Chronique de contrats spéciaux

Publié le 17/07/2017

I – Contrats relatifs au transfert d’un bien : vente

A – Garantie des vices cachés

Retour sur les conditions de mise en œuvre des clauses de non-garantie (Cass. 3e civ., 21 janv. 2016, nos 14-16295 et 14-18808)

En réaffirmant que l’action en garantie des vices cachés constitue l’unique fondement de l’action exercée contre le vendeur pour défaut de la chose vendue la rendant impropre à sa destination normale1, la Cour de cassation consolide le mur qu’elle a édifié entre la garantie et la responsabilité. Dans cette logique, elle semble soutenir désormais, le non-cumul de l’action en garantie des vices cachés et de celle en responsabilité civile délictuelle.

En l’espèce, à la suite de la dégradation, puis de l’effondrement partiel d’un mur séparant leur propriété de celle du fonds en surplomb, les acquéreurs d’une maison d’habitation assignent les vendeurs en réparation de leurs préjudices sur le double fondement des articles 1641 et 1382 du Code civil. La cour d’appel d’Aix-en Provence2, confirmant le jugement rendu en première instance sur ce point, constate, dans un premier temps, la validité de la clause exclusive de garantie et écarte l’application de la garantie légale, prévue aux articles 1641 et suivants du Code civil. Toutefois et à rebours des premiers juges, elle considère, dans un second temps, que la non-conformité aux règles de l’art du mur litigieux étant à l’origine du dommage subi par les acquéreurs, la responsabilité délictuelle3 des vendeurs pouvait être engagée. L’arrêt est frappé d’un pourvoi sur ce point. Pour les demandeurs, puisque le dommage résulte de l’inexécution d’un engagement contractuel, résidant précisément dans le vice de construction qui affectait le mur éboulé, seule une action en responsabilité contractuelle et non délictuelle pouvait être envisagée, dès lors que la garantie des vices cachés était régulièrement exclue par une stipulation contractuelle.

Les magistrats de la troisième chambre civile devaient déterminer si l’échec de l’action en garantie des vices cachés, cette dernière étant paralysée par le jeu d’une clause de non-garantie, ouvrait droit, au profit de la victime, à une action en responsabilité civile extracontractuelle à l’encontre du vendeur occasionnel.

Répondant par la négative, la Cour de cassation désapprouve les juges d’appel sur ce chef du dispositif, en considérant que l’action en garantie des vices cachés étant l’unique fondement de l’action exercée contre le vendeur pour défaut de la chose vendue la rendant impropre à sa destination normale, la cour d’appel, qui constate l’existence d’une clause de non-garantie et retient son applicabilité après avoir exclu un comportement dolosif des vendeurs, ne peut condamner ces derniers au paiement des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1382 du Code civil. En d’autres termes, l’applicabilité d’une clause exclusive de garantie (I) empêche la victime d’agir sur tout autre fondement, en raison de l’exclusivité de l’action en garantie des vices cachés (II).

Si la solution de l’arrêt s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence qui affine le régime de la garantie des articles 1641 et suivants du Code civil en la distinguant de la responsabilité, elle appelle néanmoins des explications.

I. L’application de la clause exclusive de garantie des vices cachés

Dans sa première partie, la solution rendue par la cour met en lumière l’existence d’une clause exonératoire de garantie et son applicabilité au regard du droit positif. En effet, aux termes de l’article 1641 du Code civil, le vendeur doit une garantie à l’acheteur contre les vices cachés. Il s’agit d’un « défaut4 de la chose qui la rend impropre à l’usage auquel on la destine, ou diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise ou n’en aurait donné qu’un moindre prix », à moins que le vendeur ait stipulé qu’il ne sera tenu à aucune garantie, comme y autorise l’article 1643. Toutefois, puisque la garantie contre les vices cachés constitue l’une des obligations les plus importantes qui pèsent sur le vendeur, les clauses limitatives et d’exonération de garantie se heurtent à l’hostilité de la jurisprudence ainsi qu’à celle du législateur dans certains contrats, en raison de l’ordre public5. À défaut d’une interdiction spéciale, la validité d’une telle clause, dûment acceptée, est subordonnée à la qualité du vendeur, d’une part (A), et à sa bonne foi, d’autre part (B).

A. La validité de la clause au regard de la qualité du vendeur

Pour déclarer la clause exonératoire de garantie applicable, les juges du fond procèdent à la vérification de la qualité du vendeur. Plusieurs situations sont à envisager.

Tout d’abord, le vendeur professionnel6, c’est-à-dire celui qui se livre régulièrement à des opérations d’achat et de revente de biens dont il tire profit7, ne peut utilement invoquer de telles clauses8.

Justifié en raison de la compétence du vendeur professionnel, ce refus d’application devrait ensuite jouer quelle que soit la qualité de son cocontractant, y compris en présence d’un acquéreur professionnel9. Ainsi, le seul fait que l’acquéreur contracte pour les besoins de sa profession ne suffit pas pour admettre la validité des clauses de non-garantie. En revanche, les compétences techniques de l’acquéreur professionnel, dont le domaine d’activité est similaire à celui du vendeur, lui confèrent une réelle capacité de contrôle de la chose vendue afin d’en connaître les vices décelables10. Privant de toute efficacité les clauses stipulées entre professionnels de spécialités différentes, la Cour de cassation considère « qu’en cas de vente entre professionnels de la même spécialité, la garantie du vendeur ne pouvait être invoquée lorsqu’une clause de non-garantie des vices cachés était insérée dans l’acte »11.

Enfin, le vendeur occasionnel, c’est-à-dire soit un particulier12 soit un professionnel n’exerçant pas une activité de vente de la chose viciée à titre habituel, peut se prévaloir d’une clause exclusive de garantie13, prévue par le contrat.

Or, en l’espèce, la clause de non-garantie relevait de ce dernier cas de figure, dans la mesure où elle est convenue entre particuliers, considérés ici comme de vendeurs occasionnels. Toutefois, cette dernière qualité ne saurait suffire à elle seule à décharger les vendeurs des défauts de l’immeuble cédé.

B. L’effectivité de la clause au regard de la bonne foi du vendeur

L’efficacité de la clause élusive des vices cachés dépend de la bonne foi du vendeur, laquelle est déduite de la lecture a contrario de l’article 1643 du Code civil. La bonne foi résulte de l’ignorance légitime du vendeur qui « n’aurait pas connu » les vices affectant la chose lors de la vente14. Si le vendeur professionnel est irréfragablement présumé avoir eu connaissance des vices cachés lors de la vente15, il en va en revanche autrement du vendeur occasionnel dont la mauvaise foi doit être prouvée16. Il peut s’agir d’une simple réticence à informer l’acquéreur17 ou d’une dissimulation frauduleuse18, étant précisé qu’une simple erreur ou négligence de la part du vendeur ne pourrait être assimilée à la mauvaise foi19.

En l’espèce, l’application de la clause de non-garantie procède de l’exclusion, par les juges du fond, de « tout comportement dolosif » de la part des vendeurs. Or l’expression retenue est susceptible de plusieurs acceptions.

D’abord, au stade de la conclusion du contrat, elle renvoie au dol, constitutif d’un vice du consentement au sens de l’article 1116 du Code civil : les vendeurs ont tu, intentionnellement, une information relative au mur, celui-ci n’ayant pas été effectué dans les règles de l’art, dans le but d’obtenir le consentement des acquéreurs. D’ailleurs, l’arrêt d’appel suggère cette lecture, par une formulation équivoque, en considérant que les acquéreurs « ne démontraient pas l’existence de manœuvres dolosives des vendeurs lors de la signature de l’acte de vente », alors que s’agissant d’une clause de non-garantie, la référence à la connaissance du vice par les vendeurs aurait été plus adéquate. L’intérêt de la qualification20 réside dans l’action conférée aux acquéreurs, qui peuvent agir en nullité du contrat, et solliciter du juge une indemnité lorsque l’annulation du contrat ne répare pas entièrement le préjudice qu’ils ont subi par la faute des vendeurs21. Néanmoins, la qualification de dol, délit civil, est à écarter dans la mesure où la manœuvre frauduleuse serait le silence gardé par les vendeurs ; or, depuis l’arrêt Baldus22, repris par l’ordonnance du 10 février 201623, le silence ne caractérise l’élément matériel du dol que si celui qui le conserve est débiteur d’une obligation d’information. Or tel n’est pas le cas du vendeur non-professionnel.

Ensuite, le « comportement dolosif » peut constituer une faute dolosive, au sens d’un manquement contractuel intentionnel, caractérisé par la conscience de son auteur que ses agissements ne manqueraient pas d’entraîner des désordres à plus ou moins long terme. Concrètement, la faute dolosive résiderait ici dans la connaissance par les vendeurs de deux éléments, non communiqués aux acquéreurs. Il s’agit, d’une part, de la situation du terrain, liée au décaissement du terrain et à l’enlèvement de la banquette qui stabilisait les terres pour édifier un mur ; il s’agit, d’autre part, des défauts affectant la construction du mur litigieux, notamment l’absence d’éléments structurants, le rendant particulièrement vulnérable24. L’enjeu de la qualification repose essentiellement sur la possibilité pour l’acheteur, de neutraliser tant les clauses limitatives de responsabilité25 et de garantie que la limitation prévue à l’article 1150 du Code civil.

Enfin, l’exclusion du « comportement dolosif » peut seulement signifier que les vendeurs étaient de bonne foi, ce qui justifie l’application de la clause de non-garantie. Cette acception, qui peut se prévaloir de la réaffirmation de l’exclusivité de l’action en garantie des vices cachés, dispense, par là même, les juges, de chercher une faute dolosive.

II. L’exclusivité de l’action en garantie des vices cachés

La réaffirmation du principe jurisprudentiel selon lequel l’action en garantie des vices cachés est « l’unique fondement » de l’action exercée contre le vendeur pour défaut de la chose vendue la rendant impropre à sa destination normale, limite les voies d’action offertes à l’acquéreur pour le défaut de la chose (A). Cette solution, qui s’explique par l’existence d’une norme contractuelle, est susceptible de différentes lectures selon le degré de rapprochement de la garantie à la responsabilité (B).

A. Le sens de l’exclusivité de l’action

La garantie due par le vendeur pour défaut de la chose octroie à l’acquéreur trois actions, en application des articles 1164 et 1165 du Code civil. Alors que le second texte est le siège d’une action indemnitaire, le premier confère à l’acquéreur, ayant pris livraison de la chose26, un choix discrétionnaire27 entre l’action rédhibitoire et l’action estimatoire.

L’action rédhibitoire est une action en résolution spéciale, exercée dans les conditions prévues aux articles 1641 et suivants du Code civil. Elle entraîne l’anéantissement rétroactif du contrat, obligeant l’acheteur à rendre la chose, sans que le juge ait à l’ordonner28, dans l’état où elle se trouvait lors de la résolution du contrat29. En contrepartie, le vendeur doit restituer l’intégralité du prix perçu de son acquéreur30. L’action estimatoire est une action en réduction du prix. L’acquéreur, qui conserve la chose affectée du vice caché, entend obtenir, du fait de ce défaut, la restitution d’une partie de ce qu’il a versé (C. civ., art. 1644), et ce, proportionnellement à la diminution de la valeur ou de l’utilité de la chose. L’exigence de proportionnalité trouve sa limite supérieure dans le prix payé par l’acquéreur31. Pour cette raison, l’action rédhibitoire ne saurait se confondre avec l’action indemnitaire32. Cette dernière action tend à réparer les préjudices33 subis par le vendeur du fait du vice et qui sont demeurés en dépit des actions rédhibitoire ou estimatoire ou encore la purge spontanée du défaut par le vendeur. Cette action, précise la Cour de cassation, par un arrêt rendu le 19 juin 2012, « est autonome des autres actions »34 ; elle « n’est subordonnée à l’exercice d’une action rédhibitoire ou estimatoire et peut, par suite, être engagée de manière autonome »35. Par conséquent, si la haute juridiction admet la réparation du préjudice subi du fait du vice, elle ne l’admet que sur le fondement du régime spécial de la garantie. Toutefois, l’acquéreur conserve le bénéfice des voies offertes par l’action en garantie des vices cachés aussi longtemps qu’un aménagement conventionnel ne vient pas paralyser la garantie légale. Enfin, il est utile de préciser que l’acquéreur peut modifier son choix tant qu’il n’a pas été statué sur sa demande par une décision passée en force de chose jugée36.

