Michel-Ange à ses débuts

Il y a quelques semaines, le 13 mars dernier, un dessin de jeunesse de Paul Cézanne a été adjugé 26 000 € par Ivoire Reims. Cette feuille, qui avait été égarée, avait été retrouvée dans une succession. Elle a été acquise par Aix-en-Provence, la ville natale de l’artiste et sera exposée au musée Granet. Les œuvres de jeunesse des peintres font l’objet d’une traque sans relâche et leur redécouverte relève davantage du hasard. C’est à chaque fois une divine surprise, car à travers eux, on décèle – ou l’on croit deviner – les prémices du talent que nous connaissons aujourd’hui.

Aujourd’hui, il s’agit de Michel-Ange, dont un nu masculin (sans doute le premier qu’il a réalisé) survient sur le marché. Cette feuille (plume et encre brune, 33 x 20 cm), l’une des rares de l’artiste encore en main privée, sera mise en vente à Paris, le 18 mai prochain, par Sotheby’s, avec une estimation d’environ 30 M€. Cette première étude, réalisée à Florence à la fin du XVe siècle, reprend l’un des personnages du Baptême des néophytes dans une fresque de Masaccio, sur les murs de la chapelle Brancacci de l’église florentine Santa Maria del Carmine. On connaît plusieurs autres études de la main de Michel-Ange d’après Masaccio. Celles-ci sont conservées au cabinet des estampes de Munich et à l’Albertina de Vienne. La copie des maîtres anciens, on le sait, fait partie de la formation des étudiants dans tous les pays du monde. Masaccio était considéré déjà comme l’un des peintres fondateurs de la Renaissance italienne. Dans le même esprit, Michel-Ange a copié deux figures dans la fresque l’Ascension de Saint Jean l’Évangéliste, dans la chapelle Peruzzi à Santa Croce par Giotto. Ce dessin, généralement daté entre 1490 et 1492, est conservé au musée du Louvre.

Ces copies privilégient les figures individuelles importantes sur lesquelles Michel-Ange a opéré des changements mineurs. Utilisant deux encres brunes aux tonalités différentes, il a rendu la figure de Masaccio plus musclée, robuste et monumentale, à l’image de ses futures représentations du corps humain. On y décèle déjà les traits de son David géant en marbre à la Galleria dell’accademia à Florence, ou ses Deux Esclaves au Louvre.

Ce dessin, Un jeune homme nu (d’après Masaccio) entouré de deux autres figures retrouvé, avait été vendu en 1907 à l’hôtel Drouot comme une œuvre de l’école de Michel-Ange. La feuille avait échappé à l’attention de tous les spécialistes, jusqu’à sa redécouverte récente. Classée trésor national, mais non acquise par l’État, elle dispose à présent de son certificat d’exportation hors de France et pourra être proposée sans restriction aux collectionneurs du monde entier.

• Sotheby’s Paris, 76 rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris.