Sûretés : les principales dispositions de l’ordonnance du 15 septembre 2021

Publié le 02/02/2022
Créances, dettes, droit des sûretés
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La présente ordonnance est prise en application de l’article 60 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises. L’objectif est de simplifier le droit des sûretés et de renforcer son efficacité, tout en assurant un équilibre entre les intérêts des créanciers, titulaires ou non de sûretés, et ceux des débiteurs et des garants. Sauf indication contraire, les dispositions de l’ordonnance entrent en vigueur le 1er janvier 2022 afin de laisser aux opérateurs économiques le temps de se mettre en conformité avec le droit nouveau.

Ord. n° 2021-1192, 15 sept. 2021, portant réforme du droit des sûretés : JO, 16 sept. 2021

La sécurité juridique est le premier objectif poursuivi par l’ordonnance. Celle-ci vise tout d’abord à rendre plus lisible et plus accessible le droit des sûretés.

Le deuxième objectif de la réforme est le renforcement de l’efficacité du droit des sûretés, tout en maintenant un niveau de protection satisfaisant des constituants et des garants.

Conformément à la loi d’habilitation, se trouvent ainsi réformés le cautionnement, les privilèges mobiliers, le gage de meubles corporels, le nantissement de créance, la réserve de propriété, la fiducie-sûreté ainsi que les sûretés réelles immobilières. Sont également consacrées la cession de créance (de droit commun) à titre de garantie ainsi que la cession de somme d’argent à titre de garantie (au lieu du nantissement de monnaie scripturale, qui était proposé par l’avant-projet de réforme du droit des biens de l’Association Henri Capitant), signe de la vitalité des sûretés fondées sur le droit de propriété (source : Dalloz actualité).

I – Dispositions relatives au cautionnement

L’ordonnance précise que le cautionnement est le contrat par lequel une caution s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci. Il peut être souscrit à la demande du débiteur principal ou sans demande de sa part et même à son insu.

Lorsque la loi subordonne l’exercice d’un droit à la fourniture d’un cautionnement, il est dit légal. Lorsque la loi confère au juge le pouvoir de subordonner la satisfaction d’une demande à la fourniture d’un cautionnement, il est dit judiciaire.

Le cautionnement est simple ou solidaire. La solidarité peut être stipulée entre la caution et le débiteur principal, entre les cautions, ou entre eux tous.

On peut se porter caution, envers le créancier, de la personne qui a cautionné le débiteur principal.

Par ailleurs, précise l’ordonnance, le sous-cautionnement, quant à lui, est le contrat par lequel une personne s’oblige envers la caution à lui payer ce que peut lui devoir le débiteur à raison du cautionnement.

A – De la formation et de l’étendue du cautionnement

Le cautionnement, indique l’ordonnance, peut garantir une ou plusieurs obligations, présentes ou futures, déterminées ou déterminables.

Mais le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable. Néanmoins, celui qui se porte caution d’une personne physique dont il savait qu’elle n’avait pas la capacité de contracter est tenu de son engagement.

Le cautionnement doit être exprès. Il ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. Sauf clause contraire, le cautionnement s’étend aux intérêts et autres accessoires de l’obligation garantie, ainsi qu’aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution.

Par ailleurs, précise l’ordonnance, le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses, sous peine d’être réduit à la mesure de l’obligation garantie. Il peut être contracté pour une partie de la dette seulement et sous des conditions moins onéreuses.

En outre, à peine de nullité de son engagement, la caution personne physique doit apposer elle-même la mention qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres.

En cas de différence, le cautionnement vaut pour la somme écrite en toutes lettres. Si la caution est privée des bénéfices de discussion ou de division, elle doit reconnaître dans cette mention ne pouvoir exiger du créancier qu’il poursuive d’abord le débiteur ou qu’il divise ses poursuites entre les cautions. À défaut, elle conserve le droit de se prévaloir de ces bénéfices.

Comme le précise le rapport au président de la République relatif à l’ordonnance du 15 septembre 2021, il n’est plus exigé la reproduction par la caution d’une mention strictement prédéterminée ; cela était la source d’un important contentieux portant sur des inexactitudes, parfois mineures, de la mention reproduite par la caution. Il est désormais seulement exigé que la mention désigne avec suffisamment de précision la nature et la portée de l’engagement.