Or, en l’espèce, la clause de non-garantie a été régulièrement stipulée et dûment acceptée. Elle permet aux vendeurs occasionnels, à l’encontre desquels aucun comportement dolosif n’a pu être tenu, d’échapper aux conséquences du vice qu’ils ignoraient légitimement au moment de la vente. Loin d’être anodin, cet aménagement conventionnel ne révèle ses effets, pour les acquéreurs, qu’à l’aune de l’exclusivité de l’action en garantie des vices cachés : l’acceptation de la charge du risque, par l’acquiescement à la clause de non-garantie, ne pourrait que faire peser sur les acquéreurs les conséquences de la réalisation du risque, ici l’effondrement du mur, sans qu’il ne soit possible, pour les acheteurs, de se placer sur un autre terrain que celui de la garantie et notamment sur celui de la responsabilité civile.

Si la solution de l’arrêt est conforme aux principes jurisprudentiels en la matière, l’affirmation de l’exclusion d’une action fondée sur l’article 1382 appelle explication.

B. L’appréciation de l’exclusivité de l’action

Faire droit à la demande des acquéreurs reviendrait ici à admettre un possible cumul de l’action en garantie des vices cachés et celle en responsabilité délictuelle. Quelles en seraient les conséquences ? Deux lectures complémentaires peuvent être proposées.

D’une part, l’on sait que la responsabilité extracontractuelle étant d’ordre public, la jurisprudence refuse la validité des clauses exclusives ou limitatives de responsabilité37. C’est ainsi que cette responsabilité ne permet pas de limitation conventionnelle de responsabilité. Or accepter l’action sur le fondement de l’article 1382 du Code civil revient à ruiner l’effet de la stipulation contractuelle, visant à exclure la garantie due en raison du défaut de la chose ; l’action en responsabilité civile extracontractuelle se heurte finalement à l’article 1134 du Code civil, qui soumet la relation des parties à la norme contractuelle. C’est, d’ailleurs, ce que révèle la lecture du moyen annexé à l’arrêt. Les vendeurs soutiennent que le dommage se rattachant à l’exécution du contrat, sa réparation ne pourrait être sollicitée que sur le fondement des articles 1147 et suivants du Code civil, pour l’application desquels les juges tiennent compte notamment des clauses limitatives de responsabilité, régulièrement convenues entre les parties.

D’autre part, la garantie légale en matière de vente offre trois voies aux acheteurs, parmi lesquelles l’action indemnitaire, accordée, quoiqu’en raison de la garantie, dans le cadre de l’exécution d’un contrat. Rappelons que la Cour de cassation affirme que la réparation des dommages causés par une chose vendue « ne donne pas ouverture à une action en responsabilité contractuelle mais à une garantie »38. Toutefois, sur le plan technique, l’affirmation n’est pas absolue.

En effet, la garantie est « un mécanisme d’allocation des risques de la chose dans la vente »39. Elle n’a donc pas pour objet de sanctionner une faute commise par le vendeur, mais revêt une certaine « automaticité »40 dans son application. Elle est due en raison de la réalisation d’un risque, c’est-à-dire « un sinistre redouté, affecté d’une probabilité »41. Autrement dit, la garantie « est destinée à préserver l’acheteur d’un événement imprévisible distinct de l’inexécution stricto sensu de ses obligations par le vendeur »42. La responsabilité, quant à elle, est un mécanisme qui crée, sous certaines conditions, à la charge de celui qui n’a pas su s’acquitter de son obligation principale, une obligation nouvelle subsidiaire. Or, de même que le risque ne se confond pas avec l’obligation (délictuelle ou contractuelle), la garantie ne saurait être confondue avec la responsabilité. Toutefois, allant jusqu’au bout de cette logique, l’on serait enclin à admettre que la réparation des préjudices consécutifs au vice caché ne pourrait, techniquement, être justifiée par la garantie43. Autrement dit, puisque la garantie n’a pour objet que d’attribuer la charge d’un risque, lié à la présence d’un vice, et non de sanctionner une faute (c’est-à-dire, le comportement défectueux du vendeur), l’action indemnitaire emprunte de la responsabilité son esprit. C’est, d’ailleurs, ce que souligne le débat sur la nature de l’action en réparation des dommages nés du vice caché, en cas de connaissance du vice par le vendeur44. Dès lors, si l’on admet avec certains auteurs que, sans se confondre avec la responsabilité, l’action indemnitaire exercée en vertu de la garantie en emprunte, dans une certaine mesure, son esprit45, la solution de l’arrêt sous commentaire pourrait se comprendre à l’aune du principe du non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle. Règle cardinale de la responsabilité civile, ce principe signifie que le contractant victime de l’inexécution d’une obligation contractuelle ne peut ni choisir ni panacher le fondement juridique de l’action en réparation de son dommage46.

Quoi qu’il en soit de ce débat relatif aux frontières entre la garantie et la responsabilité, il n’en demeure pas moins qu’aussi longtemps que la norme contractuelle demeure, quoique malgré ses insuffisances47, le cocontractant ne pourrait pas agir sur un fondement extracontractuel. Tel serait le sens du non-cumul des actions en garantie et en responsabilité civile délictuelle.

Motahareh Fathisalout-Bollon

B – Vente de biens de consommation

Garantie dans la vente de biens de consommation : vendeur apparent (CJUE, 9 nov. 2016, n° C-149/15, Wathelet)

Si la notion de consommateur est à l’origine d’une jurisprudence abondante tant au plan national qu’européen, celle de professionnel est beaucoup moins fréquemment en cause. Plus précisément, dans l’affaire ayant donné lieu au présent arrêt de la Cour de justice, ce n’était pas tant la question de la définition du professionnel en elle-même qui soulevait des difficultés, que celle de savoir si un tel professionnel pouvait être tenu à garantie dans les termes de la directive n° 1999/44 du 25 mai 1999, alors qu’il n’avait joué que le rôle d’un intermédiaire dans une vente intervenue entre deux particuliers.

En l’espèce, une consommatrice avait acquis un véhicule d’occasion auprès d’un garage. Ce dernier avait effectué les formalités afférentes à la vente (contrôle technique, demande d’immatriculation) et reçu le prix, sans délivrer à l’acquéreur de facture. Trois mois après la vente, la voiture tombe en panne. La consommatrice la confie alors au garage qui diagnostique une casse du moteur. La réparation lui est facturée, facture qu’elle refuse de payer, invoquant la garantie de conformité due par le garage en sa qualité de vendeur. C’est alors qu’elle découvre que le véhicule n’a jamais appartenu au garage qui n’avait joué qu’un rôle d’intermédiaire dans la vente, le véritable propriétaire étant en fait un particulier. Devant son refus persistant, le garage l’assigne en paiement devant les juridictions belges. En première instance, le tribunal la condamne au paiement de la facture ; quant à la cour d’appel de Liège, elle estime que le professionnel étant tiers à la vente, l’application de la garantie prévue par la directive ne va pas de soi. Cela la conduit à renvoyer en interprétation préjudicielle à la CJUE, la question de savoir si la notion de vendeur peut être étendue au professionnel intermédiaire dans une vente entre deux particuliers. La CJUE admet la possibilité d’une telle extension dès lors que le professionnel a rendu possible une confusion de la part du consommateur, autrement dit s’il s’est comporté comme un vendeur apparent. Si la sanction peut paraître rigoureuse pour le professionnel, elle n’est pas inéluctable.

I. La mise en œuvre de la garantie dans la vente de biens de consommation telle qu’elle résulte de la directive de 1999 suppose un contrat entre un vendeur professionnel et un consommateur, portant sur un bien de consommation.

Si ces deux dernières conditions ne soulevaient en l’espèce aucune difficulté, puisque cette garantie est susceptible de porter sur un bien d’occasion48 et que l’acheteuse avait acquis à des fins non professionnels, la difficulté venait de ce que le garage n’était intervenu dans la vente que comme intermédiaire, le propriétaire étant un particulier. Toute la question était donc de savoir dans quelle mesure ce professionnel pouvait être tenu à garantie dans les termes de la directive. Or pour répondre par l’affirmative, la Cour est conduite à s’interroger sur la notion de vendeur, mais dans des termes non dépourvus d’ambiguïté.

Selon la Cour – et l’affirmation n’a rien d’originale – la notion de vendeur est une notion autonome de droit de l’Union, dans la mesure où la directive ne renvoie pas aux droits nationaux pour la définir. Elle est donc amenée à s’interroger sur le sens que doit revêtir ce terme dans le cadre de la directive mais son cheminement, certes compréhensible dans le cadre contraint de la directive49, n’en est pas moins contourné. En effet, deux raisonnements sont possibles et il n’est pas certain d’ailleurs que la Cour ait véritablement tranché entre les deux. La première analyse (qui est d’ailleurs largement celle de l’avocat général) conduit à analyser la notion de vendeur pour déterminer si celle-ci est susceptible de s’appliquer à un intermédiaire. La seconde consiste à ne pas étendre la définition mais à retenir l’application du régime de garantie de la directive dès lors que l’intermédiaire est apparu comme un vendeur, autrement dit lorsqu’il s’est comporté comme un vendeur apparent. Suivant la première analyse, il est tenu parce qu’il est un vendeur au sens de la directive ; suivant la seconde il est tenu comme s’il était le vendeur.

Ainsi la Cour repart-elle des notions de vendeur et d’intermédiaire. S’agissant de cette dernière, la directive ne comporte qu’une référence, non pertinente en l’espèce : si elle évoque bien cette qualité, c’est pour renvoyer au droit national le soin d’apprécier dans quelle mesure le vendeur intermédiaire tenu à garantie peut se retourner contre un vendeur antérieur50 ; elle ne s’intéresse donc pas à l’intermédiaire tel qu’il apparaissait en l’espèce, à savoir le professionnel qui intervient dans la vente entre deux particuliers, ni à sa responsabilité envers le consommateur. Cependant, pour la Cour cela n’empêche pas que la notion de vendeur puisse comprendre un tel intermédiaire51. C’est une vision très particulière du vendeur, propre à l’objectif de la directive, qui est retenue. Toutefois, la portée de cette extension est immédiatement limitée puisque selon la Cour, un tel intermédiaire – qu’il ait été rémunéré ou non – ne peut être considéré comme vendeur dès que s’il se présente comme tel aux yeux du consommateur. Autrement dit même si le mot est bien employé, c’est à l’apparence qu’il est ici recouru : l’extension n’est réalisée que parce que l’intermédiaire s’est comporté comme un vendeur. Or si l’on se contentait de dire que la notion de vendeur de la directive couvre celui qui n’est pas propriétaire mais a agi comme tel, point ne serait besoin de se référer à l’idée (sinon au terme) d’apparence52 : l’intermédiaire professionnel dans une vente serait tenu comme un vendeur. C’est donc bien l’idée d’apparence qui constitue le véritable fondement de la solution : l’intermédiaire n’est pas tenu en tant que vendeur mais comme le serait un vendeur, parce qu’il apparaît comme tel compte tenu des circonstances dans lesquelles le contrat a été conclu.

Une telle solution peut paraître sévère pour le professionnel. Bien sûr, dans l’hypothèse où il serait tenu à garantie envers le consommateur, il pourrait ensuite se retourner contre le véritable propriétaire53. Mais il supportera le risque d’une insolvabilité de ce dernier ou encore d’une impossibilité de le retrouver54. Surtout, dans son action, cet intermédiaire ne pourrait invoquer la garantie des biens de consommation. La transmission de cette action en garantie par l’acquéreur consommateur paraît en effet discutable dans la mesure où cette hypothèse n’est pas couverte par la directive. En effet, dans le cas où le vendeur se retourne contre le producteur ou un vendeur antérieur, la directive renvoie au droit national la détermination des conditions d’une telle action. Or ici, le professionnel n’ayant que la qualité d’intermédiaire, on ne voit pas sur quel fondement il pourrait agir contre le propriétaire. Par ailleurs l’action ne peut être fondée sur un contrat de vente, inexistant par hypothèse55. Et, sur le fondement du mandat (ou de tout autre contrat de représentation), et si l’on raisonne sur le terrain du droit français, la faute commise par le mandataire risque de le priver de tout droit à réparation du préjudice subi.

Au surplus, dès lors que l’on fonde la solution sur l’apparence, il paraît possible d’en étendre l’intervention à tous les cas où, dans le cadre d’un texte de droit de l’Union, un professionnel intervenant comme intermédiaire, s’est comporté autrement que comme l’implique cette dernière qualité – et qu’il n’en a pas informé le consommateur. En effet, mécanisme correcteur de la rigueur de la règle de droit56, son application suppose l’existence d’une croyance légitime, liée à un défaut d’information du cocontractant. La même logique protectrice inspire le droit de la consommation et l’apparence57. Et lorsque cette dernière intervient en droit de la consommation, elle offre au consommateur une « protection renforcée »58, compte tenu des circonstances dans lesquelles le contrat a été passé. Pour être rigoureuse, une telle application du droit de la consommation n’a cependant rien d’inéluctable.

II. L’obligation à garantie dont se trouve tenu l’intermédiaire constitue en effet la rançon de l’apparence qu’il a laissé se créer, en n’informant pas le consommateur de la réalité de la situation.

