Quelle évolution pour la taxe foncière ?
« Le poids de la taxe foncière pèse chaque année de plus en plus lourd sur les propriétaires », analyse l’Union nationale de la propriété immobilière (UNPI). D’après les chiffres de l’Observatoire national des taxes foncières sur les propriétés bâties, rattaché à l’UNPI, publiés en octobre 2021, en 2020, l’ensemble des propriétaires immobiliers ont payé 35,3 milliards d’euros de taxe foncière sur les propriétés bâties. Cette somme représente un peu plus d’un tiers des recettes fiscales directes des collectivités locales. Surtout, elle a augmenté fortement depuis plusieurs années. Les recettes de la taxe foncière s’élevaient à 30,4 milliards d’euros en 2015, et à 23,5 milliards d’euros en 2010. Précisons que cette hausse ne s’explique pas seulement par la progression des taux mais aussi par celle des bases d’imposition (nouvelles constructions à taxer, revalorisation des valeurs locatives à la suite de travaux, etc.).
Le poids de la taxe foncière
Afin de traduire l’augmentation réelle des montants payés par les propriétaires de France, l’Observatoire national des taxes foncières s’emploie à comparer les taux applicables à différentes époques dans toutes les communes de France. L’Observatoire UNPI tient également compte de la revalorisation forfaitaire et annuelle des valeurs locatives (à taux inchangés, l’impôt foncier a augmenté de 6,1 % entre 2015 et 2020 et de 14,2 % entre 2010 et 2020). S’y ajoute également le poids des différentes taxes qui viennent alourdir l’impôt foncier. Il s’agit tout d’abord de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) qui peut avoir été instituée par la commune ou l’intercommunalité. Dans les deux tiers des communes françaises, les propriétés bâties font également l’objet d’une taxe spéciale d’équipement (TSE), destinée à financer un établissement public foncier local ou d’État. Depuis 2011, en Île-de-France, les propriétaires doivent s’acquitter d’une TSE au profit de la société du Grand Paris, l’établissement public chargé de développer le réseau de transport du Grand Paris. S’y ajoute depuis 2015, une taxe additionnelle spéciale annuelle (TASA) pour le financement des transports en commun. Depuis 2015 également, les propriétaires peuvent en outre être assujettis à une taxe GEMAPI, collectée au profit d’intercommunalités exerçant une compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. « Or ces taxes annexes vont peser de plus en plus lourd sur les propriétaires », avertit l’UNPI.
Évolution ville par ville
En dix ans, la taxe foncière a augmenté de plus de 30 % dans douze grandes villes sur cinquante. La taxe foncière a ainsi explosé à Nantes (+ 37,5 %), en raison principalement de l’activation d’un taux de 6,41 % au profit de Nantes-Métropole alors que la ville n’a pas diminué son taux. Villeurbanne est la seconde grande ville où la taxe foncière a le plus augmenté (+ 36,8 % entre 2010 et 2020). En plus de la hausse de deux points et demi du taux communal, les propriétaires villeurbannais ont subi la hausse du taux départemental puis son remplacement par un taux métropolitain un peu plus élevé encore. La taxe foncière a également augmenté de 36 % à Clermont-Ferrand et à Lille. À Clermont-Ferrand, la hausse s’explique principalement par l’augmentation de quasiment quatre points du taux communal, cette augmentation étant conjuguée à celle du département. Quant à Lille, le taux communal a progressé de quatre points et demi tandis que le taux départemental du Nord a fortement augmenté aussi. Enfin, on peut citer le cas de Vitry-sur-Seine (94), qui affiche une hausse de taxe foncière de 29,5 %. Parmi les hausses moins fortes, on trouve Caen, dont le taux n’a cessé de baisser depuis 2010, pour perdre quasiment deux points. Le Calvados est par ailleurs plutôt en bas de tableau concernant les augmentations de parts départementales. Grenoble est la seconde ville où l’impôt foncier a le moins progressé entre 2010 et 2020 (+ 13,3 %), grâce notamment à la stabilité du taux communal et à la légère baisse du taux départemental de 2020 par rapport aux taux régionaux et départementaux de 2010.
