Double imposition : une procédure de règlement des différends fiscaux

Publié le 21/12/2017

Une nouvelle directive relative aux mécanismes de règlement des différends en matière de double imposition vient d’être adoptée. Elle prévoit des mécanismes de règlement contraignants et obligatoires propre à sécuriser l’environnement fiscal des différents acteurs économiques. Elle s’appuie sur la convention relative à l’élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d’entreprises associées (90/436/CEE), la convention d’arbitrage de l’Union, qui fait partie de la législation de l’Union européenne.

Le 2 octobre dernier, le Conseil de l’Union européenne a adopté une nouvelle directive visant à rendre le règlement des différends, en particulier en matière de double imposition, plus efficace, plus accessible pour les contribuables et plus transparent. La proposition s’inscrit dans le cadre de l’effort plus large déployé par l’Union européenne pour instaurer un système d’imposition des sociétés juste et efficace au sein de l’Union européenne et accroître la sécurité fiscale. La directive vise à introduire une approche plus coordonnée de l’Union européenne en ce qui concerne le règlement des différends en matière de double imposition. Elle vise à mettre en place un mécanisme de règlement des différends entre États membres lorsqu’ils découlent de l’application d’accords qui prévoient l’élimination des doubles impositions. Le texte prévoit que les mécanismes de règlement des différends doivent être contraignants et obligatoires, avec des délais clairement précisés et une obligation de résultats. Ce faisant, il vise à sécuriser l’environnement fiscal, dans lequel les coûts de mise en conformité supportés par les entreprises sont réduits au minimum. La directive concerne les entreprises actives dans plusieurs États membres de l’UE, mais aussi les personnes physiques et les droits de celles-ci. Afin de rendre les mécanismes existants plus efficaces, la directive vise à étendre le champ d’application de la convention relative à l’élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d’entreprises associées (90/436/CEE), faire en sorte que les différends entre États membres qui découlent de l’interprétation et de l’application d’accords en matière de double imposition soient réglés dans un délai clairement défini et contraignant pour les États membres et rendre les résultats de l’arbitrage contraignants.

Accord sur la directive « règlement des différends »

Lors de la réunion ECOFIN du 23 mai dernier, les États membres se sont accordés sur une proposition de directive relative aux mécanismes de règlement des différends fiscaux dans l’Union européenne. Ce nouveau texte a été proposé dans le cadre du paquet « Corporate Tax Reform » de 2016. Il a pour finalité de permettre la résolution des litiges découlant de l’interprétation ou de l’application des conventions bilatérales et de la convention d’arbitrage, notamment lorsque les divergences d’interprétation conduisent à la persistance de doubles impositions. Le mécanisme de règlement des différends n’a pas vocation à se substituer aux procédures amiables prévu par les conventions fiscales bilatérales ou dans le cadre de la Convention européenne d’arbitrage en matière de prix de transfert. Cependant, il renforce ces procédures en leur adjoignant une phase d’arbitrage obligatoire et contraignante en dernier ressort, encadrée par des délais stricts et des règles de transparence.

Entrée en application

Les États membres auront jusqu’au 30 juin 2019 pour transposer la directive dans leurs législations et réglementations nationales. Elle s’appliquera aux réclamations introduites après cette date, qui portent sur des questions relatives à l’exercice fiscal débutant le 1er janvier 2018 ou ultérieurement. La directive devrait donc s’appliquer à toute réclamation introduite à compter du 1er juillet 2019 concernant des revenus ou des capitaux perçus au cours d’un exercice fiscal ouvert à compter du 1er janvier 2018 ou après cette date. Les États membres peuvent toutefois décider d’appliquer la directive à des réclamations liées à des exercices fiscaux antérieurs.

Renforcer la sécurité fiscale

Le texte vise à améliorer les mécanismes mis en œuvre pour le règlement des différends entre États membres lorsque ces différends découlent de l’interprétation d’accords sur l’élimination de la double imposition. Il s’appuie sur la convention 90/436/CEE relative à l’élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d’entreprises associées. « Cette directive constitue un élément important de notre projet visant à renforcer la sécurité fiscale et à améliorer l’environnement des entreprises en Europe », a déclaré Edward Scicluna, ministre des Finances de Malte, pays qui assure actuellement la présidence du Conseil. La double imposition constitue l’un des principaux problèmes auxquels sont confrontées les entreprises actives dans plusieurs pays. Il s’agit d’une situation dans laquelle différents États membres imposent le même revenu à des entreprises. Cette situation peut occasionner des coûts et des charges administratives supplémentaires et avoir une incidence négative sur les investissements transfrontières dans l’UE. Les personnes physiques peuvent également être confrontées à ces problèmes. Les situations dans lesquelles plusieurs États membres imposent le même revenu ou capital deux fois peuvent créer des obstacles importants à la conduite d’activités économiques transfrontières. Elles génèrent une charge fiscale excessive, peuvent entraîner des distorsions économiques et ont une incidence négative sur les investissements transfrontières. Les mécanismes actuels de règlement des différends en matière de double imposition reposent sur les procédures amiables prévues par les conventions relatives aux doubles impositions conclues par des États membres ainsi que sur la convention d’arbitrage de l’Union relative à l’élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d’entreprises associées. Selon la Commission européenne, dans le cadre actuel, certains différends en matière de double imposition n’entrent pas dans le champ d’application de la convention d’arbitrage de l’Union ou des conventions applicables en matière de double imposition qui sont applicables. Il en résulte qu’un certain nombre de cas demeurent non résolus. Le champ d’application de la convention d’arbitrage, par exemple, est limité aux différends en matière de prix de transfert et il n’est pas possible de contester l’interprétation des règles. En outre, ces procédures s’avèrent souvent onéreuses.

Un délai de deux ans

Le texte permet au contribuable d’engager une procédure amiable, dans le cadre de laquelle les États membres doivent parvenir à un accord dans un délai de deux ans. Si cette procédure échoue, une procédure d’arbitrage est engagée pour régler le différend dans des délais déterminés. À cette fin, une commission consultative est constituée, laquelle comprend trois à cinq arbitres indépendants ainsi que deux représentants de chaque État membre au maximum. Cette commission consultative émet un avis sur l’élimination de la double imposition dans le cas litigieux, qui est contraignant pour les États membres concernés, sauf s’ils conviennent d’une autre solution. Le Conseil a approuvé un compromis sur le champ d’application de la directive, c’est-à-dire les types de différends qu’elle devrait couvrir. Le Conseil est convenu d’un champ d’application élargi, mais avec la possibilité, au cas par cas, d’exclure les litiges qui ne portent pas sur la double imposition. Elle a également approuvé un compromis sur la notion de « personnalités indépendantes », c’est-à-dire sur les critères visant à garantir l’indépendance des personnes nommées pour constituer un groupe d’arbitres indépendants. Il a été décidé que les arbitres ne pouvaient être employés au sein d’une entreprise de conseil fiscal ni avoir fourni de conseils fiscaux à titre professionnel. Sauf accord contraire, le président de la commission doit être un juge. Enfin, un dernier compromis a été approuvé sur le comité permanent. Il est possible de mettre en place une structure permanente pour traiter le règlement des différends, si les États membres en conviennent ainsi.

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