L’encadrement des loyers en Seine-Saint-Denis enregistre de bons résultats

Publié le 10/11/2023
L’encadrement des loyers en Seine-Saint-Denis enregistre de bons résultats
Svitlana/AdobeStock

De nombreuses communes du département de Seine-Saint-Denis (93) sont soumises au dispositif d’encadrement des loyers, qui permet de lutter contre la progression des prix. La mesure donne de bons résultats sur ces territoires.

L’encadrement du niveau des loyers permet de plafonner le montant des loyers des logements situés dans des zones tendues, lors d’une première mise en location ou du renouvellement du bail. Le dispositif de l’encadrement des loyers dans les zones tendues a pour objectif d’agir sur les loyers excessifs et de contenir les hausses de loyers abusives constatées dans les territoires les plus tendus, pour ainsi préserver le pouvoir d’achat des Français et faciliter l’accès au logement. Situé en zone tendue, le département de Seine-Saint-Denis (93), concentre des difficultés importantes en matière de logement. Les loyers y progressent très rapidement. D’après les chiffres de l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (OLAP), entre 2009 et 2019, les loyers y ont augmenté de 21,6 %. Une évolution à rapprocher de celle de Paris, où les loyers ont bondi de 22,6 % sur la même période, d’après l’Observatoire. L’écart entre le niveau de loyer constaté dans le parc locatif privé et le loyer moyen pratiqué dans le parc locatif social y est élevé ; le taux de logements en production par rapport aux logements existants sur les cinq dernières années apparaît faible et les perspectives de production pluriannuelle de logements limitées en matière d’évolution.

La notion de zones tendues

Les zones tendues sont les secteurs géographiques se caractérisant par un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement. Il s’agit initialement des zones sur lesquelles s’applique la taxe sur les logements vacants, qui figurent sur la liste annexée au décret no 2013-392 du 10 mai 2013. L’article 73 de la loi no 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a permis de revoir les critères de définition des communes relevant d’une zone tendue faisant face à des difficultés particulières d’accès au logement. La liste des communes incluses dans ce nouveau zonage est fixée par décret après consultation des associations d’élus (AMF, France Urbaine, Intercommunalités de France, ANEL, AMEL, ANETT, etc.) et après avoir effectué l’ensemble des consultations obligatoires. Au total, la nouvelle liste du zonage comporte 3 693 communes.

Un dispositif expérimental…

Cette possibilité a été introduite par la loi no 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite ELAN, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, sous la forme d’une expérimentation prévue initialement pour une durée de cinq ans. Cette expérimentation de l’encadrement des loyers a été prolongée jusqu’en 2026 par la loi no 2022-217 du 21 février 2022, dite 3DS. Il s’agit d’un dispositif volontaire et mis en place à titre expérimental par les collectivités. Dans les zones concernées par l’encadrement des loyers, les montants des loyers ne peuvent excéder les loyers de référence fixés chaque année par arrêté préfectoral. Cette réglementation s’articule avec le décret annuel de limitation de la hausse des loyers à l’indice de référence des loyers (IRL) appliqué depuis 2012 dans les 28 zones tendues dont l’agglomération parisienne.

… applicable depuis 2021

Depuis le 1er juin 2021, l’encadrement des loyers est entré en vigueur dans les neuf communes composant l’établissement public territorial (EPT) de Plaine Commune : Aubervilliers, Épinay-sur-Seine, L’Île-Saint-Denis, La Courneuve, Pierrefitte, Saint-Denis, Saint-Ouen, Stains et Villetaneuse. Au 1er décembre 2021, ce dispositif est entré en vigueur dans les neuf communes composant l’EPT d’Est Ensemble : Bagnolet, Bobigny, Bondy, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-Sec, Pantin, Le Pré-Saint-Gervais, Romainville. Chaque année, le préfet fixe par arrêté le loyer de référence, le loyer de référence majoré et le loyer de référence minoré, exprimés par un prix au m² de surface habitable. Ces loyers de référence sont déterminés en fonction du marché locatif observé par l’OLAP et déclinés par secteurs géographiques (regroupant un ou plusieurs communes ou quartiers) et par catégories de logement (appartement/maison, nombre de pièces, nu/meublé et époque de construction du bâtiment).

