent et le demandeur à l’adoption n’est donc pas pris en compte s’il ne résulte pas d’un mariage. En conséquence, les effets de l’adoption simple ou plénière sont les mêmes, que l’adoptant soit le concubin du parent, son partenaire pacsé ou une personne totalement étrangère au couple. À défaut de mariage, les effets d’une adoption plénière ou simple se révèlent inadaptés. Consentir à l’adoption de son enfant par son nouveau concubin ou partenaire pacsé revient ainsi pour le parent soit à sacrifier son lien de filiation avec l’enfant, soit à renoncer à son autorité parentale. Vérifions-le.

Dans l’adoption plénière, le nouveau lien de filiation se substitue au lien de filiation biologique. Le prononcé d’une adoption plénière par le nouveau partenaire du parent aurait ainsi pour conséquence de faire disparaître le lien de filiation avec tous les membres de la famille par le sang, notamment les père et mère. Le lien de filiation entre l’enfant et le concubin de l’adoptant se trouverait donc effacé dans la mesure où il n’existe pas pour le concubin ou le partenaire pacsé de mesure équivalente à celle prévue à l’article 356 du Code civil disposant que : « l’adoption de l’enfant du conjoint laisse subsister sa filiation à l’égard de ce conjoint (…) ». Le concubin ou le partenaire pacsé serait donc privé de tous les droits d’autorité parentale sur son enfant et dans l’incapacité de l’adopter à son tour puisque suivant l’article 346 du Code civil « nul ne peut être adopté par plusieurs personnes, si ce n’est par deux époux », le dernier recours serait donc le mariage pour parvenir à ses fins.

L’adoption simple permet, au contraire, le maintien du lien de filiation entre le partenaire de l’adoptant et son enfant. Toutefois, la situation n’en est pas plus réjouissante. En effet, l’adoption de l’enfant du concubin ou du partenaire pacsé fait acquérir à l’adoptant tous les droits d’autorité parentale ; n’étant pas marié, il n’existe donc pas de conjoint et par conséquent pas d’application possible de l’article 365, alinéa 1, in fine du Code civil, puisque seul le cas du conjoint y est visé. Au fond, la reconnaissance légale d’un lien entre l’enfant et le partenaire non marié de son parent implique nécessairement la renonciation du parent par le sang à son autorité parentale81. Si cet obstacle est levé lorsque l’enfant est majeur, une autre difficulté d’ordre fiscal apparaît rapidement.

L’indifférence du droit fiscal aux liens unissant enfants et beaux-parents de fait. Le principal problème se cristallise autour du droit fiscal, lequel ne tient pas compte des liens qui unissent enfants et beaux-parents de fait. Les libéralités consenties à l’enfant du concubin ou du partenaire pacsé sont réputées consenties à un étranger et sont donc soumises à des droits de mutation de 60 %. Aucun des abattements prévus en cas de mutation à titre gratuit à l’intérieur de la famille n’est ici applicable. À défaut de mariage, le beau-parent de fait qui souhaiterait transmettre ses biens à ceux qu’il considère comme ses enfants doit donc s’attendre à ce que le fisc prélève une grande partie de son patrimoine. Face à des règles qui prohibent ou rendent particulièrement onéreuse la transmission des biens d’une famille à une autre, la pratique a imaginé différents palliatifs. Certaines techniques comme la constitution d’une société regroupant les enfants des différents lits ou la souscription d’une assurance-vie-décès au profit de certains enfants, sont pratiquées. Mais, les parents de la seconde famille risquent surtout d’être tentés par des procédés qui, bien que classiques, n’en sont pas moins dangereux. Il peut notamment s’agir de dons manuels, de donations déguisées ou de donations indirectes consenties à l’enfant du concubin ou partenaire pacsé. Si le beau-parent n’a pas eu d’enfants, et que la manœuvre est découverte, l’acte est en principe valable, mais taxé comme toute donation consentie à un étranger.

Aucune de ces techniques n’est pleinement satisfaisante. Faute de pouvoir parvenir à leurs fins grâce aux règles du droit patrimonial de la famille, les beaux-parents de fait auront, on l’a vu, intérêt à passer par la voie de l’adoption. Mais encore faut-il qu’ils se marient… Sans doute conviendrait-il que les dispositions relatives à l’adoption de l’enfant du conjoint soient étendues à l’enfant du concubin ou du partenaire pacsé, tout en conservant, pour ces adoptions, la dualité adoption simple/plénière. Pourtant, cette différence de traitement peut pour certains se justifier au regard des garanties qu’offre le mariage, lequel donne a priori l’assurance d’une certaine stabilité et longévité du couple. L’adoption de l’enfant de « l’autre » semble ainsi nécessiter l’engagement préalable du nouveau partenaire ou concubin du parent à l’égard de ce dernier. Toutefois, certains qualifient d’inutile l’adoption par des concubins ou partenaires pacsés, estimant que « l’adoption d’un enfant vaut bien un mariage »82. Une telle vision pour le moins classique du droit de la famille résistera-t-elle encore longtemps ?

