Les principales dispositions du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics

Publié le 18/07/2016

Deux décrets transposent le volet règlementaire des directives nos 2014/24/UE et 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014. Ces textes viennent parachever la transposition des directives européennes et prolonger le travail d’unification des règles relatives au droit de la commande publique qui intégrera notamment le nouveau régime des concessions de service public.

Il faut rappeler qu’une ordonnance du 23 juillet 2015 a transposé les directives précitées en droit français. Ses objectifs sont la transparence des procédures, la liberté d’accès à la commande. Elle a également pour but de favoriser l’accès des PME aux marchés. Enfin, l’ordonnance abroge le Code des marchés publics qui sera remplacé, à terme, par un nouveau Code de la commande publique.

Composé de 189 articles, le décret n° 2016-3601 s’applique aux marchés publics pour lesquels une consultation est engagée ou un avis d’appel à la concurrence est envoyé à la publication à compter du 1er avril 20162. Pour le Gouvernement, cette réforme ouvre un cadre modernisé et simplifié aux acteurs de la commande publique et participe à la restauration de la compétitivité de notre système juridique, dans un domaine représentant plus de 10 % du produit intérieur brut et près de 200 milliards d’euros.

Quoi qu’il en soit, la définition des marchés publics est élargie, ces derniers recouvrant désormais aussi bien les marchés visés par l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 que les accords-cadres.

Les marchés sont les contrats conclus à titre onéreux par un ou plusieurs acheteurs soumis à l’ordonnance de 2015 précitée avec un ou plusieurs opérateurs économiques, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services (les marchés de partenariat sont également des marchés publics).

Les accords-cadres, quant à eux, sont les contrats conclus par un ou plusieurs acheteurs soumis à ladite ordonnance avec un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d’établir les règles relatives aux bons de commande à émettre ou les termes régissant les marchés subséquents à passer au cours d’une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées.

Dans le nouveau décret, l’unification des marchés fractionnés est réalisée sous la dénomination « accords-cadres », dont font désormais partie les marchés à bon de commande. Une clarification de vocable voulu notamment par la transposition des textes du droit européen. Ainsi, les marchés à bons de commande s’appellent désormais des « accords-cadres fixant toutes les stipulations contractuelles »3.

Le décret comporte trois grandes parties. La première concerne les dispositions générales des marchés publics (I). Ainsi, sont traités le champ d’application, la préparation du marché public, la passation du marché public avec, en détails, les opérations préalables, le choix de la procédure, la publicité préalable, les règles générales (dématérialisation, sélection des offres, choix de l’offre, offres anormalement basses, attribution du marché public…). Les techniques d’achat, les marchés publics particuliers (maîtrise d’œuvre, marchés publics globaux, conception-réalisation, de performance, partenariat d’innovation… sont abordés de même que l’achèvement de la procédure et l’exécution du marché public, et notamment les dispositions relatives à la sous-traitance). Une seconde partie traite des dispositions spécifiques aux marchés de partenariat (II) tandis que la troisième et dernière partie concerne les dispositions relatives à l’outre-mer.

I – Les dispositions générales applicables aux marchés publics

A – Le renforcement de l’allotissement

L’article 10 du Code des marchés publics pose le principe selon lequel le pouvoir adjudicateur doit allotir le marché public. L’allotissement a pour objectif de décomposer le marché public en plusieurs lots. Ces lots sont des prestations qui répondent à des « besoins distincts » ou variables selon leur destination.

Cette règle participe au respect des principes de la commande publique et accorde une liberté importante au pouvoir adjudicateur dans la détermination du nombre et de la consistance des lots. Même si ce principe s’impose au pouvoir adjudicateur, ce dernier peut y déroger et recourir au marché global dans des hypothèses limitées. Cette dérogation est étroitement contrôlée par le juge administratif.

Le décret du 25 mars prévoit que, désormais, l’acheteur qui décide de ne pas allotir un marché public doit motiver son choix. En MAPA, la motivation doit figurer dans les documents relatifs à la procédure. En procédure formalisée, elle doit apparaître dans les documents de la consultation ou le rapport de présentation.