De plus, le champ de la mention est étendu : elle s’imposera pour tous les cautionnements souscrits par une personne physique même lorsque le créancier n’est pas un professionnel. Il faut souligner que cette mention ne doit pas nécessairement être manuscrite : il est seulement exigé qu’elle soit apposée par la caution. Elle ne fait donc pas obstacle à ce que le cautionnement soit conclu par voie électronique.

Par ailleurs, précise l’ordonnance, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions, personnelles ou inhérentes à la dette, qui appartiennent au débiteur, sous réserve des dispositions du deuxième alinéa de l’article 2293 du Code civil.

Toutefois, la caution ne peut se prévaloir des mesures légales ou judiciaires dont bénéficie le débiteur en conséquence de sa défaillance, sauf disposition spéciale contraire.

Par ailleurs, le créancier professionnel est tenu de mettre en garde la caution personne physique lorsque l’engagement du débiteur principal est inadapté aux capacités financières de ce dernier. À défaut, le créancier est déchu de son droit contre la caution à hauteur du préjudice subi par celle-ci.

De plus, indique l’ordonnance, si le cautionnement souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux revenus et au patrimoine de la caution, il doit être réduit au montant à hauteur duquel elle pouvait s’engager à cette date.

En outre, précise l’ordonnance, la personne qui s’oblige au titre d’un cautionnement légal ou judiciaire doit avoir une solvabilité suffisante pour répondre de l’obligation. Si cette caution devient insolvable, le débiteur doit lui substituer une autre caution, sous peine d’être déchu du terme ou de perdre l’avantage subordonné à la fourniture du cautionnement.

B – Des effets du cautionnement

1 – Des effets du cautionnement entre le créancier et la caution

Le créancier professionnel est tenu, avant le 31 mars de chaque année et à ses frais, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette, des intérêts et autres accessoires restant dus au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie, sous peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information et jusqu’à celle de la communication de la nouvelle information.

Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués par le débiteur pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette.

Par ailleurs, l’article 2304 du Code civil est une innovation de l’ordonnance, qui vise à assurer l’information de la sous-caution personne physique, qui n’était jusque-là pas protégée : si la caution de premier rang a elle-même bénéficié de l’information prévue par les articles précédents, elle doit la transmettre à la sous-caution dans le délai d’un mois.

Par ailleurs, précise l’ordonnance, le bénéfice de discussion permet à la caution d’obliger le créancier à poursuivre d’abord le débiteur principal. Ne peut se prévaloir de ce bénéfice ni la caution tenue solidairement avec le débiteur, ni celle qui a renoncé à ce bénéfice, non plus que la caution judiciaire.

Le bénéfice de discussion doit être invoqué par la caution dès les premières poursuites dirigées contre elle. La caution doit indiquer au créancier les biens du débiteur susceptibles d’être saisis, qui ne peuvent être des biens litigieux ou grevés d’une sûreté spéciale au profit d’un tiers. Si le créancier omet de poursuivre le débiteur, il doit répondre à l’égard de la caution de l’insolvabilité de celui-ci à concurrence de la valeur des biens utilement indiqués.

Lorsque plusieurs personnes se sont portées cautions de la même dette, elles sont chacune tenues pour le tout. Néanmoins, celle qui est poursuivie peut opposer au créancier le bénéfice de division. Le créancier est alors tenu de diviser ses poursuites et ne peut lui réclamer que sa part de la dette. Ne peuvent se prévaloir du bénéfice de division les cautions solidaires entre elles ainsi que les cautions qui ont renoncé à ce bénéfice.

Par ailleurs, le bénéfice de division doit être invoqué par la caution dès les premières poursuites dirigées contre elle. Il ne peut être mis en œuvre qu’entre cautions solvables. L’insolvabilité d’une caution au jour où la division est invoquée est supportée par celles qui sont solvables.

La caution qui a demandé la division ne peut plus être recherchée à raison de l’insolvabilité d’une autre, survenue postérieurement.