Notes de bas de pages

  • 1.
    Sur la notion de famille à travers les âges, v. not., Renaut M.-H., Histoire du droit de la famille, 2e éd., 2012, Ellipses, p. 7 à 12.
  • 2.
    Le pacs est de plus en plus prisé par les Français. Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), 175 000 couples ont choisi le pacs en 2009. 95 % de ces pacs ont été conclus par des partenaires de sexes opposés. Après une progression de 40 % en 2008, le nombre de pacs augmente encore de 20 % en 2009. Au total, après tout juste 10 années d’existence, plus de 700 000 pacs ont déjà été signés. Inversement, les mariages se font moins fréquents : 256 000 ont été célébrés en 2009, soit 3,5 % de moins qu’en 2008. Les couples choisissent de plus en plus le pacs pour officialiser leur union : en 2008, deux pacs avaient été conclus pour quatre mariages célébrés ; en 2009, ce sont deux pacs pour trois mariages. Après avoir fortement baissé en 2011 à la suite d’une modification fiscale, le nombre de pacs conclus entre personnes de sexe différent augmente de nouveau en 2012. Entre 2012 et 2013, il progresse de 8 400 déclarations alors que le nombre de mariages entre personnes de sexe différent diminue. Mais, conséquence probable de l’adoption de la loi sur le mariage pour tous, le nombre de déclarations de pacs de personnes de même sexe a diminué entre 2012 et 2013.
  • 3.
    L. n° 99-944, 15 nov. 1999, relative au pacte civil de solidarité : JO n° 265, 16 nov. 1999, p. 16959.
  • 4.
    Le qualificatif « naturel » est utilisé pour désigner un enfant dont le père et la mère n’étaient pas mariés au moment de sa conception naturelle.
  • 5.
    L. n° 72-3, 3 janv. 1972, relative à la filiation : JO n° 0003, 5 janv. 1972, p. 145.
  • 6.
    Un enfant « adultérin » est un enfant conçu dans le cadre d’une relation adultérine, c’est-à-dire en dehors du mariage dans lequel au moins un des parents est déjà engagé dans les liens du mariage.
  • 7.
    Dol C., « L’adoption entre transgression et conformisme. Le cas de la France du XIXe siècle et du début du XXe siècle », in Dionisi-Peyrusse A. et Mauger-Vielpeau L. (ss-dir.), Les fondements de la filiation, 2017, Institut universitaire Varenne, coll. « Colloques & Essais », p. 87 à 99.
  • 8.
    L’adoption suppose néanmoins l’accord du conjoint (C. civ., art. 343-1, al. 2).
  • 9.
    Cass. 1re civ., 8 oct. 1985, n° 84-13879 : Bull. civ. I, n° 249, p. 224 ; RTD civ. 1986, p. 614, obs. Patarin J. Cette décision confirme que l’adoption d’un enfant adultérin lui confère dans la succession de son auteur la situation d’enfant légitime, car le principe selon lequel : « L’enfant ayant fait l’objet d’une adoption simple, bien que conservant ses droits héréditaires dans sa famille d’origine, a, dans la famille de l’adoptant les mêmes droits successoraux qu’un enfant légitime est général et doit trouver application dans tous les cas où il n’en est pas disposé autrement par la loi laquelle ne fait pas de distinction entre les enfants adoptés selon la nature de leur filiation d’origine ».
  • 10.
    Hauser J., « L’adoption à tout faire », D. 1987, Chron., p. 206.
  • 11.
    L. n° 2001-1135, 3 déc. 2001, relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral : JO n° 281, 4 déc. 2001, p. 19279.
  • 12.