En outre, les acheteurs publics devront indiquer dans les documents de la consultation si les candidats peuvent soumissionner pour un seul lot, plusieurs lots ou tous les lots ainsi que, le cas échéant, le nombre maximal de lots qui peuvent être attribués à un même soumissionnaire. Dans cette hypothèse, les documents de la consultation devront alors préciser les règles applicables lorsque la mise en œuvre des critères d’attribution conduirait à attribuer à un même candidat un nombre de lots supérieur au nombre maximal.

B – Les marchés globaux de performance

Différents marchés globaux, visés aux articles 33 et suivants de l’ordonnance du 23 juillet 2015, dérogent, par nature, au principe de l’allotissement. Ces contrats sont à financement public (marchés publics de conception-réalisation, les marchés publics globaux de performance, les marchés publics globaux sectoriels) et à financement privé (marchés de partenariat).

Défini à l’article 34 de l’ordonnance du 23 juillet 2015, le marché public global de performance permet à l’acheteur d’associer l’exploitation ou la maintenance à la réalisation ou à la conception-réalisation de prestations (de travaux, de fournitures ou de services), afin de remplir des objectifs chiffrés de performance. Ce dispositif peut être utilisé pour satisfaire tout objectif de performance mesurable. Il peut s’agir, notamment, d’objectifs définis en termes de niveau d’activité, de qualité de service, d’efficacité énergétique ou d’incidence écologique. Ces objectifs peuvent naturellement se cumuler.

Le décret du 25 mars prévoit que le marché public global de performance doit faire obligatoirement apparaître, de manière séparée, les prix respectifs de la réalisation et de l’exploitation ou de la maintenance. En outre, la rémunération des prestations d’exploitation ou de maintenance doit être liée à l’atteinte des engagements de performances mesurables fixées par le marché public pour toute sa durée.

C – La consécration du « sourçage »

Le « sourçage » (sourcing en anglais), introduit dans le projet de décret, disparaît et s’intitule désormais : « Études et échanges préalables avec les opérateurs économiques ». Cette technique offre à l’acheteur la possibilité d’« effectuer des consultations ou de réaliser des études de marché, de solliciter des avis ou d’informer les opérateurs économiques de son projet et de ses exigences ». Ce mécanisme devrait favoriser les PME qui disposeront ainsi d’une connaissance plus approfondie des solutions techniques existantes, et notamment des innovations.

La liberté reste néanmoins encadrée dans le sens où « les résultats de ces études et échanges préalables peuvent être utilisés par l’acheteur, à condition qu’ils n’aient pas pour effet de fausser la concurrence et n’entraînent pas une violation des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ».

D – La détection des offres anormalement basses

Les prix sont en théorie librement fixés. Néanmoins, l’acheteur public doit être attentif aux offres anormalement basses pour éviter les pratiques déloyales. Une offre peut être qualifiée d’anormalement basse, si son prix ne correspond pas à une réalité économique. Il faut noter que le prix anormalement bas d’une entreprise est étendu par le décret du 25 mars aux prestations sous-traitées.

Après avoir identifié les offres susceptibles d’être anormalement basses, l’acheteur a l’obligation de demander des explications à leurs auteurs et d’en apprécier la pertinence, afin de prendre une décision d’admission ou de rejet. Cette procédure contradictoire ne relève pas d’une simple faculté, mais constitue une obligation.

Le candidat doit pouvoir faire valoir son point de vue et démontrer le sérieux de son offre. Un courrier doit lui être adressé, l’informant que son offre est suspectée d’être anormalement basse et lui demandant de fournir toutes justifications qu’il jugera utiles.

À cet égard, le décret du 25 mars 2016 énumère cinq types de justifications qui peuvent être prises en considération par le pouvoir adjudicateur4 :

  • le mode de fabrication des produits, les modalités de la prestation des services, le procédé de construction ;

  • les solutions techniques adoptées ou les conditions exceptionnellement favorables dont dispose le candidat pour exécuter les travaux, pour fournir les produits ou pour réaliser les prestations de services ;

  • l’originalité de l’offre ;

  • la règlementation applicable en matière environnementale, sociale et du travail en vigueur là où la prestation est réalisée ;

  • l’obtention éventuelle d’une aide d’État par le candidat.

