La loi relative à l’égalité et à la citoyenneté devant le juge constitutionnel. Loi-balai, lisibilité du droit et exigences constitutionnelles

Publié le 24/03/2017

Le seul intitulé de la loi Égalité et citoyenneté présage d’un vaste programme politique et juridique. Loi fourre-tout de fin de mandat, elle a suscité plusieurs censures. Le Conseil constitutionnel, saisi par soixante députés et soixante sénateurs, conformément à la Constitution, par sa décision du 26 janvier 2017, a en effet censuré plusieurs dispositions de cette loi et apporté d’utiles précisions procédurales.

Les lois de fin de mandat sont souvent qualifiées de « loi-balai » par l’agrégation de mesures qu’elles comportent. Jeudi 26 janvier 2017, le Conseil constitutionnel a censuré plusieurs dispositions de ce texte, dans certains cas en raison de l’absence de lien avec l’objet de la loi.

C’est le cas, de manière quelque peu anecdotique, de l’article 222 du projet de loi Égalité et citoyenneté, qui introduisait dans la définition de l’autorité parentale, l’interdiction d’avoir recours aux « violences corporelles » envers les enfants. Cet amendement parlementaire, qui proscrivait symboliquement les gifles et les fessées, avait été voté avec l’accord tacite du gouvernement. Il a été considéré comme un « cavalier » législatif, c’est-à-dire sans rapport avec l’objet principal de la loi. Le Conseil constitutionnel avait été saisi sur ce point par soixante sénateurs de l’opposition1.

Comme on le verra plus bas, la censure de cette disposition n’est pas isolée, mais la censure de cavaliers dans une loi dite balai ne manque pas de sel, dès lors que, sous la rubrique de l’intitulé de la loi Égalité et citoyenneté, se trouvent des dispositions aussi diverses que celles sur la mixité sociale ou encore sur le renforcement de la lutte contre le négationnisme ou enfin la substitution aux termes d’« identité sexuelle » ceux d’« identité de genre ».

En réalité, ce texte est riche de nombreuses dispositions législatives qui permettent au gouvernement terminant ses fonctions dans quelques semaines, d’adopter des mesures s’inscrivant dans la politique menée.

Le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté a été délibéré en conseil des ministres le 13 avril 2016. Le gouvernement a engagé la procédure accélérée le même jour. Le texte a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 6 juillet dernier, puis par le Sénat le 18 octobre dernier. Après l’échec de la commission mixte paritaire (CMP), le texte a été adopté en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale le 23 novembre 2016. Rejeté en nouvelle lecture par le Sénat le 19 décembre 2016, il a été adopté par l’Assemblée nationale en lecture définitive le 22 décembre 2016 en application du dernier alinéa de l’article 45 de la Constitution. Le projet de loi initial comportait 41 articles. La loi adoptée en comptait 224. Ce sont plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs qui ont saisi le Conseil constitutionnel de cette loi2. Ce dernier a statué par une décision en date du 26 janvier 20173.

Le Conseil constitutionnel a censuré d’office l’article 68, comme dépourvu de portée normative4, ainsi que ce que l’on appelle les cavaliers législatifs, dispositions introduites, sans lien avec l’objet de la loi5. Outre une précision de procédure, lui permettant d’aborder la notion d’entonnoir (I), le Conseil constitutionnel, par sa censure, a apporté des précisions sur la constitutionnalité d’une demande d’autorisation de prendre des mesures par ordonnances (II). Quant au fond, le juge constitutionnel a validé l’essentiel des dispositions contestées relatives à la mixité sociale (III), à un changement de vocable et soulevé d’office des dispositions relatives à la lutte contre le négationnisme (IV).

I – Une question inédite : l’entonnoir à rebours

La procédure d’adoption de la loi a été examinée et fait l’objet du traitement d’une question inédite. En effet, les requérants estimaient que la suppression, par l’Assemblée nationale, en nouvelle lecture, de l’article 28 quater A, pourtant adopté conforme par les deux chambres en première lecture, était contraire à la règle de l’entonnoir.

Cet article visait à subordonner le bénéfice de l’abattement de 30 % de la taxe foncière sur les propriétés bâties applicable pour certains logements sociaux dans les quartiers prioritaires, à la conclusion d’une convention entre le bailleur social, la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), et l’État.

Introduit en première lecture à l’Assemblée nationale, il avait été adopté conforme par le Sénat. Il ne faisait donc plus partie des « dispositions restant en discussion », au sens de l’article 45 de la Constitution. Pourtant, les députés l’avaient « rappelé » en nouvelle lecture, en commission spéciale, pour le modifier afin d’en assurer la conformité à la Constitution.

Puis, en séance publique, le gouvernement avait déposé un amendement de suppression, qui avait été adopté. Le Sénat ayant ensuite adopté une question préalable sur l’ensemble de la loi, le texte voté par l’Assemblée en lecture définitive ne comportait plus les dispositions en cause6.

La technique dite de l’entonnoir est classique dans la jurisprudence constitutionnelle : « Il ressort de l’économie de l’article 45 de la Constitution et notamment de la première phrase de son premier alinéa, selon laquelle : “Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement dans les deux assemblées du Parlement en vue de l’adoption d’un texte identique”, que les adjonctions ou modifications qui peuvent être apportées après la première lecture par les membres du Parlement et par le gouvernement doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion. Toutefois, ne sont pas soumis à cette dernière obligation, les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d’examen ou à corriger une erreur matérielle »7.

En l’espèce, la question dont le Conseil constitutionnel était saisi était nouvelle : il était sollicité afin de se prononcer sur la règle de ce que l’on peut appeler l’entonnoir « à rebours »8, dans la mesure où il ne s’agissait pas de censurer une disposition adoptée en violation de cette règle, mais de dire si la suppression d’une disposition pourtant votée conforme par les deux chambres méconnaissait ou non cette règle. Concrètement, cette suppression était le résultat de deux amendements, le premier, qui a rouvert la discussion sur l’article 28 quater A afin de le modifier, le second, qui a procédé à cette suppression.

Le Conseil constitutionnel a donc dû, dans un premier temps, examiner la recevabilité de chacun de ces amendements. Dans le cadre de la préparation de la loi, les auteurs du premier amendement voulaient préciser que la convention entre le bailleur social, la commune ou l’EPCI et l’État devrait être signée avant le 31 mars 2017. Ils estimaient en effet, qu’à défaut de convention, les intéressés risquaient d’être privés du bénéfice de l’abattement, pourtant prévu par la loi de finances pour 2015, pour une période allant de 2016 à 2020, dans la mesure où la taxe foncière est calculée au regard de la situation au 1er janvier de l’année d’imposition. Or, à cette date, la convention n’aurait pas pu être signée, la loi n’étant pas encore promulguée. L’amendement était donc lié à un risque de rétroactivité, pouvant elle-même conduire le juge constitutionnel à censurer ces dispositions. Le Conseil constitutionnel a sur ce point jugé qu’il était recevable en vertu de l’article 45 de la Constitution9.

