Vincent Maurel : « Il faut en finir avec l’image de l’avocat difficile d’accès et trop cher »

Publié le 29/09/2020

Durant trois jours, les 5, 6 et 7 octobre prochains, au Centre de Conférence Cœur Défense, les avocats du barreau des Hauts-de-Seine iront à la rencontre des entrepreneurs, artisans, commerçants et professions libérales, dans le cadre d’une opération baptisée « Les avocats prennent La Défense ». L’objectif ? Aider les entreprises dans un contexte particulièrement difficile, mais aussi placer l’avocat au coeur de la cité. Les explications du Bâtonnier Vincent Maurel. 

Vincent Maurel : "Il faut en finir avec l'image de l'avocat difficile d'accès et trop cher"
Vincent Maurel, Bâtonnier des Hauts-de-Seine

Actu-Juridique : Habituellement les consultations gratuites sont plutôt proposées aux particuliers, pourquoi ce choix de vous tourner vers les entrepreneurs ? 

 Vincent Maurel : Je préfère parler de consultations « offertes » plutôt que de consultations « gratuites ». Ces consultations ont en effet une véritable valeur. Les avocats qui participent à cet événement s’inscrivent dans une démarche de solidarité à destination des acteurs économiques du département des Hauts de Seine et de ses environs. On le sait malheureusement, les entreprises souffrent terriblement de la crise sanitaire. Toutes la subissent. Et il est à craindre que la situation ne s’améliore pas avant de nombreux mois. Des drames humains sont à redouter. Face à cette crise, aux graves difficultés financières et aux incertitudes qu’elle engendre, les entrepreneurs ont plus que jamais besoin d’être conseillés.

Actu-Juridique : Le barreau des Hauts-de-Seine a une spécificité, il est composé d’un très grand nombre de cabinets d’affaires et il s’était déjà mobilisé pendant le confinement auprès des entreprises…

VM. : Troisième barreau de France en nombre d’avocats, celui-ci est traditionnellement qualifié de « premier barreau d’affaires ». En effet, sur les 2.500 avocats qui le composent, plus des deux tiers assistent au quotidien les entreprises de toutes tailles, du commerce de proximité à la multinationale, tant dans le domaine du conseil que dans celui du contentieux. Mais plus que cette spécificité, c’est très certainement notre proximité avec nos partenaires, et à travers eux, avec les entreprises, les artisans, les commerçants de notre département, qui nous a décidé à créer cet événement. Celui-ci fait en effet suite à l’opération de soutien aux entreprises que nous avons réalisée en plein confinement avec la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) et la Chambre de Métiers et de l’Artisanat (CMA) du département : très rapidement après le 16 mars, une fois la stupéfaction passée, les avocats de notre barreau se sont très vite mobilisés aussi bien pour aider leurs clients que pour s’engager dans des actions de solidarité. C’est ainsi qu’en quelques jours, nous avons constitué une équipe de 70 avocats pour répondre aux nombreuses questions que se posaient les entreprises membres des chambres consulaires. Cette équipe a également rédigé des modèles de courriers ainsi que des fiches pratiques afin d’aider celles-ci à obtenir des aides, organiser leur activité, gérer leur personnel. Cette mobilisation a véritablement mis à l’honneur les avocats de notre barreau vis-à-vis de nos différents partenaires tout en renforçant nos liens avec eux et en valorisant nos expertises juridiques.

Actu-Juridique : Comment va se dérouler très concrètement l’opération « Les avocats prennent La Défense » ?

VM. : Durant trois jours, les 5, 6 et 7 octobre prochains, au Centre de Conférence Cœur Défense, les avocats du barreau des Hauts de Seine iront à la rencontre des entrepreneurs, des artisans, des commerçants, des professions libérales. Avec nos partenaires, la CCI et la CMA 92 ainsi que la BRED, qui nous a rejoints avec enthousiasme dans ce projet, ils animeront des ateliers juridiques, aux côtés de témoins dont le retour d’expérience permettra un éclairage pratique. Beaucoup de ces ateliers seront consacrés à la crise bien entendu. Mais pas uniquement. Ils s’articuleront autour de trois thèmes. Le premier jour, le 5 octobre, il s’agira justement de « Passer la crise » : Comment éviter le dépôt de bilan ? Comment penser le conflit autrement ? Comment gérer la crise ? Le 6 puis le 7 octobre, les ateliers auront pour thème respectivement « Entreprendre » puis « Rester humain ». Seront ainsi débattus des sujets divers tels que le bail commercial, la structuration de son activité, son financement mais aussi le télétravail ou bien encore l’accueil des personnes en situation de handicap au sein de l’entreprise. Dans le même temps, seront offertes des consultations dans tous les domaines du droit. Il sera possible de rencontrer un avocat pour un entretien d’une trentaine de minutes. Des premières réponses juridiques pourront être apportées à nos visiteurs, que cela concerne leur entreprise, leur projet d’entreprise, ou bien encore un sujet d’ordre personnel (social, fiscal, société, droit de la famille, pénal,…).

