Les apports de la loi Égalité et citoyenneté en matière de réglementation des professionnels de l’immobilier
Après les textes des lois Alur et Pinel de 2014, de la loi Macron de 2015, et leurs nombreux textes d’application, les recodifications de 2015 et 2016, tantôt à droit constant (ord. du 23 sept. 2015 et décret du 28 déc. 2015 recodifiant le livre Ier du Code de l’urbanisme), tantôt à droit variant (ord. du 10 févr. 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations), pour ne citer qu’eux, le domaine de l’immobilier n’a, une nouvelle fois, pas été épargné par le législateur avec la loi du 27 janvier 2017 qui, à l’exception des mesures dont l’application nécessite la publication de textes réglementaires ou dont l’entrée en vigueur est différée, s’applique depuis le 29 janvier 2017.
Si la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté1, en matière immobilière, traite essentiellement du logement social à travers le titre II traitant de la mixité sociale et l’égalité des chances dans l’habitat, son chapitre V, relatif à des mesures de simplification, s’attarde sur le régime de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce.
En effet, la loi du 27 janvier 2017 est venue tirer les conséquences de la difficulté à créer la commission de contrôle des activités de transaction et de gestion immobilières chargée initialement de la discipline des professionnels de l’immobilier, pour réorganiser le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilière (I) et l’attribution de compétences en matière disciplinaire (II). La réorganisation du titre II bis de la loi a nécessité de déplacer l’obligation de confidentialité pesant sur les professionnels de l’immobilier (III).
I – Le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières
L’article 24 de la loi Alur avait prévu la création de deux organes d’encadrement et de contrôle propres aux professionnels de l’immobilier soumis à la loi Hoguet. Si le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières a été installé le 31 juillet 2014, la Commission de contrôle des activités de transaction et de gestion immobilières chargée de la discipline des professionnels de l’immobilier n’a jamais vu le jour, en raison, semble-t-il, de difficultés dans la définition de l’organisation et son financement. C’est pourquoi, la loi a fusionné dans une seule instance, le « Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières », les deux commissions initialement prévues, qui se voit doter la personnalité morale.
L’entrée en application du nouveau Conseil étant subordonnée à la publication de différents décrets, pour l’heure, il se poursuivra dans son mode de fonctionnement actuel.
Le nouveau Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières. Le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières, autorité publique dotée de la personnalité morale, remplace la Commission de contrôle des activités de transaction et de gestion immobilières.
Il a pour mission de veiller au maintien et à la promotion des principes de moralité, de probité et de compétence nécessaires au bon accomplissement des activités relevant de la loi Hoguet.
Il propose :
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les règles du Code de déontologie ;
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la nature de l’obligation d’aptitude professionnelle ;
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la nature de l’obligation de compétence professionnelle ;
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la nature et les modalités selon lesquelles s’accomplit la formation continue.
Il est consulté pour avis sur l’ensemble des projets de textes législatifs ou réglementaires relatifs à l’exercice des activités réglementées par la loi Hoguet.
Après enquête, il peut prononcer des sanctions disciplinaires.
Il établit un rapport annuel d’activité (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-1).
Un décret, pris en Conseil d’État, devra fixer les conditions d’application des nouvelles dispositions (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-3-2).
Le collège à vocation générale. La loi prévoit que le collège du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières est composé de 21 membres (contre 13 auparavant) :
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un magistrat de l’ordre judiciaire en activité ou un magistrat honoraire ;
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sept professionnels de l’immobilier, choisis en veillant à assurer la représentativité de la profession, sur proposition d’un syndicat professionnel ou d’une union de syndicats professionnels, représentatifs des professionnels de l’immobilier ;
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cinq anciens professionnels de l’immobilier ayant cessé d’exercer depuis au moins deux ans à la date de leur nomination, choisis dans les mêmes conditions, qui, avant leur nomination, doivent avoir établi une déclaration d’intérêts (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-2-1) ;
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cinq représentants des consommateurs choisis parmi les associations de défense des consommateurs agréées œuvrant dans le domaine du logement ;
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trois personnalités qualifiées dans le domaine de l’immobilier, notamment en droit des copropriétés ou de l’immobilier, dont l’une est désignée présidente.