En revanche, il n’a pas eu la même approche sur le deuxième amendement10. Lors des débats, le gouvernement avait justifié la suppression de l’article 28 quater A par les situations de blocage qu’il était susceptible d’entraîner et l’opportunité s’attachant à examiner plutôt ces questions « dans le cadre de l’examen de l’un des projets de loi de finances, initiale ou rectificative, de cette fin d’année puisque nous avons ce débat par ailleurs et qu’il est loin d’être clos »11.

L’amendement n’était donc pas motivé par le souci de remédier à une inconstitutionnalité ou de procéder à la correction d’une erreur matérielle. Le Conseil constitutionnel l’a relevé, en ajoutant que cet amendement n’était pas non plus destiné « à opérer une coordination avec des textes en cours d’examen à la date à laquelle il a été adopté »12. En effet, même si une disposition analogue à l’article 28 quater A a bien été ensuite adoptée à l’article 47 (ex-23 ter) de la loi de finances rectificative pour 2016, cette disposition n’a été introduite dans le projet de loi de finances rectificative que le 6 décembre dernier, alors qu’elle a été supprimée le 23 novembre dans le texte faisant l’objet de la décision commentée : à la date où la recevabilité de l’amendement du gouvernement devait donc être appréciée, aucune coordination n’était requise avec un autre texte en discussion.

Le Conseil constitutionnel en a conclu que « l’article 28 quater A a donc été supprimé selon une procédure contraire à la Constitution ». Habituellement, le Conseil constitutionnel sanctionne les irrégularités de procédure au regard de l’article 45 de la Constitution en censurant la disposition qui en a résulté. En l’espèce, une telle solution était impossible, puisque c’est justement la suppression d’un article adopté conforme en première lecture qui était en cause.

Cette circonstance a conduit le Conseil à préciser le cadre de son contrôle. Après avoir rappelé l’exigence qui s’attache au respect de la clarté et de la sincérité des débats parlementaires13, il a affirmé, ce qui semble inédit dans sa jurisprudence : « Le Conseil constitutionnel ne tient pas des articles 61 et 62 de la Constitution le pouvoir de rétablir un article irrégulièrement supprimé au cours des débats parlementaires. Il lui revient, en revanche, de s’assurer que l’irrégularité constatée n’a pas rendu la procédure législative contraire à la Constitution »14.

Il faut souligner, même si c’est peu fréquent, que le Conseil constitutionnel a déjà censuré dans son intégralité une loi pour un motif d’irrégularité procédurale. Ce fut le cas, notamment en raison du non-respect des règles de priorité d’examen entre la première partie de la loi de finances et la seconde15 ; ou encore en raison de l’adoption définitive d’une loi organique relative à l’inéligibilité du médiateur des enfants, alors que le projet de loi ordinaire auquel elle était associée n’était toujours pas définitivement adopté et que les modifications susceptibles d’y être apportées pouvaient avoir un impact sur le texte organique16 ; ainsi qu’en raison du non-respect de la règle de priorité d’examen, par le Sénat, des projets de loi ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales17 ; ou enfin, en raison du non-respect de la règle posée par l’article 42 de la Constitution selon laquelle, « La discussion des projets et des propositions de loi porte, en séance, sur le texte adopté par la commission saisie en application de l’article 43 ou, à défaut, sur le texte dont l’assemblée a été saisie », le Sénat ayant, en séance publique, examiné le projet de loi dans sa version transmise par l’Assemblée nationale, alors que la commission avait adopté un texte modifié18.

Il apparaît, à la lecture de la décision, que le Conseil constitutionnel s’est réservé la possibilité de censurer, dans son intégralité ou pour partie, une loi dont une disposition aurait été irrégulièrement supprimée. Cependant, ainsi que les commentaires aux Cahiers le soulignent, une telle censure supposerait qu’il résulte de l’irrégularité constatée une méconnaissance de l’exigence constitutionnelle de clarté et de sincérité des débats parlementaires affectant, soit une partie des dispositions votées, par exemple le chapitre au sein duquel figurait l’article en cause, soit la loi dans son intégralité.

Par une formule quelque peu surprenante, le Conseil constitutionnel juge que, en l’espèce, « pour regrettable qu’elle soit, [la suppression irrégulière de l’article 28 quater A] n’a pas eu pour effet de porter une atteinte inconstitutionnelle aux exigences de clarté et de sincérité des débats parlementaires », le Conseil constitutionnel a donc écarté le grief des requérants19. Cela signifie donc que, dans d’autres cas, ce caractère regrettable pourrait conduire, selon les circonstances, à une censure. Il lui restera alors à dessiner les contours jurisprudentiels de la censure en la matière. Les bases jurisprudentielles nouvelles de cette notion inédite d’entonnoir à rebours devront donc être précisées. Le Conseil constitutionnel apporte une autre nouveauté, dans cette décision du 26 janvier 2017, au regard du champ de l’autorisation parlementaire donnée au gouvernement d’adopter des ordonnances.

II – La censure de l’imprécision de l’autorisation donnée par le Parlement au gouvernement pour adopter des ordonnances

Rappelons qu’aux termes du premier alinéa de l’article 38 de la Constitution : « Le gouvernement peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ». Cette disposition fait obligation au gouvernement d’indiquer avec précision au Parlement, afin de justifier la demande qu’il présente, la finalité des mesures qu’il se propose de prendre par voie d’ordonnances ainsi que leur domaine d’intervention.

En l’occurrence, le Parlement avait habilité le gouvernement à remplacer les régimes déclaratifs par un régime d’autorisation d’ouverture d’un établissement privé d’enseignement scolaire. Si le Conseil constitutionnel estime que le législateur a précisément défini le domaine d’intervention des mesures qu’il autorise le gouvernement à prendre par ordonnance, il juge en revanche, que, eu égard à l’atteinte susceptible d’être portée à la liberté de l’enseignement par la mise en place d’un régime d’autorisation administrative, en confiant au gouvernement, sans autre indication, le soin de préciser « les motifs pour lesquels les autorités compétentes peuvent refuser d’autoriser l’ouverture » de tels établissements, le législateur a insuffisamment précisé les finalités des mesures susceptibles d’être prises par voie d’ordonnance20. Ainsi, l’article 39 de la loi habilitant le gouvernement à modifier, par ordonnance, la législation relative aux conditions et modalités d’ouverture des établissements privés d’enseignement scolaire est censuré. Le contexte était plus précisément le suivant. L’article 39, issu d’un amendement adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, visait à habiliter le gouvernement, sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, à prendre, par ordonnance, les mesures nécessaires pour remplacer le régime actuel de déclaration, auprès de l’Administration, d’ouverture des établissements privés d’enseignement, par un régime d’autorisation préalable, à préciser les motifs de refus d’ouverture, à fixer les dispositions régissant les fonctions de direction et d’enseignement dans ces établissements et à renforcer la liberté d’enseignement dont ils bénéficient une fois ouverts.

Il faut rappeler que l’ouverture d’un établissement privé d’enseignement scolaire relève, depuis les lois Goblet du 30 octobre 1886, Falloux du 15 mars 1850 et Astier du 25 juillet 1919, d’un régime déclaratif, dans lequel l’Administration a la possibilité de s’opposer à l’ouverture. À défaut, l’établissement est ouvert de manière régulière.