    La loi de 2001 a posé le principe de l’égalité de droits des enfants adultérins, à la suite de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme dans l’arrêt Mazurek. V. CEDH, 1er févr. 2000, Mazurek : D. 2000, p. 332, note Thierry J.-B. ; JCP G 2000, II 10286, note Gouttenoire-Cornu A. et Sudre F. ; JCP G 2000, I 278, obs. Le Guidec R. ; Defrénois 30 mai 2000, n° 37179, p. 654, obs. Massip J. ; Gaz. Pal. Req. 2000, 2, p. 2407, note Bollon N. et Portefaix M. ; Dr. famille 2000, comm. 33, note de Lamy B. ; LPA 21 juill. 2000, p. 20, note Canaple M. ; RTD civ. 2000, p. 311, obs. Hauser J. ; RTD civ. 2000, p. 429, obs. Marguénaud J.-P. ; RTD civ. 2000, p. 601, obs. Patarin J.
  • 13.
    Définition retenue in Meulders-Klein M.-T. et Thery I. (ss-dir.), Les recompositions familiales aujourd’hui, 1993, Nathan, Essais et recherches.
  • 14.
    L. n° 2002-305, 4 mars 2002, relative à l’autorité parentale : JO, 5 mars 2002, p. 4161 et s.
  • 15.
    C’est la loi du 11 juillet 1966 (L. n° 66-500, 11 juill. 1966, portant réforme de l’adoption : JO n° 0160, 12 juill. 1966, p. 5956) qui a autorisé expressément l’adoption de l’enfant du conjoint. Jusqu’alors, la légitimation adoptive était exclue et l’adoption simple, bien qu’admise, était rarement usitée. Toutefois, les difficultés persistaient. Jusqu’à une loi de 1976 (L. n° 76-1179, 22 déc. 1976, modifiant certaines dispositions relatives à l’adoption : JO, 23 déc. 1976, p. 7364) l’adoption n’était permise que si toute descendance légitime manquait à l’adoptant, sauf dispense du président de la République. Rapidement, le législateur a corrigé les imperfections de cette loi, facilitant ainsi l’adoption de l’enfant que le conjoint a eu hors mariage, ou qui est né d’un précédent mariage. La suppression de l’interdiction d’adoption en présence d’enfants légitimes a ouvert largement cette forme d’adoption.
  • 16.
    Trillat B., L’adoption, essai sur les institutions, 1995, PUL, p. 16.
  • 17.
    http://www.adoption.gouv.fr/. En France, en 2007, 95 % des adoptés en la forme simple le sont dans un cadre intrafamilial. Parmi eux, 84 % sont les enfants du conjoint et 8 % d’un ex-conjoint. Les adoptés sont relativement âgés puisque le jugement intervient lorsqu’ils ont 33,6 ans en moyenne. L’adoption simple de type intrafamilial est essentiellement demandée par des adoptants seuls, surtout des hommes (73 %) mais aussi des femmes (25 %), qui adoptent dans la majorité des cas l’enfant de leur conjoint ou d’un ex-conjoint. En outre, 5,7 % des enfants adoptés en la forme plénière le sont par le conjoint de leur parent. Pour les deux tiers d’entre eux, l’adoption est prononcée parce que le lien de filiation n’est établi qu’à l’égard du conjoint (ou de la conjointe) du demandeur.
  • 18.
    Aux termes de l’article 343-2 du Code civil, « la condition d’âge prévue à l’article précédent n’est pas exigée en cas d’adoption de l’enfant du conjoint ».
  • 19.
    Aux termes de l’article 344, alinéa 1, du Code civil, « Les adoptants doivent avoir 15 ans de plus que les enfants qu’ils se proposent d’adopter. Si ces derniers sont les enfants de leur conjoint, la différence d’âge exigée n’est que de 10 ans ».
  • 20.
    C. civ., art. 348-5.
  • 21.
    C. civ., art. 344, al. 2.
  • 22.
    C. civ., art. 353, al. 3.
  • 23.
    L. n° 96-604, 5 juill. 1996, relative à l’adoption : JO n° 156, 6 juill. 1996, p. 10208.
  • 24.