Le président et les membres sont nommés par arrêté conjoint du garde des Sceaux, du ministre de la Justice, du ministre chargé du Logement et du ministre chargé de la Consommation.
Des suppléants du même sexe que les titulaires sont nommés dans les mêmes conditions pour les quatre premières catégories de membres.
L’écart entre le nombre de femmes et le nombre d’hommes ne peut être supérieur à un dans le collège et dans chacun des quatre dernières catégories membres.
Les membres sont nommés pour trois ans renouvelables.
En cas d’impossibilité pour l’un des membres d’achever son mandat, un nouveau membre est nommé pour la durée restant à courir.
Sauf dispositions contraires, les missions confiées au Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières sont exercées par le collège (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-2, I à IIII).
La formation restreinte à compétence disciplinaire. La loi prévoit que, en matière de sanctions disciplinaires, le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières statue en formation restreinte.
Elle est composée :
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du magistrat de l’ordre judiciaire, qui en est le président ;
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de trois membres élus parmi les membres de la catégorie des professionnels ayant cessé leur activité ;
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d’un membre élu parmi les membres de la catégorie des représentants des consommateurs ;
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d’un membre élu parmi les membres de la catégorie des personnalités de l’immobilier, qui, en cas d’empêchement de ce dernier, il est suppléé par celui des autres membres de cette catégorie qui n’est pas le président du Conseil (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-2, IV).
Le bureau. Le bureau est composé du président du collège et de deux membres élus parmi les membres de la catégorie des professionnels ayant cessé leur activité et des représentants des consommateurs (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-2, V). Les membres du bureau ne peuvent siéger dans la formation restreinte (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-2-1).
Le bureau peut prononcer une suspension provisoire (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-5-2, v. infra) et saisir la commission restreinte (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-5-3, cf. infra).
Le personnel. Le personnel du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières est composé d’agents publics détachés ou mis à sa disposition, d’agents contractuels de droit public et de salariés de droit privé (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-3).
Financement. Le financement du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières est assuré par le versement de cotisations professionnelles forfaitaires acquittées par les professionnels de l’immobilier soumis à la loi Hoguet.
Les cotisations sont recouvrées par le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières. Le montant de ces cotisations sera fixé par décret, après avis du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières et des organisations professionnelles représentatives des professionnels de l’immobilier, sans pouvoir excéder toutefois cinquante euros.
Le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières désigne un commissaire aux comptes et un commissaire aux comptes suppléant. Il est soumis au contrôle de la Cour des comptes (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-3).
II – La discipline
La loi de 1970 prévoit que tout manquement aux lois, aux règlements, ainsi qu’aux obligations fixées par le Code de déontologie ou toute négligence grave, commis par un professionnel de l’immobilier soumis à la loi Hoguet dans le cadre de l’exercice de ses activités, l’expose à des poursuites disciplinaires, qui se prescrivent par cinq ans à compter de la commission des faits. Le texte de préciser que la cessation des activités n’est pas un obstacle aux poursuites disciplinaires pour des faits commis pendant l’exercice des fonctions (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-4-1). Un décret, pris en Conseil d’État, devra fixer les conditions d’application des dispositions relatives à la discipline (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-6).
A – Les sanctions encourues
Les sanctions principales. Selon l’article 13-4-1 de la loi de 1970, les sanctions disciplinaires principales sont, compte tenu de la gravité des faits reprochés :
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l’avertissement ;
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le blâme ;
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l’interdiction temporaire, totale ou partielle, d’exercer et de gérer, diriger et administrer, directement ou indirectement, une personne morale exerçant ces mêmes activités, pour une durée n’excédant pas trois ans ;
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l’interdiction définitive, totale ou partielle, d’exercer et de gérer, diriger et administrer, directement ou indirectement, une personne morale exerçant ces mêmes activités.