Ce régime déclaratif se décline en trois procédures distinctes, en fonction de la nature de l’enseignement dispensé par l’établissement (premier degré, second degré général ou second degré technique), codifiées aux articles L. 441-1 et suivants du Code de l’éducation.

Ces procédures font intervenir, à chaque fois de manière différente, le maire, l’autorité académique, le préfet ainsi que le procureur de la République. Ceux-ci peuvent s’opposer à l’ouverture de l’établissement pour des motifs liés aux bonnes mœurs, à l’hygiène et, pour le seul enseignement technique, pour des considérations d’ordre public et liées à la nature de l’enseignement dispensé. Le délai d’opposition est d’un mois, sauf pour l’enseignement technique, où il est de deux mois.

L’opposition formée par l’autorité compétente est communiquée au déclarant et peut faire l’objet d’un recours devant le juge administratif. Si l’établissement fonctionne en dépit de l’opposition de l’Administration, le déclarant commet un délit.

Par exception, en Alsace et dans le département de la Moselle, un régime d’autorisation préalable instauré par une loi allemande du 12 février 1873 est maintenu en application par l’article L. 481-1 du Code de l’éducation. Des régimes différents s’appliquent dans les îles Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et à Saint-Pierre-et-Miquelon21. Les requérants estimaient que la substitution d’un régime d’autorisation préalable au régime déclaratif en vigueur portait une atteinte disproportionnée à la liberté de l’enseignement comme à la liberté d’association. Les sénateurs ajoutaient qu’étaient aussi méconnues la liberté de conscience et la liberté d’entreprendre.

C’est dans ce contexte que le juge constitutionnel va apporter une précision, sans pour autant remettre en cause sa jurisprudence constante selon laquelle il n’incombe pas au gouvernement de faire connaître au Parlement la teneur des ordonnances qu’il prendra en vertu de cette habilitation22. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 26 janvier 2017, apporte un contrôle inédit de l’usage des ordonnances.

Il rappelle en premier lieu, qu’il appartient en principe au Conseil constitutionnel, saisi de dispositions habilitant le gouvernement à prendre par ordonnance des mesures du domaine de la loi, de veiller à ce que celles-ci ne soient « ni par elles-mêmes, ni par les conséquences qui en découlent nécessairement, contraires aux règles et principes de valeur constitutionnelle »23. Il rappelle encore sa formulation de principe relative à la liberté de l’enseignement, qui « constitue l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, réaffirmés par le Préambule de la Constitution de 1946 auxquels se réfère le Préambule de la Constitution de 1958 »24.

Admettant que le législateur avait défini avec suffisamment de précision le domaine d’intervention des mesures susceptibles d’être prises par ordonnance, dès lors qu’il avait indiqué qu’il s’agissait de remplacer un régime déclaratif par un régime d’autorisation d’ouverture des établissements privés d’enseignement25, il a cependant jugé que « le législateur a insuffisamment précisé les finalités des mesures susceptibles d’être prises par voie d’ordonnance (…) eu égard à l’atteinte susceptible d’être portée à la liberté de l’enseignement par la mise en place d’un régime d’autorisation administrative, en confiant au gouvernement, sans autre indication, le soin de préciser “les motifs pour lesquels les autorités compétentes peuvent refuser d’autoriser l’ouverture” »26.

Les raisons de cette censure tiennent à ce que l’habilitation conférée ne permettait pas de connaître les lignes directrices des mesures susceptibles d’être prises par ordonnance. Or si le gouvernement peut demander à agir par ordonnance et si le législateur peut lui accorder son habilitation, cet accord doit être « éclairé », notamment lorsqu’une liberté constitutionnelle comme la liberté de l’enseignement est en jeu. Alors que la liberté d’enseignement était en jeu, l’habilitation rendait ainsi pratiquement impossible au Conseil constitutionnel de s’assurer que les mesures envisagées, par elles-mêmes ou par les conséquences qui en découlent nécessairement, étaient conformes à la Constitution27.

III – L’essentiel des dispositions validé sur le fond

A – Le renforcement de l’objectif de mixité sociale jugé conforme à la Constitution

L’essentiel est jugé conforme à la Constitution, dans un souci de conciliation des mesures sociales avec le principe de libre administration des collectivités territoriales28.

Les articles 97 à 100 de la loi déférée, aménagent les règles imposant à certaines communes de disposer, sur leur territoire, d’un nombre minimal de logements locatifs sociaux (selon les cas, 20 % ou 25 % des résidences principales).

La question centrale soulevée par les requérants tenait à la conformité de ces nouvelles dispositions aux principes constitutionnels inhérents à la libre administration des collectivités territoriales. Depuis la loi dite SRU du 13 décembre 200029, le Conseil constitutionnel a été amené à apporter des précisions30 sur les contours du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales. Il a ainsi jugé que « si le législateur peut, sur le fondement des articles 34 et 72 de la Constitution, assujettir les collectivités territoriales ou leurs groupements, à des obligations et à des charges, c’est à la condition que celles-ci répondent à des exigences constitutionnelles ou concourent à des fins d’intérêt général, qu’elles ne méconnaissent pas la compétence propre des collectivités concernées, qu’elles n’entravent pas leur libre administration et qu’elles soient définies de façon suffisamment précise quant à leur objet et à leur portée »31.

Si les dispositions issues de la loi SRU poursuivent un objectif de mixité sociale et d’accroissement de la production de logements locatifs sociaux dans les communes qui connaissent un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements32, le juge doit veiller à ce que les obligations et charges qui en résultent pour les communes, n’entravent pas leur libre administration. Ainsi, le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de censurer un dispositif de prélèvement sur les ressources fiscales des communes, en raison de son caractère automatique et forfaitaire33.

Dans la décision du 26 janvier 2017, le juge constitutionnel valide l’essentiel du dispositif, en jugeant que les nouvelles règles issues des articles 97, 98 et 99 de la loi déférée se concilient avec le principe de libre administration34. Sans porter atteinte à la philosophie générale du dispositif SRU, ces articles apportent des aménagements aux différentes modalités d’application : les critères en vertu desquels les communes sont soumises aux obligations de réalisation de logements sociaux (art. 97) ; la procédure de carence applicable en cas de non-respect par les communes de leurs engagements triennaux (art. 98) ; le prélèvement annuel sur les ressources fiscales des communes n’ayant pas atteint le taux de 20 % ou 25 % de logements sociaux (art. 99).

La conciliation a néanmoins ses limites et a conduit le Conseil constitutionnel à censurer une mesure jugée attentatoire au principe de libre administration des collectivités. En effet, le paragraphe I de l’article 100 de la loi déférée, qui supprimait la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) pour les communes faisant l’objet de la procédure de carence, avait des conséquences plus importantes sur leurs ressources et, partant, sur leur libre administration.

En effet, ces dispositions faisaient perdre le bénéfice de la DSU à toute commune faisant l’objet d’un arrêté de carence, quel que soit l’écart entre le niveau de logements locatifs sociaux existants dans la commune et les objectifs auxquels elle est tenue.

