Une liste d’unité pour les CCI du Grand Paris
Pour la première fois, Medef, CGPME et fédérations professionnelles ont décidé de s’allier pour les élections des représentants aux CCI qui ont lieu du 20 octobre au 2 novembre. C’est donc sous le label Unipec que les organisations patronales ont présenté leurs listes communes.
Organisées tous les cinq ans, les élections consulaires permettent aux chefs d’entreprises et cadres dirigeants d’élire les représentants qui siégeront aux chambres de commerce départementales et régionales. Les enjeux sont importants car les CCI jouent un rôle essentiel pour l’économie au niveau local, que ce soit en termes de soutien aux entreprises ou d’accélération du développement économique. Et justement, les années à venir seront cruciales pour le Grand Paris et son écosystème économique : opportunités liées au Brexit, candidature aux Jeux olympiques de 2024, développement du Grand Paris Express avec les futures lignes de métro en construction et peut être même l’organisation de l’Exposition universelle de 2025. Les différents acteurs et responsables des réseaux consulaires appellent donc tous à une mobilisation des électeurs pour donner une meilleure légitimité à leurs actions sur le terrain.
Rassemblement des organisations patronales
Pour la première fois, c’est une liste d’union composée de la CGPME, du Medef et des fédérations professionnelles qui se présente dans cinq départements du Grand Paris (Paris, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne et Val-d’Oise). Sous la bannière Unipec, les organisations patronales souhaitent fédérer les entreprises et gagner en visibilité. Pour Éric Berger, président du Medef Ile-de-France, la décision se justifie aisément : « En partant du principe que nous avions les mêmes idées, nous avons œuvré pour trouver une solution. Créer une liste d’unité est vite devenu une évidence et ça s’est fait plutôt naturellement ». Il faut en effet se rappeler que lors des élections consulaires de 2010, les différentes organisations s’étaient affrontées par listes interposées. « Ce fut contre-productif pour tout le monde », se souvient M. Berger ; « nous avons essayé de tirer les enseignements de ce qui s’est passé lors des dernières élections. Car si au niveau national il existe évidemment des différends entre M. Gattaz et M. Asselin – présidents respectifs du Medef et de la CGPME –, au niveau local nous avons le même objectif : soutenir les entreprises, l’activité économique et l’emploi », rajoute-t-il.
La CNDI, défenseur des petites entreprises
Sur les départements de la Seine-Saint-Denis (93) et du Val-d’Oise (95), la liste Unipec sera la seule en lice. Sur les autres départements où la liste d’union est présente, elle se retrouvera face à la CNDI (Coordination nationale des indépendants). Créée en 2007, l’organisation est forte de plusieurs succès aux élections prud’homales et se présente pour la deuxième fois aux élections consulaires. Présidé par Olivier Bidou, également gérant de France Imprim’, la CNDI cible principalement les entreprises de moins de 10 salariés et les commerçants. « Nous avons créé la CNDI en partant du constat que personne ne défendait les petits entrepreneurs. C’est ce rôle que nous souhaitons remplir et c’est la raison pour laquelle nous nous présentons à ces élections », explique le chef d’entreprise. Principal point de son programme : la taxe professionnelle votée par les chambres de commerce et d’industrie et dont il souhaite une révision majeure. « Les petites entreprises sont complètement étouffées par cet impôt qui leur est extrêmement défavorable ».
Les électeurs appelés à voter à ce scrutin pourront le faire par courrier ou voie électronique (sur www.jevote.cci.fr) entre le 20 octobre et le 2 novembre à minuit. Les résultats des élections seront connus au plus tard le 10 novembre et seront annoncés par la préfecture de police de Paris.
Danielle Dubrac, tête de liste Unipec en Seine-Saint-Denis (93), évoque pour les Petites Affiches les problématiques de ce scrutin.
Les Petites Affiches – Quels sont les sujets qui concernent les CCI ?
Danielle Dubrac – On a aujourd’hui de nouvelles formes d’économie qui viennent perturber les schémas existants. Je pense à l’économie collaborative par exemple, qui bouleverse certains secteurs, comme le domaine de l’immobilier ou celui des chauffeurs. De la même manière, l’embauche des jeunes reste un sujet d’inquiétude, il faut que l’on puisse offrir d’autres choses que le chômage à la jeunesse dans nos banlieues. Sur ces problématiques, la chambre de commerce et d’industrie peut être à la fois un acteur et un vecteur des bonnes volontés. Nous avons tous intérêt à agir et la CCI peut représenter le lieu qui le permet. Elle a aussi un vrai rôle de porte-parole, avec la montée en puissance du pouvoir économique des régions elle va devenir le grand interlocuteur du conseil régional.
LPA – Pouvez-vous nous parler des priorités de votre programme ?