Le sursis des interdictions temporaires et définitives. L’interdiction temporaire et l’interdiction définitive peuvent être assorties du sursis. Si, dans le délai de cinq ans à compter du prononcé de la sanction disciplinaire, la personne sanctionnée a commis une infraction ou une faute ayant entraîné le prononcé d’une nouvelle sanction disciplinaire, celle-ci entraîne, sauf décision motivée de la formation restreinte, l’exécution de la première peine sans confusion possible avec la seconde.
Les sanctions complémentaires. L’avertissement, le blâme et l’interdiction temporaire peuvent être assortis de la sanction complémentaire de l’interdiction d’être membre du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières pendant dix ans au plus.
L’avertissement, le blâme et l’interdiction temporaire peuvent aussi être accompagnés, pendant un délai d’un an, de mesures de contrôle et de formation soumettant la personne sanctionnée à des obligations particulières, fixées dans la décision de la formation restreinte. Le coût de ces mesures est supporté par le mis en cause, qui ne peut le mettre à la charge de son mandant.
Lorsqu’elle prononce une sanction disciplinaire, la formation restreinte peut décider de mettre à la charge de la personne sanctionnée tout ou partie des frais occasionnés par l’action disciplinaire.
Publicité. La formation restreinte peut publier ses décisions dans les journaux ou supports qu’elle détermine. Les frais de publication sont à la charge de la personne sanctionnée.
B – La procédure disciplinaire
Saisine du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières. Le président du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières est saisi par :
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le procureur de la République ;
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le préfet ;
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les associations de défense des consommateurs, agréées ou ayant au moins cinq ans d’existence ;
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l’observatoire local des loyers ;
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les professionnels de l’immobilier soumis à la loi Hoguet ;
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les cocontractants des professionnels de l’immobilier, qui peuvent, le cas échéant, se faire représenter par les associations de défense des consommateurs agréées (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-5).
Enquête. Le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières est doté d’un service chargé de procéder aux enquêtes préalables aux procédures disciplinaires qui est dirigé par le président du conseil et composé d’enquêteurs habilités par celui-ci.
Les enquêteurs sont désignés dans des conditions propres à éviter tout conflit d’intérêt avec les mis en cause.
Ils recueillent, sans contrainte, par tout moyen approprié, tous les éléments nécessaires pour mettre la formation restreinte en mesure de se prononcer. Ils peuvent à cet effet :
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obtenir du mis en cause et de toute autre personne tout document ou information, sous quelque forme que ce soit, relatif aux faits dénoncés dans la saisine ;
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entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations ;
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accéder aux locaux à usage professionnel ;
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faire appel à des experts.
Toute personne entendue peut se faire assister par un conseil de son choix.
Au cours de l’enquête, le mis en cause ne peut pas opposer le secret professionnel (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-5-1).
Suspension provisoire. Lorsque des faits d’une particulière gravité apparaissent de nature à justifier des sanctions disciplinaires, le bureau peut prononcer, lorsque l’urgence et l’intérêt public le justifient, la suspension provisoire de l’exercice de tout ou partie des activités du mis en cause pour une durée qui ne peut excéder trois mois. Toutefois, la suspension ne peut être prononcée que si le mis en cause a été mis en mesure de consulter le dossier et de présenter ses observations (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-5-2).
Enquête. À l’issue de l’enquête et après avoir mis la personne intéressée en mesure de présenter ses observations, l’enquêteur adresse son rapport au bureau. Lorsque les faits justifient une procédure disciplinaire, le bureau arrête les griefs qui sont notifiés par l’enquêteur à la personne intéressée. La notification expose les faits passibles de sanction et est accompagnée des principaux éléments susceptibles de fonder les griefs.
Le mis en cause peut consulter le dossier et présenter ses observations et se faire assister par un conseil de son choix à toutes les étapes de la procédure.
L’enquêteur établit un rapport final qu’il adresse au bureau avec les observations du mis en cause. Le bureau décide s’il y a lieu de saisir la formation restreinte (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-5-3).