    La voie de l’adoption plénière de l’enfant du conjoint a d’abord été largement ouverte, notamment avec la loi du 11 juillet 1966 portant réforme de l’adoption. Cette loi permettait l’adoption plénière par une personne agissant individuellement. L’écueil de cette loi était qu’à la filiation d’origine de l’enfant s’en substituait une nouvelle, ceci avait pour résultat que le parent qui consentait à cette adoption par son conjoint perdait sa filiation avec son propre enfant et devait à son tour l’adopter. Ce n’est qu’avec la loi du 22 décembre 1976 sur l’adoption que cette erreur a été corrigée (C. civ., art. 356). En 1993 le législateur vient refermer la voie de l’adoption plénière (L. n° 93-22, 8 janv. 1993, modifiant le Code civil, relative à l’état civil, à la famille et aux droits de l’enfant et instituant le juge aux affaires familiales : JO n° 7, 9 janv. 1993, p. 495), donnant lieu à la rédaction de l’article 345-1 du Code civil en ces termes : « L’adoption plénière de l’enfant du conjoint n’est permise que lorsque cet enfant n’a de filiation légalement établie qu’à l’égard de ce conjoint ». Ce brusque revirement de tendance se justifiant notamment par l’injustice de l’adoption plénière intervenant après décès du père ou de la mère et qui privait les grands-parents de l’enfant ainsi adopté, de leur petit-enfant par le sang, après avoir perdu leur propre enfant. En 1996, le législateur innove encore avec la loi du 5 juillet 1996 (préc.) portant réforme de l’adoption. Cette loi dans son article 4 donne nouvelle rédaction à l’article 345-1 du Code civil et permet ainsi d’envisager l’adoption plénière de l’enfant du conjoint même si sa filiation est établie à l’égard de l’autre parent. Deux hypothèses sont à envisager, soit le parent est décédé sans ascendant au premier degré ou avec des ascendants désintéressés de l’enfant, soit il s’est vu retirer l’autorité parentale.
  • 25.
    Le recours à l’adoption plénière n’est pas toujours possible. La loi ne l’admet que pour un enfant mineur de moins de 15 ans (C. civ., art. 345, al. 1er) et exige que l’enfant y consente personnellement s’il a plus de 13 ans (C. civ., art. 345, al. 3).
  • 26.
    C. civ., art. 345-1, 1°, 2° et 3°.
  • 27.
    La notion de désintérêt manifeste des ascendants à l’égard de leurs petits-enfants doit être appréhendée à la lumière des décisions judiciaires qui traitent du désintérêt des parents à l’égard de leur enfant.
  • 28.
    Batteur A., Droit des personnes, des familles et des majeurs protégés, 8e éd., 2015, LGDJ, p. 186 à 189.
  • 29.
    Quelle que soit la date de son adoption, il convient de distinguer suivant que l’adopté est né avant ou après le 1er janvier 2005. Dans la première hypothèse, l’enfant ne change pas de nom si c’est l’épouse de son père qui l’adopte ; en revanche, il prend le nom de l’adoptant si c’est l’époux de sa mère. Dans la seconde hypothèse, aux termes de l’article 357 du Code civil, l’adoptant et son conjoint choisissent, par déclaration conjointe, le nom dévolu à l’enfant mineur : il peut garder celui qu’il avait, ou prendre les noms des deux conjoints dans l’ordre choisi par eux, dans la limite d’un nom pour chacun d’eux s’ils ont des doubles noms. À défaut de déclaration conjointe, il prend le nom de l’adoptant et celui de son conjoint, dans la limite du premier nom de chacun s’ils ont des noms doubles, par ordre alphabétique. Cependant, si le couple a déjà un ou des enfants communs, biologiques ou adoptés plénièrement, le nom précédemment attribué à ceux-ci s’imposera à l’adopté.
  • 30.
    C. civ., art. 348-1.
  • 31.
    Seule l’hypothèse du parent qui est dans l’impossibilité de manifester sa volonté n’est pas visée expressément par l’article 345-1 du Code civil.
  • 32.
    L. n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe : JO n° 0114, 18 mai 2013, p. 8253.
  • 33.
    Batteur A., « L’adoption et la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux personnes de même sexe », LPA 04 juill. 2013, p. 29.
  • 34.
    Tel est l’objet de l’article 8 de la loi du 17 mai 2013, qui introduit un troisième alinéa à l’article 360 du Code civil : « L’enfant précédemment adopté par une seule personne, en la forme simple ou plénière, peut l’être une seconde fois, par le conjoint de cette dernière, en la forme simple ».
  • 35.
    Cette procédure est prévue par l’article L. 441-3 du Code de l’organisation judiciaire.
  • 36.
    Cass., avis, 22 sept. 2014, nos 14-70006 et 14-70007 : D. 2014, Jur., p. 2031, note Leroyer A.-M. ; D. 2015, p. 21, note Fulchiron H. ; Dr. famille 2014, comm. 160, note Neirinck C. ; RTD civ. 2014, p. 872, obs. Hauser J.
  • 37.
    V. not., JCP G 2014, 1004, obs. Hauser J.
  • 38.