La notion de valeur locative cadastrale
La base d’imposition de la taxe foncière sur les propriétés bâties est constituée par la valeur locative cadastrale de chaque propriété, représentant en principe le loyer annuel potentiel de ce bien immobilier, diminué d’un abattement forfaitaire de 50 % présumé couvrir les frais de gestion et d’entretien (assurance, réparations, etc.). La valeur locative cadastrale est fixée par les services du cadastre avec le concours de la commission communale des impôts directs. Lors de la révision générale de 1970, après une analyse des déclarations souscrites par chaque propriétaire, un zonage géographique de la collectivité organisé en zones locatives homogènes a été fixé et des valeurs de référence ou de comparaison ont été établies dans chaque zone, pour chaque type et catégorie de biens (bâti, non-bâti, locaux commerciaux et industriels). Par la suite, les valeurs locatives cadastrales ont régulièrement été corrigées par des coefficients d’actualisation et de revalorisation nationaux, pour tenir compte de l’érosion monétaire et de l’évolution des loyers. Ce coefficient est désormais fixé en fonction de l’évolution sur un an de l’indice des prix à la consommation harmonisé. « Si on cumule les coefficients de majoration appliqués entre 2015 et 2020, les bases d’imposition de la taxe foncière ont été majorées par un coefficient égal à 1,06137049, ce qui correspond à une augmentation d’environ 6,14 %. Entre 2010 et 2020, les valeurs locatives ont été majorées de 14,22 %. Quant au coefficient applicable en 2021, il est de 1,002 (soit une augmentation de 0,2 % des valeurs locatives en 2021). C’est le coefficient le plus faible jamais appliqué ! En raison de la revalorisation des valeurs locatives, même à taux inchangés, la taxe foncière d’un contribuable a augmenté de 6,1 % en cinq ans et 14,2 % en dix ans », souligne l’UNPI.
Une réforme attendue des bases de taxe foncière
La valeur locative cadastrale des locaux d’habitation correspond au loyer annuel normal de cet immeuble lorsqu’il est loué aux conditions du marché. Elle est calculée par unité d’évaluation, l’unité étant le local, c’est-à-dire une propriété ou fraction de propriété faisant l’objet d’une utilisation distincte. La révision de 1970 a permis de choisir pour chaque zone les locaux représentatifs de chaque catégorie de locaux présents sur le territoire communal, afin de constituer une nomenclature de classement et fixer, suivant le cas, des tarifs ou des valeurs locatives de référence par catégorie de local. La valeur locative cadastrale résulte de l’application de neuf paramètres qui interviennent dans la fiche de calcul : la surface totale des pièces et annexes affectées à l’habitation, la catégorie du logement, l’importance du logement, la surface des dépendances, le degré d’entretien, la situation générale, la situation particulière, l’existence ou non d’un ascenseur, l’équipement et le confort mesurés en équivalences superficielles. Pour obtenir la valeur locative cadastrale du local, on applique donc un tarif d’évaluation à la surface pondérée totale. Le principe d’une révision générale des valeurs des locaux d’habitation en 2026 a été voté dans le cadre de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020. Le mode de calcul des valeurs locatives sera simplifié, en particulier par l’abandon de la notion de local de référence et grâce à la mise en place d’une grille tarifaire. Cette réforme devrait entraîner de nombreux transferts de charges.
Quelles méthodes pour calculer les nouvelles bases locatives ?
On sait que les biens immobiliers seront classés en quatre sous-groupes : maisons individuelles, appartements, dépendances isolées, et locaux exceptionnels. Les propriétés des trois premiers sous-groupes seront évaluées selon une méthode tarifaire, et non par comparaison avec des locaux de référence comme aujourd’hui. Seuls les locaux présentant des caractéristiques exceptionnelles seront évalués par voie d’appréciation directe. La catégorie du logement sera fonction de la superficie des pièces principales et de celle des dépendances après application de coefficients de minoration. Un tarif au mètre carré sera établi pour chaque catégorie de logement et pour chaque secteur d’évaluation à partir des loyers pratiqués dans le secteur privé en 2023. Dès 2027, les tarifs seront mis à jour en fonction de l’évolution des loyers, qui devront être renseignés chaque année par les propriétaires bailleurs. Pour lisser les transferts de charges qui sont attendus, l’article 146 de la loi de finances pour 2020 a prévu l’application d’un coefficient de neutralisation, correspondant au rapport entre la somme des valeurs locatives avant révision et la somme des valeurs locatives après révision.
Référence : AJU003c2