Si le créancier a divisé de lui-même son action, il ne peut plus revenir sur cette division, même s’il y avait, au temps de l’action, des cautions insolvables.

Par ailleurs, précise l’ordonnance, l’action du créancier ne peut avoir pour effet de priver la caution personne physique du minimum de ressources fixé à l’article L. 731-2 du Code de la consommation. Les cautions doivent donc conserver le « reste à vivre » réservé au débiteur surendetté bénéficiant d’un plan de redressement. Il s’agit d’une limite apportée au droit de poursuite du créancier, laquelle a pour but d’éviter que la caution ne se trouve totalement démunie, à la suite de l’exécution de son engagement de caution, et d’éviter ainsi son surendettement.

2 – Des effets du cautionnement entre le débiteur et la caution

La caution qui a payé tout ou partie de la dette a un recours personnel contre le débiteur tant pour les sommes qu’elle a payées que pour les intérêts et les frais. Ne sont restituables que les frais postérieurs à la dénonciation, faite par la caution au débiteur, des poursuites dirigées contre elle. Si la caution ne réalise qu’un paiement partiel, ce qu’envisage le texte, la subrogation ne sera également que partielle, conformément au droit commun de la subrogation personnelle figurant aux articles 1346 et suivants du Code civil.

Si la caution a subi un préjudice indépendant du retard dans le paiement des sommes précitées, elle peut aussi en obtenir réparation. Par ailleurs, la caution qui a payé tout ou partie de la dette est subrogée dans les droits qu’avait le créancier contre le débiteur.

L’article 2311 du Code civil, précise le rapport au président de la République, concerne la perte du recours de la caution contre le débiteur principal. Cette sanction suppose, comme dans le droit antérieur, que la caution ait payé le créancier sans en avertir le débiteur principal. En revanche, la sanction n’était précédemment encourue que si la caution avait payé sans être poursuivie par le créancier ; cette condition n’est pas reprise, ce qui doit inciter la caution à systématiquement informer le débiteur principal du paiement à intervenir.

C – Les effets du cautionnement entre les cautions

1 – De l’extinction du cautionnement

L’article 2313 du Code civil affirme que le cautionnement peut s’éteindre soit par voie principale, c’est-à-dire pour une cause qui trouve sa source dans les relations entre le créancier et la caution, soit par voie accessoire, du fait de l’extinction de l’obligation principale.

L’article 2314 du Code civil reprend et clarifie le « bénéfice de subrogation », qui constitue une cause spécifique d’extinction de l’obligation de règlement de la caution : si, par sa faute, le créancier a perdu un droit sur lequel la caution pouvait compter dans l’exercice de son recours subrogatoire, celle-ci est déchargée à concurrence du préjudice qu’elle subit. Toute clause contraire est réputée non écrite.

Par ailleurs, en rupture avec le droit antérieur, le dernier alinéa prévoit que « la caution ne peut reprocher au créancier son choix du mode de réalisation d’une sûreté ». Selon le rapport au président de la République, est principalement visé le choix entre saisie, attribution judiciaire ou pacte commissoire ; la solution inverse porte en effet une atteinte excessive aux droits du créancier qui peut légitimement ne pas souhaiter devenir propriétaire du bien grevé de sûreté.

L’article 2315 du Code civil, quant à lui, rappelle la faculté, de résiliation unilatérale à tout moment du cautionnement à durée indéterminée, conformément à la règle prévue en droit commun des contrats par l’article 1211 du Code civil.

Par ailleurs, l’article 2316 du Code civil (nouveau) précise, dans un souci de sécurité juridique, que lorsqu’un cautionnement de dettes futures prend fin, la caution reste tenue des dettes nées antérieurement, sauf clause contraire. Il s’agit ici de consacrer légalement la distinction entre l’obligation de couverture et l’obligation de règlement, utilisée par la jurisprudence. La date à prendre en compte est la date de naissance de la créance cautionnée : les créances nées antérieurement à l’extinction du cautionnement doivent être réglées par la caution, même si leur date d’exigibilité est postérieure.

L’article 2317 du Code civil prévoit dans son alinéa premier que les héritiers de la caution ne sont tenus que des dettes nées avant le décès.