E – Offre irrégulière, inacceptable ou inappropriée

Certaines offres peuvent ne pas être examinées par l’acheteur public :

  • l’offre irrégulière est une offre incomplète (absence d’une pièce demandée dans les documents de la consultation, par exemple) ou qui ne respecte pas la législation applicable en matière sociale et environnementale (une offre qui méconnaît la législation n’est plus « inacceptable » mais « irrégulière ») ;

  • l’offre inacceptable est une offre dont le prix excède les crédits établis pour le marché avant le lancement de la procédure ;

  • l’offre inappropriée est une offre qui apporte une réponse différente du besoin exprimé par l’acheteur public (offre proposant des ordinateurs de bureau alors que l’objet du marché porte sur des ordinateurs portables, par exemple).

Il est ainsi essentiel de lire attentivement tous les documents de la consultation et de s’y conformer.

Dans le cadre d’un appel d’offres et dans une procédure adaptée sans négociation, les offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées sont éliminées sans être examinées. Toutefois, l’acheteur peut autoriser les soumissionnaires concernés à régulariser une offre irrégulière.

Dans les autres procédures, les offres inappropriées sont éliminées, mais les offres irrégulières ou inacceptables peuvent faire l’objet d’une négociation ou d’un dialogue pour être modifiées.

Le choix de négocier ou non et les modalités de la négociation sont librement fixés par l’acheteur public.

F – L’introduction de cas d’interdictions facultatives de soumissionner

Les acheteurs peuvent exclure de la procédure de passation du marché :

  • les personnes qui, au cours des trois années précédentes, ont dû verser des dommages et intérêts, ont été sanctionnées par une résiliation ;

  • les personnes qui ont entrepris d’influer indûment sur le processus décisionnel de l’acheteur ou d’obtenir des informations confidentielles susceptibles de leur donner un avantage indu lors de la procédure de passation du marché public ;

  • les personnes qui, par leur participation préalable directe ou indirecte à la préparation de la procédure de passation du marché public, ont eu accès à des informations susceptibles de créer une distorsion de concurrence par rapport aux autres candidats ;

  • les personnes à l’égard desquelles l’acheteur dispose d’éléments suffisamment probants ou constituant un faisceau d’indices graves, sérieux et concordants pour en déduire qu’elles ont conclu une entente avec d’autres opérateurs économiques en vue de fausser la concurrence ;

  • les personnes qui, par leur candidature, créent une situation de conflit d’intérêts, lorsqu’il ne peut y être remédié par d’autres moyens.

G – La procédure concurrentielle avec négociation

Les procédures sont dites formalisées, adaptées, ou sans mise en concurrence. Parmi les procédures formalisées, on retrouve la procédure d’appel d’offres (ouvert ou restreint, sans négociation), la procédure négociée avec mise en concurrence préalable et la procédure de dialogue compétitif.

Le décret met en place une nouvelle procédure. La procédure concurrentielle avec négociation est la procédure par laquelle un pouvoir adjudicateur négocie les conditions du marché public avec un ou plusieurs opérateurs économiques autorisés à participer aux négociations. Le pouvoir adjudicateur doit indiquer dans les documents de la consultation les exigences minimales que doivent respecter les offres. Selon les dispositions de l’article 25 du décret n° 2016-360, les conditions de recours à cette procédure sont les mêmes que celles dédiées au dialogue compétitif.

H – La procédure d’appel d’offres ouverte ou restreinte

Lorsque la valeur estimée du marché est égale ou supérieure aux seuils européens, le marché est passé selon l’une des procédures formalisées suivantes.

L’appel d’offres est la procédure par laquelle l’acheteur choisit l’offre économiquement la plus avantageuse, sans négociation, sur la base de critères objectifs préalablement portés à la connaissance des candidats. Il peut être ouvert ou restreint. L’appel d’offres est ouvert lorsque tout opérateur économique intéressé peut soumissionner.