D. D. – Elles sont multiples. Nous avons d’abord les réseaux de type PLATO qui doivent être poursuivis et soutenus. Ces derniers permettent aux entreprises de créer des liens et de répondre entre elles à leurs besoins. Nous souhaitons aussi continuer la politique d’accompagnement de diagnostics sur le numérique et sur la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Des sujets qui ne sont pas évidents pour toutes les entreprises, certaines ne sont pas à jour sur ces points. Évidemment, le commerce est aussi une de nos priorités, avec leur maintien dans les centres-villes. Nous continuerons de travailler de concert avec les villes pour arriver à dynamiser les zones économiques-clés. Les commerçants auront aussi besoin d’aide avec la nouvelle réglementation sur le travail le dimanche, ou les évolutions des habitudes de consommation de leur clientèle. Nous serons présents pour les accompagner. Un dernier point important est le respect de l’équilibre entre emploi et habitat. Les programmes de logement sont évidemment un élément positif, mais ils ne doivent pas grignoter le dynamisme des zones d’activités.
LPA – Il y a également une problématique autour de l’image de la Seine-Saint-Denis ?
D. D. – Oui, et travailler sur l’image du territoire est tout aussi important que s’occuper des problèmes de transports et d’emploi. Lorsque vous proposez des offres d’emplois, mais que vous rencontrez des difficultés à recruter parce que les gens ne veulent pas venir là où vous êtes implantés, ça rajoute une difficulté supplémentaire. La Seine-Saint-Denis a un potentiel extraordinaire, mais possède aussi de nombreux paradoxes. Il s’agit par exemple du troisième collecteur de TVA en France, et dans le même temps du territoire avec le plus de chômage en dehors des DOM-TOM. On y retrouve le meilleur et le pire, c’est un territoire en devenir et il ne faut pas que l’on ralentisse la région capitale. C’est pour ça qu’il y a un intérêt à ce que chacun ait sa place dans le dynamisme du département. Nous sommes aujourd’hui arrivés à rattraper notre retard sur les transports à travers le tramway et le Grand Paris Express, maintenant il faut que le développement économique profite à tout le monde. Car si la population n’en voit pas les effets, nos territoires rebasculeront dans les épisodes d’émeutes qu’on a pu connaître. Notre objectif est d’apporter des solutions aux problèmes des entreprises et, comme je l’expliquais, la chambre peut être un lieu de rencontre entre acteurs publics et privés autour de la compétence et du pouvoir économique.
LPA – Quels sont les grands rendez-vous auxquels le département devra répondre ?
D. D. – Il y a évidemment le Grand Paris Express et les JO 2024 à l’horizon. Ce type d’événement est important sur le plan économique bien sûr, mais aussi en termes d’optimisme que cela apporte à la population et aux dirigeants d’entreprises. Les CCI sont présentes pour donner des avis techniques. Lorsqu’il y a eu l’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO) pour le tramway, nous ne sommes pas intervenus politiquement sur les tracés, mais nous étions présents sur l’aspect technique des travaux. Concrètement cela veut dire l’analyse de l’impact sur les commerces, les dédommagements accordés aux commerçants pénalisés par les travaux publics, etc. En tant qu’acteur de terrain nous connaissons mieux que n’importe qui la carte d’implantation des services, commerces et entreprises. Ce type d’information est précieux et lorsque de grands projets sont entrepris, nous sommes capables d’anticiper les conséquences sur le tissu économique local pour apporter des réponses. La CCI va aider les entrepreneurs en leur faisant bénéficier de l’accès aux bonnes informations. Ça leur permet d’aller défendre un appel d’offres seul ou à plusieurs parce qu’on les a aidés à connaître ces marchés. Les grands événements, tel que l’était l’Euro de football 2016, permettent de créer un engouement chez les entrepreneurs. C’est aussi grâce aux grands projets qu’on arrive à changer petit à petit l’image du département, et ça permet de créer une dynamique économique.
LPA – Est-ce que la participation sera une donnée importante de ce scrutin ?
D. D. – Oui, il faut convaincre les personnes de voter à ces élections. Ce sont les entreprises qui font l’économie et il faut qu’elles aient la parole. C’est grâce à leurs représentants qu’elles accèdent à une expression. Nous sommes des chefs d’entreprises sur le terrain comme eux et nous essayons de les défendre sur la réglementation, de les aider sur le management ou le développement économique.
Les chambres sont présentes pour offrir des outils d’aide à la décision. Ce qui est important pour nous dans un département de la Seine-Saint-Denis où le meilleur et le pire se côtoient, c’est aussi de leur faire connaître les richesses du territoire. Pour une entreprise il est nécessaire de bien connaître son environnement. Cela permet de faire travailler les entreprises du territoire et d’employer la population locale. Il est vrai que le mode de scrutin est un peu compliqué et que le calendrier n’est pas idéal, mais il faut que les entrepreneurs se mobilisent quand même.