Elles avaient également pour effet de priver les communes en cause de la possible exonération de prélèvement sur leurs ressources fiscales, prévue à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 302-7 du Code de la construction et de l’habitation – alors même que cette exonération, spécifique aux communes percevant la DSU, était modifiée par l’article 99 de la loi déférée.

Enfin, à la différence du prélèvement sur les ressources fiscales déjà en vigueur (et augmenté par l’article 99), la perte de ressources qui résultait des dispositions contestées ne faisait l’objet d’aucun plafonnement. Or, dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à la loi SRU, un tel plafonnement est l’une des garanties concourant à la préservation des ressources des communes et ainsi au respect du principe de libre administration des collectivités territoriales35.

Le Conseil constitutionnel en a conclu que, dès lors qu’elles s’appliquaient « à des communes confrontées à une insuffisance de ressources et supportant des charges élevées »36, les dispositions du paragraphe I de l’article 100 aboutissaient « à priver certaines d’entre elles d’une part substantielle de leurs recettes de fonctionnement » (§ 68). Dans ses observations, le gouvernement indiquait d’ailleurs que la DSU pouvait représenter « entre 0,2 % et 5 % des recettes réelles de fonctionnement des communes éligibles ».

Le Conseil constitutionnel a donc censuré le paragraphe I de l’article 10037, dont les dispositions restreignaient les ressources de ces communes « au point d’entraver leur libre administration et ainsi de méconnaître l’article 72 de la Constitution »38.

La tenue d’un répertoire des logements locatifs sociaux et de leurs habitants est, quant à elle, jugée conforme au respect de la vie privée39. Le contexte est le suivant. L’article L. 411-10 du Code de la construction et de l’habitation prévoit que le ministère chargé du Logement tient un répertoire des logements locatifs sociaux et de leurs habitants, pour permettre l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques de l’habitat. Le c du 1° du paragraphe I de l’article 78 de la loi déférée complète cet article L. 411-10. Il prévoit que, pour alimenter ce répertoire, les bailleurs sociaux transmettent au ministère chargé du Logement le numéro d’immatriculation au répertoire national d’identification des personnes physiques de chaque occupant majeur d’un logement locatif social. Les sénateurs requérants soutiennent que ces dispositions portent une atteinte injustifiée au droit au respect de la vie privée des occupants de logements sociaux. La liberté proclamée par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 implique le droit au respect de la vie privée. Par suite, la collecte, l’enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d’intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu que le ministère chargé du Logement soit en mesure d’établir une cartographie de l’occupation socio-économique du parc de logements sociaux, afin d’améliorer la mise en œuvre de la politique en matière d’attribution de ces logements. Il a ainsi poursuivi un objectif d’intérêt général. Si les collectivités territoriales et certains de leurs établissements publics peuvent obtenir du représentant de l’État dans la région les informations relatives aux logements situés sur leur territoire contenues dans le répertoire, c’est en vertu du huitième alinéa de l’article L. 411-10, à la condition que ces informations aient été préalablement rendues anonymes.

Le juge constitutionnel précise que par ailleurs, le législateur a prévu au 4° du paragraphe I de l’article 78 que l’exploitation des données du répertoire par le groupement d’intérêt public mentionné à l’article L. 441-2-1 du Code de la construction et de l’habitation est réalisée de manière à rendre impossible l’identification des intéressés. Il en résulte que le législateur a retenu des modalités de collecte, d’enregistrement, de conservation, et de communication du numéro d’immatriculation au répertoire national d’identification des personnes physiques adéquates et proportionnées à l’objectif poursuivi. Par conséquent, le Conseil constitutionnel juge que le grief tiré de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée doit être écarté40.

Dans cette loi hétérogène, outre des dispositions relatives à la mixité sociale, des changements de vocabulaire sont introduits. Si des doutes avaient pu être émis sur leur lisibilité, l’adoption des termes d’identité de genre a été validée par le juge constitutionnel.

B – La notion juridique d’identité de genre validée par le Conseil constitutionnel

Plusieurs articles de la loi déférée substituent dans différents textes les mots « identité de genre » aux mots « identité sexuelle ». Il en est ainsi de l’article 170 de la loi modifiant les articles 24, 32 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, afin de réprimer de manière aggravée la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence, la diffamation et l’injure publiques lorsque ces infractions sont commises à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur « identité de genre ». L’article 207 se bornait à mettre à jour d’autres dispositions en conformité avec la nouvelle dénomination. Enfin, l’article 171 modifiait le Code pénal afin de prévoir que le fait d’accompagner, de faire suivre ou précéder un crime ou un délit de tout acte de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération de la victime à raison notamment de son identité de genre, constitue une circonstance aggravante de ce crime ou de ce délit. Il en est de même lorsque l’infraction a été commise contre la victime pour cette raison.

Les requérants soutenaient que ces articles contrevenaient au principe de légalité des délits et des peines, dans la mesure où la notion d’identité de genre ferait l’objet de controverses et serait imprécise.

Il faut noter que ces modifications ont été inspirées par des propos du Défenseur des droits et introduites par l’Assemble nationale, ainsi que l’exprimait le rapporteur : « Un amendement des rapporteurs a également traduit une préoccupation exprimée par le Défenseur des droits à l’occasion de son audition par la commission spéciale dans la perspective de l’étude du projet de loi. Les textes relatifs à la lutte contre les discriminations répriment les atteintes fondées sur “l’orientation ou identité sexuelle des personnes”. D’une part, ces deux critères sont distincts l’un de l’autre, et la mise en commun de l’adjectif qualificatif, bien que grammaticalement correcte, n’est pas très heureuse. D’autre part et surtout, on sait aujourd’hui que “identité sexuelle” ne signifie pas grand-chose et que la construction sociale des individus est plus heureusement reflétée par l’expression “identité de genre”. La commission a donc dissocié l’orientation sexuelle et l’identité de genre comme critères autonomes constitutifs d’une circonstance aggravante dans la commission d’une infraction pénale »41. Cet amendement reprend les préconisations formulées par le Défenseur des droits lors de son audition. Il a indiqué qu’il convenait de distinguer l’orientation sexuelle de l’identité sexuelle : l’orientation sexuelle correspond à la capacité de chacun à ressentir une profonde attirance émotionnelle, affective et sexuelle envers une autre personne, qu’elle soit de même sexe ou de sexe différent, tandis que l’identité sexuelle vise l’expérience intime et personnelle de son genre, profondément vécue par chacun, qu’elle corresponde ou non au sexe assigné à la naissance. Par ailleurs, il a souligné qu’il était préférable de remplacer les termes d’« identité sexuelle » par ceux d’« identité de genre »42.

Ericka Bareigts, secrétaire d’État chargée de l’Égalité réelle, a déclaré : « Enfin, les circonstances aggravantes que sont le racisme, l’homophobie et la transphobie seront généralisées à l’ensemble des infractions prévues par le Code pénal. Je salue à ce titre l’amendement qui introduit la notion d’identité de genre en lieu et place de l’identité de sexe, pour qu’aucune ambiguïté ne soit possible entre l’homosexualité et le transsexualisme »43.

