Parties communes et images des parties communes d’un immeuble : quels accès pour les forces de l’ordre ?

Publié le 08/04/2022
Hall d'immeuble
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Le régime de l’accès aux parties communes des immeubles et à leurs images est aménagé par l’article 20 de la loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021. L’occasion de faire le point sur ce nouveau régime et sur la réglementation applicable autorisant les forces de l’ordre à avoir l’accès physique aux parties communes, ainsi que d’avoir accès aux images de la vidéo-surveillance des parties communes de l’immeuble.

L. n° 2021-1520, 25 nov. 2021, NOR : INTX2113731L, art. 20

La vie d’un immeuble collectif pose la question de l’accès à certaines parties de l’immeuble pour les personnes qui n’y sont pas résidentes.

Ainsi, la législation oblige propriétaires et copropriétaires à permettre aux huissiers, services postaux et autres colporteurs de presse d’accéder aux boîtes aux lettres1 et aux opérateurs des distributeurs de gaz naturel et d’électricité et aux opérateurs agissant pour leur compte d’accéder aux ouvrages relatifs à la distribution de gaz naturel et d’électricité2.

Ces éléments pouvant se situer hors des parties communes, notamment bâties, on en déduit que cette autorisation légale vaut aussi autorisation de pénétrer dans les parties communes.

En ce qui concerne l’accès stricto sensu aux parties communes de l’immeuble, le Code de la construction et de l’habitation organise l’obligation faite aux propriétaires et locataires de permettre à l’huissier de justice d’accéder aux parties communes de l’immeuble3.

En ce qui concerne les forces de l’ordre et de secours, le droit d’accès aux parties communes en résidentiel a été modifié, en dernier lieu, par l’article 20 de la loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et à valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels4 qui modifie le Code de la sécurité intérieure et la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Ceci nous permet de faire le point sur la réglementation applicable autorisant les forces de l’ordre à avoir l’accès physique aux parties communes (I) ainsi que d’avoir accès aux images de la vidéosurveillance des parties communes de l’immeuble (II).

I – L’accès aux parties communes de l’immeuble (CSI, art. L. 272-1)

L’accès aux parties communes doit être donné aux forces de l’ordre et de secours aux fins d’intervention (A). Dès lors qu’il est satisfait à cette obligation, en cas d’occupation illicite des parties communes, il peut être fait appel aux forces de l’ordre pour faire cesser le trouble (B), qui pourra être sanctionné (C).

A – L’obligation de permettre l’accès aux fins d’intervention (CSI, art. L. 272-1)

L’accès aux parties communes est de plein droit pour les services des forces de l’ordre et de secours (1), tandis que ceux de la police municipale peuvent faire l’objet d’une autorisation permanente (2).

1 – L’accès de plein droit des services de forces de l’ordre et de secours

Il résulte de la nouvelle rédaction de l’article L. 272-1 du Code de la sécurité intérieure que « les propriétaires ou les exploitants d’immeubles à usage d’habitation ou leurs représentants s’assurent que les services de police et de gendarmerie nationales ainsi que les services d’incendie et de secours sont en mesure d’accéder aux parties communes de ces immeubles aux fins d’intervention ».

En conséquence, l’administrateur d’un bien immobilier, gestionnaire d’un immeuble en monopropriété résidentiel ou syndic d’un immeuble en copropriété résidentiel, doit rendre les immeubles accessibles aux services des forces de l’ordre et de secours concernés.

2 – L’autorisation permanente d’accès aux services de police municipale

Il résulte de la nouvelle rédaction de l’article L. 272-1 du Code de la sécurité intérieure que les propriétaires ou les exploitants d’immeubles à usage d’habitation ou leurs représentants « peuvent accorder à la police municipale une autorisation permanente de pénétrer dans ces mêmes parties communes ».

En conséquence, l’administrateur d’un bien immobilier, gestionnaire d’un immeuble en monopropriété résidentiel ou syndic d’un immeuble en copropriété résidentiel, doit obtenir l’accord du propriétaire ou des copropriétaires pour autoriser de manière permanente la police municipale à pénétrer dans les parties communes.

En matière de copropriété, la loi de 1965 prévoit la majorité à laquelle les autorisations données aux forces de l’ordre d’accéder aux parties communes de l’immeuble est décidée.

En effet, l’article 24, I, prévoit que, sauf disposition légale contraire, les décisions de l’assemblée générale des copropriétaires sont prises à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance. Le II de l’article 24 précise certaines décisions relevant de cette majorité de l’article 24. Désormais, le H de l’article 24 prévoit que relève de cette majorité « l’autorisation permanente accordée à la police municipale de pénétrer dans les parties communes », et non plus à la police et à la gendarmerie.

B – L’appel aux forces de l’ordre pour le rétablissement de la jouissance paisible des lieux (CSI, art. L. 272-3)

Les propriétaires ou exploitants d’immeubles à usage d’habitation ou leurs représentants, qui satisfont à l’obligation d’accès des forces de l’ordre et de secours aux parties communes de l’immeuble5, peuvent également faire appel à la police ou à la gendarmerie nationales ou à la police municipale pour rétablir la jouissance paisible de ces lieux, en cas d’occupation des espaces communs du bâti par des personnes qui :

  • entravent l’accès et la libre circulation des locataires ;

  • empêchent le bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté ;

  • ou nuisent à la tranquillité des lieux.

L’appel aux forces de l’ordre pour le rétablissement de la jouissance paisible, sur le fondement de ce texte, est donc soumis à deux conditions : une occupation seulement de l’espace commun bâti source de nuisances.