L’appel d’offres est restreint lorsque seuls les candidats sélectionnés par l’acheteur sont autorisés à soumissionner. Le choix entre les deux formes d’appel d’offres est libre.

Le décret réduit le délai minimal de réception des offres et candidatures. En AOO, il est fixé à trente-cinq jours (trente jours si transmission par voie électronique). En AOR, le délai de réception des candidatures ainsi que celui des offres sont de trente jours (possibilité de le réduire à vingt-cinq jours si les offres sont transmises par voie électronique). La négociation reste interdite dans le cadre de ces deux procédures.

En outre, l’article 68 du décret prévoit que, désormais, l’acheteur peut décider d’examiner les offres avant les candidatures en appel d’offres ouvert afin de lui faire gagner du temps. Lorsqu’il fait usage de cette faculté, il doit s’assurer que la vérification de l’absence de motifs d’exclusion et du respect des critères de sélection s’effectue de manière impartiale et transparente, afin que le marché public ne soit pas attribué à un soumissionnaire qui aurait dû être exclu ou qui ne remplit pas les critères de sélection établis par l’acheteur.

I – La négociation des procédures en MAPA

Lorsque la valeur estimée du besoin est inférieure aux seuils de procédure formalisée, l’acheteur peut recourir à une procédure adaptée dont il détermine librement les modalités en fonction de la nature et des caractéristiques du besoin à satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d’y répondre ainsi que des circonstances de l’achat.

De nombreux acheteurs ignorent la liberté que cette procédure leur offre. Sa souplesse permet pourtant souvent de répondre de manière optimale à l’impératif que doit respecter tout acheteur public : la meilleure utilisation des deniers publics. Elle ouvre, en outre, les marchés publics aux entreprises inhabiles au maniement des procédures formalisées, notamment les petites et moyennes entreprises (PME). Elle est enfin, source d’économie pour l’acheteur public lui-même, car elle lui permet d’adapter les moyens mis en œuvre aux enjeux de son achat.

On peut noter que, quelle que soit leur valeur estimée du marché, les marchés de services sociaux et de services spécifiques peuvent être passés selon une procédure adaptée.

Il s’agit notamment de services :

  • sanitaires, sociaux et soins de santé ;

  • administratifs, éducatifs et culturels ;

  • juridiques (services administratifs des tribunaux).

En outre, le décret du 25 mars prévoit que le Code des marchés publics ne s’applique pas aux marchés publics des services juridiques de représentation légale d’un client par un avocat et de consultation juridique fournis par un avocat. L’acheteur peut définir librement les modalités de publicité et de mise en concurrence en fonction du montant et des caractéristiques du marché public.

Ainsi, seul le conseil juridique n’étant pas réalisé par un avocat ou n’étant pas lié à un contentieux restera soumis aux obligations classiques de publicité et de mise en concurrence imposées par le Code des marchés publics5.

Quoi qu’il en soit, le décret du 25 mars précise que lorsque l’acheteur a prévu de négocier, il peut cependant attribuer le marché public sur la base des offres initiales sans négociation, à condition d’avoir indiqué dans les documents de la consultation qu’il se réserve la possibilité de le faire6. Les acheteurs publics devront ainsi veiller à bien rédiger les clauses de leurs marchés en ce qui concerne la possibilité de recourir ou non à la négociation afin de limiter le risque de contentieux sur ce point.

J – Le document unique de marché européen (DUME)

Le DUME est une déclaration sur l’honneur qui vise à supprimer l’obligation de produire, par les candidats soumissionnaires à un marché public, un nombre important de certificats ou autres documents relatifs aux critères d’exclusion et d’attribution.

Le recours au DUME par le candidat est rendu possible (article 49 du décret). En outre, l’acheteur sera tenu d’accepter le DUME électronique lorsqu’il sera utilisé par un opérateur pour les marchés publics pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis d’appel à la concurrence a été envoyé à la publication à compter du 1er avril 2017 pour les centrales d’achat et à compter du 1er avril 2018 pour les autres acheteurs.