Or le sujet est sensible, les termes ne sont pas neutres et la lisibilité du droit est particulièrement nécessaire dans ce domaine. « Lors des débats parlementaires, la notion d’identité de genre avait été rejetée par le gouvernement en raison de son imprécision juridique et en conséquence d’un risque d’interprétations divergentes selon les juridictions.

“Votre commission spéciale estime inopportune l’adoption de dispositions pénales simplement interprétatives et non normatives. En l’espèce, cet ajout d’un nouveau terme ne crée aucune protection juridique supplémentaire par rapport au droit existant.

Sans nier la dimension sociologique d’une évolution du langage juridique, les termes de la loi, en particulier du droit pénal, se doivent d’être précis et de ne soulever aucune ambigüité, la loi pénale étant d’interprétation stricte.

Or, comme le relevait le rapporteur de la commission des lois, notre collègue Alain Anziani, lors des débats parlementaires sur le projet de loi relatif au harcèlement sexuel, l’introduction d’un nouveau motif est susceptible d’une interprétation a contrario par les juridictions” »44.

Si ce vocabulaire fait son entrée dans cette loi, il n’est pas inconnu des réflexions en droit ni du droit international. Dans le domaine des sciences sociales, le genre est la traduction imparfaite du gender anglais, les gender studies ayant pour objet d’interroger, voire de remettre en cause les différences des sexes et leurs rôles respectifs. Ces études ont pour objet les frontières, parfois nettes et parfois brouillées, entre le masculin et le féminin. Dans le cadre de ces études sont examinées la transidentité, la transsexualité ou encore l’intersexualité.

Dans le domaine du droit, la notion de genre existait également avant son introduction dans la loi examinée par le Conseil constitutionnel45.

En droit international, la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (convention d’Istanbul), adoptée et signée par la France le 11 mai 2011, comporte le terme « genre ».

L’article 3 qui contient les définitions prévoit ainsi à son c que « le terme “genre” désigne les rôles, les comportements, les activités et les attributions socialement construits, qu’une société donnée considère comme appropriés pour les femmes et les hommes ».

Cette convention a été ratifiée le 4 juillet 201446.

Cette notion figure également dans la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection.

En droit interne, la notion de genre est encore peu utilisée. Elle est présente à l’article 225-1 du Code pénal, depuis l’intervention de l’article 86 de la loi n° 2016-1547 relative à la justice du XXIe siècle. La commission générale de terminologie et de néologie avait recommandé en 2005 de s’en tenir aux termes « sexe », « sexiste » ou « sexuel », selon les termes suivants : « L’utilisation croissante du mot genre dans les médias et même les documents administratifs, lorsqu’il est question de l’égalité entre les hommes et les femmes, appelle une mise au point sur le plan terminologique.

On constate en effet, notamment dans les ouvrages et articles de sociologie, un usage abusif du mot genre, emprunté à l’anglais gender, utilisé notamment en composition dans des expressions telles gender awareness, gender bias, gender disparities, gender studies…, toutes notions relatives à l’analyse des comportements sexistes et à la promotion du droit des femmes. Le sens en est très large, et selon l’Unesco, « se réfère aux différences et aux relations sociales entre les hommes et les femmes » et « comprend toujours la dynamique de l’appartenance ethnique et de la classe sociale ». Il semble délicat de vouloir englober en un seul terme des notions aussi vastes.

En anglais, l’emploi de gender dans ces expressions constitue un néologisme et correspond à une extension de sens du mot qui signifie genre grammatical. De plus, ce terme est souvent employé pour désigner exclusivement les femmes ou fait référence à une distinction selon le seul sexe biologique.

Or, en français, le mot sexe et ses dérivés sexiste et sexuel s’avèrent parfaitement adaptés dans la plupart des cas pour exprimer la différence entre hommes et femmes, y compris dans sa dimension culturelle, avec les implications économiques, sociales et politiques que cela suppose.

La substitution de genre à sexe ne répond donc pas à un besoin linguistique et l’extension de sens du mot genre ne se justifie pas en français. Dans cette acception particulière, des expressions utilisant les mots genre et a fortiori l’adjectif genré, ou encore le terme sexospécificité, sont à déconseiller.

Toutefois, pour rendre la construction adjective du mot gender, fréquente en anglais, on pourra préférer, suivant le contexte, des locutions telles que hommes et femmes, masculin et féminin ; ainsi on traduira gender equality par égalité entre hommes et femmes, ou encore égalité entre les sexes.

La Commission générale de terminologie et de néologie recommande, plutôt que de retenir une formulation unique, souvent peu intelligible, d’apporter des solutions au cas par cas, en privilégiant la clarté et la précision et en faisant appel aux ressources lexicales existantes »47.

La notion de « genre » n’est enfin pas totalement absente de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

En outre, dans sa décision du 12 janvier 200248, le Conseil constitutionnel avait ainsi jugé :

« 113. Considérant qu’aux termes de l’article 134, la composition du jury “concourt à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes” ; que, de même, aux termes de l’article 137 : “les jurys sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes” ».

En l’espèce, le Conseil constitutionnel a validé ces formulations en raisonnant de la manière suivante. Il a relevé, d’une part, que les modifications contestées s’ajoutent à l’interdiction des discriminations liées au sexe et à l’orientation sexuelle. La notion de genre est donc distincte de ces deux notions49.

D’autre part, il a jugé qu’« il résulte des travaux parlementaires qu’en ayant recours à la notion d’identité de genre, le législateur a entendu viser le genre auquel s’identifie une personne, qu’il corresponde ou non au sexe indiqué sur les registres de l’état civil ou aux différentes expressions de l’appartenance au sexe masculin ou au sexe féminin »50.

Enfin, comme il avait déjà pu le faire pour conclure au caractère clair et précis de certains termes, notamment lorsqu’il a été saisi de la notion de « bande organisée », il a constaté que les termes « identité de genre » figuraient déjà dans divers textes51.

Il en a conclu que les termes « identité de genre » utilisés par le législateur sont suffisamment clairs et précis pour respecter le principe de légalité des délits et des peines.

IV – La pénalisation accrue de toute forme de négationnisme soulevée d’office

Le Conseil constitutionnel a examiné d’office le dernier alinéa du 2° de l’article 173 de la loi déférée, lequel 2° modifiait l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse pour ajouter, après son premier alinéa, les trois alinéas suivants :

« Seront punis des mêmes peines ceux qui auront nié, minoré ou banalisé de façon outrancière, par un des moyens énoncés à l’article 23, l’existence d’un crime de génocide autre que ceux mentionnés au premier alinéa du présent article, d’un autre crime contre l’humanité, d’un crime de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage ou d’un crime de guerre défini aux articles 6, 7 et 8 du statut de la Cour pénale internationale signé à Rome le 18 juillet 1998 et aux articles 211-1 à 212-3, 224-1 A à 224-1 C et 461-1 à 461-31 du Code pénal, lorsque :

1° Ce crime a donné lieu à une condamnation prononcée par une juridiction française ou internationale ;

2° ou la négation, la minoration ou la banalisation de ce crime constitue une incitation à la violence ou à la haine à l’égard d’un groupe de personnes ou d’un membre d’un tel groupe défini par référence à la prétendue race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale ».