Le fondement de l’admission de ce correctif en droit de l’Union est ainsi similaire à celui qui conduit à le retenir en droit français : au-delà des considérations liées à la nécessaire protection du consommateur dans le marché intérieur, c’est bien au nom de la confiance que la solution est justifiée – confiance dans le marché intérieur mais aussi et surtout confiance dans l’attitude du professionnel, la sécurité du commerce juridique59. En l’espèce, en l’absence d’information destinée à le détromper, le consommateur a pu légitimement croire que le vendeur était le garage. Or c’est cette croyance légitime née de l’apparence, qui permet d’admettre l’engagement du professionnel. Elle constitue donc la condition d’application de ce mécanisme60 ; cela suppose que les circonstances aient permis cette croyance et la Cour précise les éléments qui peuvent être pris en considération par le juge national lorsqu’il sera amené à apprécier si concrètement l’intermédiaire peut être tenu à garantie61. En premier lieu (sans que les différents éléments soient hiérarchisés), le degré d’intervention de l’intermédiaire. L’avocat général évoquait plus précisément les efforts déployés par le professionnel, l’importance des échanges de correspondances entre l’acquéreur et l’intermédiaire ou encore le fait que le consommateur se soit acquitté du prix entre les mains du professionnel62. Plus largement peuvent être pris en compte, le comportement de ce dernier et les circonstances dans lesquelles la vente est intervenue. Ainsi le fait que la vente ici ait eu lieu dans un garage autrement dit chez un professionnel vendant des choses identiques ne semble pas à cet égard indifférent. C’est en effet par rapport à un consommateur moyen c’est-à-dire normalement informé raisonnablement attentif et avisé que la possibilité d’une confusion sera appréciée63.

La croyance légitime naît donc des circonstances de conclusion de la vente mais aussi d’un défaut d’information, dans une relation asymétrique, toutes circonstances de nature à justifier le jeu du mécanisme de l’apparence. Le contexte de conclusion du contrat peut faire naître cette apparence ou au contraire ne pas laisser planer de doutes sur la qualité en laquelle intervient le professionnel. Pour prendre l’illustration de la vente de véhicule d’occasion, l’appréciation sera bien différente selon que le professionnel aura une activité affichée de dépôt-vente ou, comme cela semblait être le cas de garage, dans lequel se trouvaient, peut-être côte à côte, des véhicules lui appartenant et des véhicules appartenant à des tiers qu’il était chargé de vendre. Dans une pareille situation, si le contexte ne la fait pas apparaître (cloisonnement des deux aspects de l’activité, par exemple), c’est par l’information que le professionnel peut dissiper la confusion susceptible de naître dans l’esprit d’un consommateur moyen. On voit par là le lien qui unit l’apparence et l’information. C’est bien le sens de l’arrêt de la Cour de justice : l’assimilation de l’intermédiaire au vendeur doit demeurer exceptionnelle. Pour échapper à l’obligation de garantir, le premier devra indiquer au consommateur qu’il n’est pas le véritable propriétaire ; il s’agit plus généralement de permettre au consommateur de s’adresser au véritable débiteur de l’obligation en cas de défaut de la chose64. Cette information est a fortiori requise lorsque ce dernier est un particulier puisqu’alors la garantie des biens de consommation n’est pas applicable. Elle est à cet égard déterminante pour le consommateur65 qui peut préférer acquérir d’un professionnel justement pour bénéficier de la protection offerte.

Cette information devra naturellement intervenir dans la phase précontractuelle. Observons au passage que la directive relative aux droits de consommateurs prévoit parmi les informations que le professionnel doit délivrer avant la conclusion du contrat, figure son identité ainsi que les garanties dues par le professionnel66. Mais ici, le rôle de cette information était un peu différent puisqu’on peut y voir une sorte d’obligation négative pour le professionnel d’informer le consommateur sur des droits qu’il n’a pas67.

Cet arrêt démontre s’il en était besoin la place et le rôle de l’information dans la protection du consommateur telle que la conçoit la Cour de justice. La carence du professionnel à cet égard peut même conférer à un particulier une qualité à laquelle il n’aurait pu prétendre puisqu’il n’y a de consommateur que pour autant que l’autre partie est un professionnel. Par le jeu du mécanisme de l’apparence, c’est ici le champ d’application du droit de la consommation lui-même qui se trouve étendu.

Hélène Claret

II – Contrats relatifs à la mise à disposition d’un bien

A – Bail (…)

B – Prêt à usage

Des dépenses exposées par l’emprunteur dans le prêt à usage (Cass. 1re civ., 13 juill. 2016, n° 15-10474)

À lire l’article 1886 du Code civil les dépenses exposées par l’emprunteur afin d’utiliser la chose prêtée ne sauraient être répétées à moins qu’elles ne soient, comme l’indique l’article 1890 « extraordinaire(s), nécessaire(s), et tellement urgente(s) » au point que l’emprunteur n’ait pu en prévenir le prêteur. Les choses ne semblent guère compliquées et l’on peut alors, à première vue, s’étonner que l’arrêt de la première chambre civile du 13 juillet 2016 revenant sur l’application de ces textes se voit réserver les honneurs d’une publication au Bulletin. Néanmoins, la Cour de cassation invite ici à s’interroger sur la question assez complexe du sort de certaines dépenses qui, sans être dues (par l’emprunteur) ne sont pas nécessairement indues (pour le prêteur).

En l’espèce, quelques années après le décès d’un époux, l’épouse avait opté pour l’usufruit des biens successoraux et accordé un prêt à usage sur l’un des immeubles de la succession à l’un des enfants communs. Suite à l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession, l’emprunteur avait alors sollicité la restitution du montant des réparations, améliorations et travaux qu’elle avait apportés à l’immeuble emprunté. La cour d’appel, estimant que faire supporter les dépenses en question à l’emprunteur reviendrait à faire disparaître la gratuité du prêt à usage en avait admis la répétition. Après avoir rappelé la lettre de l’article 1890 et affirmé que suivant l’article 1886, « toutes autres dépenses que ferait l’emprunteur, y compris pour user de la chose, ne sont pas soumises à répétition », la Cour de cassation casse l’arrêt. Suggérant autant qu’elle ne dit, la Cour propose d’apporter une réponse claire et tranchée à un vieux débat relatif à l’interprétation et à la combinaison des articles 1886 et 1890 (I). En outre, affirmant qu’il ne saurait exister de dépenses ordinaires devant être assumées par le prêteur, elle écarte l’idée, parfois retenue en doctrine, suivant laquelle faire peser la charge de telles dépenses sur la tête de l’emprunteur contreviendrait au caractère essentiellement gratuit du prêt à usage (II).

I. L’inexistence de charges ordinaires ouvrant droit à répétition

L’article 1886 du Code civil – « Si, pour user de la chose, l’emprunteur a fait quelque dépense, il ne peut pas la répéter » – est généralement présenté à la lumière des enseignements de Pothier qui, généralisant une loi romaine68, proposait de retenir que « l’emprunteur est (…) tenu des impenses ordinaires qui sont une charge naturelle du service que l’emprunteur tire de la chose qui lui a été prêtée (…) »69. Les termes retenus par le code sont néanmoins « moins expressifs »70 et envisagent la question de façon négative en paralysant la restitution des dépenses exposées71. La formulation se rapproche en réalité de la doctrine de Domat suivant lequel « Si pour user de la chose empruntée, on est obligé à quelque dépense, celui qui emprunte en sera tenu »72. La raison pour laquelle les codificateurs semblent avoir repris la pensée de Domat plus que celle de Pothier tient vraisemblablement, au caractère quelque peu sibyllin de la pensée du second. En effet, elle laisse entière la question de savoir ce qu’est une « charge naturelle du service ». La règle posée par Domat, est plus précise et plus pragmatique puisqu’elle vise les dépenses nécessaires à l’usage de la chose, c’est-à-dire celles sans lesquelles cet usage serait compromis. La situation de l’emprunteur revêt donc une double dimension. Non seulement, à suivre la lettre du code, il ne saurait demander la restitution des dépenses rendues nécessaires par l’usage de la chose, mais il doit également, en application de son obligation de conservation, réaliser les dépenses rendues nécessaires par l’usage de la chose73, une obligation est donc mise à sa charge. C’est ce qu’affirme nettement Pont, commentant cet article : « Pris à la lettre, [l’article 1886] signifierait que l’emprunteur ne peut pas répéter la dépense dans le cas où il l’aurait faite. Mais évidemment la pensée de l’article va plus loin ; le législateur a entendu dire que l’emprunteur est tenu de faire la dépense dès qu’elle devient nécessaire »74.

Si l’emprunteur doit donc assumer les dépenses nécessaires à l’usage de la chose, il ne saurait être tenu de toutes les dépenses. En effet, l’article 1890 oblige le prêteur à rembourser les dépenses de conservation de la chose dès lors qu’elles sont extraordinaires, nécessaires et tellement urgentes que l’emprunteur n’ait pu en prévenir le prêteur. Les conditions étant cumulatives, une dépense réalisée par l’emprunteur, qui ne présenterait pas ces caractéristiques, ne pourrait en principe faire l’objet d’une restitution. L’idée a cependant été émise que la portée de cette disposition était moins radicale que ce qu’elle ne paraît et c’est à cet égard que l’arrêt du 13 juillet 2016 apporte une réelle avancée.

À la lecture de certains auteurs, dont Baudry-Lacantinerie, « il semblerait résulter de [l’article 1890] que si l’emprunteur avait le temps de prévenir le prêteur, et a fait la dépense sans en informer ce dernier, cette dépense reste tout entière à sa charge. Cette solution est trop contraire au droit commun pour pouvoir être acceptée ; l’article 1890 vise les dépenses nécessaires : or il est de principe que les dépenses nécessaires doivent être remboursées pour leur intégralité à celui qui les a faites »75. L’auteur poursuit en restreignant considérablement le champ d’application de l’article 1890. Selon lui, il n’aurait aucunement vocation à priver l’emprunteur du droit à la répétition, il ne fait qu’en déterminer le débiteur. Plus précisément, il affirme que « si l’emprunteur n’a pu prévenir le prêteur, il a contre lui une action en indemnité, même si le prêteur a, avant que le remboursement ne soit effectué, abandonné la possession à un tiers reconnu propriétaire de l’immeuble (…). Au contraire si l’emprunteur, pouvant prévenir le prêteur ne l’a pas fait, il n’a pas, dans cette même hypothèse de délaissement, le droit d’agir contre le prêteur ; il ne peut agir que contre le véritable propriétaire ; c’est l’application des règles de la gestion d’affaires »76. L’auteur va même plus en affirmant que des dépenses réalisées par l’emprunteur qui ne s’avéreraient qu’utiles, « par exemple les dépenses d’amélioration »77, pourraient donner lieu à répétition par le prêteur. Bien que l’auteur ne la vise pas directement, il semble qu’il voit dans l’utilité des dépenses exposées par l’emprunteur une application de la gestion d’affaires78 dont les conditions d’application sont bien moins restrictives que celles de l’article 1890, la seule utilité de la dépense justifiant la répétition. Comme le résume un auteur, « selon cette opinion, il faudrait donc considérer que l’article 1890 n’est qu’une simple illustration de la théorie générale de la gestion d’affaires, dans laquelle il conviendrait par conséquent de trouver les véritables critères de la dépense remboursable. En d’autres termes, l’article 1890 serait inutile »79.

Dans l’arrêt sous commentaire, la cour d’appel est censurée en ce qu’elle opère une confusion entre les différents types de dépenses. Après avoir prononcé que l’emprunteur était fondé à obtenir le remboursement sous réserve que les travaux litigieux correspondissent à des dépenses nécessaires pour user de la chose, elle a pu retenir que les dépenses extraordinaires devaient être supportées par le prêteur, faute de quoi le contrat perdrait son caractère essentiellement gratuit. Il y a là une véritable confusion des genres, censurée à juste titre par la Cour de cassation. De deux choses l’une : soit la dépense est nécessaire à l’usage de la chose et l’article 1886 exclut la répétition ; soit la dépense est extraordinaire, présente les caractères de l’article 1890 et la charge en incombe alors au prêteur. En dépassant cette confusion, il apparaît que la cour d’appel considérait que puissent exister des dépenses ordinaires ne relevant pas de l’article 1886 et ouvrant donc droit à répétition. Cette position pouvait se réclamer de la doctrine de certains auteurs considérant que la combinaison des articles 1886 et 1890 conduit à définir la dépense ordinaire comme celle « qui n’a pas pour objet la conservation de la chose, ou qui, si elle a pour objet la conservation, n’est pas prévisible ou n’est pas si urgente que le prêteur n’ait pu en être avisé », dès lors que la charge de la dépense est compatible avec la gratuité du prêt80. La théorie en cause n’est néanmoins pas partagée par tous. Ainsi, pour Guillouard, seules entrent dans le champ d’application de l’article 1890 les dépenses de conservation, partant « une dépense d’amélioration, si utile qu’elle puisse être, ne rentre pas dans les pouvoirs de l’emprunteur. Puisqu’il détient la chose, il peut et il doit même faire les dépenses nécessaires à sa conservation ; mais il ne peut l’améliorer aux frais du prêteur »81. La Cour de cassation tranche donc le débat.

