Loi de finances pour 2022 : quoi de neuf pour les entreprises ?

Publié le 03/02/2022
Finance
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Volet fiscal du plan en faveur des indépendants, crédit d’impôt en faveur de la recherche collaborative, amortissement des fonds de commerce et autres ajustements destinés à amortir les effets de la crise sanitaire sont au menu de la loi de finances pour 2022. La loi de finances pour 2022 (L. n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022, JORF n°0304 du 31 décembre 2021), dont les mesures fiscales ont été validées par le Conseil constitutionnel (Cons. const., 28 décembre 2021, n° 2021-833, JORF n°0304 du 31 décembre 2021) et ses 200 articles ne contiennent pas de grandes réformes fiscales. Focus sur les mesures concernant les entreprises et dirigeants ; les mesures relatives aux ménages, à l’immobilier et aux sanctions et contrôles fiscaux font l’objet de développements distincts.

Statut unique d’entrepreneur individuel

La loi de finances pour 2022 entérine les mesures fiscales du plan en faveur des indépendants, annoncé par le président de la République, le 16 septembre dernier. Le projet de loi en faveur de l’activité professionnelle indépendante, adopté en première lecture par le Sénat met notamment en place un statut unique d’entrepreneur individuel dont le patrimoine privé et le patrimoine professionnel sont séparés et supprime, par conséquent, l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL).

Sur le plan fiscal, l’article 13 de la loi de finances pour 2022 prévoit que toutes les entreprises individuelles, à l’exception des entreprises soumises à un régime micro-fiscal, peuvent désormais opter pour l’impôt sur les sociétés par leur assimilation à l’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL). Dans ce cas, la loi précise également que les dividendes perçus par l’entrepreneur individuel seront soumis aux cotisations sociales pour la fraction excédant 10 % du montant du bénéfice net imposable ou, si ce montant est supérieur, la part de ces revenus qui excède 10 % du montant de la valeur des biens du patrimoine affecté constaté en fin d’exercice. Sur le plan social, l’option entraîne l’assujettissement de l’exploitant au régime social du gérant associé unique d’EURL.

Cession d’entreprises individuelles : relèvement des plafonds d’exonération

L’article 19 de la loi de finances pour 2022 relève considérablement les plafonds d’exonération des plus‐values professionnelles réalisées lors de la transmission à titre onéreux ou gratuit d’une entreprise individuelle ou d’une branche complète d’activité (CGI, art. 238 quindecies, I). Ainsi le plafond d’exonération totale, qui s’applique lorsque la valeur vénale des éléments transmis est inférieure à 300 000 euros, passe à 500 000 euros et le plafond de l’exonération partielle passe de 500 000 euros à un million d’euros. Lorsque l’entreprise est mise en location-gérance, la loi admet que ces exonérations peuvent s’appliquer, si, toutes les autres conditions étant part ailleurs remplies, l’entreprise est cédée à une personne autre que le locataire-gérant.

Cession d’entreprises individuelles et retraite

L’article 19 assouplit le dispositif d’exonération applicable aux entrepreneurs individuels et aux associés de sociétés de personnes qui cèdent leur entreprise et partent à la retraite (CGI, art. 151 septies A) en leur accordant plus de temps pour céder leur entreprise. Ces chefs d’entreprises qui ont fait valoir leur droit à la retraite, en 2019, 2020 et 2021, disposent de 3 ans pour réaliser la cession.

Par ailleurs, l’article 7 modifie les délais d’option et de renonciation pour les régimes d’imposition à l’impôt sur le revenu des entrepreneurs individuels, notamment pour les faire coïncider avec les déclarations fiscales.

Cession de titres et départ à la retraite

L’article 29 aménage l’abattement spécifique de 500 000 euros applicable à la plus-value de cession de titres de sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) réalisée par le cédant qui fait valoir ses droits à la retraite (CGI, art. 150-0 D ter). Afin de tenir compte des effets de la crise sanitaire sur le marché des reprises d’entreprises, la loi prolonge de 2 ans le dispositif qui devait s’appliquer aux cessions intervenues avant le 31 décembre 2022. Il s’applique désormais aux cessions intervenues jusqu’au 31 décembre 2024. Par ailleurs, la loi accorde une année de plus au chef d’entreprise qui a fait valoir ses droits à la retraite pour céder son entreprise et cesser toute fonction dans la société cédée. Si le cédant a fait valoir ses droits à la retraite en 2019, 2020 et 2021, « et que ce départ en retraite précède la cession, le délai prévu par ces dispositions est porté à 3 ans ».