K – L’utilisation de variantes

Dans certains cas, les candidats peuvent proposer une solution variante, c’est-à-dire une solution ou l’emploi de moyens autres que ceux qui ont été fixés dans les documents de la consultation. Ces variantes permettent de faire ressortir des solutions innovantes ou d’employer des moyens inconnus de l’acheteur public.

Dans une procédure formalisée, les variantes sont interdites, sauf si l’acheteur public les a autorisées dans l’avis de marché. À l’inverse, dans une procédure adaptée, les variantes sont autorisées, sauf si l’organisme précise le contraire dans les documents de la consultation.

L – Le respect du délai de réponse

La première condition pour qu’une offre soit examinée est qu’elle soit réceptionnée par l’acheteur public dans le délai maximum indiqué dans l’avis de marché. Pour garantir l’égalité des candidats, tous disposent du même temps pour élaborer et remettre leur offre.

Chaque entreprise doit anticiper l’expiration du délai et prendre toutes les mesures nécessaires pour que son offre parvienne avant la date et l’heure limites, en tenant compte d’indications telles que les horaires d’ouverture du service pour les documents à remettre et du poids des documents pour les offres transmises par voie électronique.

Certaines modalités sont reconnues pour attester de façon fiable les dates et heures de réception de l’offre :

  • remise en mains propres contre récépissé mentionnant la date et l’heure ;

  • recommandé postal avec avis de réception ;

  • transmission électronique sur le profil d’acheteurs de l’acheteur…

L’offre doit être transmise en une seule fois avant l’expiration du délai. Par exemple, si un pli arrive dans les temps mais que les échantillons demandés arrivent après l’échéance, l’offre est alors considérée comme incomplète et ne pourra pas être examinée par l’acheteur public.

Si plusieurs offres sont transmises successivement, seule la dernière reçue est ouverte. Pour modifier une offre déjà réceptionnée, le candidat doit en transmettre une nouvelle avant la fin du délai de réponse. Celle-ci sera admise et la première rejetée.

M – Les réponses électroniques

La dématérialisation est la possibilité de conclure un marché public par voie électronique, soit par messagerie, soit par le biais d’une plate-forme sur internet appelée « profil d’acheteurs ». La législation est la même que les communications et les échanges d’informations soient électroniques ou non. C’est l’acheteur public qui définit le mode de transmission en l’indiquant dans l’avis de marché ou les documents de la consultation.

Toutes les communications et tous les échanges d’informations devront être effectués par des moyens de communication électronique lorsqu’une consultation à compter du 1er avril 2017 pour les centrales d’achat et du 1er octobre 2018 pour les autres acheteurs7.

L’obligation de dématérialisation complète prévue pour le 1er octobre 2018 comporte des dérogations listées à l’article 41 en ce qui concerne notamment les marchés publics mentionnés à l’article 30 (v. supra) et répondant à un besoin dont la valeur estimée est inférieure aux seuils de procédure formalisée, ainsi que les marchés publics de services sociaux et autres services spécifiques mentionnés à l’article 28.

On peut noter également que les opérateurs économiques n’auront plus l’obligation de signer électroniquement leur offre. La signature n’est plus requise qu’au stade de la phase d’attribution du marché.

N – Le recours aux avenants

Par ailleurs, l’article 139 du décret précise quand un marché public peut être modifié, notamment, dans les cas suivants :

  • lorsque les modifications, quel qu’en soit leur montant ont été prévues dans les documents contractuels initiaux sous la forme de clauses de réexamen, dont des clauses de variation du prix ou d’options claires, précises et sans équivoque ;

  • lorsque des travaux, fournitures ou services supplémentaires, quel qu’en soit leur montant (mais le montant des modifications ne peut être supérieur à 50 % du montant du marché public initial) sont devenus nécessaires et ne figuraient pas dans le marché public initial, à la double condition qu’un changement de titulaire soit impossible pour des raisons économiques ou techniques tenant notamment à des exigences d’interchangeabilité ou d’interopérabilité avec les équipements, services ou installations existants achetés dans le cadre du marché public initial et présenterait un inconvénient majeur ou entraînerait une augmentation substantielle des coûts pour l’acheteur ;