    V. parmi une abondante littérature, Bandrac M., Delaisi De Parseval G. et Depadt-Sebag V., « Repenser la prohibition de la gestation pour autrui ? », D. 2008, Chron., p. 434 à 441 ; Sériaux A., « Maternités pour le compte d’autrui : la mainlevée de l’interdit ? », D. 2009, Chron., p. 1215 à 1220 ; Hauser J., « La gestation pour autrui : aspects juridiques et éthiques », in Muzny P. (ss-dir.), La liberté de la personne sur son corps, 2009, Dalloz, Thèmes et commentaires, p. 85 à 103.
  • 39.
    Cass. ass. plén., 31 mai 1991, n° 90-20105 : Bull. civ. ass. plén., n° 4 ; Terré F. et Lequette F., Les grands arrêts de la jurisprudence civile, 113e éd., 2015, n° 51 ; Batteur A., Cerf-Hollender A., Gosselin-Gorand A. et Larralde J.-M., « Les interdits de la maternité de substitution et de gestation pour le compte d’autrui », in Batteur A. (ss-dir.), Les grandes décisions du droit des personnes et de la famille, 2e éd., 2016, Lextenso, p. 213 et s. ; D. 1991, p. 417, rapp. Chartier Y.,note Thouvenin D. ; JCP G 1991, II 21752, comm. Bernard J., concl. Dontenwille H., note Terré F. ; Defrénois 15 sept. 1991, n° 35088, p. 947, obs. Massip J. ; D. 1991, p. 318, obs. Aubert J.-L. ; D. 1992, p. 59, obs. Dekeuwer-Défossez F. ; Rev. crit. DIP 1991, p. 711, note Labrusse-Riou C. ; RTD civ. 1991, p. 517, obs. Huet-Weiller D. ; RTD civ. 1992, p. 88, obs. Mestre J. ; RTD civ. 1992, p. 489, étude Gobert M.
  • 40.
    Cass. 1re civ., 29 juin 1994, n° 92-13563 : Bull. civ. I, n° 226 ; D. 1994, p. 581, note Chartier Y. ; RTD civ. 1994, p. 842, obs. Hauser J. ; JCP G 1995, II 22362, note Rubellin-Devichi J.
  • 41.
    CA Rennes, 6e ch., sect. A, 7 mars 2016, n° 15/03855 ; CA Dijon, 24 mars 2016, n° 15/00057.
  • 42.
    La solution a, toutefois, été récemment abandonnée par la Cour de cassation : Cass. 1re civ., 5 juill. 2017, n° 16-16455. Au visa des articles 353 et 361 du Code civil, ensemble les articles 3, § 1, de la convention de New York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l’enfant et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, il a été jugé que : « Le recours à la gestation pour autrui à l’étranger ne fait pas, en lui-même, obstacle au prononcé de l’adoption, par l’époux du père, de l’enfant né de cette procréation, si les conditions légales de l’adoption sont réunies et si elle est conforme à l’intérêt de l’enfant ».
  • 43.
    Hauser J., « L’adoption à tout faire », art. préc.
  • 44.
    C. civ., art. 360, al. 1er.
  • 45.
    C. civ., art. 364, al. 1er.
  • 46.
    C. civ., art. 370.
  • 47.
    C. civ., art. 348.
  • 48.
    C. civ., art. 364.
  • 49.
    C. civ., art. 365, al. 1er.
  • 50.
    C. civ., art. 365, al. 2.
  • 51.
    Dans la loi du 4 mars 2002, le législateur a modifié l’article 365, alinéa 1er, in fine du Code civil en remplaçant la formule « mais celui-ci en conserve l’exercice » par « lequel en conserve seul l’exercice, sous réserve d’une déclaration conjointe avec l’adoptant adressée au directeur des services de greffe judiciaires du tribunal de grande instance aux fins d’un exercice en commun de cette autorité ». Cette nouvelle rédaction s’inscrit dans un mouvement de généralisation de l’exercice en commun de l’autorité parentale.
  • 52.
    Fulchiron H., « L’autorité parentale rénovée (commentaire de la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale) », Defrénois 15 août 2002, n° 37580, p. 959.
  • 53.
    Le législateur a résisté à sa tentation première de supprimer cette condition de déclaration conjointe pour faire de l’exercice commun la modalité de principe dans l’adoption simple de l’enfant du conjoint. V. AN, proj. L. ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, texte adopté n° 84, 12 févr. 2013, n° 84, art. 1 quater.
  • 54.
