« Il y a un engouement pour la création d’entreprise dans le 93 ! »
Après avoir été développeur économique pour la ville de Noisy-le-Grand, au sud de la Seine-Saint-Denis, Léa Pons a rejoint le réseau Entreprendre 93, une association qui a pour objectif de créer de l’emploi en aidant à la création d’entreprise. Pour Les Petites Affiches, elle explique son fonctionnement et ses missions, dans un département où la création d’entreprise fait de plus en plus d’émules.
LPA
Qu’est ce que le réseau Entreprendre 93 ?
Léa Pons
Nous sommes une association fondée il y a trente ans par André Mulliez, industriel du Nord de la France. Confronté à une grave crise dans le secteur du textile, il a du licencier massivement. Très éprouvé par cela, il a cherché des solutions et a eu l’idée que, tant qu’il n’y aurait pas d’entreprises prospères sur un territoire, il n’y aurait pas d’emploi durable. Il a fondé le réseau Entreprendre, qui a pour raison d’être de créer des entreprises pour créer des emplois. L’association a maintenant des antennes partout en France, et même à l’international, dans des pays comme le Chili, le Maroc, l’Espagne et la Tunisie. Depuis quinze ans, nous sommes présents en Seine-Saint-Denis. On commence à être un peu connus : on travaille avec la CCI, avec le département pour les bénéficiaires du RSA, avec les pépinières d’entreprise et les incubateurs qui orientent les gens vers nous. Notre association compte 135 chefs d’entreprises bénévoles. Parmi eux, il y a un certain nombre de personnes que nous avons aidé à se lancer.
LPA
Quelle est votre mission ?
L. P.
On aide la création d’entreprise par trois leviers. Le premier, c’est l’aide au financement. Nous faisons des prêts à 0 % de 15 000 à 50 000 euros. Le second, c’est l’accompagnement individuel des créateurs d’entreprises. Un réseau de parrains, c’est-à-dire de chefs d’entreprise, accompagne des personnes qui ont un projet de création d’entreprise de manière bénévole en leur proposant un rendez-vous par mois pendant deux ans. Le chef d’entreprise expérimenté écoute celui qui se lance, cela crée des liens très forts. Le troisième volet, c’est l’accompagnement collectif. Une fois par mois, nous organisons des clubs ou des ateliers au cours desquels les lauréats peuvent échanger entre eux. Ces rencontres ont lieu soit chez nous, soit dans les locaux des personnes que nous accompagnons. Varier les lieux de ces clubs nous permet de faire découvrir le département aux chefs d’entreprise. La Seine-Saint-Denis n’est pas un département comme les autres. On accorde un intérêt particulier à l’égalité des chances, veillons à aller vers les femmes, les jeunes, les seniors, pour que le maximum de la population puisse créer une entreprise.
LPA
Qui peut prétendre à votre aide ?
L. P.
Ce qu’on cherche, c’est la création d’emplois. Par conséquent, nous accompagnons les créations d’entreprise qui ont pour objectif de créer au minimum 6 emplois dans les 3 ans. Lorsqu’un candidat vient à nous, il rencontre d’abord 4 à 5 chefs d’entreprise du réseau. Si la majorité de leurs retours sont positifs, il passe devant un comité d’engagement, composé cette fois de 10 à 12 chefs d’entreprise. À l’issue de ce comité, on décide de l’accompagner ou non. Le comité n’est pas toujours le même. Notre réseau compte 135 membres qui se relaient pour le constituer. L’an dernier, nous avons accompagné 24 entreprises. Cela représentait en fait 47 lauréats, car certains projets comptaient plusieurs associés.
LPA
Quels sont les critères valorisés par le comité ?
L. P.
La création d’emploi est le premier critère. Nous cherchons des projets avec un potentiel de développement en Seine-Saint-Denis. Il faut que les candidats aient besoin de financement assez conséquents, d’un minimum de 70 000 € : en-dessous de ce seuil, il est très compliqué de créer une PME qui génère de l’emploi. Nous ne finançons jamais tout. Les lauréats doivent ensuite trouver d’autres partenaires, aller voir les banques…
LPA
Savez-vous ce que deviennent vos lauréats ?
L. P.
Nous les accompagnons pendant deux ans, nous avons un très bon suivi. Nous savons qu’il y a 91 % de pérennité sur trois ans. C’est beaucoup en Seine-Saint-Denis, où la moyenne de survie sur trois ans se situe entre 50 et 60 %. Parmi les lauréats, nous avons de très belles réussites, comme l’école du numérique Simplon à Montreuil, ou les salles d’escalade « in doors » Arkose. Au bout de deux ans, ils deviennent des chefs d’entreprise aguerris et deviennent bénévoles à leur tour. Accompagner à leur tout est un engagement moral qu’ils prennent quand ils nous rejoignent.
LPA
Comment percevez-vous la Seine-Saint-Denis ?
L. P.
C’est un département en pleine explosion. On a d’ailleurs de plus en plus de demandes. On sent un véritable engouement autour de la création d’entreprise. Seulement, s’il y a beaucoup de création d’entreprises, il y a aussi beaucoup de fermetures ! Beaucoup de personnes créent leur entreprise pour créer leur propre emploi et ne savent pas bien dans quoi elles se lancent. Les Dyonisiens ont vraiment besoin d’être accompagnés. Souvent, ils connaissent mal les obligations que l’on a lorsque l’on crée une entreprise – démarche administratives, mutuelle obligatoire pour les salariés que l’on recrute… Ils manquent également de financement. Avec peu ou pas d’apport personnel, les candidats que nous accompagnons ont besoin de nous pour avoir des premiers fonds et pouvoir ensuite aller voir les banques.
LPA
Quelle est la clé du succès pour une création d’entreprise ?
L. P.
Il y en a une seule : être accompagné. On tâtonne toujours lorsque l’on crée une entreprise. Que l’on fasse appel à une structure comme la nôtre ou aux services de la CCI, une chose est importante : ne pas rester seul !