Après avoir rappelé la lettre de l’article 1890, elle met fin aux interprétations de la combinaison de cette disposition avec l’article 1886 en affirmant que « toutes autres dépenses que ferait l’emprunteur, y compris pour user de la chose, ne sont pas soumises à répétition ». Un véritable principe est ici posé. Alors que les termes de l’article 1886 écartent la répétition pour les seules dépenses rendues nécessaires par l’usage de la chose, la Cour étend leur portée. Aucune dépense, qu’elle vise ou non l’usage de la chose, ne saurait ouvrir droit à répétition dès lors qu’elle ne rentre pas dans le champ d’application de l’article 1890. Faute d’être directement envisagées par le code, les dépenses spontanément réalisées par l’emprunteur sont donc rapatriées dans le giron de l’article 1886. De là à admettre que la conclusion d’un prêt à usage restreint considérablement le champ d’application de la gestion d’affaires82, il n’y a qu’un pas, que la Cour de cassation semble franchir. Le code envisageant de façon restrictive les charges pouvant être répétées, il serait contraire à l’économie générale du prêt de voir ces dispositions spéciales contournées par l’application de la gestion d’affaires. Dénonçant donc l’existence d’une catégorie intermédiaire de dépenses pesant in fine sur le prêteur, l’arrêt suggère également que l’enrichissement réalisé par ce dernier du fait des dépenses réalisées par l’emprunteur ne remet pas en cause la gratuité du prêt à usage.

II. L’absence de remise en cause de la gratuité du prêt

Suivant l’arrêt du 13 juillet 2016, les dépenses d’améliorations ne rentrant pas dans le strict cadre de l’article 1890, quoiqu’elles aient été faites avec l’accord du prêteur83 (dès lors que l’accord ne vise que les dépenses et non leur prise en charge) n’ouvrent pas droit à répétition. L’on pourrait toutefois se demander si, comme le soutenait la cour d’appel, faire peser la charge des dépenses non extraordinaires sur la tête de l’emprunteur ne serait pas de nature en remettre en cause la gratuité du prêt84. La cassation semble également bienvenue sur ce point en ce qu’elle confirme une certaine conception de l’onérosité du contrat. Lorsqu’il s’agit de déterminer si un contrat est conclu à titre gratuit ou onéreux, les anciens articles 1105 (« Le contrat de bienfaisance est celui dans lequel l’une des parties procure à l’autre un avantage purement gratuit ») et 1106 (« Le contrat à titre onéreux est celui qui assujettit chacune des parties à donner ou à faire quelque chose ») du Code civil ne sont guère d’une grande aide. Les auteurs étaient d’ailleurs assez critiques vis-à-vis de cette rédaction insistant notamment sur le fait que l’article 1106 semble tenir pour équivalentes les qualifications de contrat synallagmatique et de contrat à titre onéreux85. En outre, la doctrine s’opposait sur la définition à apporter à l’onérosité. Certains, s’inspirant de Pothier86, pouvaient considérer que « ce qui constitue le caractère onéreux, c’est seulement l’existence d’un intérêt commun et partagé ; est à titre onéreux tout contrat intéressé de part et d’autre, chacune des parties donnant ou faisant quelque chose »87. Pour d’autres au contraire, l’onérosité se situerait plutôt dans l’existence d’une contrepartie. Ainsi, « le titre onéreux correspond à l’équivalence objective ou subjective de sacrifices antagonistes. Il y a acte à titre gratuit lorsque l’avantage conféré à l’une des parties n’a pas pour fin la compensation d’un sacrifice objectivement ou subjectivement équivalent »88.

Lorsque la gratuité est envisagée à l’aune du prêt à usage, une autre question se pose. Un prêt dans lequel le prêteur a un intérêt, doit-il se voir nier la qualification de contrat conclu à titre gratuit ? En effet, à suivre la doctrine de certains, l’intérêt du prêteur ferait échec à la qualification de prêt à usage89. Pour d’autres à l’inverse, « la bienveillance et la gratuité (…), peuvent n’être pas exemptes d’un certain calcul »90. La jurisprudence est d’ailleurs en ce sens qui refuse de requalifier le prêt à usage en bail du seul fait que le prêteur tirerait un intérêt du contrat, dès lors que cet intérêt n’est pas l’exacte contrepartie de la jouissance de la chose91. Dans ce contexte doctrinal et jurisprudentiel, la nouvelle formulation retenue par l’ordonnance de réforme du droit des contrats du 10 février 2016 mérite d’être saluée. Se ralliant à la seconde conception de l’onérosité et excluant toute référence à l’intérêt, le nouvel article 1107 dispose que « le contrat est à titre onéreux lorsque chacune des parties reçoit de l’autre un avantage en contrepartie de celui qu’elle procure. Il est à titre gratuit lorsque l’une des parties procure à l’autre un avantage sans attendre ni recevoir de contrepartie ».

Dans l’arrêt sous commentaire, la Cour de cassation écarte toute idée d’onérosité du prêt. Cela se comprend bien puisque aucune obligation d’exposer les dépenses en cause ne pesait sur l’emprunteur. Si celles-ci pouvaient, une fois réalisées aux frais de l’emprunteur, constituer un véritable intérêt ou un avantage pour le prêteur, qui se trouve corrélativement enrichi du montant de ces dépenses, elles ne pouvaient être analysées comme une contrepartie de la jouissance de l’immeuble. Leur charge ne faisait donc en aucun cas disparaître la gratuité du prêt.

Johann Le Bourg

C – Dépôt-vente

Régime du dépôt-vente : la Cour de cassation tire toutes les conséquences des vertus supposées de la qualification exclusive (Cass. 1re civ., 14 janv. 2016, n° 12-22971, D)

1. Le dépôt-vente, premières vues. Évoquant la figure romaine qu’était l’aestimatum (contrat estimatoire), le dépôt-vente est une figure juridique qui peut emprunter ses traits à plusieurs types de contrats. Il peut prendre l’allure d’une vente faite sous condition résolutoire, parfois les tribunaux le considèrent comme un contrat innommé proche de la vente92. Il peut aussi être juxtaposé à un autre contrat (contrat de dépôt doublé d’un mandat de vendre93), voire entremêlé à un autre contrat au sein d’une figure contractuelle complexe (contrat principal d’entreprise et contrat accessoire de dépôt94). La décision sous étude rend compte de cette diversité, mais pas seulement.

2. Faits, procédure et annonce du plan. M. X, a confié à la société Union méditerranéenne d’art contemporain, devenue société Galeries Bartoux (la société) un tableau du peintre Roger Y ; un bon de dépôt, daté du 20 juillet 2005 et signé des deux parties, précisait que le tableau était pris en dépôt-vente et que « les détails et les conditions de ce dépôt seront à préciser ultérieurement avec la direction » ; la société a vendu l’œuvre et remis, le 29 janvier 2008, un chèque de 23 000 €, représentant le produit de cette vente, à M. X qui en a contesté tant le principe que le montant. La cour d’appel tout en retenant la qualification de mandat de vente, ne fit pas droit à la demande en dommages et intérêts95 de M. X. Sur pourvoi formé par ce dernier, la première chambre civile cassa l’arrêt, considérant que les conditions requises pour la validité du mandat d’aliéner n’étaient pas remplies.

L’occasion nous est ainsi offerte de discerner quelle figure juridique abritait ce contrat intitulé « dépôt-vente » (I). Opération essentielle s’il en est afin de pouvoir déterminer les conséquences attachées une telle qualification (II).

I. Détermination de la qualification du contrat passé entre M. X, et la société Union méditerranéenne d’art contemporain.

3. Ce que n’est pas le dépôt-vente. La figure juridique du dépôt-vente est complexe et ne se laisse pas identifier sans difficultés. En se focalisant sur les obligations que fait naître le dépôt, il devient possible, de rechercher une qualification « à travers deux obligations à la charge de celui qui reçoit une chose, corporelle ou incorporelle, dont il n’est point propriétaire et dont il n’entend en principe point jouir personnellement : d’une part, la garder pour le compte de celui qui revêt cette qualité ; d’autre part, la restituer à terme »96.

À partir de cette définition, on peut se demander quel est (sont) l’(les) élément(s) caractéristique(s) du dépôt vente : le dépôt ou la vente ? Ni l’un ni l’autre comme pourrait le laisser supposer, à tort, une qualification exclusive. On se rend compte, d’abord que le dépôt-vente, contrairement à ce que l’appellation pourrait laisser penser97, ne contient pas toutes les obligations inhérentes au contrat de dépôt98. Il en apparaît même l’exact symétrique puisqu’en pareil cas, le « déposant-vendeur » ne vise pas à se faire restituer la chose remise qui est le propre du dépôt, mais bien au contraire, à s’en séparer à titre onéreux, ce qui est la finalité de la vente. Ensuite, il ne contient pas non plus celles caractéristiques de la vente, puisque précisément, l’obligation de garde constitutive du dépôt99, est absente de la vente.

4. Ce que peut recouvrer le dépôt-vente. Le dépôt-vente est bien plutôt un conglomérat d’opérations complexes à partir duquel, rien n’est acquis d’avance100. En effet, selon l’économie du contrat, les tribunaux pencheront pour telle ou telle figure juridique. Ainsi, lorsqu’un vendeur confie des biens à un commerçant (marchand de journaux, de tableaux, etc.) afin que celui-ci les présente à sa clientèle, et conclut les ventes en tant que représentant du fournisseur, le contrat n’est pas une vente101 mais un mandat assorti d’un dépôt. Il n’y a donc qu’un prix, en principe fixé par le fournisseur mandant, et le commerçant mandataire est généralement rémunéré soit forfaitairement, soit par la conservation d’une partie du prix102. Parfois, deux ventes véritables se succèdent, (l’une entre le vendeur initial et le commerçant intermédiaire qui devient ainsi propriétaire et supporte la charge des risques ; l’autre entre ce commerçant et ses clients103 ; il y aura en pareil cas, deux prix différents dont la différence constitue la rémunération du revendeur.

5. Analyse du contrat passé entre M. X, et la société Union méditerranéenne d’art contemporain. Au cas particulier, le contrat sur lequel se focalisait le litige se présentait sous la forme d’un bon de dépôt, daté du 20 juillet 2005 et signé des deux parties. Il était précisé, que « le tableau était pris en dépôt-vente » et que « les détails et les conditions de ce dépôt seront à préciser ultérieurement avec la direction ».

Dans l’esprit de M. X, – c’est en tout cas, ce qu’il soutenait en premier lieu –, le fait d’avoir utilisé l’expression « dépôt-vente », n’impliquait pas pour autant qu’il eût fallu analyser cette opération en un dépôt. C’est ce qu’il évoquait au demeurant et en premier lieu au soutien de son pourvoi considérant que « la dénomination retenue par les parties ne lie pas le juge, celui-ci ayant l’obligation de restituer à la convention son exacte qualification eu égard à ce qui a été voulu entre les parties et, « qu’en s’attachant exclusivement à la dénomination donnée par les parties à l’écrit établissant la remise du tableau, les juges du fond [avaient] violé l’article 12 du Code de procédure civile ». Mais ses critiques ne s’arrêtaient pas là.

Pour la cour d’appel, l’acte du 20 juillet 2005 étant « expressément qualifié de dépôt-vente, la seule circonstance qu’il soit indiqué que ses détails et conditions [seraient] à préciser ultérieurement [était] insuffisante pour lui faire perdre cette qualification », celle d’un dépôt doublé d’un mandat de vendre, au cas particulier ».

Solution que critiquait également le pourvoi au motif que « lorsqu’une chose est remise à un dépositaire en vue de sa vente, la convention de dépôt-vente ne s’analyse en un contrat de mandat de vendre que du jour où les parties sont convenues des conditions de cette vente ». Pour M. X, le mandat de vendre est un mandat portant sur une chose à aliéner. Il ne peut donc naître à la vie juridique que lorsque les parties se sont mises d’accord sur la chose et sur le prix. Ainsi donc, estimait-il qu’« en retenant l’existence d’un mandat de vendre tout en constatant l’absence de tout accord sur les conditions de la vente et la volonté des parties de fixer ces conditions ultérieurement, les juges du fond ont violé les articles 1134 et 1984 du Code civil ».