Ce dernier alinéa créait un nouveau délit de négation, de minoration ou de banalisation de tout crime contre l’humanité, crime de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage ou d’un crime de guerre, lorsque la négation, la minoration ou la banalisation de ce crime constitue une incitation à la violence ou à la haine à l’égard d’un groupe de personnes ou d’un membre d’un tel groupe défini par référence à la prétendue race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale. Il résultait par ailleurs de la lecture combinée de ce dernier alinéa et du précédent, que ce délit était constitué y compris si le crime n’avait pas donné lieu à une condamnation prononcée par une juridiction française ou internationale52.

A – La jurisprudence constitutionnelle relative à la négation de crimes

Le Conseil constitutionnel s’est déjà prononcé à deux reprises sur des dispositions réprimant la négation de crimes.

Le Conseil constitutionnel a d’abord jugé, dans sa décision n° 2012-647 DC :

« Considérant qu’une disposition législative ayant pour objet de “reconnaître” un crime de génocide ne saurait, en elle-même, être revêtue de la portée normative qui s’attache à la loi ; que, toutefois, l’article 1er de la loi déférée réprime la contestation ou la minimisation de l’existence d’un ou plusieurs crimes de génocide “reconnus comme tels par la loi française” ; qu’en réprimant ainsi la contestation de l’existence et de la qualification juridique de crimes qu’il aurait lui-même reconnus et qualifiés comme tels, le législateur a porté une atteinte inconstitutionnelle à l’exercice de la liberté d’expression et de communication ; que, dès lors, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, l’article 1er de la loi déférée doit être déclaré contraire à la Constitution ; que son article 2, qui n’en est pas séparable, doit être également déclaré contraire à la Constitution ».

Le Conseil constitutionnel a ensuite jugé, dans sa décision n° 2015-512 QPC du 8 janvier 201653 : « 5. Considérant qu’aux termes de l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 : “La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi” ; que l’article 34 de la Constitution dispose : “La loi fixe les règles concernant (…) les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques” ; que, sur ce fondement, il est loisible au législateur d’édicter des règles concernant l’exercice du droit de libre communication et de la liberté de parler, d’écrire et d’imprimer ; qu’il lui est également loisible, à ce titre, d’instituer des incriminations réprimant les abus de l’exercice de la liberté d’expression et de communication qui portent atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers ; que, cependant, la liberté d’expression et de communication est d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés ; qu’il s’ensuit que les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi ;

6. Considérant, en premier lieu, que le tribunal militaire international, dont le statut est annexé à l’accord de Londres du 8 août 1945 susvisé, a été établi “pour le jugement et le châtiment des grands criminels de guerre des pays européens de l’Axe” ; que les crimes contre l’humanité dont la contestation est réprimée par les dispositions contestées sont définis par l’article 6 du statut de ce tribunal comme “l’assassinat, l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain commis contre toutes populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux, lorsque ces actes ou persécutions, qu’ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du tribunal, ou en liaison avec ce crime” ; qu’en réprimant les propos contestant l’existence de tels crimes, le législateur a entendu sanctionner des propos qui incitent au racisme et à l’antisémitisme ;

7. Considérant que les propos contestant l’existence de faits commis durant la Seconde Guerre mondiale qualifiés de crimes contre l’humanité et sanctionnés comme tels par une juridiction française ou internationale constituent en eux-mêmes une incitation au racisme et à l’antisémitisme ; que, par suite, les dispositions contestées ont pour objet de réprimer un abus de l’exercice de la liberté d’expression et de communication qui porte atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers ;

8. Considérant, en second lieu, que les dispositions contestées, en incriminant exclusivement la contestation de l’existence de faits commis sanctionnés comme tels par une juridiction française ou internationale, visent à lutter contre certaines manifestations particulièrement graves d’antisémitisme et de haine raciale ; que seule la négation, implicite ou explicite, ou la minoration outrancière de ces crimes est prohibée ; que les dispositions contestées n’ont ni pour objet ni pour effet d’interdire les débats historiques ; qu’ainsi, l’atteinte à l’exercice de la liberté d’expression qui en résulte est nécessaire, adaptée et proportionnée à l’objectif poursuivi par le législateur ; que, par suite, le grief tiré de l’atteinte à cette liberté et à la liberté d’opinion doit être écarté ;

Sur le grief tiré de l’atteinte au principe d’égalité devant la loi pénale :

9. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de la Déclaration de 1789, la loi “doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse” ; que le principe d’égalité devant la loi pénale ne fait pas obstacle à ce qu’une différenciation soit opérée par le législateur entre agissements de nature différente ;

10. Considérant que, d’une part, la négation de faits qualifiés de crime contre l’humanité par une décision d’une juridiction française ou internationale reconnue par la France se différencie de la négation de faits qualifiés de crime contre l’humanité par une juridiction autre ou par la loi ; que, d’autre part, la négation des crimes contre l’humanité commis durant la Seconde Guerre mondiale, en partie sur le territoire national, a par elle-même une portée raciste et antisémite ; que, par suite, en réprimant pénalement la seule contestation des crimes contre l’humanité commis soit par les membres d’une organisation déclarée criminelle en application de l’article 9 du statut du tribunal militaire international de Nuremberg, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale, le législateur a traité différemment des agissements de nature différente ; que cette différence de traitement est en rapport avec l’objet de la loi du 13 juillet 1990 susvisée qui vise à réprimer des actes racistes, antisémites ou xénophobes ; que le grief tiré de l’atteinte au principe d’égalité devant la loi pénale doit être écarté ;

11. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les dispositions de l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution ».

C’est à l’aune de ces précédents que le juge constitutionnel a pu apprécier les dispositions nouvelles.

B – L’application des principes constitutionnels aux dispositions soulevées

Le Conseil constitutionnel a contrôlé la constitutionnalité du dernier alinéa du 2° de l’article 173 au regard de la liberté d’expression, qui constitue une liberté fondamentale « d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés » et « que les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi »54.

Il semblait probable que ces dispositions fassent l’objet d’une censure au regard de la liberté d’expression. Il appartenait donc au Conseil constitutionnel de se livrer au triple contrôle qu’il effectue habituellement55 : « les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi ».

Dans un premier temps, le Conseil constitutionnel a constaté qu’il ne pouvait être retenu que la négation d’un crime de génocide, d’un crime contre l’humanité, d’un crime de réduction en esclavage ou d’un crime de guerre constitue par principe une incitation à la haine ou à la violence à caractère raciste ou religieux. Si la négation de certains de ces crimes peut constituer une telle incitation, ce constat ne peut être généralisé. En outre, à la différence des faits d’apologie qui, par principe, valorisent des actes illicites, il n’en va pas forcément de même de la seule négation.

Contrairement à ce qu’il avait jugé dans sa QPC précitée du 8 janvier 2016, le Conseil constitutionnel a donc considéré que le législateur avait en l’espèce sanctionné des actes qui ne constituent pas nécessairement des abus de la liberté d’expression (§ 194).

