D’autres vies que la mienne
Gallimard
Comment se mettre à écrire sur la vie des autres dans un monde où l’autocentrisme, l’égoïsme – ou plutôt l’égotisme – règnent ?
Dans un pays où l’autofiction est une gageure, pourquoi, quand on a une plume affinée, préfère-t-on écrire sur les autres que sur soi ? Telle pourrait être la question à laquelle tente de répondre Dominique Bona, dans Mes vies secrètes, paru aux éditions Gallimard.
L’académicienne revient en effet sur son parcours d’écrivain et de biographe. Mais loin de ressembler à une autobiographie, elle nous raconte dans une vingtaine de chapitres les rencontres qui ont émaillé sa vie personnelle et sa vie d’écrivain.
Car tout est imbriqué dans son parcours, on découvre comment une rencontre en amènera une autre, les liens qui unissaient certains des personnages qu’elle a choisi de conter et qui, quelques années plus tard, la conduiront sur un autre chemin avec un autre personnage à raconter…
La plume est belle, sensible, sans sensationnalisme mais avec une justesse de ton qui fait des biographies de Dominique Bona une référence en la matière, le style en plus.
Un style humble qui laisse la place à ces personnages historiques mais qui sous couvert de la biographie en dit tout autant sur son auteur.
On aime cette sensation de hasard, qui parcourt ses rencontres fortuites qui l’amènent de Romain Gary à Berthe Morisot, de Gala Dali à Stefan Zweig.
Comment naît une idée de biographie ou de roman, l’angle par lequel elle attaque un personnage historique, ce qu’elle est prête à faire ou ne pas faire pour en savoir plus sur ces personnages.
Un parcours parfois simple, mais le plus souvent semé d’embûches, d’espoirs et de désillusions, émaillés par de belles rencontres, voilà le portrait que Dominique Bona fait d’elle, de sa façon de travailler aussi.
Rien n’est vraiment laissé au hasard, même si elle suit ses intuitions et se laisse parfois porter par les héros de ses livres, elle reste maître en son royaume, et quel royaume…! Celui d’un grand siècle disparu mais qu’elle sait si bien faire revivre.
Voilà pourquoi elle préfère, plutôt que se raconter, raconter la vie des autres.
À remettre dans les mains de tous les amoureux de la littérature et des belles rencontres.