Pour le Conseil d’État, les crédits d’impôts étrangers non imputés sur l’impôt français ne sont pas restituables.
Un résident de France qui perçoit des revenus en provenance de ces États revêtant la nature, notamment, d’intérêts et de redevances, et ayant supporté l’impôt, doit tenir compte de ces revenus pour le calcul de son impôt français. Conformément aux conventions fiscales internationales, le bénéficiaire de ces revenus a droit à un crédit d’impôt imputable sur l’impôt français, égal au montant de l’impôt payé ou supporté dans l’État d’origine, qui ne peut toutefois excéder le montant de l’impôt français correspondant à ces revenus. Une société qui, compte tenu du caractère déficitaire de son résultat, n’a pas été en mesure d’utiliser des crédits d’impôt perçus en contrepartie de retenues à la source prélevées à l’étranger en paiement de l’impôt sur les sociétés en France ne peut obtenir de l’administration fiscale le remboursement des sommes correspondantes1.
Un résultat déficitaire
En l’espèce, plusieurs des filiales de la SA Faurecia appartenant au groupe fiscal intégré dont elle est la société mère ont perçu, au titre de chacune des années 2006 à 2010, divers revenus de source étrangère, en particulier des intérêts et des redevances, à raison desquels elles ont acquitté des retenues à la source. Estimant que ces sociétés, résidentes de France, étaient bénéficiaires de crédits d’impôts correspondant à l’impôt perçu dans les États dont provenaient ces revenus, en application des stipulations des conventions fiscales bilatérales conclues entre la France et ces mêmes États, la SA Faurecia, substituée à ses filiales en application du a de l’article 223 O du Code général des impôts (CGI), a demandé à l’administration fiscale la restitution de ces crédits d’impôts, qui n’avaient pu faire l’objet d’une imputation sur l’impôt dû sur l’ensemble du résultats du groupe, du fait du caractère déficitaire de ce dernier.
À la suite du rejet de ses demandes, elle a saisi le tribunal administratif de Montreuil de demandes tendant à la restitution du montant total des crédits d’impôts d’origine étrangère dont elle disposait, en sa qualité de société mère d’un groupe fiscal intégré, au titre des années 2006, 2007 et 2008, 2009 et 2010. Le tribunal administratif a rejeté cette demande2. La cour administrative d’appel de Versailles a rejeté l’appel de la SA Faurecia dirigé contre ce jugement3. La société anonyme (SA) Faurecia a également demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution de crédits d’impôts d’origine étrangère dont elle disposait, en sa qualité de société mère d’un groupe fiscal intégré, au titre des années 2009 et 2010. Le tribunal a rejeté cette demande4. La société s’est donc pourvue en cassation devant le Conseil d’État afin d’obtenir l’annulation de ces arrêts5.
Les stipulations des articles relatifs à l’élimination des doubles impositions des conventions fiscales bilatérales conclues entre la France et le Brésil, le Canada, la Chine, la Corée du Sud, l’Espagne, les États-Unis d’Amérique, l’Inde, le Japon, la Pologne, la République Tchèque, le Portugal, la Slovaquie ainsi que la Thaïlande, prévoient que, lorsqu’un résident de France perçoit des revenus en provenance de ces États revêtant la nature, notamment, d’intérêts et de redevances, et que ces revenus y ont supporté l’impôt, ils sont pris en compte pour le calcul de l’impôt français. Ces stipulations prévoient que le bénéficiaire de ces revenus a droit à un crédit d’impôt imputable sur l’impôt français, égal au montant de l’impôt payé ou supporté dans l’État d’origine, qui ne peut toutefois excéder le montant de l’impôt français correspondant à ces revenus6.
L’entreprise estimait sa demande de restitution fondée dans la mesure où le crédit d’impôt correspond à une créance détenue sur le Trésor public. Le juge administratif a entériné la solution de l’Administration selon laquelle il ne résulte pas des dispositions des 18 conventions en cause, ni d’aucune disposition ou d’aucun principe de droit national, que le crédit d’impôt n’ayant pu faire l’objet d’une imputation soit restitué par la France au résident bénéficiaire de ces revenus.
La cour administrative d’appel de Versailles, en jugeant, pour ce motif, que la SA Faurecia n’était pas fondée à demander la restitution des crédits d’impôts litigieux, n’a donc pas entaché ses arrêts, qui sont suffisamment motivés, d’erreur de droit. En jugeant que, dès lors que la SA Faurecia ne disposait d’aucun droit à obtenir la restitution du montant des crédits d’impôts d’origine étrangère dont ses filiales étaient bénéficiaires, elle ne disposait d’aucune créance restituable pouvant être regardée comme un bien au sens de l’article premier du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, la cour administrative d’appel de Versailles n’a pas entaché son arrêt d’erreur de droit.
Le résultat d’ensemble du groupe présentait, au titre des années en litige, un caractère déficitaire, rappelle le Conseil d’État. Dès lors « les crédits d’impôts résultant de l’application des stipulations de ces conventions ne pouvaient faire l’objet d’une restitution ».