Actu-Juridique : Qui peut venir à ces journées ? Faut-il s’inscrire au préalable ?

VM. : Cette manifestation s’adresse en premier lieu aux entrepreneurs, aux commerçants, aux artisans, aux professions libérales afin de les conseiller dans le cadre de leur activité professionnelle. Mais toute personne qui se présentera sera la bienvenue, et notamment les salariés, très nombreux à La Défense. Quels qu’ils soient, nos visiteurs auront également la possibilité de consulter un avocat pour des questions d’ordre personnel. C’est pourquoi aux côtés des avocats d’affaires se trouveront des avocats qui pourront apporter des premiers conseils à ceux qui rencontrent des difficultés avec leur copropriété, dans leur couple, qui sont victimes de violences intrafamiliales… J’insiste sur ce dernier point et j’espère que la configuration de cet événement permettra à certaines personnes qui n’osent pas parler de leurs difficultés de s’en ouvrir à un avocat, surtout s’il s’agit de violences subies. Il est ainsi prévu une quinzaine de box permettant un entretien en toute confidentialité. Il est recommandé de s’inscrire préalablement. Un site a été ouvert à cet effet. Il suffit de s’y rendre  et de choisir son créneau horaire en indiquant, de manière très générale, le domaine du droit pour lequel une rencontre avec un avocat est souhaitée.  Il sera également possible de s’inscrire en se rendant directement sur place : des hôtesses se trouveront sur le parvis de La Défense ainsi qu’à l’entrée de la tour Cœur Défense et recevront les inscriptions. Enfin, notez que nous avons mis en place un dispositif sanitaire strict afin d’assurer à chacun la plus grande sécurité possible au regard du contexte sanitaire.

Actu-Juridique : Combien d’avocats du barreau sont-ils mobilisés dans le cadre de cette opération ? 

VM. :  : Près d’une centaine d’avocats se sont mobilisés ! Il représentent la diversité de notre barreau. Certains exercent en structure individuelle, d’autres sont collaborateurs ou associés dans ce que l’on appelle les « grandes structures ». Tous les cabinets d’affaires de notre barreau sont représentés. Tous les domaines du droit sont également traités. Comme je l’ai indiqué, l’objectif est en effet d’apporter une première réponse juridique aux personnes qui viendront nous voir, dans tous les domaines. Je dois avouer ma fierté d’être à la tête d’un Ordre dont les membres, quelle que soit leur activité, quel que soit leur cabinet d’appartenance, répondent systématiquement présents pour participer aux différentes actions menées par le barreau. Cela est vrai pour les traditionnelles actions en faveur de l’accès au droit, cela est également vrai pour ce type d’actions, plus innovantes mais particulièrement nécessaires je pense en cette période des plus compliquées. Je rends en particulier hommage à la petite équipe d’avocats bénévoles qui coordonne l’opération et qui travaille sans compter à sa réussite.

 Actu-Juridique : Qu’attendez-vous de cette manifestation ? Pensez vous la pérenniser ? 

VM. : J’espère d’abord que cette manifestation rencontrera le succès malgré le contexte sanitaire particulièrement compliqué. Mais c’est justement parce que nous sommes confrontés à une crise sans précédent que je crois en son importance et à sa nécessité. Outre l’aide que les agents économiques, je le souhaite, y trouveront, cette manifestation a aussi vocation à placer l’avocat au cœur de la cité. A rappeler que celui-ci n’assure pas seulement la défense des justiciables devant les tribunaux. Il est le conseil au quotidien des entreprises et des particuliers, dans tous les domaines de leur vie tant professionnelle que personnelle. Je serais heureux si elle participe à faire évoluer le regard que porte le public sur notre profession, sur la diversité de notre activité, tant dans le domaine du conseil que dans celui du contentieux. Sur l’accessibilité des avocats également. Cette dernière remarque n’est pas anodine. En travaillant sur ce projet avec nos partenaires, cela nous a été répété à plusieurs reprises. Beaucoup croient l’avocat difficile d’accès, trop cher. Beaucoup ne pensent à lui que pour résoudre un conflit ou bien pour assurer leur défense devant un tribunal. Il faut en finir avec cette image. Les avocats sont des professionnels du droit capables d’appréhender toutes les problématiques juridiques et fiscales, quelle qu’en soit la cause, dans le cadre ou non d’un contentieux. Il ne faut pas avoir peur de pousser la porte de leur cabinet. Ces trois journées seront ainsi l’occasion de redécouvrir une profession qui sait être le conseil de proximité du particulier et de l’entreprise autant que le défenseur des droits des justiciables. J’en forme le vœu en tout cas.  Quant à la pérennité de cette manifestation, je l’espère également. Le bâtonnier élu Michel Guichard qui prendra ma succession le premier janvier prochain, est, quoiqu’il en soit, tout autant motivé que moi et a déjà pris date pour l’année prochaine. En espérant que les ateliers évoqueront alors la crise sanitaire au passé !

 

Le programme de ces journées est accessible sur le site de l’événement.