Formation du dirigeant

L’article 19 de la loi de finances double le crédit d’impôt pour la formation du dirigeant des micro-entreprises (CGI, art. 244 quater M).

Professionnels libéraux et retraite

L’article 18 tire les conséquences de l’article 108 de la loi de financement de la sécurité sociale (L. n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022, JORF n°0299 du 24 décembre 2021) qui donne la possibilité à certains professionnels libéraux de procéder à des rachats de trimestres de retraite dans de larges mesures. En raison d’une reconnaissance légale tardive de leur profession, de nombreux professionnels du soin (ostéopathes, chiropracteurs ou encore hypnothérapeuthes) n’ont pas été affiliés à un régime d’assurance vieillesse. La loi de finances les autorise à déduire de leur résultat imposable les cotisations versées dans le cadre du rachat de trimestres de base entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2026.

Amortissement du fonds de commerce

L’article 23 de la loi de finances pour 2022 autorise les entreprises, à titre temporaire et pour tenir compte des effets de la crise sanitaire, à déduire de leur résultat imposable l’amortissement constaté en comptabilité au titre des fonds commerciaux acquis entre 2022 et fin 2025. Le rythme de reprise des provisions pour dépréciation déduites est par ailleurs imposé.

L’article 15 modifie, à la marge, le report en arrière des déficits (CGI, art. 220 quinquies) en prévoyant que le bénéfice servant de base d’imputation doit être diminué de la part de bénéfices ayant donné lieu à un impôt sur lequel a été imputée une réduction d’impôt.

Recherche et innovation

En matière de recherche et d’innovation, trois mesures sont à signaler. L’article 11 de la loi de finances pour 2022 allonge la durée du statut de jeune entreprise innovante (JEI) (CGI, art. 44 sexies-0 A), la faisant passer de 7 à 10 ans. L’article 69 crée un crédit d’impôt en faveur de la recherche collaborative (CGI, art. article 244 quater B bis nouveau). Il concerne les dépenses facturées aux entreprises par des organismes de recherche et de diffusion des connaissances dans le cadre d’un contrat de collaboration conclu entre 2022 et fin 2025. Enfin, l’article 83 proroge de 2 ans le crédit d’impôt innovation qui s’applique désormais aux dépenses engagées avant le 31 décembre 2024 (CGI, art. 244 quater B, II-k). Il supprime par ailleurs la détermination forfaitaire retenue pour certains frais de fonctionnement, et relève les taux de 20 à 30 % en métropole et de 40 à 60 % dans les départements d’outre-mer.

Mesures sectorielles

L’article 82 de la loi de finances pour 2022 crée un crédit d’impôt en faveur des entreprises d’édition musicale (CGI, art. 220 septdecies) et l’article 85 prolonge le crédit d’impôt en faveur des métiers d’art jusqu’au 31 décembre 2023 (CGI, art. 244 quater O).

Conformité Union européenne

L’article 24 de la loi de finances met en conformité avec le droit européen les retenues à la source applicables aux sociétés non-résidentes (CGI, art. 182) prélevées sur les revenus non-salariaux des personnes morales non-domiciliées. Il tire les conséquences de plusieurs jurisprudences du Conseil d’État (dont CE, 22 nov. 2019, n°423698) qui a jugé contraires aux principes de liberté de circulation des capitaux et de libre prestation de services garantis par le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne plusieurs dispositifs de retenue à la source due par une personne morale ou un organisme non-résident dans la mesure où ils s’appliquent sur une assiette brute.

Or une personne morale française ou un organisme français serait imposable sur un bénéfice établi après déduction des charges supportées pour l’acquisition et la conservation de ces revenus dans la même situation. La loi de finances apporte deux évolutions. La première est la création d’un abattement forfaitaire de charges de 10 % appliqué par le débiteur des revenus, lors du prélèvement de la retenue à la source. La deuxième mesure met en place un nouveau dispositif de restitution de retenue à la source pour tenir compte des charges supportées pour l’acquisition et la conservation des revenus.

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