    Le Conseil constitutionnel a été saisi le 29 octobre 2013 par la Cour de cassation d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la constitution garantit des 1er et 5e alinéas de l’article 786 du Code général des impôts. Le 1er alinéa de l’article 786 du Code général des impôts prévoit que, pour la perception des droits de mutation lors de la transmission à titre gratuit entre adoptant et adopté, le lien de parenté résultant de l’adoption simple n’est pas pris en considération. Selon le 5e alinéa du même article, cette disposition du 1er alinéa n’est pas applicable pour les transmissions faites en faveur d’adoptés qui, soit dans leur minorité et pendant 5 ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité et pendant 10 ans au moins, auront reçu de l’adoptant des secours et des soins non interrompus. Les requérants soutenaient que ces dispositions méconnaissent notamment le principe d’égalité. Le Conseil constitutionnel a rejeté leurs griefs et jugé les dispositions litigieuses conformes à la constitution. À ce sujet, v. Cons. const., 28 janv. 2014, n° 2013-361 QPC : D. 2014, p. 284 ; D. 2014, p. 1171, obs. Granet-Lambrechts F. ; AJ fam. 2014, p. 179, obs. Salvage-Gerest P. ; Dr. famille 2014, comm. 52, Azincourt J.-D.; RTD civ. 2014, p. 356, obs. Hauser J.
  • 55.
    CGI, art. 786, 1°.
  • 56.
    CGI, art. 786 : « Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il n’est pas tenu compte du lien de parenté résultant de l’adoption simple.
  • 57.
    Cette disposition n’est pas applicable aux transmissions entrant dans les prévisions de l’alinéa 1er de l’article 368-1 du Code civil, ainsi qu’à celles faites en faveur :
  • 58.
    1° D’enfants issus d’un premier mariage du conjoint de l’adoptant ;
  • 59.
    2° De pupilles de l’État ou de la Nation ainsi que d’orphelins d’un père mort pour la France ;
  • 60.
    3° D’adoptés mineurs au moment du décès de l’adoptant ou d’adoptés mineurs au moment de la donation consentie par l’adoptant qui, pendant 5 ans au moins, ont reçu de celui-ci des secours et des soins non interrompus au titre d’une prise en charge continue et principale ;
  • 61.
    3° bis D’adoptés majeurs qui, soit dans leur minorité et pendant 5 ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité et pendant 10 ans au moins, auront reçu de l’adoptant des secours et des soins non interrompus au titre d’une prise en charge continue et principale ;
  • 62.
    4° D’adoptés dont le ou les adoptants ont perdu, morts pour la France, tous leurs descendants en ligne directe ;
  • 63.
    5° D’adoptés dont les liens de parenté avec la famille naturelle ont été déclarés rompus par le tribunal saisi de la requête en adoption, sous le régime antérieur à l’entrée en vigueur de la loi n° 66-500 du 11 juillet 1966 ;
  • 64.
    6° Des successibles en ligne directe descendante des personnes visées aux 1° à 5° ;
  • 65.
    7° D’adoptés, anciens déportés politiques ou enfants de déportés n’ayant pas de famille naturelle en ligne directe ».
  • 66.
    Grillet-Ponton D., « Le détournement fiscal de l’adoption simple : entre le cœur et la raison », Dr. famille 1999, p. 6.
  • 67.
    V. CGI, art. 786, 3°. Sur ce texte modifié par la L. n° 2016-297, 14 mars 2016, relative à la protection de l’enfant, art. 36 : JO n° 63, 15 mars 2016 ; v. Douet F., « Adoption simple et droits de mutation à titre gratuit : une légère amélioration », LEFP mai 2016, n° 82, p. 7. À noter que cette disposition a été modifiée par L. fin. n° 2016-1917, 29 déc. 2016, art. 9. Le Code général des impôts prévoit certaines hypothèses dans lesquelles le lien de parenté résultant de l’adoption est pris en compte pour le calcul des droits de mutation à titre gratuit. Les transmissions visées sont soumises au régime fiscal applicable aux transmissions en ligne directe. Il s’agit principalement des transmissions faites au profit d’adoptés mineurs au moment de la donation consentie par l’adoptant qui, pendant 5 ans au moins, ont reçu de celui-ci des secours et des soins non interrompus au titre d’une prise en charge continue et principale. La charge de la preuve pèse sur l’adopté. Cette preuve peut notamment résulter des mentions de la requête en adoption et du jugement prononçant cette adoption ou de la démonstration – au moyen d’attestions – de l’existence d’un soutien affectif et matériel suivi durant la période requise.
