Val-de-Marne (94)

Val-de-Marne : après la crise économique, la reprise

Publié le 14/08/2020

Les entreprises du Val-de-Marne ont été contraintes de s’adapter dans l’urgence à de nouveaux modes de fonctionnements (télétravail, mise en place des mesures de distanciation sociale, roulement au sein des bureau, etc.). La moitié des répondants d’une étude menée par la CCI Paris Île-de-France et la CRMA ont dû fermer administrativement, proportion montant jusqu’à 80 % pour l’immobilier et le tourisme et plus des deux tiers pour les entreprises culturelles. Les besoins ont été criants : en équipements individuels (pour 58 % des répondants) tout comme en trésorerie (pour 43 % des répondants). Alors que des freins existent – comme la baisse de la demande ou les incertitudes sur les consignes d’hygiène et de sécurité – les entreprises tentent de relancer leur dynamique. Celles du Val-de-Marne ne font pas exception et des dispositifs les y aident d’ores et déjà.

« La crise a été un moment brutal », concède Alice Olivieri, cheffe de projet réseaux d’entreprises à la CCI 94. Pourtant, il fallait absolument à la CCI, interlocutrice prioritaire des entreprises locales, être présente pour apporter aux entreprises « tout son soutien ». Très vite, se rappelle-t-elle, une cellule de crise a été mise sur pied, afin de répondre aux nombreuses questions que se posaient les dirigeants, notamment concernant toutes les mesures gouvernementales qui se succédaient, ou les conditions d’éligibilité à certaines aides. « Nous avons appelé les entreprises, nos clients, pour les rassurer. Nous voulions leur montrer qu’ils n’étaient pas seuls, et que nous étions présents », éclaire-t-elle.

Face à elle et aux autres conseillers, des entreprises chamboulées qui, se rappelle-t-elle, « ont dû très rapidement se réorganiser ». Et les difficultés, dans ce contexte, ont été unanimement partagées. À l’occasion d’une enquête réalisée auprès de plusieurs milliers d’entrepreneurs franciliens, les résultats partagés par Alice Olivieri sont sans nuance : « 80 % des entreprises répondantes annoncent une baisse de leur chiffre d’affaires. 35 % ont eu des difficultés de trésorerie, et 27 % ont connu des ruptures d’approvisionnement. Depuis, le trou a dû encore se creuser », puisque l’étude date du début du confinement, estime Alice Olivieri. Elle détaille : certains secteurs ont été terriblement touchés, en premier lieu les commerces hors alimentaire, d’autant plus impactés à cause des « loyers et des lourdes charges liées à un local ». L’événementiel également a connu un arrêt quasi total, tout comme les entreprises de communication. Les entreprises de livraison s’en sont mieux sorties, car elles ont pu continuer à exercer une activité, même si tout n’a pas été simple, « avec des salariés qui avaient peur de retourner au travail », avec pour conséquence, parfois, un manque de salariés. « Dans ce cas, difficile d’assurer la continuité du service », reconnaît Alice Olivieri.

Alors que les entreprises naviguent encore à flots, une certitude émerge : les impacts de la crise seront durables. Selon l’enquête francilienne menée par la CCI Paris et la CRMA, la moitié des entreprises estiment que la durée de retour à la normale sera supérieure à six mois. Les secteurs du tourisme, de la culture et du commerce de gros et détail sont les plus pessimistes.

Val-de-Marne : après la crise économique, la reprise
treety/AdobeStock

Reboost, Soluccio, des accompagnements offerts aux entreprises

Face à cette crise sans précédent, la CCI 94 offre aujourd’hui, pour une valeur d’environ 4 000 euros (avec le soutien de la Direccte et de trois territoires du Val-de-Marne), un accompagnement (de juin à décembre 2020), tant individuel que collectif. En difficultés, bouleversées, « les entreprises qui intègrent le parcours sont très motivées », constate Alice Olivieri. Évidemment, la perception de la situation diffère d’une personne à l’autre, ainsi que la capacité à positiver sur certains points, tout comme celle de tout remettre à plat. Elle revient sur le dispositif, qui concernera à terme 90 entreprises, tous secteurs confondus (BTP, industrie, conseils, service, informatique, spectacle…) et de 1 à 40 salariés. « Au sein de ce parcours, les entreprises pourront bénéficier de coaching, de conseils sur leur stratégie, avec une vraie volonté de revoir le modèle économique de l’entreprise. 9 heures  sont dédiées à la stratégie sur les 30 heures au total, ce qui montre bien l’accent mis sur ce point ». Parmi leurs préoccupations, la question de l’approvisionnement, remise à plat par la crise où le local a joué sa carte. « Il y a un atelier sur la supply chain, avec, en filigrane, la question de l’impact écologique et de l’approvisionnement », détaille Alice Olivieri. « L’idée d’avoir un fournisseur à trois rues et plus au bout du monde émerge. C’est un sujet très pertinent, d’autant plus en raison de ce qu’on a vécu ». Mais aussi, sans surprise, le numérique : « Les entreprises étaient avides de le mettre en place ».