Un complément de loyer possible

En principe, le loyer hors charges d’un logement mis en location ne peut dépasser le loyer de référence majoré. Par exception, si la qualité du bien le justifie, l’investisseur-bailleur peut opter pour un complément de loyer, pour un bien présentant des caractéristiques de localisation ou de confort déterminantes, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique. Ce complément de loyer doit être expressément mentionné, chiffré et justifié dans le bail. Le législateur n’a pas défini les caractéristiques de confort ou de localisation propre à mettre en place un complément de loyer, pas plus qu’il n’en a précisé les éléments de valorisation, ce qui pose en pratique des difficultés d’interprétation, même si la jurisprudence commence à proposer des lignes directrices en la matière. La loi no 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a cependant listé une série de défauts rédhibitoires en présence desquels aucun complément de loyer ne peut être prévu pour les baux signés depuis le 18 août 2022. Il s’agit des biens :

– disposant de sanitaires sur le palier ;

– présentant des signes d’humidité sur certains murs ;

– classé F ou G en termes de performance énergétique ;

– ayant des fenêtres qui laissent anormalement passer l’air (hors grille de ventilation) ;

– présentant un vis-à-vis de moins de dix mètres ;

– subissant des infiltrations ou inondations provenant de l’extérieur du logement ;

– rencontrant des problèmes d’évacuation d’eau au cours des trois derniers mois ;

– présentant une installation électrique dégradée.

Une réglementation de mieux en mieux respectée

D’après les chiffres de la deuxième édition du baromètre de l’encadrement des loyers publié par la fondation Abbé-Pierre, ce dispositif est encore appliqué de manière très inégale. Cependant le taux d’annonces qui se situent hors du cadre est plus raisonnable dans des territoires nouveaux de l’encadrement, comme Plaine Commune (33 %). Il est même excellent à Est-Ensemble, avec seulement 14 % d’annonces dépassant les plafonds de loyer, même si ce territoire de banlieue parisienne dispose encore de trop peu d’annonces analysées par le baromètre de la fondation Abbé-Pierre (138 annonces) pour tirer des conclusions complètement définitives. Des chiffres très encourageants ; cependant, souligne le baromètre de l’encadrement des loyers, « au vu du faible nombre d’amendes dressées envers les propriétaires contrevenants, l’heure est désormais au renforcement du contrôle du respect de cette loi utile, mais trop longtemps négligée par l’État. On peut se réjouir de voir de nombreuses collectivités s’emparer du sujet et multiplier les initiatives, en lien avec la société civile, pour faire connaître leurs droits aux locataires ».

Un cadre contraignant

Si le préfet constate qu’un bail ne respecte pas le loyer de référence majoré prévu par arrêté, il peut adresser une mise en demeure au bailleur, lui rappelant le manquement constaté et lui enjoignant de mettre le contrat en conformité avec le loyer de référence et de restituer le trop-perçu de loyer à son locataire dans un délai de deux mois. Cette mise en demeure doit informer le bailleur du montant maximal de la sanction encourue en l’absence de réaction et lui indiquer qu’il dispose d’un délai d’un mois pour présenter ses observations. Dans le délai imparti, le bailleur doit transmettre au préfet une copie du contrat mis en conformité ainsi que les éléments lui permettant de justifier le remboursement de trop-perçu au locataire. Sans réponse de la part du bailleur à cette mise en demeure, le préfet pourra prononcer une amende à son encontre, d’un montant maximum de 5 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale. Le montant de l’amende envisagée devra être proportionné à la gravité des faits reprochés et précisé au bailleur. La décision du préfet doit être motivée et mentionner les voies et délais de recours. Le prononcé de l’amende ne fait pas obstacle à ce que le locataire engage une action en diminution de loyer.

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