Comment procéder au déblocage exceptionnel de l’épargne salariale ?
La loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat, publiée au Journal officiel le 17 août dernier, modifie plusieurs points en droit du travail et droit de la sécurité sociale dans l’objectif d’améliorer le pouvoir d’achat des salariés. Parmi ces mesures, est instauré un dispositif de déblocage exceptionnel de l’épargne salariale, à actionner par les salariés avant le 31 décembre 2022.
Le déblocage exceptionnel de l’épargne salariale : en quelques mots
La loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat instaure un dispositif de déblocage exceptionnel de l’épargne salariale pour l’année 2022.
Les salariés peuvent demander jusqu’au 31 décembre 2022 de débloquer jusqu’à 10 000 euros, exonérés de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu, placés sur leur plan d’épargne salarial.
Quels sont les salariés concernés par ce dispositif ?
Tous les salariés ou anciens salariés ayant investi des sommes perçues au titre de la participation et/ou de l’intéressement sur un plan d’épargne ou, le cas échéant, bénéficiant de droits à participation sur un compte courant bloqué peuvent solliciter le déblocage de titres, parts ou actions, ou sommes, jusqu’à 10 000 euros net de prélèvements sociaux.
La nature du contrat de travail n’a pas d’impact.
D’autres personnes peuvent bénéficier de cette mesure : chefs d’entreprise, directeurs généraux, présidents, gérants, membres du directoire, etc.
Quelles entreprises sont concernées par ce dispositif ?
Toutes les entreprises ayant mis en place un dispositif de participation, d’intéressement ou de plan d’épargne (PEE/PEI) sont concernées.
Cela inclut les entreprises de moins de 50 salariés.
Le fait que la participation soit mise en place à titre facultatif (dans les entreprises de moins de 50 salariés notamment) n’a pas d’impact.
De même, le mode de mise en place de participation ou d’intéressement n’a pas d’impact (accord d’entreprise, de groupe, adhésion à un accord de branche, régime d’autorité, accord collectif ou DUE pour l’intéressement, etc.).
Sous quelles conditions les salariés peuvent-ils débloquer leur épargne salariale ?
Par principe, les droits des salariés affectés à un plan d’épargne salariale sont indisponibles pendant un délai de 5 ans.
Dans certaines situations exceptionnelles, des cas de déblocage anticipé sont prévus, qui ont pour la majorité traits à la vie personnelle du salarié :
• Rupture du contrat de travail ;
• Mariage ou pacs ;
• Naissance ou adoption dès lors que le foyer compte déjà au moins deux enfants à sa charge ;
• Divorce, séparation ou dissolution d’un pacs si la résidence d’au moins un enfant est fixée au domicile de l’intéressé ;
• Violences conjugales commises contre l’intéressé par son actuel ou ancien conjoint ;
• Invalidité de l’intéressé, de ses enfants ou de son conjoint ;
• Décès de l’intéressé ou de son conjoint ;
• Affectation des sommes épargnées à la création ou reprise d’une entreprise ;
• Affectation des sommes épargnées à l’acquisition ou l’agrandissement de la résidence principale ;
• Surendettement ;
• En cas de plan de cession de l’entreprise ou de liquidation judiciaire.
En dehors de ces cas, il n’est pas possible pour les salariés de débloquer leur épargne salariale avant l’expiration du délai d’indisponibilité.
L’article 5 de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 sur le pouvoir d’achat modifie ce point.
Ainsi, à titre exceptionnel, et dans l’objectif de soutenir le pouvoir d’achat actuel des Français, il a été voté que les salariés auraient désormais la possibilité de débloquer de façon anticipée leurs droits au titre de l’épargne salariale, affectés avant le 1er janvier 2022, pour l’achat de biens ou la fourniture de services, mais dans la limite de 10 000 euros net de prélèvements sociaux.
Seuls les droits acquis au titre de la participation et affectés sur un plan épargne de type PEE, PEI, PEG ainsi que les droits à intéressement placés sur un tel plan peuvent être débloqués.
Sont donc exclus ceux qui ont été placés sur un plan de retraite obligatoire, PERCO ou PERECO ou fonds solidaires.