Argumentation approuvée par les hauts magistrats : « en l’absence de toute précision sur les conditions de la vente, et notamment sur la détermination du prix, la convention ne pouvait être qu’un contrat d’entremise donnant mission à la société de rechercher des acquéreurs, et non de conclure la vente pour le compte de M. X sans avoir obtenu préalablement son accord ». Conséquence logique, les règles sur le mandat doivent être appliquées. Quelles sont-elles ?

II. Sur les conséquences de la qualification attribuée au contrat passé entre M. X et la société Union méditerranéenne d’art contemporain.

6. Régime juridique applicable au mandat de vendre104. Le contrat dont s’agit étant un contrat d’entremise, « la société mandataire avait pour mission de rechercher des acquéreurs et non de conclure la vente pour le compte de M. X, sans avoir obtenu préalablement son accord ». Le mandat conçu en termes généraux que l’on ne confondra pas avec le mandat général évoqué à l’article 1987 du Code civil105, s’oppose au mandat exprès, lui-même ne devant pas être assimilé ipso facto au mandat spécial106. Il ne s’agit plus de l’étendue des affaires du mandant qui est concernée, mais de l’importance des pouvoirs conférés au mandataire sur les affaires en question.

Suivant l’article 1988, le mandataire ne peut accomplir que des actes d’administration lorsque le mandat est conçu en termes généraux107. Pour que le mandataire puisse faire plus, à savoir disposer de la chose et, pas seulement, l’administrer, il faut que ce soit clairement exprimé, autrement dit que le mandat soit exprès108.

7. Application des règles à l’espèce sous étude. C’est exactement ce que soutenait M. X, estimant que « lorsqu’une chose est remise à un dépositaire en vue de sa vente, la convention de dépôt-vente ne s’analyse en un contrat de mandat de vendre que du jour où les parties sont convenues des conditions de cette vente ; qu’en retenant l’existence d’un mandat de vendre tout en constatant l’absence de tout accord sur les conditions de la vente et la volonté des parties de fixer ces conditions ultérieurement, les juges du fond ont violé les articles 1134 et 1984 du Code civil ».

Et ajoutait-il pertinemment : « Le mandat d’aliéner doit être exprès ; qu’en déduisant l’existence d’un mandat de vendre de la seule production d’un bon de dépôt faisant mention d’une remise en dépôt-vente dont les conditions seront à préciser ultérieurement, les juges du fond ont violé les articles 1134 et 1988 du Code civil ».

La réponse de la Cour de cassation tombe limpide et tel un couperet. Au visa des articles 1984 et 1988 du Code civil et en se calquant sur l’argumentation du pourvoi, la haute juridiction énonce « en statuant ainsi, alors que le mandat, lorsqu’il porte sur un acte d’aliénation, doit être exprès (…), la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

L’arrêt rendu par la cour d’appel est donc cassé pour avoir considéré que le principe même de la vente était inclus par l’opération juridique envisagée109 et violé, ce faisant, les règles sur le mandat d’aliéner. Dès lors, peu importe la question de savoir si le mandataire a commis une faute ou non quant au montant du prix de vente du tableau110 puisqu’il n’avait même pas le pouvoir de le vendre. Où l’on retrouve l’une des caractéristiques fondamentales du mandat conçu en termes généraux, à savoir que « le pouvoir de transiger n’emporte pas celui de compromettre »…

Geneviève Pignarre

III – Contrats de consommation

(Voir I. A.)

IV – Contrats publics

Les ARS ne sont pas des tiers privilégiés pour agir contre les contrats des établissements publics de santé (CE, 2 juin 2016, nos 395033 et 396645, ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes)

À l’instar de l’évolution du contrôle de légalité des actes administratifs unilatéraux, il aura suffi de quelques jurisprudences audacieuses du Conseil d’État pour réaliser, en moins de dix ans, une complète métamorphose du contentieux des contrats publics, qui s’est notamment traduite par l’accroissement considérable des pouvoirs du juge en ce domaine, et l’extension très importante des possibilités de recours des tiers dont l’action est ainsi encouragée au nom de l’intérêt général111. Toutefois, ce mouvement de libéralisation juridictionnelle est encore refréné sur certains points, révélant un souci évident de régulation du flux contentieux. En particulier, les tiers désireux d’obtenir l’annulation du contrat doivent non seulement justifier d’un intérêt à agir, mais encore s’abstenir de soulever un moyen sans rapport avec la lésion dont ils se prévalent, ce qui constitue une entorse à une règle classique du procès administratif. Quant aux tiers dits privilégiés, personnes publiques investies par les textes du contrôle de légalité de certains actes administratifs locaux, elles n’échappent pas en toutes circonstances à cette exigence, comme en atteste cet arrêt du 2 juin 2016.

Le Conseil d’État était saisi de recours en cassation formés par la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes contre deux ordonnances rejetant les requêtes de l’Agence régionale de santé d’Auvergne aux fins d’obtenir la suspension de l’exécution d’un marché public de déconstruction, conception et réalisation conclu par le centre hospitalier Émile Roux du Puy-en-Velay en vue de réaménager un espace intergénérationnel au sein de l’hôpital. Ces demandes étaient fondées d’une part, sur l’article L. 521-1 du Code de justice administrative régissant le référé suspension de droit commun, d’autre part sur l’article L. 554-6 du même code qui permet au directeur général de l’ARS de demander la suspension des délibérations du conseil de surveillance et des décisions du directeur des établissements publics de santé dans le cadre du contrôle de légalité qu’il exerce sur ces décisions en vertu de l’article L. 6143-4 du Code de la santé publique. Confirmant les décisions des juges du fond, le Conseil d’État juge les requêtes irrecevables pour défaut d’intérêt à agir de l’ARS, laquelle ne pouvait en l’espèce se prévaloir de la qualité de tiers privilégié et devait donc, comme tout autre tiers, démontrer qu’elle avait été lésée de façon suffisamment directe et certaine par la passation ou les clauses du marché pour en contester la validité ou en demander la suspension. Si cette décision peut se réclamer d’une stricte application des textes en vigueur, une interprétation plus ambitieuse était certainement envisageable, plus cohérente avec l’évolution par ailleurs observée.

I. L’application stricte des textes relatifs au déféré du directeur de l’ARS

Les textes ont depuis longtemps aménagé un régime particulier aux recours exercés par certaines autorités de l’État contre les actes de collectivités ou établissements publics qu’elles sont chargées de contrôler. Le déféré préfectoral, dispositif le plus connu instauré par les premières lois de décentralisation, permet ainsi au préfet de demander au tribunal administratif compétent d’annuler l’acte d’une collectivité territoriale de son ressort géographique, dès lors que cet acte lui paraît irrégulier112. La particularité de ce type de recours a d’abord tenu à ce qu’il pouvait aussi bien être exercé contre une décision unilatérale que dirigé contre un contrat. Et lorsqu’il agit dans ce cadre, le représentant de l’État n’a pas en principe à justifier d’un intérêt à agir, lequel est nécessairement contenu dans l’objectif d’intérêt général poursuivi. Le même dispositif existe au bénéfice des directeurs des agences régionales de santé lesquels, selon l’article L. 6143-4 du Code de la santé publique, sont investis au nom de l’État du contrôle de la légalité des actes des établissements publics de santé et peuvent donc de la même manière saisir le juge administratif pour en obtenir la censure, y compris lorsqu’il s’agit de contrats.

Cette possibilité d’obtenir l’annulation directe d’un contrat pour les tiers n’est cependant plus une exception depuis l’important revirement de jurisprudence opéré par l’arrêt Département de Tarn-et-Garonne, reconnaissant à toute personne extérieure à la convention le droit de former un tel recours113. Ainsi comme l’indique le Conseil d’État dans cet arrêt, il convient désormais de distinguer deux catégories de tiers. La première regroupe les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, et le représentant de l’État dans le département, dont la seule qualité suffit normalement à leur permettre de contester la validité du contrat. La seconde vise l’ensemble des administrés ordinaires, qui sont soumis quant à eux aux règles générales du procès administratif et doivent notamment justifier d’un intérêt à agir. Une difficulté tient cependant à ce que les textes qui régissent la première catégorie établissent la liste des contrats susceptibles d’être déférés au tribunal administratif par l’autorité publique compétente. Or cette liste n’est pas exhaustive. Pour ce qui concerne le directeur de l’ARS, les contrats des établissements de santé énumérés par le Code de la santé publique et donc susceptibles d’être déférés au tribunal administratif sont notamment les délégations de service public, les contrats de partenariat, les baux emphytéotiques, mais non les marchés publics. Le Conseil d’État en déduit dès lors « qu’une agence régionale de santé ne peut, en cette seule qualité, être regardée comme justifiant d’un intérêt lui donnant qualité pour demander au juge administratif d’annuler ou de suspendre un marché public ». Dans cette hypothèse, l’autorité publique perd ainsi sa qualité de tiers privilégié, ce qui ne signifie pas qu’elle ne puisse plus agir, mais qu’elle doit alors, comme tout autre tiers « démontrer qu’elle a été lésée dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par la passation ou les clauses d’un tel marché ».

En l’espèce, la requête de l’ARS ne remplissait pas cette exigence, les écrits produit devant le juge indiquant même de bonne foi que « ses intérêts propres en tant que structure administrative n’étaient pas lésés par le marché litigieux ». Pouvait-il du reste en aller autrement ? Toute action de ce type est nécessairement abstraite car exclusivement tournée vers le rétablissement de la légalité. La lésion d’intérêts propres semble dès lors largement exclue, d’autant plus que les missions de l’ARS sont très générales, puisqu’elles consistent essentiellement dans la mise en œuvre de la politique de santé et la tutelle des établissements publics de santé. Les juges du fond ont d’ailleurs relevé sans ambages que la contribution des ARS au respect de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie « ne peut être considérée, dans le cadre du recours en contestation de validité du contrat, recours de plein contentieux, comme un intérêt direct et certain lésé »114. C’est aussi une autre conséquence du transfert de l’action en déféré contre un contrat dans la catégorie des recours de pleine juridiction, où l’appréciation de l’intérêt à agir est traditionnellement plus stricte qu’en excès de pouvoir115. Ainsi en exigeant de l’ARS qu’elle démontre un intérêt à agir contre les marchés publics de ces établissements, le Conseil d’État rend non seulement cette action plus contraignante, mais aussi surtout plus improbable. Une telle position interroge compte tenu de l’importance de tels contrats et du rôle des agences régionales de santé en tant qu’autorités de tutelle.

II. L’assouplissement souhaitable du régime du déféré du directeur de l’ARS

Il n’est pas contestable que les marchés publics affectent directement et parfois de manière considérable les finances publiques, ce qui était le cas en l’occurrence de la construction d’un espace intergénérationnel pour plusieurs millions d’euros. Leur exclusion de la catégorie des actes susceptibles d’être déférés au tribunal administratif sur le fondement de l’article L. 6143-4 du Code de la santé publique semble dès lors contradictoire avec l’esprit animant les articles L. 6145-1 et suivants du même code qui établissent la tutelle budgétaire des ARS sur les établissements publics de santé. Il est notamment prévu que ces dernières approuvent l’état des prévisions de recettes et de dépenses arrêté par le directeur de l’établissement (CSP, art. L. 6145-1) et arrêtent les comptes et l’affectation des résultats d’exploitation sous certaines conditions (CSP, art. L. 6145-2). Elles peuvent également demander aux directeurs des établissements de modifier leurs états prévisionnels des dépenses et des recettes « pour permettre le respect de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie » et peuvent le modifier elles-mêmes en l’absence de réponse du directeur de l’établissement (CSP, art. L. 6145-4). Enfin, lorsque la situation financière de l’établissement l’exige, elles peuvent demander au directeur de présenter un plan de redressement, voire décider de le placer sous administration provisoire (CSP, art L. 6143-3 ; CSP, art. L. 6143-3-1).

Ainsi une lecture plus souple des dispositions du Code de la santé publique, n’excluant pas les marchés publics de la liste des actes soumis au contrôle du directeur de l’ARS, paraissait opportune, et pouvait même être encouragée par la jurisprudence développée en matière de déféré préfectoral. On se souvient en effet que le Conseil d’État n’a pas hésité à s’affranchir des textes en élargissant la portée du déféré préfectoral. L’article 2131-2 du Code général des collectivités territoriales, issu de l’article 3 de la loi du 2 mars 1982, établit lui aussi la liste des actes faisant l’objet d’une transmission au préfet et susceptibles d’être déférés au tribunal administratif, dont sont notamment exclus les marchés publics inférieurs à un certain montant. Or il est jugé que par cet article « le législateur n’a pas entendu limiter la faculté qu’a le préfet de former un recours pour excès de pouvoir à l’encontre de tous les actes des collectivités territoriales »116. Le préfet a ainsi intérêt à agir par voie de déféré contre tout contrat conclu par les collectivités territoriales de son ressort, y compris ceux qui ne lui sont pas transmis en application de l’article L. 2131-2 du Code général des collectivités territoriales. Sans doute l’intention du législateur est-elle plus clairement exprimée dans les travaux parlementaires préparatoires des articles L. 6143-4 et suivants du Code de la santé publique tels qu’ils résultent de la loi du 21 juillet 2009, où il apparaît que l’omission des marchés publics de la liste des actes susceptibles d’être déférés au tribunal administratif n’est pas involontaire. Le quatrième alinéa de l’article L. 2131-2 du CGCT n’exclut pas moins clairement lui aussi certains contrats du contrôle de légalité préfectoral, sans que cela ait empêché le Conseil d’État de s’en accommoder au nom de l’intérêt général. Deux arguments au moins peuvent encore convaincre de la nécessité d’aller en sens.

