Le bénéfice de la garantie financière des agences de voyages

Publié le 18/07/2017

Un comité d’établissement intervenu auprès d’une agence de voyages dans l’organisation de forfaits touristiques conclus au profit des salariés de l’entreprise mais qui n’a pas agi comme simple intermédiaire ou mandataire de ces derniers doit être considéré comme un professionnel du tourisme et est, à ce titre, exclu du bénéfice de la garantie financière souscrite par l’agence.

Cass. 1re civ., 29 mars 2017, no 15-26766, PB

Il résulte de l’article L. 211-18 du Code du tourisme que les professionnels du voyage, pour pouvoir être immatriculés, sont dans l’obligation de souscrire une garantie financière au profit de leurs clients. Cette garantie, qui doit résulter d’un écrit1, peut être conclue avec un organisme de garantie collective tel que l’association professionnelle de solidarité du tourisme (APST) ou avec un établissement de crédit ou une entreprise d’assurance dès lors qu’ils sont établis sur le territoire d’un État membre de la Communauté européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’espace économique européen2. Cette garantie, qui doit être d’un montant suffisant, est spécialement affectée au remboursement des fonds reçus au titre des forfaits touristiques conclus par les clients de l’agent de voyages3. Cette garantie sera appelée, le plus souvent, à intervenir en cas de dépôt de bilan de l’organisateur de voyages pour suppléer à l’insolvabilité de ce dernier4. C’est à cette situation qu’a trait un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 29 mars 20175. En l’espèce, un comité d’établissement souscrit auprès d’une agence de voyages plusieurs forfaits touristiques au profit de salariés de l’établissement. À la suite d’une mise en liquidation judiciaire de l’agence, le comité, quoiqu’ayant déclaré sa créance pour les acomptes versés au passif, ne peut obtenir le règlement de celle-ci. Dans ces conditions, elle sollicite ce règlement de l’APST à laquelle avait adhéré l’agence incriminée. Cette demande est rejetée par la cour d’appel dont la décision est confirmée par la première chambre civile dans l’arrêt ici commenté qui considère que, le comité d’établissement n’ayant pas agi comme simple intermédiaire entre l’agent de voyages et les salariés bénéficiaires des forfaits, doit être considéré comme un professionnel du tourisme.

Un opérateur du tourisme ne peut bénéficier de la garantie financière souscrite par l’agent de voyages. Comme le relèvent plusieurs décisions rendues par le tribunal de grande instance de Paris le 16 mai 2013 cette garantie « ne peut profiter qu’aux consommateurs finaux, à l’exclusion des opérateurs touristiques ayant contracté avec le tour-opérateur défaillant »6. En fait, un tiers intervenant dans l’organisation ou la distribution d’un voyage à forfait ne pourra, le cas échéant, ne prétendre au bénéfice de la garantie financière que s’il remplit deux conditions. En premier lieu, comme le prévoit l’article R. 211-26 du Code du tourisme, il doit être le consommateur final du forfait. Cette notion de consommateur final ne doit pas être entendue trop restrictivement7, c’est pourquoi le tiers qui intervient au contrat de voyage au nom et pour le compte du voyageur doit être considéré comme un consommateur final. C’est d’ailleurs la position expressément retenue par la directive communautaire du 25 novembre 2015 susmentionnée. En effet, dans son article 17,2, elle dispose que : « La garantie… couvre les montants des paiements effectués par les voyageurs ou en leur nom en ce qui concerne les forfaits… ». Encore faut-il que le tiers intervenant agisse comme simple mandataire ce qui ne semblait pas être le cas dans l’espèce annotée bien qu’il s’agissait d’un comité d’établissement en principe habilité à représenter les salariés. En second lieu, le tiers qui concourt en tant qu’intermédiaire à la constitution du forfait touristique ne doit recevoir aucune rémunération quelle que soit sa forme à peine d’être considéré comme un opérateur du tourisme8. Comme l’écrit M.C. Lachièze, un comité d’entreprise intervenu dans la constitution d’un forfait touristique en tant qu’intermédiaire non rémunéré est « transparent du point de vue du droit du tourisme »9. Dans l’espèce annotée il semble que cette condition était remplie.

L’arrêt rendu par la première chambre civile le 29 mars 2017 concerne l’hypothèse, au demeurant exceptionnelle, où un comité d’établissement intervenu dans l’organisation et la distribution d’un séjour auprès de l’agence de voyages a été considéré comme un professionnel du tourisme.

Il ne remet pas en cause la règle selon laquelle un tiers intervenant au contrat de voyage en qualité d’intermédiaire non rémunéré n’est pas un professionnel du tourisme et ne peut ni voir sa responsabilité engagée sur le fondement de l’article L. 211-16 du Code du tourisme, ni se voir refuser le bénéfice de la garantie de financement de l’article L. 211-18 du même code.

Notes de bas de pages

  • 1.
    C. tourisme, art. R. 211-26.
  • 2.
    V. par exemple la société européenne de protection juridique : Cass. 2e civ., 17 sept. 2009, n° 08-20478.
  • 3.
    C. tourisme, art. L. 211-18, II, a.
  • 4.
    V. Dir. n° 2015.2302 du PE et du Cons., 25 nov. 2015, relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyages liées, art. 17, 1.
  • 5.
    Cass. 1re civ., 29 mars 2017, n° 15-26766 : Dalloz actualité, 26 avr. 2017, obs. Delpech X. ; Juristour 197/2017, p. 13, obs. X. D.
  • 6.
    TGI Paris, 16 mai 2013, nos 10/15955, 10/10016, 10/09991 et 10/09992 : Juristour 155/2013, p. 11, obs. Delpech X.
  • 7.
    Sur ce point, v. Lachièze C., Droit du tourisme, 2014, LexisNexis, n° 97.
  • 8.
    Cass. 1re civ., 19 févr. 2013, n° 11-26881 : Juristour 152/2013, p. 12, obs. Delpech X. ; Juristour 157/2013, p. 45, note Lachièze C. – Cass. 1re civ., 9 avr. 2015, n° 14-15377 : Juristour 175/2015, p. 14, obs. X. D. ; Juristour 179/2015, p. 45, note Lachièze C. ; LPA 22 juin 2015, p. 12, note Dagorne-Labbe Y.
  • 9.
    Note sous Cass. 1re civ., 19 févr. 2013, n° 11-26881.
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