L’article 2318 du Code civil précise le sort du cautionnement en cas de dissolution entraînant la transmission universelle du patrimoine de la personne morale du créancier, du débiteur principal ou de la caution. Elle peut résulter d’une fusion (par combinaison ou par absorption), d’une scission ou encore de la réunion de toutes les parts de la société entre les mains d’un associé unique (1844-5, al. 3).

Par ailleurs, ainsi que le précise le rapport au président de la République, comme le prévoit aujourd’hui la jurisprudence1, la fusion du débiteur principal entraîne l’extinction de l’obligation de couverture de la caution, sauf à ce qu’elle consente à maintenir son engagement au moment de l’opération. Conformément de nouveau à la jurisprudence2, la fusion du créancier entraîne l’extinction de l’obligation de couverture de la caution, sauf à ce qu’elle consente à maintenir son engagement, soit au moment de l’opération, soit par avance.

Enfin, levant les incertitudes du droit positif suscitées par un récent arrêt3, le texte affirme que la fusion de la caution n’a pas d’incidence sur le cautionnement.

Par ailleurs, l’article 2319 du Code civil précise que la caution du solde d’un compte courant ou de dépôt ne peut plus être poursuivie cinq ans après la fin du cautionnement.

Enfin, précise l’ordonnance, la simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge pas la caution. En revanche, conformément à la règle de l’accessoire, la caution peut se prévaloir de cette prorogation pour refuser de payer le créancier avant l’échéance ainsi reportée.

Afin de compenser la suppression du recours avant paiement, qui pouvait être exercé dans une telle hypothèse, le nouveau texte ouvre alors à la caution la possibilité de demander la constitution d’une sûreté judiciaire sur les biens du débiteur en application du livre V du Code des procédures civiles d’exécution. L’existence de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement, condition exigée par l’article L. 511-1 de ce code, est alors présumée jusqu’à preuve du contraire.

2 – Dispositions relatives aux sûretés réelles

Selon l’ordonnance, la sûreté réelle est l’affectation d’un bien ou d’un ensemble de biens, présents ou futurs, au paiement préférentiel ou exclusif du créancier.

La sûreté réelle est soit légale, judiciaire ou conventionnelle, selon qu’elle est accordée par la loi à raison de la qualité de la créance, par un jugement à titre conservatoire, ou par une convention.

En outre, elle est mobilière ou immobilière, selon qu’elle porte sur des biens meubles ou immeubles. De plus, elle est générale lorsqu’elle porte sur la généralité des meubles et des immeubles ou des seuls meubles ou des seuls immeubles.

Enfin, elle est spéciale lorsqu’elle ne porte que sur des biens déterminés ou déterminables, meubles ou immeubles.

L’article 2325 du Code civil, quant à lui, est relatif aux sûretés réelles pour autrui. Le texte prévoit ainsi que la sûreté réelle peut être constituée en garantie de la dette d’autrui : la nature de sûreté réelle de cette figure est ainsi réaffirmée, conformément à la jurisprudence actuelle et dans un souci de sécurité juridique. Dans la lignée du droit antérieur à nouveau, il est prévu que « le créancier n’a d’action que sur le bien affecté en garantie ».

En revanche, en rupture avec le droit antérieur, cette sûreté se voit appliquer un certain nombre de règles protectrices de la caution, à savoir le devoir de mise en garde (art. 2299), les obligations d’information (art. 2302 à 2304), le bénéfice de discussion (art. 2305 et 2305-1), les recours de la caution (art. 2308 à 2312) et le bénéfice de subrogation (art. 2314).

Par ailleurs, précise l’ordonnance, une sûreté réelle peut être constituée sur les biens d’une personne morale de droit privé en vertu de pouvoirs résultant de délibérations ou délégations établies sous signatures privées alors même que la constitution de la sûreté doit l’être par acte authentique.

II – Dispositions relatives aux sûretés sur les meubles

A – Dispositions relatives aux privilèges mobiliers

L’article 2330 du Code civil précise que les privilèges mobiliers sont accordés par la loi. Ils sont généraux ou spéciaux. Les dispositions légales qui les régissent sont d’interprétation stricte. Ils donnent le droit d’être préféré aux autres créanciers. Sauf disposition contraire, ils ne confèrent pas de droit de suite. Ils se reportent sur la créance de prix du débiteur à l’égard de l’acquéreur.

Par ailleurs, selon l’article 2331, outre celles prévues par des lois spéciales, les créances privilégiées sur la généralité des meubles sont :

  • Les frais de justice, sous la condition qu’ils aient profité au créancier auquel le privilège est opposé ;

  • Les frais funéraires ;

  • Les rémunérations et indemnités telles que les rémunérations, pour les six derniers mois, des salariés et apprentis ; le salaire différé, pour l’année échue et pour l’année courante, institué par l’article L. 321-13 du Code rural et de la pêche maritime ; les créances du conjoint survivant instituées par l’article 14 de la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989 relative au développement des entreprises commerciales et artisanales et à l’amélioration de leur environnement économique, juridique et social et l’article L. 321-21-1 du Code rural et de la pêche maritime

  • Pendant la dernière année, les produits livrés par un producteur agricole dans le cadre d’un accord interprofessionnel à long terme homologué, ainsi que les sommes dues par tout contractant d’un exploitant agricole en application d’un contrat-type homologué.

Dans une perspective d’accessibilité et d’intelligibilité de la règle de droit, le nouvel article 2331-1 mentionne les privilèges du Trésor et des caisses de sécurité sociale, avec renvoi aux dispositions spéciales qui leur sont applicables.

Par ailleurs, l’article 2332 est relatif aux privilèges mobiliers spéciaux :

  • Toutes les sommes dues en exécution d’un bail ou de l’occupation d’un immeuble, sur le mobilier garnissant les lieux et appartenant au débiteur, y compris, le cas échéant, le mobilier d’exploitation et la récolte de l’année ;

  • Les frais de conservation d’un meuble, sur celui-ci ;

  • Le prix de vente d’un meuble, sur celui-ci ;

  • Les créances nées du contrat de travail de l’auxiliaire salarié d’un travailleur à domicile répondant à la définition de l’article L. 7412-1 du Code du travail, sur les sommes dues à ce travailleur par les donneurs d’ouvrage.

Les privilèges désuets (privilège de l’hôtelier, privilège pour les créances résultant d’abus et prévarications commis par les fonctionnaires, privilège des créances nées d’un accident) sont abrogés.

B – Dispositions relatives au gage de meubles corporels

L’ordonnance prévoit que le gage peut avoir pour objet des meubles immobilisés par destination. L’ordre de préférence entre le créancier hypothécaire et le créancier gagiste est déterminé conformément à l’article 2419 du Code civil.

En outre, précise l’ordonnance, le gage de la chose d’autrui peut être annulé à la demande du créancier qui ignorait que la chose n’appartenait pas au constituant.

Par ailleurs, l’article 2341, relatif au gage avec dépossession de choses fongibles, est complété par un troisième alinéa qui permet aux parties d’autoriser le constituant à aliéner les choses gagées à charge de les remplacer par la même quantité de choses équivalentes. Cette hypothèse d’un gage avec dépossession sur stock circulant se rencontre en effet en pratique et était prévue dans le gage de stocks4, qui est abrogé par ailleurs.

L’article 2342 est relatif au gage sans dépossession de choses fongibles. La faculté d’aliéner les biens fongibles, qui supposait jusque-là une clause en ce sens, est désormais le principe – lequel peut être écarté par une clause contraire. Comme le précise le rapport au président de la République, cette solution, inspirée de celle qui existe aujourd’hui pour le gage de stocks, correspond à la réalité du gage de choses fongibles, qui a vocation à être un gage tournant.

C – Dispositions relatives au nantissement de meubles incorporels

L’article 2355 du Code civil est complété afin de prévoir que les nantissements ne confèrent en principe pas de droit de rétention fictif.

En cas de contestation, la preuve de la date incombe au créancier nanti, qui peut la rapporter par tout moyen.

L’article 2361-1 confirme la possibilité, aujourd’hui discutée, de constituer plusieurs nantissements sur une même créance, le rang étant alors déterminé en fonction de la date de l’acte, conformément à l’article 2361.