Le point fort du parcours Reboost ? La force du collectif. « Ce qui est innovant dans ce programme, ce sont les ateliers de co-développement. Nous faisons appel à l’intelligence collective sur une thématique définie en mettant en relation des dirigeants qui partagent une même problématique, avec l’idée que la résolution des problèmes peut se faire ensemble ». Aux yeux d’Alice Olivieri, les avantages de cette approche sont nombreux : à la fois le partage d’expérience, et la demande comblée des entrepreneurs de faire partie d’un écosystème proche d’eux, continuité d’une entraide développée naturellement pendant le confinement. « Les dirigeants sont souvent seuls, et cela les rassure de voir que d’autres dirigeants ont été confrontés aux mêmes choses, qu’ils ont connu les mêmes difficultés dans la gestion de leur entreprise ».

Si le programme a ouvert ses portes, le nombre d’entreprises inclus n’est pas encore arrivé à son maximum. « Certaines entreprises sont encore en gestion de crise, elles ont la tête dans le guidon et n’ont pas le temps de prendre le recul nécessaire et de se poser les bonnes questions. Cela dépend du secteur, de la maturité des entreprises, certaines sont happées par le pur opérationnel », éclaire Alice Olivieri, qui prédit que de nouvelles candidatures arriveront sur le bureau de la CCI plus tardivement, quitte à suivre un programme en version plus concentrée, sur un temps plus réduit. « C’est un programme flash », rappelle-t-elle, afin de les accompagner dans la gestion de l’urgence. « Alors si cette offre gratuite pour les entreprises leur permet de capitaliser sur d’autres postes de dépense, et contribuer à la pérennité des entreprises », la mission sera remplie. Car le but de Reboost ne consiste pas seulement à aider à l’instant T, mais à effectuer aussi un bilan de la santé des entreprises qui auront été accompagnées. « Nous allons suivre l’évolution du chiffre d’affaires, vérifier le taux de maintien de l’emploi voire la création d’emploi, et suivre les évolutions du dirigeant en tant que tel ».

Le territoire val-de-marnais peut également bénéficier du programme « Relance entreprise » de Soluccio, développé au niveau régional. Élisabeth Wallerand, responsable entreprises de la CCI Val-de-Marne, détaille cet accompagnement, plus pertinent que jamais. « Les dirigeants que nous avons actuellement au téléphone sont certes au milieu du guet, mais ils ne sont pas démoralisés pour autant. Ils sont plutôt dans l’optique d’une reprise ». Elle souligne, comme Alice Olivieri, qu’ils ne sont cependant pas dans la perspective de « reprendre comme avant », mais au cœur d’une réflexion stratégique. La crise a été, pour beaucoup, un véritable révélateur. « Pour ceux qui remettaient au surlendemain le passage au numérique, cela devient crucial de penser le numérique pas seulement comme un site vitrine mais marchand aussi, par exemple », précise-t-elle. Sécuriser son business, se conformer aux réglementations, à la sécurité, aux RH, tout comme développer le côté purement commercial, envisager la croissance externe ou encore les reprises d’entreprise, autant de points abordés lors de cet accompagnement. Le site offre non seulement un « diagnotic » qui passe par une « check-list relance » (une série de 20 questions thématiques) et le suivi par un conseiller, mais aussi des fiches pratiques et webinars gratuits pour se former et s’informer.

Destiné aux entreprises qui en ont vraiment besoin, les critères d’accès à Soluccio sont simples : « avoir maximum 250 salariés, posséder son siège social en Île-de-France et être une PME au sens européen du terme ».

À ses yeux, et « de loin », c’est la digitalisation qui est le module le plus demandé, qu’il s’agisse de la prise de conscience de l’inévitabilité du numérique que de sa mise en place : création d’un site, relation avec les clients, gestion des réseaux sociaux, cybersécurité ou encore référencement, tous les aspects sont abordés thématiquement. L’accompagnement financier, un peu moins demandé, est pourtant important pour « optimiser le plan de trésorerie, évaluer le prévisionnel sur 12 mois, ou encore finaliser un montage ou un dossier bancaire destiné à un prêt garanti par l’État ». Les conseillers rattachés à Soluccio peuvent donc, et c’est là un gros point fort, proposer un plan détaillé et des solutions concrètes réellement adaptées aux besoins de l’entreprise en question.

En filigrane se dessine aussi le futur avec des entreprises plus sensibles aux questions écologiques. « Les chefs d’entreprise espèrent capter de nouveaux marchés, car de plus en plus d’acheteurs exigent une démarche RSE », analyse Élisabeth Wallerand, qui ne remet pas en question pour autant la sincérité des sociétés

Enfin, dans l’optique de la reprise, le programme Soluccio propose un volet spécial RH. En effet, « toutes les entreprises ne sont pas dans l’optique de se séparer de leurs salariés, certaines cherchent à recruter, notamment des commerciaux », détaille-t-elle. Là encore, le conseiller en charge du suivi peut aider à préconiser un véritable plan d’action. Pour l’instant, environ 80 entreprises se sont inscrites dans le Val-de-Marne, mais ce sont environ 150 entreprises qui souhaiteraient entrer dans le dispositif

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