  • lorsque la modification est rendue nécessaire par des circonstances qu’un acheteur diligent ne pouvait pas prévoir (mais ici encore, le montant des modifications ne peut être supérieur à 50 % du montant du marché public initial) ;

  • lorsqu’un nouveau titulaire remplace le titulaire initial du marché public, dans des cas limitativement énumérés (dans le cas d’une cession du marché public : à la suite d’une opération de restructuration du titulaire initial).

O – L’attribution du marché public

En général, l’acheteur public apprécie séparément les candidatures et les offres :

  • la candidature lui permet d’évaluer les capacités professionnelles, techniques et financières du soumissionnaire. S’il a fixé des niveaux minimaux de capacités, il élimine les candidatures qui ne les atteignent pas ;

  • l’offre choisie est la plus avantageuse économiquement. Pour cela, l’acheteur a préalablement définit plusieurs critères, qui doivent être liés à l’objet du marché et ne pas être discriminatoires (par exemple, la proximité géographique du soumissionnaire ou sa nationalité ne peuvent être utilisées comme des critères de choix).

Pour attribuer le marché public au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l’offre économiquement la plus avantageuse, l’acheteur doit se fonder :

  • soit sur un critère unique qui peut être :

    • le prix, à condition que le marché public ait pour seul objet l’achat de services ou de fournitures standardisés dont la qualité est insusceptible de variation d’un opérateur économique à l’autre ;

    • le coût, déterminé selon une approche globale qui peut être fondée sur le coût du cycle de vie au sens de l’article 63 du décret ;

  • soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l’objet du marché public ou à ses conditions d’exécution parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux.

P – Le rejet d’une candidature

Pour les marchés publics passés selon une procédure formalisée, l’acheteur, dès qu’il décide de rejeter une candidature ou une offre, doit notifier à chaque candidat ou soumissionnaire concerné le rejet de sa candidature ou de son offre en lui indiquant les motifs de ce rejet. Pour l’avocat Raphaël Apelbaum, la formulation « motifs de rejets » est trop large. Elle soulève plus de réponses qu’elle n’en apporte. Dans le doute, il conseille à l’acheteur d’être le plus détaillé possible.

Dans le cadre d’un MAPA, le décret oblige l’acheteur à informer simplement du rejet de l’offre ou de la candidature, sans donner de motifs simples ou détaillés ou autres informations. C’est seulement sur demande de l’opérateur que l’acheteur doit communiquer les motifs de rejet sous un délai de quinze jours. Seulement, en MAPA, rien n’oblige l’acheteur à attendre quinze jours avant la signature du contrat de marché. Selon Raphaël Apelbaum, « cela risque d’être une source de contentieux, car nous allons à l’encontre du droit européen et du principe d’un droit au recours effectif accordé à tout opérateur ».

II – Les marchés de partenariat

La deuxième partie du décret est consacré aux marchés de partenariat. Ces contrats remplacent les partenariats public-privé (PPP) mais aussi les baux emphytéotiques administratifs (BEA) et autres autorisations d’occupation temporaire (AOT) du domaine public lorsque ceux-ci étaient employés comme contrats de commande publique (deux outils fort appréciés par les collectivités locales).

Le marché de partenariat permet de confier à une entreprise ou à un groupement d’entreprises une mission ayant notamment pour objet :

  • la construction, la transformation, la rénovation, le démantèlement ou la destruction d’ouvrages, d’équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public ou à l’exercice d’une mission d’intérêt général ;

  • tout ou partie de leur financement.

Son lancement est conditionné à la réalisation d’une évaluation et d’une étude préalables pour s’assurer que cette procédure est plus favorable que les autres modes de réalisation du projet. Le décret du 25 mars précise les conditions de recours aux marchés de partenariat : l’appréciation du bilan plus favorable se fera au regard de l’étendue du transfert de la maîtrise d’ouvrage du projet au titulaire, du périmètre des missions susceptibles de lui être confiées, des modalités de partage des risques ainsi que du coût global du projet, compte tenu notamment de la structure de financement envisagée (art. 152).

