Reprise des délais en matière d’habitat indigne

Publié le 24/06/2020

Présentation du décret n° 2020-607 du 20 mai 2020 portant dérogation au principe de suspension des délais en matière d’habitat indigne pendant la période d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19.

D. n° 2020-607, 20 mai 2020 : JO n° 0124, 21 mai 2020, texte 45

Les articles 7 et 8 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 20201, relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période, organisent la suspension et le report des délais imposés par/et à l’Administration. Ainsi, il est prévu que les délais accordés à l’Administration pour vérifier le caractère complet d’un dossier, pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction d’une demande, pour la consultation ou la participation du public, ainsi que ceux à l’issue desquels une décision, un accord ou un avis de l’Administration peut ou doit intervenir ou est acquis implicitement et qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus jusqu’à la fin de la période protégée soit, à ce jour, jusqu’au 23 juin inclus2. Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant cette période est reporté jusqu’à son achèvement. Les délais imposés par l’Administration pour réaliser des contrôles et des travaux ou pour se conformer à des prescriptions suivent le même régime.

L’article 9 de l’ordonnance n° 2020-3063 a prévu que, par dérogation à ces dispositions, un décret peut déterminer les catégories d’actes, de procédures et d’obligations pour lesquels le cours des délais reprend, pour des motifs de protection des intérêts fondamentaux de la Nation, de sécurité, de protection de la santé, de la salubrité publique, de sauvegarde de l’emploi et de l’activité, de sécurisation des relations de travail et de la négociation collective, de préservation de l’environnement et de protection de l’enfance et de la jeunesse.

C’est chose faite, en matière immobilière, avec le décret n° 2020-607 du 20 mai 2020 portant dérogation au principe de suspension des délais en matière d’habitat indigne pendant la période d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de Covid-194, qui prévoit que certains délais prévus par plusieurs arrêtés de police administrative contre l’habitat indigne reprennent leur cours, au vu des enjeux pour la santé, la sécurité et la salubrité publique. Le décret fixe donc la date de reprise des délais (I), ainsi que le domaine d’application des délais repris (II).

I – Date de reprise des délais

Ainsi, en application du premier alinéa de l’article 9 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, le décret n° 2020-607 prévoit que certains délais prévus par divers arrêtés de police administrative contre l’habitat indigne reprennent leur cours dans un délai de 7 jours à compter de la publication du décret, soit à compter du 27 mai 2020.

II – Le domaine des délais repris

Les délais prévus par les arrêtés de police administrative reprennent dans les domaines du respect des règles d’hygiène en matière d’habitat (A), de suroccupation des locaux d’habitation (B), d’insalubrité des immeubles (C), de lutte en matière de plomb et d’amiante (D), de sécurité en cas d’urgence (E), de protection incendie et bâtiment menaçant ruine (F), ainsi que ceux concernant les mesures de sûreté en cas d’accidents naturels (G).

A – Respect des règles d’hygiène en matière d’habitat (CSP, art. L. 1311-4)

D’une manière générale, en cas d’urgence, notamment de danger ponctuel imminent pour la santé publique, le préfet peut ordonner l’exécution immédiate des mesures prescrites par les règles d’hygiène prévues par le Code de la santé publique.

Les délais des arrêtés pris dans ce cadre reprennent.

B – Suroccupation des locaux d’habitation (CSP, art. L. 1331-23)

Des locaux ne peuvent être mis à disposition aux fins d’habitation, à titre gratuit ou onéreux, dans des conditions qui conduisent manifestement à leur suroccupation. Le préfet met en demeure la personne qui a mis les locaux à disposition dans de telles conditions de faire cesser cette situation dans un délai qu’il fixe.

La mise en demeure précise que, à l’expiration du délai fixé, en cas de poursuite de la mise à disposition des locaux dans des conditions qui conduisent manifestement à leur suroccupation, la personne qui a mis les locaux à disposition est redevable d’une astreinte par jour de retard.

Les délais des arrêtés pris dans ce cadre reprennent.

C – Insalubrité des immeubles (CSP, art. L. 1331-26-1)

Lorsque le rapport motivé du directeur général de l’agence régionale de santé ou du directeur du service communal d’hygiène et de santé concluant à l’insalubrité de l’immeuble concerné, fait apparaître un danger imminent pour la santé ou la sécurité des occupants lié à la situation d’insalubrité de l’immeuble, le préfet, qui peut prononcer une interdiction temporaire d’habiter, met en demeure le propriétaire, ou l’exploitant s’il s’agit de locaux d’hébergement, de prendre les mesures propres à faire cesser ce danger dans un délai qu’il fixe.

Les délais des arrêtés pris dans ce cadre reprennent.

D – Plomb et amiante (CSP, art. L. 1334-1 et s.)

Dans le cadre des diagnostics et des travaux en matière de lutte contre le saturnisme et l’amiante, l’autorité administrative peut pendre divers arrêtés. Seuls les délais des arrêtés comportant une interdiction d’habiter ou d’occuper les lieux pris dans ce cadre reprennent.

E – Sécurité en cas d’urgence (CCH, art. L. 129-3 et L. 511-3)

En cas d’urgence ou de menace grave et imminente ou en cas de péril imminent, le maire peut ordonner les mesures provisoires permettant de garantir la sécurité des occupants et, si nécessaire, l’évacuation de l’immeuble.

Les délais des arrêtés pris dans ce cadre reprennent.

F – Protection incendie et bâtiment menaçant ruine (CCH, art. L. 123-3 et L. 511-1)

Dans le cas où un établissement recevant du public est à usage total ou partiel d’hébergement, le maire peut prescrire, par arrêté, à l’exploitant et au propriétaire, les mesures nécessaires pour faire cesser la situation d’insécurité constatée par la commission de sécurité et, le cas échéant, pour réaliser des aménagements et travaux dans un délai fixé. Le maire peut également prononcer une interdiction temporaire d’habiter ou d’utiliser les lieux applicable jusqu’à la réalisation des mesures prescrites.

Le maire peut aussi prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu’ils menacent ruine et qu’ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d’une façon générale, ils n’offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique.

Les délais des arrêtés pris en application de ces dispositions reprennent uniquement en ce qui concerne les délais prévus pour :

  • faire cesser ou interdire l’usage d’habitation ou l’utilisation ;

  • assurer le relogement ou l’hébergement des occupants ;

  • exécuter toute autre prescription rendue indispensable par la gravité du danger encouru par les occupants ou les tiers, notamment en raison du confinement.

G – Les mesures de sûreté en cas d’accidents naturels

La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels, les maladies épidémiques ou contagieuses, les épizooties, de pourvoir d’urgence à toutes les mesures d’assistance et de secours et, s’il y a lieu, de provoquer l’intervention de l’administration supérieure5. En cas de danger grave ou imminent, découlant notamment de ces accidents naturels l’article L. 2212-4 du Code général des collectivités territoriales autorise le maire à prescrire l’exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances.

Le décret prévoit justement que les délais prévus par ces arrêtés pris par les maires en application de l’article L. 2212-4 du Code général des collectivités territoriales reprennent leur cours.

Notes de bas de pages

  • 1.
    Ord. n° 2020-306, 25 mars 2020, art. 7 et 8.
  • 2.
    Ord. n° 2020-306, 25 mars 2020, art. 1er.
  • 3.
    Ord. n° 2020-306, 25 mars 2020, art. 9.
  • 4.
    JO n° 0124, 21 mai 2020, texte 45.
  • 5.
    CGCT, art. L. 2212-2, 5°.
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