Covid-19 : publication des nouveaux délais de procédures fiscales

Publié le 01/07/2020

L’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 a fixé les nouveaux délais applicables aux procédures fiscales pendant la période d’urgence sanitaire. Le point sur leurs conséquences en matière de contrôle fiscal, de délai de prescription et de rescrit.

Les ordonnances s’enchaînent à un rythme soutenu, rendant difficile la lisibilité du droit d’exception propre à la période d’état d’urgence sanitaire. Dans ce registre, la matière fiscale ne fait pas exception, au contraire, elle ajoute des exceptions au cadre déjà dérogatoire du droit commun.

Période juridiquement protégée : du 12 mars au 23 août pour les procédures fiscales

Pour mémoire, la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 (JO, 24 mars 2020) a déclaré l’état d’urgence sanitaire pour une durée initiale de 2 mois, débutant le 12 mars et devant s’achever le 23 mai 2020 à minuit. La première ordonnance dite fiscale – ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période (JO, 26 mars 2020) – en avait tiré les conséquences sur les procédures fiscales. Son article 10 a procédé à la suspension des délais fiscaux, ouvrant ainsi une période dite juridiquement protégée, se clôturant un mois après la fin de la période d’état d’urgence sanitaire, soit le 23 juin, à minuit.

Pendant la période de confinement, la Direction générale des finances publiques a suspendu sa mission de contrôle. Ses services se sont mis à disposition des contribuables, particuliers et surtout entreprises, les accompagnant dans leurs diverses démarches de demande de remboursement de crédit d’impôt, d’étalement voire d’annulation de leurs dettes fiscales.

Les délais relatifs aux procédures en cours au 12 mars, ainsi que les délais nés pendant cette période ont donc été suspendus, préservant ainsi la capacité de l’administration à intervenir sur place lors d’un contrôle fiscal ainsi que la capacité des contribuables à faire valoir leurs arguments dans de bonnes conditions. Il s’agit par exemple de la durée des opérations sur place pour les petites et moyennes entreprises ou du délai dont dispose le contribuable pour présenter ses observations suite à l’envoi d’une proposition de rectification.

Prolongation de l’état d’urgence sanitaire

Dans un second temps, l’état d’urgence sanitaire a été prolongé par la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020. Selon le rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 (JO, 14 mai 2020), « dans un souci de sécurité juridique, le choix a été fait de retenir la date du 23 juin à minuit, car elle correspond à la date qu’avaient anticipée tous les acteurs, compte tenu des dispositions de l’article 4 de la loi d’urgence précitée qui avait déclaré l’état d’urgence sanitaire pour une durée de deux mois, soit jusqu’au 23 mai minuit, et de la définition de la période juridiquement protégée par l’ordonnance n° 2020-306 (fin de l’état d’urgence sanitaire + 1 mois) ».

L’article 1er de l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 (JO, 14 mai 2020) a donc repoussé ce terme au 23 août à minuit. Au final, la période juridiquement protégée, s’étale, au regard des procédures fiscales, du 12 mars au 23 août. Selon le rapport « une prolongation de cette suspension est aujourd’hui nécessaire pour permettre aux entreprises de se concentrer sur la reprise de leurs activités permise par l’allégement des restrictions de circulation, voire par leur réouverture lorsqu’une fermeture administrative leur a été appliquée. Une reprise immédiate et indifférenciée de tous les contrôles fiscaux non achevés le 12 mars 2020 pour lesquels des délais impératifs sont susceptibles d’arriver à échéance rapidement après le 23 juin 2020 pourrait en effet poser des difficultés pratiques à certaines d’entre elles, notamment les bars et restaurants ».

Aussi, l’ordonnance prolonge la suspension de ces délais jusqu’au 23 août 2020 inclus, soit un mois après le nouveau terme de l’état d’urgence sanitaire, pour permettre une reprise échelonnée des procédures de contrôle fiscal, adaptée à la situation économique de chaque contribuable. En pratique, si, d’ici le 23 août à minuit, des opérations de contrôle ont repris ou si des actes de procédure ont été envoyés aux contribuables, ces opérations sont sans influence sur le décompte des délais de réponse du contribuable. Ces délais ne seront décomptés qu’à partir du 24 août.

Ces dispositions ne concernent pas les dispositions relatives aux rescrits : la suspension des procédures de rescrits s’arrêtera ainsi le 23 juin 2020 à minuit. Cette exception à la règle des procédures fiscales joue en faveur des contribuables, qui, lorsqu’ils ont soumis une demande de rescrit à l’administration fiscale, sont dans l’attente de la réponse de celle-ci pour pouvoir accomplir leur opération. Fixer la date de reprise des rescrits au 23 août aurait rallongé d’autant leur attente.

Délais de prescription rallongés

Conséquence du report des délais : les délais de prescription fiscale qui ont été suspendus le 12 mars et qui recommencent à courir le 24 août 2020 et se trouvent donc rallongés de 165 jours, durée qui s’est écoulée entre le 12 mars, début de l’état d’urgence sanitaire et la fin de la période juridiquement protégée.

Par conséquent, toutes les échéances fiscales qui devaient se prescrire le 31 décembre de cette année, par exemple l’impôt sur les sociétés, l’impôt sur le revenu ou encore la TVA et les taxes sur le chiffre d’affaires, ne le seront que le 1er juin 2021.

Rappelons que les prescriptions légales sont de 3, 6 ou 10 ans.

Elle est de 6 ans en matière d’impôt sur la fortune immobilière, de droits d’enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, ainsi que de taxes, redevances et impositions assimilées ou recouvrées suivant les mêmes modalités, lorsque les conditions requises pour l’intervention de la prescription abrégée de 3 ans prévue par l’article L. 180 du LPF ne sont pas remplies, c’est-à-dire si l’exigibilité des droits et taxes a été insuffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité ou, pour l’impôt sur la fortune immobilière, par le dépôt de la déclaration et des annexes mentionnées au même article 982, ou parce qu’il est nécessaire de procéder à des recherches ultérieures. Elle est de 10 ans en cas d’activité occulte, de procès-verbal pour flagrance fiscale ou et en cas de non-déclaration d’avoirs détenus à l’étranger.

Article balai

Le gouvernement n’exclut pas que le terme des périodes de références fixé par les ordonnances puisse à nouveau évoluer. En effet, l’article 12 prévoit que lorsque le terme de la période d’application des ordonnances prises sur le fondement de l’article 11 de la loi du 23 mars 2020 susvisée est défini par référence à la cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la même loi, il peut, pour tenir compte de l’évolution de la situation sanitaire, être avancé par décret en Conseil d’État.