Pour contourner cette difficulté, le législateur avait précisé dans les dispositions examinées que la négation, la minoration ou la banalisation de ces crimes ne pouvait être réprimée que si elle constituait « une incitation à la violence ou à la haine à l’égard d’un groupe de personnes ou d’un membre d’un tel groupe défini par référence à la prétendue race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale ».

Toutefois, cet ajout était en réalité sans portée répressive. En effet, le Conseil constitutionnel a relevé qu’« aux termes du septième alinéa de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 actuellement en vigueur, est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende le fait de provoquer à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » et que « Dès lors, les dispositions introduites par le dernier alinéa du 2° de l’article 173, qui répriment des mêmes peines des propos présentant les mêmes caractéristiques, ne sont pas nécessaires à la répression de telles incitations à la haine ou à la violence »56.

Afin de déterminer si cette disposition était nécessaire, adaptée et proportionnée à la liberté d’expression, il y avait donc lieu de l’examiner au regard de sa portée réelle, qui consistait à « imposer au juge, pour établir les éléments constitutifs de l’infraction, de se prononcer sur l’existence d’un crime dont la négation, la minoration ou la banalisation est alléguée, alors même qu’il n’est pas saisi au fond de ce crime et qu’aucune juridiction ne s’est prononcée sur les faits dénoncés comme criminels »57. Or, le Conseil constitutionnel a jugé qu’il y avait là une atteinte inconstitutionnelle à la liberté d’expression.

Or les dispositions contestées faisaient de la négation d’un crime un élément constitutif d’une infraction alors même que ce crime n’avait fait l’objet d’aucune reconnaissance judicaire préalable. La prévisibilité du délit, pour l’auteur des propos en cause, devenait dès lors délicate voire douteuse, puisqu’il ne pouvait connaître à l’avance, l’appréciation qu’en ferait le juge. En outre un risque se faisait jour, celui de conduire le juge pénal à se prononcer sur des débats historiques et à devoir juger si des faits potentiellement très anciens revêtaient une qualification pénale58. Il en résultait ainsi « une incertitude sur la licéité d’actes ou de propos portant sur des faits susceptibles de faire l’objet de débats historiques qui ne satisfait pas à l’exigence de proportionnalité qui s’impose s’agissant de l’exercice de la liberté d’expression »59. Le Conseil constitutionnel a donc censuré ces dispositions60.

Selon l’analyse présentée dans les commentaires aux Cahiers du Conseil constitutionnel, cette censure n’entraîne aucun affaiblissement de la répression des propos incitant à la haine ou à la violence qui demeurent réprimés conformément aux dispositions de l’article 24 de la loi du 29 juillet 188161. Il reste néanmoins une volonté politique de renforcer la lutte contre le négationnisme, ce qui pourra sans doute se faire à l’avenir en collant au plus près des exigences que le Conseil constitutionnel a rappelées.

En somme, ce que l’on appelle la loi fourre-tout ou loi-balai, pour signifier une loi regroupant des dispositions diverses de fin de mandat, laisse, en droit, une impression mitigée. D’un côté, l’on comprend qu’il s’agit de faire adopter des mesures auxquelles la majorité peut tenir, dans le cadre de son programme de travail. D’un autre côté, le nombre impressionnant d’articles, l’extrême variété des dispositions – qui n’auront pas empêché le juge constitutionnel de censurer ce qui lui apparaissait par trop éloigné du thème de la loi, dont la plasticité de l’intitulé « Égalité et citoyenneté » pouvait néanmoins laisser espérer à leur auteur une certaine souplesse –, ne convainc pas de la lisibilité d’une telle loi. Le juge constitutionnel semble ainsi avoir élagué ce qui était par trop lointain, précisé plusieurs exigences de procédures, et enfin recadré une série de dispositifs. La lisibilité du droit a, à n’en pas douter, encore du chemin à parcourir.