Le premier tient à la fonction particulière du directeur de l’ARS, auquel le législateur a confié en tant que représentant de l’État le contrôle autrefois exercé par le préfet sur les actes des établissements publics de santé, qui incluait l’ensemble des contrats publics. Cette qualité était d’ailleurs invoquée en l’espèce par analogie, dans le cadre de l’action exercée sur le fondement de l’article L. 521-1 du CJA, au titre de la jurisprudence Département de Tarn-et-Garonne qui considère que le représentant de l’État dans le département a de facto intérêt à agir contre tout contrat public conclu par une collectivité territoriale de son ressort. Sans doute faut-il admettre que seule l’autorité préfectorale, dont la compétence est prévue sur ce point par la Constitution et par la loi, a effectivement ce privilège. Mais au moins peut-on s’accorder sur l’idée que la substitution du directeur de l’ARS au préfet en la matière, répondant à un souci d’allégement de la charge de travail des préfectures, ne devrait pas s’accompagner d’une régression du contrôle de légalité.

Le second argument tient à la nécessité d’aller vers une unification du régime contentieux des contrats publics passés par les établissements hospitaliers, dont on peut difficilement justifier qu’il soit à géométrie variable au seul prétexte d’alléger la passation de certains contrats, au demeurant sans tenir compte de l’enjeu qu’ils sont susceptibles de comporter. Cette unification est d’autant plus souhaitable que l’état du droit, tel qu’il résulte de la jurisprudence Département de Tarn-et-Garonne et de l’arrêt commenté, accentue considérablement la disparité de ce régime par la distinction opérée entre tiers privilégié et tiers ordinaire, et que selon la nature du contrat qu’il entend contester, le directeur de l’ARS répondra à l’une ou l’autre de ces qualifications. Ainsi dans le premier cas, il n’aura pas à démontrer son intérêt à agir, alors que dans le second, il lui faudra non seulement répondre à cette exigence, mais encore sera-t-il limité dans son argumentation car il ne pourra soulever que des moyens en rapport avec la lésion dont il se prévaut. Comme évoqué précédemment, l’action du directeur de l’ARS devient dans ce dernier cas très hypothétique, et c’est alors aux simples administrés qu’il revient de former un éventuel recours et exercer ainsi le contrôle de légalité de l’acte, lequel sera de toute évidence plus sporadique et aléatoire qu’entre les mains du représentant de l’État. Sans doute peut-on se réfugier derrière l’idée selon laquelle le recours exercé par un tiers contre un contrat n’est pas vraiment un contentieux de la légalité, ce que peut d’ailleurs conforter la requalification récente du déféré préfectoral en recours de pleine juridiction dans cette hypothèse117 ; mais une telle affirmation résiste difficilement à la pratique de ce contentieux où les moyens soulevés sont toujours des moyens de légalité. Il faut encore ajouter que la différenciation du régime des recours tenant à la nature du contrat en cause peut aussi poser problème au regard de la distinction parfois difficile entre les marchés publics et d’autres types de conventions, comme les délégations de service public, qui figurent au nombre des actes pouvant être déférés au juge par le directeur de l’ARS. La difficulté est accentuée par l’entrée en vigueur au 1er juillet 2016 des nouveaux textes de la commande publique118, élargissant notamment la notion de marché public qui englobe désormais les contrats de partenariats, lesquels sont également concernés par le déféré de l’article L. 6143-4 du Code de la santé publique. Faudra-t-il alors aussi considérer ces contrats, devenus des marchés publics, comme n’étant plus soumis au contrôle particulier du représentant de l’État ? Cela n’est évidemment pas souhaitable pour la légalité, comme dans l’intérêt des finances publiques, et il apparaît au contraire nécessaire de rétablir pleinement le contrôle du représentant de l’État sur l’ensemble des contrats des établissements publics de santé.