Sont déblocables :
• ces droits à participation ou intéressement placés sur un plan épargne (hors plans de retraite précités ou fonds solidaires) ;
• l’abondement qui se rattache à ces sommes ;
• les revenus provenant des sommes attribuées et ayant reçu la même affectation au même titre que les intérêts des sommes investies dans des supports de placement ;
• les suppléments d’intéressement et de participation investis dans les mêmes conditions.
Le ministère du Travail a précisé que les sommes débloquées devaient servir à la consommation des ménages et non pas à l’épargne. Si le bénéficiaire n’est pas tenu de justifier du bien ou du service qu’il compte acquérir au moment du déblocage, il devra toutefois être en mesure de justifier de son achat auprès de l’administration fiscale en cas de contrôle (donc pendant 3 ans).
Jusqu’à quand cette disposition peut-elle être mise en œuvre ?
Cette possibilité de déblocage exceptionnel de l’épargne salariale est limitée dans le temps : les salariés doivent demander le retrait de leurs avoirs bloqués sur un plan d’épargne salariale avant le 31 décembre 2022.
Les sommes distribuées au titre de la participation ou de l’intéressement pour l’année 2022 sont donc exclues du dispositif.
Compte tenu de ce délai limité, la loi du 16 août 2022 dispose que les employeurs sont dans l’obligation d’informer les bénéficiaires de ce dispositif exceptionnel de déblocage de l’épargne salariale dans un délai de 2 mois après la promulgation de la loi, soit au plus tard le 16 octobre 2022.
L’administration a précisé que cette information pouvait être faite par tout moyen.
Y a-t-il un plafond pour les sommes que les salariés peuvent débloquer ?
Oui, le montant d’épargne salariale que les salariés peuvent débloquer de façon anticipée est soumis à un plafond égal à 10 000 euros.
Ce montant est exonéré de prélèvement et cotisations sociales.
Ce déblocage exceptionnel doit par ailleurs se faire en une seule fois.
Il est de droit et ne peut donc être refusé par l’entreprise, qui n’est toutefois pas soumise à l’obligation de prendre en charge les frais de déblocages. Ils seront mis à la charge du salarié en l’absence d’accord entre lui et son employeur.
Dans certains cas particuliers, il nécessitera toutefois la conclusion d’un accord collectif.
Quel est le régime social et fiscal des sommes débloquées ?
Les sommes débloquées sont exonérées de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu.
L’organisme gestionnaire ou, à défaut, l’employeur doit déclarer ces sommes débloquées à l’administration fiscale.
De manière plus générale, comment fonctionne l’épargne salariale ?
L’épargne salariale a pour but d’associer les salariés aux résultats de l’entreprise ou de leur permettre de se constituer une épargne, avec l’aide de l’entreprise.
Elle désigne, dans les faits, plusieurs dispositifs :
La participation des salariés aux résultats de l’entreprise. Dispositif obligatoire dans les entreprises de 50 salariés et plus, qui met en place une redistribution d’une partie des bénéfices de l’entreprise au profit des salariés par le biais d’une réserve spéciale de participation. Le régime de la participation repose en principe sur un accord ou, à défaut, sur le régime d’autorité. Le montant de la réserve spéciale de participation est calculé sur une formule légale, qui comprend le bénéfice fiscal de la société, ou sur une formule plus favorable.
L’intéressement. Dispositif facultatif également mis en place par accord collectif en principe (sauf dans les entreprises de moins de 50 salariés qui peuvent, à ce jour, envisager la mise en place par décision unilatérale de l’employeur), l’intéressement permet également d’associer collectivement les salariés aux performances et aux résultats de l’entreprise par le versement d’une prime dont le montant résulte d’une formule de calcul liée à ces résultats ou performances et qui doit être, par nature, aléatoire.
Les plans d’épargne. Ce sont des systèmes également facultatifs qui permettent aux salariés de se constituer un portefeuille de valeurs mobilières avec l’aide de l’entreprise et dans des conditions fiscales et sociales avantageuses. Ils peuvent être alimentés par les salariés par les sommes qui leur sont versées au titre de la participation ou de l’intéressement. Différents plans d’épargne existent : plan d’épargne d’entreprise (PEE), plan d’épargne interentreprises (PEI), plan d’épargne pour la retraite collectif (Perco) et plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (Pereco).
La loi du 16 août 2022 ne vise que les sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement que les salariés ont placées sur un plan d’épargne pour acheter des titres, parts ou actions (hors plan d’épargne retraite).
Référence : AJU006j9