Notes de bas de pages

  • 1.
    http://www.lemonde.fr/politique/article/2017/01/26/fessee-ecole-hors-contrat-hlm-le-conseil-constitutionnel-censure-des-dispositions-du-texte-egalite-et-citoyennete_5069736_823448.html#bip7oVWXUMv8Qstw.99.
  • 2.
    Ils contestaient son article 39, certaines dispositions de son article 98 et ses articles 100 et 217. Les sénateurs requérants critiquaient également la procédure d’adoption de cette loi, ses articles 33 et 45, certaines dispositions de son article 52, ses articles 55, 58, 59, 60 et 64, certaines dispositions de ses articles 67 et 78, ses articles 80 et 91, certaines dispositions de ses articles 102, 104, 117, 121 et 122, ses articles 128 et 129, certaines dispositions de ses articles 149, 152, 162, 170 et 171, ses articles 174, 176, 177, 179, 186, 187, 190, 191 et 192, certaines dispositions de son article 204, ses articles 207, 222 et 223. Les députés requérants critiquaient aussi certaines dispositions de ses articles 67, 70, 97 et 99.
  • 3.
    Cons. const., 26 janv. 2017, n° 2016-745 DC.
  • 4.
    Ce que l’on a coutume d’appeler un « neutron législatif ».
  • 5.
    Le Conseil constitutionnel a censuré trente-six articles qui avaient été introduits par amendement en première lecture sans présenter de lien, même indirect, avec le projet de loi initial (« cavaliers ») : sept étaient contestés à ce titre par les requérants (articles 64, 80 et 91, paragraphe XIV de l’article 117 et articles 191, 192 et 222) et vingt-neuf ont été soulevés d’office par le Conseil (articles 11, 13, 14, 15, 16, 31, 42, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 69, 110, 112, 119, 126, 145, 163, 169, 203, 204, 209, 210 et 220). Le Conseil a également censuré sept dispositions introduites en nouvelle lecture en violation de la règle dite de l’« entonnoir », toutes contestées à ce titre par les requérants : le paragraphe I de l’article 67, le paragraphe II de l’article 100, le paragraphe III de l’article 104, le paragraphe II de l’article 121, le 1° du paragraphe I de l’article 122, l’article 128 et les paragraphes V à VII de l’article 152. V. le commentaire aux Cahiers du Conseil constitutionnel.
  • 6.
    V. le commentaire aux Cahiers sur la décision ici commentée.
  • 7.
    V. récemment, Cons. const., 29 déc. 2016, n° 2016-744 DC, Loi de finances pour 2017, pt. 69.
  • 8.
    Expression employée dans les commentaires aux Cahiers du Conseil constitutionnel sur la décision ici commentée.
  • 9.
    Pt. 7.
  • 10.
    Idem.
  • 11.
    Emmanuelle Cosse, ministre du Logement et de l’Habitat durable : JOAN, 24 nov. 2016, p. 7825. Cités dans le commentaire aux Cahiers.
  • 12.
    Pt. 7.
  • 13.
    Pt. 4.
  • 14.
    Pt. 5.
  • 15.
    Cons. const., 24 déc. 1979, n° 79-110 DC, Loi de finances pour 1980.
  • 16.
    Cons. const., 16 déc. 1999, n° 99-420 DC, loi organique relative à l’inéligibilité du Médiateur des enfants.
  • 17.
    Cons. const., 23 juin 2011, n° 2011-632 DC, loi fixant le nombre des conseillers territoriaux de chaque département et de chaque région.
  • 18.
    Cons. const., 24 oct. 2012, n° 2012-655 DC, loi relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social.
  • 19.
    Pt. 8.
  • 20.
    Pt. 1 de la décision ici commentée.
  • 21.
    Précisions apportées dans le commentaire aux Cahiers, préc.
  • 22.
    Pour un exemple récent, V. Cons. const., 17 nov. 2016, n° 2016-739 DC, pt. 92.
  • 23.
    Cons. const., 22 juill. 2005, n° 2005-521 DC, loi habilitant le gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures d’urgence pour l’emploi, cons. 11.
  • 24.
    Rappelé au point 11 de la décision ici commentée. V. par exemple, Cons. const., 14 nov. 2014, n° 2014-425 QPC, Société Mutuelle Saint-Christophe (taxe spéciale sur les contrats d’assurance contre l’incendie).
  • 25.
    Pt. 13.
  • 26.
    Idem.
  • 27.
    Analyse que propose le commentaire aux Cahiers, préc.
  • 28.
    Pts. 21, 40, 51 et 60 de la décision ici commentée.
  • 29.
    Loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
  • 30.
    Cons. const., 7 déc. 2000, n° 2000-436 DC, loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains ; Cons. const., 6 déc. 2001, n° 2001-452 DC, loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier ; Cons. const., 17 janv. 2013, n° 2012-660 DC, loi relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social et Cons. const., 26 avr. 2013, n° 2013-309 QPC, SARL SCMC, (exercice par le préfet du droit de préemption des communes ayant méconnu leurs engagements de réalisation de logements sociaux).
  • 31.
    Cons. const., 7 déc. 2000, n° 2000-436 DC, préc., cons. 12.
  • 32.
    Cons. const., 17 janv. 2013, n° 2012-660 DC.
  • 33.
    Cons. const., 7 déc. 2000, n° 2000-436 DC, cons. 47.
  • 34.
    Pts. 31 à 60.
  • 35.
    V. les Cons. const., 6 déc. 2001, n° 2001-452 DC et Cons. const., 17 janv. 2013, n° 2012-660 DC mais aussi dans la décision ici commentée lors du contrôle de l’article 99, pt. 58.
  • 36.
    Par définition même de la DSU, qui selon l’article L. 2334-15 du Code général des collectivités territoriales, a pour objet « de contribuer à l’amélioration des conditions de vie dans les communes urbaines confrontées à une insuffisance de leurs ressources et supportant des charges élevées », in commentaires aux Cahiers préc.
  • 37.
    Ainsi que le paragraphe III, qui en était indissociable. Le paragraphe II a, quant à lui, été censuré pour violation de la règle dite de « l’entonnoir ». L’article 100 a donc été déclaré inconstitutionnel dans sa totalité.
  • 38.
    Pt. 68.
  • 39.
    Pt. 30 de la décision ici commentée.
  • 40.
    Pts 24 à 29, décision ici commentée.
  • 41.
    Rapp. n° 3851 (Assemblée nationale – XIVe législature) de Razzy Hammadi fait au nom de la commission spéciale, chargée d’examiner, après engagement de la procédure accélérée, le projet de loi Égalité et citoyenneté.
  • 42.
    La question a déjà été abordée en 2013, http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/laurence-neuer/l-identite-de-genre-pourrait-bientot-remplacer-l-identite-sexuelle-05-07-2013-1700951_56.php : L’identité de genre est bien présente dans les textes internationaux. C’est « l’expression intime et personnelle de son genre profondément vécue par chacun », précisent les Principes de Jogjakarta, publiés en 2007, qui formalisent les droits de l’Homme en matière d’orientation sexuelle et d’identité de genre. Ainsi, l’identité de genre est déconnectée du sexe assigné à la naissance, voire réassigné par un traitement chirurgical dans le cas des transsexuels. Même si de nombreuses personnes « transgenres » n’ont subi aucun traitement hormonal ou chirurgical de réassignation de sexe, il n’en demeure pas moins que leur « identité de genre » ne correspond pas à leur sexe biologique. « La transidentité est davantage une question d’identité, et non de sexualité », souligne la CNCDH. Concrètement, « une telle réforme aboutit à remplacer dans le Code pénal “l’identité sexuelle par l’identité de genre” pour qualifier la circonstance aggravante de certains délits (violences, injures…) et lutter contre les discriminations dont sont victimes les personnes transsexuelles et transgenres », explique l’avocate Sabrina Goldman, rapporteur de l’avis de la CNCDH. Le Conseil de l’Europe a d’ailleurs invité les États membres à « interdire expressément la discrimination fondée sur l’identité de genre dans leurs législations anti-discrimination ». « La France doit être en cohérence avec les textes internationaux et européens afin de réprimer utilement de telles discriminations », ajoute l’avocate. Parmi les discriminations visant les personnes transidentitaires en France : le processus de changement de sexe à l’état civil. « La situation des personnes trans souhaitant obtenir une modification de leur état civil est particulièrement précaire et difficile », note le rapport de la CNCDH. Pour justifier une demande de rectification de la mention du sexe figurant dans un acte de naissance, deux conditions sont en effet nécessaires selon la Cour de cassation : le diagnostic du transsexualisme et l’irréversibilité de la transformation de l’apparence physique.
  • 43.
    Débats relatés dans les commentaires aux Cahiers.
  • 44.
    Rapp. n° 827 (Sénat – 2015-2016) de Dominique Estrosi Sassone et Françoise Gatel, fait au nom de la commission spéciale, déposé le 14 septembre 2016.
  • 45.
    Commentaires préc.
  • 46.
    Loi n° 2014-476 du 14 mai 2014 autorisant la ratification de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique : JO n° 0112, 15 mai 2014, p. 8033.
  • 47.
    Commission générale de terminologie et de néologie, Recommandation sur les équivalents français du mot « gender » : JO n° 169, 22 juill. 2005, p. 12000.
  • 48.
    Cons. const., 12 janv. 2002, n° 2001-455 DC.
  • 49.
    Pt. 89.
  • 50.
    Idem.
  • 51.
    Idem.
  • 52.
    Commentaires, préc.
  • 53.
    Cons. const., 8 janv. 2016, n° 2015-512 QPC, M. Vincent R. (Délit de contestation de l’existence de certains crimes contre l’humanité), cons. 5.
  • 54.
    Pt. 192.
  • 55.
    Commentaires aux Cahiers préc.
  • 56.
    Pt. 195.
  • 57.
    Pt. 196.
  • 58.
    Commentaires préc.
  • 59.
    Idem.
  • 60.
    La censure ne porte pas, en revanche, sur les trois premiers alinéas du 2° de l’article 173, qui répriment la négation, la minoration et la banalisation de façon outrancière d’un crime de génocide, d’un crime contre l’humanité, d’un crime de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage ou d’un crime de guerre, lorsque ce crime « a donné lieu à une condamnation prononcée par une juridiction française ou internationale ».
  • 61.
    Préc.
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