David Bailleul

Notes de bas de pages

  • 1.
    V. déjà Cass. 1re civ., 1er déc. 1998, n° 96-21951 : RDI 1999, p. 262, obs. Malinvaud P. ; Contrats, conc. consom. 1999, comm. 39, note Leveneur L. – Cass. 3e civ., 25 janv. 2012, n° 10-27357 : Bull. civ. III, n° 17.
  • 2.
    CA Aix-en-Provence, 3e ch. B, 27 févr. 2014, n° 12/21951.
  • 3.
    Il convient de signaler que le moyen annexé à l’arrêt sous commentaire fait état de la « faute quasi-délictuelle » (c’est-à-dire C. civ., art. 1383 plutôt que C. civ., art. 1382) des vendeurs, laquelle résidait dans le fait qu’ils avaient décaissé leur terrain, créant ainsi un dénivelé supérieur à celui existant en limite de propriété et qu’ils ont procédé à l’enlèvement de la banquette qui stabilisait les terres pour édifier le mur litigieux. Rappelons que selon les constatations de l’expert, le mur éboulé « n’a pas été construit dans les règles de l’art, sur sa partie sud concernée par les désordres, qui trouvent leur origine, notamment, dans la vulnérabilité du mur, en raison de l’absence d’éléments structurants, au regard de sa hauteur ».
  • 4.
    L’existence du défaut n’est admise que lorsqu’il présente une certaine gravité ; le caractère caché du vice résulte de l’ignorance de l’acheteur du vice, eu égard à la nature de la chose, aux conditions de la vente ou à ses propres compétences (Huet J., JCl. Civil Code, art. 1641 à 1649, fasc. 30, spéc. nos 61 et s.) ; à défaut, l’acheteur aurait conclu à ses risques et périls (Cass. 3e civ., 4 févr. 2004, n° 02-18029 : Bull. civ. III, n° 23 ; JCP N 2004, 1296, étude Vignon-Barrault A. – Cass. ass. plén., 27 oct. 2006, n° 05-18977 : Bull. ass. plén., n° 13, Rapp. Rivière, avis Cavarroc ; JCP G 2007, II, 10019, note Leveneur L. ; JCP N 2007, 1157, spéc. n° 12, obs. Piedelièvre S. ; D. 2006, p. 2812, obs. Gallmeister I. ; Defrénois 30 mars 2007, n° 38561, p. 431, note Dagorne-Labbe Y. ; RDI 2007, p. 256, obs. Trébulle F.-G.). À cela s’ajoute que le vice doit être antérieur à la vente pour être à la charge du vendeur, et qu’il incombe à l’acquéreur de prouver que ces diverses exigences sont satisfaites.
  • 5.
    Sur ce point, v. Huet J., JCl. Civil Code, art. 1641 à 1649, fasc. 60, spéc. nos 13 et s.
  • 6.
    Il en est de même du fabricant, du revendeur intermédiaire ou du vendeur que ses compétences techniques autorisent à assimiler à un vendeur professionnel. V. pour des illustrations jurisprudentielles : Barret O., « Vente (3e effets) », spéc. n° 653 : Rép. civ. Dalloz.
  • 7.
    V. par ex. : Cass. 1re civ., 30 sept. 2008, n° 07-16876.
  • 8.
    Et ce, en dehors des hypothèses où le particulier a également la qualité de consommateur. Dans pareil cas, c’est la législation sur les clauses abusives qui s’applique : l’article L. 132-1, combiné avec l’article R. 132-1 du Code de la consommation, ainsi que les dispositions relatives à la nouvelle « garantie légale de conformité », telles qu’elles résultent de l’ordonnance de transposition du 17 février 2005.
  • 9.
    Cass. com., 27 nov. 1991, n° 89-19546 : Bull. civ. IV, n° 367.
  • 10.
    Sur la notion de « même spécialité », v. Huet J., JCl. Civil Code, art. 1641 à 1649, fasc. 60, spéc. nos 41 et s. ; Kengne G., « Le professionnel de la même spécialité », LPA 20 juill. 2000, p. 17.
  • 11.
    Cass. 3e civ., 30 oct. 1978, n° 77-11354 : JCP G 1979, II, 19178, note Ghestin J. ; RTD civ. 1979, p. 392, obs. Cornu G.
  • 12.
    Sauf lorsqu’il est assimilé à un vendeur professionnel : Cass. 3e civ., 10 juill. 2013, n° 12-17149 : Bull. civ. III, n° 101 – Cass. 3e civ., 9 févr. 2011, n° 09-71498.
  • 13.
    Cass. 3e civ., 13 janv. 2009, n° 07-18777.
  • 14.
    Cass. 3e civ., 16 nov. 1988, n° 87-14988 : Bull. civ. III, n° 164.
  • 15.
    Cass. com., 27 nov. 1991, n° 89-19456 : Bull. civ. IV, n° 367 – Cass. com., 21 janv. 1992, n° 90-12115 : Contrats, conc. consom. 1992, comm. 94, note Leveneur L. – Cass. 2e civ., 30 mars 2000, n° 98-15286 : Bull. civ. II, n° 57 ; D. 2000, IR, p. 132.
  • 16.
    Cette preuve incombe aux acquéreurs en application de l’article 1315 du Code civil.
  • 17.
    Cass. 3e civ., 19 nov. 2008, n° 07-17880 : D. 2008, p. 3085.
  • 18.
    V. parmi d’autres : Cass. 3e civ., 6 juill. 2011, n° 10-18882 : Bull. civ. III, n° 126 ; RTD civ. 2011, p. 776, obs. Gautier P.-Y. – Cass. 3e civ., 14 avr. 2010, n° 09-14455 – Cass. 3e civ., 16 déc. 2009, n° 09-10540.
  • 19.
    Cass. 3e civ., 22 juin 2010, n° 09-67250 : RDI 2010, p. 542.
  • 20.
    Outre le choix dont dispose l’acquéreur de se placer sur le terrain de la nullité comme sur celui de la garantie, v. infra II.
  • 21.
    Cass. com., 15 janv. 2002, n° 99-18774 : Bull. civ. IV, n° 11 ; RTD civ. 2002, p. 290, obs. Mestre J. et Fages B.
  • 22.
    Cass. 1re civ., 3 mai 2000, n° 98-11381 : D. 2002, p. 928, obs. Tournafond O. ; RTD civ. 2000, p. 566, obs. Mestre J. et Fages B. – Adde Cass. 3e civ., 17 janv. 2007, n° 06-10442 : D. 2007, p. 1051, note Mazeaud D. ; D. 2007, p. 1054, note Stoffel-Munck P. ; D. 2007, p. 2966, obs. Amrani-Mekki S. ; AJDI 2007, p. 416, obs. Bigot de la Touanne S. ; RTD civ. 2007, p. 335, obs. Mestre J. et Fages B.
  • 23.
    V. sur la question parmi d’autres : Mekki M., D. 2016, p. 566 et s.
  • 24.
    V. CA Aix-en-Provence, 27 févr. 2014, n° 12/21951.
  • 25.
    Cass. com., 4 mars 2008, n° 07-11790 : Bull. civ. IV, n° 53 ; D. 2008, p. 844, obs. Delpech X. ; Contrats, conc. consom. 2008, comm. 172, obs. Leveneur L. ; JCP G 2008, II, n° 10079, note Guignard L. ; RDC 2008, p. 750, obs. Viney G. ; RTD civ. 2008, p. 490, obs. Jourdain P.
  • 26.
    Le refus de prendre livraison d’une chose viciée présage de la résolution éventuelle du contrat. V. en ce sens : Huet J., JCl. Civil Code, art. 1641 à 1649, fasc. 50, spéc. n° 7 et les décisions citées.
  • 27.
    Le choix entre l’action rédhibitoire et l’action estimatoire appartient à l’acheteur seul (Cass. 3e civ., 20 oct. 2010, n° 09-16788 : Contrats, conc. consom. 2011, comm. 2, obs. Leveneur L.), même si l’affirmation doit être nuancée. En effet, l’acquéreur perd cette option dans certaines hypothèses. Il en est ainsi lorsqu’il n’est pas en mesure de restituer la chose, en raison de sa perte par cas fortuit telle qu’envisagé à l’alinéa 2 de l’article 1647, à moins que la propriété de la chose n’ait été transmise à l’acheteur par le jeu d’une clause de réserve de propriété (Cass. com., 19 oct. 1982, n° 81-10220 : Bull. civ. IV, n° 321 ; RTD civ. 1984, p. 515, obs. Huet J.). Par ailleurs, l’option disparaît lorsque le défaut n’est pas suffisamment grave (Cass. 3e civ., 25 juin 2014, n° 13-17254). Enfin, l’acquéreur perd également l’option entre les deux actions lorsque le vice a été réparé par le vendeur, seule l’indemnisation du préjudice peut être sollicitée (Cass. com., 1er févr. 2011, n° 10-11269 : D. 2011, p. 516, obs. Delpech X. ; RTD com. 2011, p. 405, obs. Bouloc B.).
  • 28.
    Cass. 1re civ., 25 mai 2016, n° 15-17317 : « (…) la résolution d’une vente entraînant de plein droit la remise des parties en l’état où elles se trouvaient antérieurement à sa conclusion, le juge de proximité, dès lors qu’il la prononçait, n’était pas tenu, à défaut de demande expresse en ce sens, d’ordonner en même temps que la restitution du prix, celle de la chose vendue. »
  • 29.
    Cass. 1re civ., 8 déc. 2009, n° 08-21138.
  • 30.
    Cela signifie qu’en cas de vente successive de la même chose, le vendeur initial ne doit à l’acheteur final que le prix qu’il a reçu de son propre acheteur (Cass. com., 22 mai 2012, n° 11-13086 : Bull. civ. IV, n° 191 ; RTD civ. 2012, p. 141, obs. Gautier P.-Y.). En effet, l’acquéreur n’exerce que l’action du vendeur intermédiaire contre le vendeur originaire (Barret O., « Vente (3e effets) », n° 623 : Rép. civ. Dalloz).
  • 31.
    En ce sens, v. Huet J., JCl. Civil Code, art. 1641 à 1649, fasc. 50, spéc. n° 34.
  • 32.
    Cass. 1re civ., 6 avr. 2016, n° 15-12402.
  • 33.
    Pour des exemples sur ce point, v. Malinvaud P., « L’action en garantie/réparation des vices cachés de l’article 1645 du Code civil », RDI 2014, p. 112.
  • 34.
    Sur l’autonomie de l’action indemnitaire : Cass. com., 19 juin 2012, n° 11-13176 : Bull. civ. IV, n° 132 ; D. 2012, p. 1737 ; JCP G 2012, 963, avis de l’avocat général Le Mesle L. ; RDI 2012, p. 519, obs. Malinvaud P. ; RDC 2013, p. 101, obs. Borghetti J.-S. – Cass. 1re civ., 26 sept. 2012, n° 11-22399 : Bull. civ. II, n° 192 ; D. 2012, p. 2306 ; RDC 2013, p. 101, obs. Borghetti J.-S. ; RDC 2013, p. 164, obs. Viaud F.
  • 35.
    Cass. 3e civ., 24 juin 2015, n° 14-15205.
  • 36.
    Cass. 2e civ., 11 juill. 1974, n° 73-10415 : Bull. civ. II, n° 231.
  • 37.
    Cass. civ., 3 janv. 1933 : DH 1933, p. 113 – Cass. civ., 18 juill. 1934 : D. 1935, 1, p. 38, note Roger R.
  • 38.
    Cass. com., 19 mars 2013, n° 11-26566 : D. 2013, p. 1947, obs. Delpech X., note Hontebeyrie A. ; RTD com. 2013, p. 323, obs Bouloc B. ; JCP G 2013, 705, note Pillet G. ; RDC 2013, p. 967, obs. Le Bourg J. et Quézel-Ambrunaz C. ; Gaz. Pal. 14 nov. 2013, n° 153v0, p. 15, obs. Mekki M. ; JCP G 2013, 1291, spec. n° 5, obs. Stoffel-Munck P. ; RDC 2013, p. 1360, note Borghetti J. S.
  • 39.
    Coëffard P., Garantie des vices cachés et « responsabilité contractuelle de droit commun », 2005, LGDJ, Faculté de droit et de sciences sociales de l’université de Poitiers, spéc. n° 8.
  • 40.
    Bénabent A., Les contrats spéciaux, 4e éd., 1999, Montchrestien, n° 207 ; Izorche M.-L., « Le vendeur professionnel, entre vices cachés et jurisprudence hermétique », D. 2000, p. 407, spéc. nos 6 et s.
  • 41.
    Quézel-Ambrunaz C., « Antenne relais : distinguer risque, trouble et préjudice sur fond de principe de précaution ! », RLDC 2009, p. 59.
  • 42.
    Coëffard P., Garantie des vices cachés et « responsabilité contractuelle de droit commun », thèse préc., n° 48.
  • 43.
    Un auteur résume l’idée dans les termes suivants : « En effet, l’on peine à trouver l’élément à l’origine de l’obligation de verser des dommages et intérêts. Faire du vice caché un manquement contractuel serait le ramener dans l’orbite du défaut de conformité, avec lequel il ne saurait désormais être confondu. Supposer que l’obligation aux dommages et intérêts compensatoires du préjudice subi provient de la garantie elle-même serait en méconnaître la nature : il ne s’agit pas d’une obligation » : RDC 2012, p. 1248, Quézel-Ambrunaz C.
  • 44.
    V. l’analyse proposée par Le Bourg J. et Quézel-Ambrunaz C., « La garantie édilicienne échappe aux critères de la jurisprudence Faurecia », RDC 2013, p. 967, spéc. IV et les réf. citées ; Waltz-Teracol B., « Incertitude sur le fondement et le régime de l’action en réparation du fait d’un vice caché », D. 2015, p. 1939.
  • 45.
    V. par ex. : Puig P., Contrats spéciaux, 4e éd., 2011, Dalloz, Hyper Cour, n° 467 – Contra Malaurie P., Aynès L. et Gautier P.-Y., Les contrats spéciaux, 4e éd., 2009, Defrénois, n° 410.
  • 46.
    V. parmi d’autres : Ancel P., « Les concours de la responsabilité délictuelle et de la responsabilité contractuelle. Les concours de responsabilités : entre dialogue et conflits », Resp. civ. et assur. 2012, étude 8 – V. sur ce point, bien que dans un domaine différent : Cass. 1re civ., 28 juin 2012, n° 10-28492.
  • 47.
    Ce qui était le cas ici, dans la mesure où les acquéreurs ne réclamaient ni la résolution du contrat ni la diminution du prix, mais uniquement des dommages-intérêts correspondant aux frais de la reptation du mur ainsi que de remise en état des lieux suite à son éboulement.
  • 48.
    Les biens d’occasion ne sont en effet pas exclus du champ d’application de la garantie. V. C. consom., art. L. 217-7 et pour une application : CA Montpellier, 8 oct. 2014, n° 13/01138 : Juris-Data n° 2014-026744.
  • 49.
    La directive assujettit à l’obligation de garantie le vendeur et lui seul ; il s’agit donc de faire rentrer le professionnel en cause dans cette définition.
  • 50.
    Dir. n° 1999/44/CE, 25 mai 1999, art. 4.
  • 51.
    L’avocat général semblait aller plus loin. Pour lui, si l’application de la directive suppose un contrat, rien n’est précisé quant à la qualité des parties à ce contrat ; il n’est pas exigé en particulier que le vendeur soit le propriétaire du bien de consommation (v. concl. Saugmandsgaard Øe, pt 63 et s., spéc. pt 68 et 69).
  • 52.
    En droit français, c’est parce que seul le propriétaire a la qualité de vendeur, que l’apparence permet de valider une vente a non domino.
  • 53.
    V. concl. Saugmandsgaard Øe, pt 92.
  • 54.
    V. concl. Saugmandsgaard Øe, pt 75.
  • 55.
    Au demeurant, à supposer qu’un tel contrat existe, la situation de l’acquéreur professionnel n’en serait pas forcément tellement plus favorable. La garantie des biens de consommation ne paraît pas envisageable ; quant à l’action en garantie des vices cachés, elle paraît vouée à l’échec. La jurisprudence se montre sévère pour l’acquéreur professionnel (dès lors du moins qu’il avait les compétences techniques le mettant en mesure de déceler le vice, ce qui est le cas en l’espèce) même si cette qualité ne conduit pas à présumer une connaissance des vices. Une telle rigueur paraîtrait d’autant plus vraisemblable qu’en pareille circonstance, le professionnel a eu l’occasion de se livrer à un examen approfondi de la chose qu’il détenait. Il resterait alors l’action sur le fondement du mandat (v. sur ce point, Barret O., « Effets de la vente », nos 563 et s. : Rép. civ. Dalloz).
  • 56.
    Danis-Fatôme A., Apparence et contrat, 2004, LGDJ, n° 554.
  • 57.
    En ce sens, Danis-Fatôme A., Apparence et contrat, préc., n° 861.
  • 58.
    Arrêt, pt 41.
  • 59.
    Danis-Fatôme A., Apparence et contrat, préc., n° 640.
  • 60.
    Danis-Fatôme A., Apparence et contrat, préc., n° 880.
  • 61.
    Arrêt, pt 44.
  • 62.
    V. concl. Saugmandsgaard Øe, pt 85.
  • 63.
    V. concl. Saugmandsgaard Øe, pt 87.
  • 64.
    V. concl. Saugmandsgaard Øe, pt 72.
  • 65.
    V. arrêt, pt 39 et s.
  • 66.
    Dir. n° 2011/83/UE, 25 oct. 2011, art. 5, §1er, b et e ; et pour sa transposition en droit français, C. consom., art. L. 111-1. Cette disposition n’était toutefois pas applicable compte tenu de la date des faits.