Suspension provisoire. Lorsque des faits d’une particulière gravité apparaissent de nature à justifier des sanctions disciplinaires, le bureau peut prononcer, lorsque l’urgence et l’intérêt public le justifient, la suspension provisoire de l’exercice de tout ou partie des activités du mis en cause pour une durée qui ne peut excéder trois mois. Toutefois, la suspension ne peut être prononcée que si le mis en cause a été mis en mesure de consulter le dossier et de présenter ses observations (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-5-2).
Les poursuites. À l’issue de l’enquête et après avoir mis la personne intéressée en mesure de présenter ses observations, l’enquêteur adresse son rapport au bureau. Lorsque les faits justifient une procédure disciplinaire, le bureau arrête les griefs qui sont notifiés par l’enquêteur à la personne intéressée. La notification expose les faits passibles de sanction et est accompagnée des principaux éléments susceptibles de fonder les griefs.
Le mis en cause peut consulter le dossier et présenter ses observations et se faire assister par un conseil de son choix à toutes les étapes de la procédure.
L’enquêteur établit un rapport final qu’il adresse au bureau avec les observations du mis en cause. Le bureau décide, s’il y a lieu, de saisir la formation restreinte (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-5-3).
C – Les décisions et des voies de recours
La convocation du mis en cause. La formation restreinte convoque le mis en cause pour une audience devant se tenir deux mois au moins après la notification des griefs (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-7).
Le mis en cause peut être assisté ou représenté par le conseil de son choix, consulter le dossier avant l’audience et présenter des observations écrites ou orales (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-7).
Récusation d’un membre du conseil. Lorsqu’il existe une raison sérieuse de mettre en doute l’impartialité d’un membre de la formation, le mis en cause peut demander sa récusation (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-7).
Publicité de l’audience. L’audience est, par principe, publique. Toutefois, d’office ou à la demande du mis en cause, le président peut interdire au public l’accès de la salle pendant tout ou partie de l’audience dans l’intérêt de l’ordre public ou lorsque la protection du secret des affaires ou de tout autre secret protégé par la loi l’exige (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-7).
Auditions. Le président peut décider d’entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile.
Délibérations. Les délibérations de la formation restreinte sont secrètes. Elle statue par décision motivée. En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-7).
Communication des décisions. La formation restreinte communique les décisions exécutoires prononçant une interdiction d’exercer à la chambre de commerce et d’industrie territoriale ou à la chambre départementale d’Île-de-France ayant délivré la carte professionnelle de l’intéressé ou auprès de laquelle la déclaration préalable d’activité a été effectuée (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-8).
Recours. Les décisions de la formation restreinte et celles du bureau prononçant une mesure de suspension provisoire sont susceptibles de recours de pleine juridiction devant la juridiction administrative (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-9).
Répertoire des sanctions. Le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières crée et tient à jour un répertoire des personnes sanctionnées, avec l’indication des sanctions exécutoires. Ce répertoire précise si les décisions sont définitives. Les décisions annulées ou modifiées à la suite de l’exercice d’une voie de recours sont supprimées du répertoire.
Les modalités et le fonctionnement du répertoire devront être déterminés par un décret pris en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (L. n° 70-9, 2 janv. 1970, art. 13-10).
III – Obligation de confidentialité
Déplacement de l’obligation. Désormais, il est précisé à l’article 4-3 de la loi de 1970 que les professionnels de l’immobilier relevant de la loi Hoguet doivent respecter la confidentialité des données dont ils ont connaissance dans l’exercice de leurs activités. Mais outre la réserve de dispositions leur imposant la divulgation de certaines informations, ce principe ne fait pas obstacle à la communication aux copropriétaires de tout élément nécessaire au bon fonctionnement du syndicat, ni au signalement d’un habitat manifestement indigne au sens de l’article 1er-1 de la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement au maire de la commune concernée (et non plus à l’art. 13-3 de la loi de 1970).
Notes de bas de pages
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1.
JO n° 0024, 28 janv. 2017, texte n° 1.