  • 68.
    CGI, art. 786, 6°.
  • 69.
    Ceci vaut que l’adoption soit plénière ou simple.
  • 70.
    Cass. 1re civ., 9 juill. 2014, n° 13-19013 : Bull. civ. I, n° 134 ; D. 2014, p. 1590 ; RTD civ. 2014, p. 870, obs. Hauser J. ; AJ fam. 2014, p. 510, obs. Levillain N. ; Dr. famille 2014, p. 143, obs. Neirinck C. ; Dr. famille 2014, p. 144, obs. Beignier B. et Nicod M.
  • 71.
    C. civ., art. 370-2.
  • 72.
    C. civ., art. 348, al. 1er.
  • 73.
    Cass. 1re civ., 20 mars 2013, n° 12-16401 : Bull. civ. I, n° 49 ; Dr. famille 2013, comm. 67, note Neirinck C. ; AJ fam. 2013, p. 231, obs. Salvage-Gerest P.
  • 74.
    C. civ., art. 368.
  • 75.
    C. civ., art. 353, al. 1er.
  • 76.
    C. civ., art. 353, al. 2.
  • 77.
    La première condition devrait toujours être remplie dans la mesure où le consentement recueilli de l’enfant majeur est révélateur de son intérêt à l’adoption. Les juges s’y réfèrent néanmoins, car c’est parfois à travers elle qu’ils contrôlent la finalité de l’adoption. Cette dernière étant dénoncée par les enfants de l’adoptant comme poursuivant un but uniquement successoral, les juges vérifient plus précisément que l’adoption repose avant tout sur un sentiment filial. D’autres fois, ce contrôle de la finalité institutionnelle est effectué par le prisme de la seconde condition. Le juge peut alors être enclin à examiner cette condition sans référence à la situation familiale des descendants de l’adoptant qui invoquent pourtant son atteinte. Mais le plus souvent, il vérifie les retombées éventuellement préjudiciables de l’adoption sur la vie familiale des enfants opposants.
  • 78.
    Cass. 1re civ., 12 janv. 2011, n° 09-16527 : Bull. civ. I, n° 9 ; Dr. famille 2011, comm. 20, note Neirinck C. ; AJ fam. 2011, p. 10, obs. Chénedé F., JCP 2011, n° 415, obs. Bosse-Platière H. et Gouttenoire A. ; LPA 11 mars 2011, p. 9, obs. Fraissinier-Amiot V. ; RTD civ. 2011, p. 337, obs. Hauser J. ; RJPF 2011/4, n° 32, obs. Garé T.
  • 79.
    Cass. 1re civ., 6 janv. 2004, n° 01-01600 : Bull. civ. I, n° 2 ; D. 2004, Somm., p. 365, note Vigneau D. ; D. 2004, p. 1419, obs. Granet-Lambrechts F. ; JCP G 2004, II 10064, note Labrusse-Riou C. ; JCP G 2004, I 109, obs. Rubellin-Devichi J. ; Defrénois 30 avr. 2004, n° 37926, p. 594, obs. Massip J. ; AJ fam. 2004, p. 66, obs. Bicheron F. ; Dr. famille 2004, comm. 16, note Fenouillet D. ; RJPF 2004/3, n° 34, note Garé T. ; RLDC 2004/3, n° 107, note Dekeuwer-Défossez F. ; LPA 8 avr. 2004, p. 13, note Voisin V. ; RTD civ. 2004, p. 75, obs. Hauser J. ; adde, Batteur A., « Secrets autour de la conception de l’enfant (Étude de droit civil) », in Mélanges Malaurie P., Liber amicorum, 2005, Defrénois, p. 15 à 50.
  • 80.
    La cour d’appel avait fait droit à la demande aux motifs notamment que la loi n’interdisait pas l’adoption de son propre enfant : « et que l’adoption simple, ne manifestant pas une filiation biologique, ne pouvait être assimilée à la reconnaissance d’un enfant dont les père et mère connaissent un des empêchements à mariage prévu par les articles 161 et 162 du Code civil ».
  • 81.
    Aux termes de l’article 345 du Code civil, l’adoption plénière est réservée aux mineurs.
  • 82.
    Cass. 1re civ., 8 oct. 2008, n° 07-16094 : Bull. civ. I, n° 223 ; JCP 2008, act. 615, obs. Favier Y. ; JCP G 2009, II 10012, note Favier Y. ; D. 2008, p. 2663, obs. Egea V. ; D. 2008, p. 2832, note Norguin V. ; D. 2009, p. 2190, obs. Plazy J.-M. ; Defrénois 15 déc. 2008, n° 38871, p. 2431, obs. Massip J. ; RTD civ. 2008, p. 655, obs. Hauser J.