  • 67.
    V. pour une autre illustration : C. consom., art. L. 224-59 : obligation d’informer le consommateur qui contracte à l’occasion d’une foire ou d’un salon, qu’il ne dispose pas d’un droit de rétractation.
  • 68.
    Dig. L. XII, Tit. VI, L. 18, § 2, comm.
  • 69.
    Pothier R.-J., in Bugnet M., Œuvres, t. V, 1861, Cosse Marchal et Plon, n° 81.
  • 70.
    Pour reprendre l’expression de Pont P., Explication théorique et pratique du Code civil, t. VIII, 1867, Delamotte et fils, n° 69.
  • 71.
    Ce qui n’est pas exactement la même chose, en ce sens, v. Duvergier J.-B., Le droit civil français suivant l’ordre du Code, t. XI, 1841, Société typographique belge, n° 77, qui précise que la règle de l’article 1886 « diffère, sous un double rapport, de celle que les jurisconsultes ont formulée. En effet, l’article du code veut que, si les dépenses ont été faites pour user de la chose, elles ne puissent être répétées ; ce n’est pas dire précisément que l’emprunteur est obligé de les faire. D’un autre côté, il peut y avoir des dépenses ordinaires d’entretien, qui ne soient pas nécessaires pour user de la chose. Ainsi, de ce que les dépenses nécessaires pour rendre l’usage possible seraient imposées à l’emprunteur, on ne devrait pas conclure qu’il est tenu de toutes les dépenses ordinaires d’entretien ».
  • 72.
    Domat J., Les lois civiles dans leur ordre naturel, t. I, Liv. I, Tit. V, sect. III, XIV, 1767, p. 69. L’on pourrait néanmoins remarquer qu’il y a encore une différence entre l’affirmation de Domat et l’article 1886. Le premier impose expressément à l’emprunteur de faire les dépenses puisqu’il « en sera tenu », alors que le second ne fait qu’en interdire la répétition, v. Duvergier J.-B., Le droit civil français suivant l’ordre du Code, préc., n° 78.
  • 73.
    L’exemple délivré par Pothier R.-J., in Bugnet M., Œuvres, préc., est connu : « Si je vous ai prêté mon cheval pour faire un voyage, vous êtes obligé de le nourrir et de l’entretenir de fers à vos dépens, cette dépense ordinaire étant une charge de la jouissance que vous en avez ».
  • 74.
    Pont P., Explication théorique et pratique du Code civil, préc.
  • 75.
    Baudry-Lacantinerie G. et Wahl A., Traité théorique et pratique de droit civil, t. 20, De la société, du prêt, du dépôt, 1898, Librairie de la société du recueil général des lois et des arrêts, n° 664.
  • 76.
    Baudry-Lacantinerie G. et Wahl A., Traité théorique et pratique de droit civil, t. 20, De la société, du prêt, du dépôt, préc., n° 665.
  • 77.
    Baudry-Lacantinerie G. et Wahl A., Traité théorique et pratique de droit civil, t. 20, De la société, du prêt, du dépôt, préc., n° 666.
  • 78.
    En ce sens, v. Planiol M. et Ripert G., Traité pratique de droit civil français, t. XI, 2e partie, 1932, LGDJ, n° 1133 : « Le prêteur est obligé (…) en vertu de la gestion d’affaires, de rembourser à l’emprunteur les dépenses faites par lui pour la conservation de la chose, et même les dépenses utiles, dans la mesure de la valeur qu’elles ont conservée ». Comp. Laurent F., Principes de droit civil, t. 26, 4e éd., 1887, Bruylant, n° 482.
  • 79.
    Grua F. et Cayrol N., JCl. Civil Code, Art. 1888 à 1891, « Prêt à usage, obligations du prêteur », 2016, n° 32.
  • 80.
    Grua F. et Cayrol N., JCl. Civil Code, Art. 1880 à 1887, « Prêt à usage – Obligations de l’emprunteur », 2016, nos 44 et 45. À l’appui de leur démonstration, les auteurs citent l’arrêt CA Dijon, 29 janv. 2008, n° 07/00052 : Juris-Data n° 2008-358268, jugeant que doit être rejetée la demande de remboursement de l’emprunteur si « les factures produites par les emprunteurs ne concernent pas à l’évidence des travaux nécessaires à la conservation de la chose prêtée. Il ne s’agit pas non plus de dépenses extraordinaires, mais de dépenses liées à l’entretien courant (réfection d’enduit de façade, installation de prises électriques, réfection de la menuiserie, pose d’un carrelage dans l’entrée de la chaufferie). Il n’est pas non plus justifié de l’urgence des travaux dispensant l’emprunteur d’informer le prêteur ». Sur la non-remise en cause de la gratuité, v. infra.
  • 81.
    Guillouard L., Traités du prêt, du dépôt et du séquestre, 1892, Paris, Durand et Pedone-Lauriel, n° 56 ; comp. Laurent F., Principes de droit civil, t. 26, 4e éd., 1887, Bruylant, n° 482, pour qui l’obligation de l’article 1890 « ne naît pas du contrat » et qu’« il ne suffit pas que la conservation de la chose exige une dépense pour que l’emprunteur ait le droit de la faire pour le compte du prêteur ; quand il y a une dépense nécessaire à faire, il doit en avertir le propriétaire, c’est le maître qui décidera si la dépense sera faite ». Adde la proposition intermédiaire Grua F. et Cayrol N., JCl. Civil Code, Art. 1880 à 1887, « Prêt à usage – Obligations de l’emprunteur », 2016, n° 33 : « Ne conviendrait-il pas d’analyser l’article 1890, non pas comme un simple renvoi à la théorie générale de la gestion d’affaires, mais comme une règle fixant des conditions particulières à l’admission de celle-ci dans le prêt à usage, en raison de la gratuité du contrat ? C’est que normalement, dans la gestion d’affaires, l’exigence de préserver le maître d’une intrusion intempestive dans ses affaires doit le céder à celle de ne pas laisser sans recours le gérant qui a agi pour rendre service. Mais, lorsque le gérant et le maître sont liés par ailleurs par un prêt à usage, le conflit d’exigences s’en trouve modifié, puisqu’on est en présence de deux personnes également serviables. Le gérant et emprunteur, qui n’a plus le monopole de l’altruisme, n’a plus autant de raisons d’être préféré au maître et prêteur. Le souci de préserver ce dernier contre des initiatives importunes peut donc l’emporter ».
  • 82.
    Rappr. Grua F. et Cayrol N., JCl. Civil Code, Art. 1880 à 1887, « Prêt à usage – Obligations de l’emprunteur », 2016, n° 33 : « Ainsi s’expliqueraient les dispositions exceptionnellement restrictives de l’article 1890, auxquelles il conviendrait de s’en tenir. Ce serait admettre que l’existence d’un contrat entre les parties modifie les règles des quasi-contrats ».
  • 83.
    L’accord du prêteur n’est pas étudié par la Cour de cassation. À la lecture des moyens annexés au pourvoi, son existence ne semblait toutefois pas douteuse.
  • 84.
    En ce sens, Grua F. et Cayrol N., JCl. Civil Code, Art. 1880 à 1887, « Obligations de l’emprunteur », 2016, n° 45 : « Quoi que dise l’article 1886 du Code civil, toutes les dépenses nécessaires pour user de la chose ne peuvent être à la charge définitive de l’emprunteur, sans quoi la gratuité du contrat risque de s’inverser au profit du prêteur (…) Dira-t-on qu’il est douteux que le prêteur ait entendu préserver l’emprunteur de toutes les imprévisions et le garantir de toute la gratuité qu’il pouvait espérer du contrat ? Certes, mais la définition même du prêt à usage permet de présumer que les parties n’ont pas entendu que l’emprunteur assume des charges qui feraient disparaître la gratuité du prêt, puisqu’il s’agit là d’un élément essentiel du contrat ».
  • 85.
    V. par ex., Flour J., Aubert J.-L. et Savaux E., Les obligations, t. 1, L’acte juridique, 15e éd., 2012, Sirey, n° 85 ; Terré F., Simler P. et Lequette Y., Les obligations, 10e éd., 2009, Dalloz, n° 67 ; Mazeaud H., Mazeaud L. et Mazeaud J., Leçons de droit civil, t. II, 1er vol., Obligations, 7e éd., Chabas F. (dir.), 1985, Montchrestien, n° 103 ; Baudry-Lacantinerie G. et Barde L., Traité théorique et pratique de droit civil, t. XII, Des obligations, t. I, 3e éd., 1906, Librairie de la société du recueil J.-B. Sirey et du journal du Palais, n° 16 ; Duranton A., Cours de droit français suivant le Code civil, t. X, 4e éd., 1844, Paris, Thorel et Guibert, n° 80.
  • 86.
    Pothier R.-J., « Traité des obligations », in Bugnet M., Œuvres, t. II, 2e éd., 1861, Paris, Cosse, Marchal et Plon, n° 12, les contrats à titre onéreux sont « ceux qui se font pour l’intérêt et l’utilité réciproque de chacune des parties ».
  • 87.
    V. not. Beudant C. et Lerebours-Pigeonnière P., Cours de droit civil français, t. VIII, Les contrats et les obligations, 2e éd., 1936, réimpr. 1996, Paris, Librairie Arthur Rousseau, n° 37.
  • 88.
    Dupeyroux J.-J., Contribution à la théorie générale de l’acte à titre gratuit, Maury J. (préf.), 1955, LGDJ, p. 434 ; Adde not. Planiol M., Traité élémentaire de droit civil, t. II, 1902, Paris, Pichon, n° 951, qui affirme que « le contrat est à titre onéreux lorsque chacune des parties reçoit quelque chose de l’autre, soit sous la forme d’une dation immédiate, soit sous la forme d’une promesse pour l’avenir ». Planiol relativise cependant son propos en note en précisant qu’il se « conforme ici au langage usuel, qui n’est pas très correct. Une acquisition se fait à titre onéreux ou à titre gratuit, selon que l’acquéreur fournit ou non la valeur de ce qu’il reçoit ; mais on a tort de dire qu’un contrat est à titre onéreux, car un contrat n’a pas de titre, c’est lui-même qui sert de titre à l’acquisition ».
  • 89.
    V. par ex. Malaurie P., Aynès L. et Gautier P.-Y., Les contrats spéciaux, 3e éd., 2007, Defrénois, n° 911 : « Quand le prêteur tire un profit du contrat, il n’y a pas prêt à usage ».
  • 90.
    Pont P., Explication théorique et pratique du Code civil, préc., n° 21, l’auteur se justifie ensuite en affirmant que le juge « n’a pas ici, plus qu’en aucun autre contrat, à rechercher le motif premier, la cause éloignée du contrat ».
  • 91.
    V. par ex. Cass. com., 22 juill. 1986, n° 84-17646.
  • 92.
    CA Paris, 18 mai 1953 : JCP G 1953, II, 7776.
  • 93.
    « La vente est alors faite au nom et pour le compte du fournisseur sur lequel pèse le risque commercial de l’invendu. C’est également lui qui déterminera le prix de vente de la marchandise ». En ce sens, Malaurie P., Aynès L. et Gautier P.-Y., Droit des contrats spéciaux, 8e éd., 2016, Defrénois, n° 89, p. 69. V. en ce sens et cité par ces auteurs, Cass. com., 17 févr. 1981, n° 79-14298 : Bull. civ. IV, n° 86 : « La charge de restituer en nature la chose est un élément essentiel du contrat de dépôt ». Un commerçant avait constitué un stock de marchandises dont le fournisseur était resté propriétaire jusqu’au paiement du prix. Celui-ci tomba en « faillite ». Les hauts magistrats considèrent que le prix des marchandises vendues appartient au syndic du commerçant et non au fournisseur parce que le contrat est une vente et non un dépôt.
  • 94.
    Ainsi pour un contrat de restauration : le prestataire à qui le manteau d’un client a été remis peut endosser la qualité accessoire de dépositaire.
  • 95.
    Sur cette question, v. infra n° 7.
  • 96.
    Gautier P.-Y., « Exercices de qualification », in dossier « Le dépôt est-il véritablement un contrat ? », RDC 2014, n° 110g0, p. 149.
  • 97.
    Autrement appelé contrat de confié dans le secteur de la bijouterie, joaillerie.
  • 98.
    Sauf si les parties en décident autrement. Ainsi jugé que : « La remise des biens en vue de leur vente n’est pas exclusive d’un contrat de dépôt (Cass. com., 6 juill. 1999, n° 97-10302 : Bull. civ. IV, n° 148).
  • 99.
    Puig P., Contrats spéciaux, 6e éd., 2015, Dalloz, Hypercours, nos 958 et s.
  • 100.
    Sur cette question, v. « Dépôt » : Rép. civ. Dalloz, ainsi que notre étude publiée à l’AJCA 2016, p. 508.
  • 101.
    Collart Dutilleul F. et Delebecque P., Contrats civils et commerciaux, 10e éd., 2015, Dalloz, n° 91, p. 102.
  • 102.
    Collart Dutilleul F. et Delebecque P., Contrats civils et commerciaux, préc.
  • 103.
    Seulement le commerçant, premier acheteur peut restituer les biens s’il ne les a pas déjà revendus dans un certain délai. Cette particularité confère au contrat la nature d’une vente sous condition résolutoire.
  • 104.
    Pour une étude plus générale, v. Riéra A., « Quel(s) régime(s) juridique(s) pour le(s) dépôt-vente ? », AJCA 2016, p. 512.
  • 105.
    C. civ., art. 1987 : le mandat général « embrasse toutes les affaires du mandant ».
  • 106.
    Sur toutes ces distinctions, v. Wéry P., Droit des obligations, vol. 1, Théorie générale du contrat, 2e éd., 2011, Larcier, nos 162 et s.
  • 107.
    C. civ., art. 1988, al. 1er. V. aussi Andersen R., du Jardin J., Foriers P.-A. et Simont L. (dir.), Répertoire pratique du droit belge, Législation, Doctrine, Jurisprudence Mandat et fiducie.
  • 108.
    C. civ., art. 1988, al. 2 : « S’il s’agit d’aliéner ou d’hypothéquer, ou de quelque autre acte de propriété, le mandat doit être exprès ».
  • 109.
    Les juges d’appel avaient considéré que la société mandataire n’avait pas commis de faute « sur le principe même de la vente ».
  • 110.
    Selon les juges d’appel, la faute du mandataire résidait en ce qu’il n’avait « pas obtenu l’accord préalable de M. X sur le prix de cette vente ». Ils en déduisaient que « cette faute ne [pouvait] toutefois donner lieu à indemnisation, en l’absence de perte d’une chance réelle et sérieuse de renoncer à la vente proposée dans l’espoir d’obtenir un prix supérieur, dès lors que la cote de l’artiste pour des œuvres de dimensions semblables était nettement inférieure au prix de vente ».
  • 111.
    V. Girard D., « L’unité retrouvée du contentieux des contrats publics », Revue générale du droit (en ligne), note sous CE, ass., 4 avr. 2014, n° 358994, département de Tarn-et-Garonne.
  • 112.
    CGCT, art. L 2131-2 et s.
  • 113.
    CE, ass., 4 avr. 2014, n° 358994, département de Tarn-et-Garonne : Lebon ; RDFA 2014, p. 425, concl. Dacosta B.
  • 114.
    TA Clermont-Ferrand, Ord., 19 nov. 2015, n° 1501868.
  • 115.
    CE, 23 déc. 2011, n° 348647, ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration : Lebon.
  • 116.
    CE, sect., 13 janv. 1988, n° 68166, Mutuelle générale des personnels des collectivités locales et de leurs établissements : Lebon.
  • 117.
    CE, 23 déc. 2011, n° 348647, ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration.
  • 118.
    Ord. n° 2015-899, 23 juill. 2015 et D. n° 2016-360, 25 mars 2016, relatifs aux marchés publics.
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