D – Dispositions relatives à la propriété retenue ou cédée à titre de garantie

L’article 10 modifie la section 1 du chapitre 4, relative à la propriété retenue à titre de garantie. Plus précisément, indique le rapport au président de la République, il complète l’article 2372 afin de combattre une solution jurisprudentielle5 considérée comme inopportune : la Cour de cassation interdit en effet au sous-acquéreur d’un bien acquis sous réserve de propriété d’opposer au vendeur réservataire les exceptions dont il aurait pu se prévaloir contre l’acheteur-revendeur, au détriment des intérêts du sous-acquéreur de bonne foi. Le texte permet d’aligner le régime de cette sûreté avec les règles applicables à la cession de créance et à la subrogation personnelle6.

E – Dispositions relatives aux sûretés sur les immeubles

Les sûretés sur les immeubles sont les privilèges, le gage immobilier et les hypothèques. La propriété de l’immeuble peut également être retenue ou cédée en garantie.

L’ordonnance précise que les privilèges immobiliers sont accordés par la loi. Ils sont généraux. Ils sont dispensés de la formalité de l’inscription. Les dispositions légales qui les régissent sont d’interprétation stricte. Ils donnent le droit d’être préféré aux autres créanciers mais ne confèrent pas de droit de suite. « Lorsque le privilège porte aussi sur la généralité des meubles du débiteur, il ne s’exerce sur les immeubles qu’à défaut de mobilier suffisant. »

F – Dispositions relatives aux hypothèques

L’ordonnance reformule les règles existantes en matière d’hypothèque (C. civ., art. 2385 à C. civ., art. 2391). En outre, l’ordonnance explicite la règle de l’indivisibilité de l’hypothèque (C. civ., art. 2393 [ancien] / C. civ., art. 2391, nouveau]).

Pour tenir compte de la transformation des privilèges immobiliers spéciaux en hypothèques légales spéciales, deux sous-sections distinguent désormais les hypothèques légales générales et les hypothèques légales spéciales.

La liste des hypothèques légales générales a été reprise (C. civ., art. 2240 [ancien] / C. civ., art. 2393, [nouveau]), à l’exception des frais de dernière maladie et de fourniture des subsistances faites au débiteur et à sa famille pendant la dernière année qui ont été supprimés (source : ANIL).

G – Dispositions modifiant le Code de commerce

L’article 27 modifie les règles de publicité du privilège du vendeur et du nantissement du fonds de commerce. Afin de simplifier les règles de publicité, l’obligation d’enregistrement de l’acte de nantissement ainsi que le délai pour inscrire ces sûretés à peine de nullité sont supprimés.

L’article 28 modifie les autres parties du Code de commerce. Il prévoit tout d’abord à l’article L. 110-1 que le cautionnement d’une dette commerciale est, entre toutes personnes, commercial, ce qui a pour effet de soumettre le contentieux relatif à ce cautionnement à la compétence des juridictions commerciales. Cette modification répond à un objectif de bonne administration de la justice, en permettant que le tribunal de commerce soit saisi à la fois du contentieux relatif à la dette principale et de celui relatif au cautionnement.

L’article 29 modifie le régime applicable au nantissement de compte-titres. Les dispositions relatives aux fruits et produits font l’objet de différents aménagements. Il est ainsi consacré de manière expresse la possibilité pour les parties d’exclure conventionnellement les fruits et produits de l’assiette du nantissement de compte-titres. S’agissant des exigences relatives à l’ouverture du compte fruits et produits, celles-ci sont assouplies de manière à atténuer les difficultés et délais que peut engendrer l’ouverture d’un tel compte auprès d’établissement de crédit, notamment lorsque le constituant a son siège social à l’étranger.

Notes de bas de pages

  • 1.
    V. par ex. Cass. com., 25 oct. 1983, n° 82-13358.
  • 2.
    V. par ex. Cass. com., 20 janv. 1987, n° 85-14035.
  • 3.
    Cass. com., 7 janv. 2014, n° 12-20204.
  • 4.
    C. com., art. L. 527-1 et s.
  • 5.
    Cass. com., 5 juin 2007, n° 05-21349.
  • 6.
    C. civ., art. 1324 et C. civ., art. 1346-5.