C – Les sanctions de l’occupation illégale des parties communes (CSI, art. L. 272-4)

Les éléments constitutifs de l’infraction démontrent que ce n’est pas en soi la seule occupation sans droit ni titre des parties communes qui est sanctionnée (1) de peines principales de principe (2) qui peuvent être écartées en cas d’amende forfaitaire (3). Les peines encourues sont plus lourdes en cas de circonstances aggravantes (4) et une peine complémentaire peut être prononcée (5).

1 – Les éléments constitutifs de l’infraction

Est pénalement sanctionné le fait d’occuper en réunion les espaces communs ou les toits des immeubles collectifs d’habitation en empêchant délibérément :

  • l’accès ;

  • la libre circulation des personnes ;

  • ou le bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté.

2 – Les peines principales de principe encourues

L’occupation illicite des parties communes est punie de deux mois d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende.

3 – L’extinction de l’action publique par l’amande forfaitaire

Toutefois, pour ce délit, commis y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte6 par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 200 €.

Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 150 € et le montant de l’amende forfaitaire majorée est de 450 €.

4 – Les circonstances aggravantes

Lorsque l’infraction d’occupation illicite des parties communes est accompagnée de voies de fait ou de menaces, de quelque nature que ce soit, elle est punie de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende.

5 – Les peines complémentaires

Les personnes coupables de ces infractions encourent également, à titre de peine complémentaire, une peine de travail d’intérêt général.

II – L’accès aux images de la vidéosurveillance en cas d’occupation des parties communes (CSI, art. L. 272-2)

En cas d’occupation des parties communes, les forces de l’ordre peuvent se faire transmettre les images de la vidéosurveillance des parties communes de l’immeuble (A), les modalités de transmission font l’objet d’une convention avec le préfet (B)7. Lorsque l’immeuble est en copropriété, la décision autorisant la transmission des images est adoptée à la majorité de l’article 25 (C).

A – La transmission des images

Lorsque les conditions sont réunies (1), la décision peut être prise (2) de transmettre les images en temps réel pour la durée nécessaire aux missions de forces de l’ordre (3).

1 – Les conditions de transmission des images

La transmission aux services chargés du maintien de l’ordre ne doit pas se faire sur des images concernant l’entrée des habitations privées ou la voie publique. Elles doivent être réalisées en vue de la protection des parties communes des immeubles collectifs à usage d’habitation, en cas d’occupation empêchant l’accès ou la libre circulation des personnes ou le bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté.

2 – La décision de transmission des images

La transmission de ces images est autorisée sur décision :

  • de la majorité des copropriétaires dans les conditions fixées à l’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dans le parc privé ;

  • du gestionnaire dans les immeubles sociaux.

Toutefois, en cas d’urgence, la transmission des images peut être décidée par les services de la police ou de la gendarmerie nationales ou, le cas échéant, par les agents de la police municipale, à la suite d’une alerte déclenchée par le gestionnaire de l’immeuble.

3 – Le délai et la durée de la transmission des images

Cette transmission s’effectue en temps réel, dès que les circonstances l’exigent et pour une durée strictement limitée au temps nécessaire à l’intervention des services de la police ou de la gendarmerie nationales ou, le cas échéant, des agents de la police municipale.

B – La convention de transmission des images

Cette convention a pour objet de fixer les modalités de transmission des images aux forces de l’ordre (1). Elle doit prévoir un affichage obligatoire à destination de l’information des tiers (2). Elle est transmise à la commission départementale de vidéoprotection (3).

1 – L’objet de la convention

Une convention préalablement conclue entre le gestionnaire de l’immeuble et le préfet précise les conditions et modalités de ce transfert.

2 – La mention de l’affichage obligatoire

Cette convention prévoit l’information par affichage sur place de l’existence du système de prise d’images et de la possibilité de leur transmission aux forces de l’ordre.

Lorsque la convention a pour objet de permettre la transmission des images aux services de police municipale, elle est en outre signée par le maire.

3 – La transmission de la convention

Cette convention est transmise à la commission départementale de vidéoprotection8 qui apprécie la pertinence des garanties prévues et en demande, le cas échéant, le renforcement au préfet.

C – La décision de transmission des images de la vidéosurveillance en copropriété (L. 1965, art. 25, m)

La loi de 1965 prévoit la majorité à laquelle les autorisations de transmettre les images de la vidéo surveillance des parties communes de l’immeuble aux forces de l’ordre sont décidées.

Ainsi, selon l’article 25, m, ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant l’autorisation de transmettre aux services chargés du maintien de l’ordre les images réalisées en vue de la protection des parties communes9.

Notes de bas de pages

  • 1.
    CCH, art. L. 126-12 ; CPCE, art. L. 5-10.
  • 2.
    CCH, art. L. 126-15.
  • 3.
    CCH, art. L. 126-14 ; CCH, art. R. 126-5 à R. 126-7.
  • 4.
    JO n° 0275, 26 nov. 2021, texte n° 1.
  • 5.
    Mentionnée par l’article L. 271-1 du Code de la sécurité intérieure donc.
  • 6.
    Dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du Code de procédure pénale.
  • 7.
    À noter qu’il est rappelé que ne sont pas soumis aux dispositions de l’article L. 272-2 du Code de la sécurité intérieure les systèmes utilisés dans des traitements automatisés ou contenus dans des fichiers structurés selon des critères permettant d’identifier, directement ou indirectement, des personnes physiques, qui sont soumis à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
  • 8.
    Mentionnée au chapitre III du titre II et du titre V du livre II du Code de la sécurité intérieure.
  • 9.
    Dans les conditions prévues à l’article L. 126-1-1 du Code de la construction et de l'habitation.
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