Le seuil au-delà duquel les acheteurs peuvent recourir au marché de partenariat, est fixé à :

  • deux millions d’euros HT lorsque l’objet principal du marché de partenariat porte sur des biens immatériels, des systèmes d’information ou des équipements autres que des ouvrages ainsi que lorsque le contrat comporte des objectifs chiffrés de performance énergétique et prévoit que la rémunération du titulaire tient compte de l’atteinte de ces objectifs ;

  • cinq millions d’euros HT lorsque l’objet principal du marché de partenariat porte sur les ouvrages d’infrastructures de réseau et les ouvrages de bâtiment pour lesquels seules les missions de conception, construction et financement sont confiées au titulaire ;

  • dix millions d’euros HT pour les autres prestations ou ouvrages.

En outre, pour mieux apprécier la pertinence du recours à ces contrats complexes, les marchés de partenariat seront désormais soumis à une « démarche d’évaluation préalable renforcée » confiée à Fin Infra, et un bilan détaillé devra démontrer la pertinence du recours à ce type de marché. De même, l’étude de soutenabilité, qui détermine si un projet est viable pour les finances de l’acheteur, sera également soumise à l’avis des services compétents.

Le ministère de l’Économie a annoncé la transformation de la mission d’appui au financement des infrastructures (fin infra). Cette mission constituera « un pôle d’expertise public de la structuration juridique et financière – et plus largement du financement – des opérations d’investissement dans les infrastructures » et aura pour mission de « favoriser le financement des projets d’investissement décidés par les acteurs publics, d’optimiser la valeur et le coût global des projets, et de sécuriser les opérations ».

Notes de bas de pages

  • 1.
    La publication du décret n° 2016-360 relatif aux marchés publics est accompagnée de celle d’un second texte spécifique aux marchés publics de défense ou de sécurité, le décret n° 2016-361.
  • 2.
    Par ailleurs cinq avis ont été publiés au JORF n° 0074 du 27 mars 2016 : Avis relatif aux seuils de procédure et à la liste des autorités publiques centrales en droit de la commande publique – NOR : EINM1608119V.
  • 3.
    Avis relatif à la liste des activités qui sont des travaux en droit de la commande publique – NOR : EINM1608130V.
  • 4.
    Avis relatif à la liste des dispositions internationales en matière de droit environnemental, social et du travail permettant de rejeter une offre comme anormalement basse en matière de marchés publics – NOR : EINM1608173V.
  • 5.
    Avis relatif à la nature et au contenu des spécifications techniques dans les marchés publics – NOR : EINM1608199V.
  • 6.
    Avis relatif aux contrats de la commande publique ayant pour objet des services sociaux et autres services spécifiques – NOR : EINM1608208V.
  • 7.
    Le décret abroge notamment le décret n° 2005-1308 du 20 octobre 2005 relatif aux marchés passés par les entités adjudicatrices mentionnées à l’article 4 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au Code des marchés publics et le décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 relatif aux marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs mentionnés à l’article 3 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au Code des marchés publics.
  • 8.
    Les bons de commande sont définis à l’article 80 du décret par opposition aux accords-cadres qui ne fixent pas toutes les stipulations contractuelles et qui donnent lieu à la conclusion de marchés subséquents.
  • 9.
    Cette liste n’est pas exhaustive et présente des exemples de justifications que le soumissionnaire peut fournir pour démontrer le sérieux de son offre. D’autres explications peuvent donc être apportées et aucune n’est exclue a priori.
  • 10.
    V. aussi l’article 30 du décret qui détaille les cas de marchés publics négociés sans publicité ni mise en concurrence préalable.
  • 11.
    En revanche, lorsque l’acheteur se réfère expressément à l’une des procédures formalisées, il est tenu de l’appliquer dans son intégralité.
  • 12.
    D. n° 2016-360, art. 41.
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