  • 83.
    Salvage-Gerest P., « Les actes dont la nature implique le consentement strictement personnel du majeur en tutelle : une catégorie à revoir d’urgence », Dr. famille 2009, étude 17.
  • 84.
    Murat P., « L’inadoptabilité de l’autiste majeur, inapte à consentir à son adoption », Dr. famille 2008, comm. 173.
  • 85.
    Favier Y., « Pas d’adoption simple pour le majeur sous tutelle inapte à consentir à sa propre adoption », JCP 2008, act. 615.
  • 86.
    Batteur A., « Les actes de la vie familiale du majeur protégé », in Plazy J.-M. et Raoul-Cormeil G. (ss-dir.), Le patrimoine de la personne protégée, 2015, LexisNexis, p. 333 à 343, spéc. p. 340, étude 24.
  • 87.
    C. civ., art. 501 anc. : « En ouvrant la tutelle ou dans un jugement postérieur, le juge, sur l’avis du médecin traitant, peut énumérer certains actes que la personne en tutelle aura la capacité de faire elle-même, soit seule, soit avec l’assistance du tuteur ou de la personne qui en tient lieu. »
  • 88.
    La doctrine n’est pas unanime à ce sujet. V. RTD. civ. 2008, p. 655, obs. Hauser J. Selon l’auteur : « La réponse n’est pas juridiquement discutable. On ne voit guère comment on pourrait consentir à une adoption par représentation. Elle laisse toutefois une impression de malaise. On l’a bien compris, l’adoption projetée par le nouveau conjoint de son père était très probablement dans l’intérêt de l’enfant autiste, on peut imaginer que l’opération était le prélude à l’organisation de l’avenir de l’enfant et l’adoption simple avait alors la grande vertu, puisque l’épouse s’occupait de l’enfant, d’effacer les droits de mutation à titre gratuit entre étrangers si celle-ci voulait lui transmettre des biens. Tout ceci tombe à l’eau. Après tout l’adoption fait l’objet d’un contrôle par le tribunal qui la prononce et suppose qu’elle soit dans l’intérêt de l’adopté, serait-il inconcevable d’ajouter à l’article 360 qu’à titre exceptionnel l’adoption pourrait être prononcée sans le consentement de l’adopté si celui-ci est hors d’état de le donner, au besoin en prévoyant un contrôle renforcé ? Serait-il inconcevable de prévoir au moins un régime fiscal spécial, en dehors de toute adoption, pour les transmissions à titre gratuit en faveur d’une personne sous tutelle, puisque telle est souvent la vraie question ? En retenant la catégorie des actes strictement personnels on tire la conséquence logique de leur nature et on protège spécialement le protégé mais cette protection, comme il arrive parfois, se retourne contre lui. Derechef, il faudrait vraiment réfléchir à la finalité de l’adoption simple au XXIe siècle ».
  • 89.
    Fulchiron H., « La transmission des biens dans les familles recomposées », Defrénois 30 juin 1994, n° 35853, p. 833.
  • 90.
    Avant la loi du 17 mai 2013, la jurisprudence refusait l’adoption de l’enfant des partenaires pacsés dans le cadre des familles homoparentales, justement car cela conduisait soit à faire disparaître le lien de filiation biologique (adoption plénière) soit à transférer l’autorité parentale à l’adoptant, au détriment de la mère par le sang (adoption simple). La Cour de cassation refusait au partenaire le recours à l’adoption simple au motif que l’article 365 dispose que, dans ce cas, l’adoptant est seul investi de l’autorité parentale, sauf s’il est l’époux du père ou de la mère de l’enfant (Cass. 1re civ., 20 févr. 2007, n° 06-15647 : Bull. civ. I, n° 71). Pour autant, le droit antérieur n’ignorait pas la famille homoparentale. La jurisprudence avait admis la délégation d’autorité parentale au profit de la partenaire de la mère biologique de l’enfant dans les conditions de l’article 377 du Code civil « lorsque les circonstances l’exigent » (Cass. 1re civ., 24 févr. 2006, n° 04-17090 : Bull. civ. I, n° 101).
  • 91.
    Rubellin-Devichi J., « Réflexions pour d’indispensables réformes en matière d’adoption », D. 1991, Chron., p. 213.
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