Focus sur l’activité de l’AGRASC

Publié le 12/05/2022

Focus sur l’activité de l’AGRASC

L’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis accroît son activité afin de répondre à sa mission : s’assurer que nul ne tire profit de son délit. Elle dispose désormais de quatre antennes régionales et de nouvelles possibilités d’affectation sociale et de restitution aux populations spoliées des avoirs.

Après avoir ouvert en mars 2021 des antennes à Marseille et à Lyon, l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) a ouvert en avril 2022 deux nouvelles antennes régionales à Rennes et Lille pour faciliter la saisie et la gestion des avoirs issus de la criminalité organisée. Ces antennes régionales ont des missions identiques à celles du siège central et sont chargées de renforcer la proximité avec les services enquêteurs et judiciaires, par le biais notamment de formations spécialisées ou d’échanges réguliers dans leur ressort de compétence. La nouvelle antenne régionale de Rennes compte quatre agents dédiés et correspondra à terme au périmètre de la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Rennes. En 2021, environ 17 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis dans ce ressort et 6,3 millions d’euros ont été confisqués définitivement. L’antenne de Lille sera également à terme compétente sur la totalité du ressort de cette juridiction.

Faciliter la confiscation

Numéraire, comptes bancaires, biens immobiliers, ou des biens plus atypiques comme les œuvres d’art, des bateaux des voitures de luxe, comme des grands crus, des montres, des chaussures Louboutin, voire un troupeau de bovins dans le Jura… : les biens confisqués par l’AGRASC,qui a été créée dans le cadre de la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010, avec pour objectif de faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale notamment en cas de fraude fiscale et douanière, sont d’une grande variété. L’agence centralise de très nombreuses saisies et s’assure tant de la bonne gestion de ces biens que, une fois ces biens confisqués par une décision définitive, du versement du produit de leur vente au budget général de l’État. Depuis 2011, les ventes des avoirs frauduleux ont permis à l’État de récolter 1,5 milliard d’euros détenus à la Caisse des dépôts et consignation. Les biens saisis peuvent être vendus avant jugement, soit parce qu’ils ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité ou parce qu’ils sont susceptibles de se dévaluer. Ils peuvent être vendus au stade de la confiscation, lorsqu’un tribunal a condamné leur propriétaire. Le 5 novembre dernier, lors d’un colloque organisé dans le cadre des dix ans de l’agence, le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, a souligné que « la peine de confiscation a du sens » et souhaité qu’elle devienne « une des peines centrales de notre Code pénal ». Pour le garde des Sceaux « Cette sanction patrimoniale n’a pas vocation à se limiter à la lutte contre la délinquance économique et financière ou la criminalité organisée, mais elle doit devenir également un instrument de lutte contre la délinquance du quotidien », L’action de l’AGRASC permet d’améliorer l’efficacité de la réponse pénale à la criminalité organisée. Pour les pouvoirs publics, la sanction pénale la plus redoutée des criminels est, en effet, la saisie et la confiscation des biens et leur vente rapide permet d’en tirer le meilleur prix au bénéfice de la collectivité publique.

Assurer à la peine de confiscation une réelle efficacité

L’AGRASC est un établissement public administratif placé sous la double tutelle du garde des Sceaux, ministre de la Justice et du ministre des Comptes publics. Le président du conseil d’administration et le directeur général de l’AGRASC sont des magistrats de l’ordre judiciaire, le secrétaire général est issu du ministère des Finances. Outre la direction, l’agence est composée d’un secrétariat général, du pôle opérationnel, du pôle de gestion, du pôle juridique et d’une agence comptable. Elle est constituée d’agents fonctionnaires ou contractuels, principalement issus du ministère de la Justice, des ministères économiques et financiers et du ministère de l’Intérieur. Le fonctionnement de l’agence a été précisé par le décret n° 2011-134 du 1er février 2011 et elle a commencé ses activités le 4 février 2011. L’Agence, qui est chargée de l’exécution de la peine de confiscation au nom du procureur de la République, vise par ailleurs à répondre au besoin indispensable de gestion des biens saisis, lorsque ceux-ci exigent des actes d’administration (véhicules, immeubles, fonds de commerce, bateaux, etc.). À cet effet, l’Agence a été conçue comme une structure d’assistance juridique et pratique aux juridictions et comme un prestataire de services. La création de l’AGRASC s’est inscrite dans un cadre législatif plus vaste visant à améliorer l’efficacité de la justice pénale, notamment en matière de criminalité organisée et de lutte contre les trafics, considérant que pour être véritablement dissuasive, toute sanction pénale doit pouvoir s’accompagner de la privation des délinquants des profits qu’ils ont pu tirer de l’infraction. En effet, avant la création de l’AGRASC les conditions de saisie des avoirs étaient assez restrictives, privant la peine de confiscation de son effectivité. En outre, l’absence de gestion des saisies et confiscations, conduisait à une dérive des frais de justice et à la constatation de moins-values sur les biens saisis.

Les missions de l’AGRASC

Outre son rôle général d’aide, de conseil et d’orientation donnés aux magistrats et enquêteurs en matière de saisies et de confiscations, l’agence a pour mission d’améliorer le traitement judiciaire des saisies et des confiscations en matière pénale. Elle assure notamment la gestion centralisée de toutes les sommes saisies dans le cadre des procédures pénales en France. Elle procède à l’ensemble des ventes avant jugement de biens meubles saisis décidées par les magistrats lorsque ces biens meubles ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité et qu’ils sont susceptibles de dépréciation. Elle réalise l’ensemble des publications, auprès des services de publicité foncière pour les saisies et confiscations pénales immobilières et auprès des tribunaux de commerce, pour les saisies de fonds de commerce. L’AGRASC gère sur mandat de justice, tous les biens complexes qui lui sont confiés et qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d’administration. Elle assure la gestion des biens saisis, procède à leur vente et à la répartition de son produit en exécution de toute demande d’entraide internationale ou de coopération émanant d’une autorité judiciaire étrangère et veille le cas échéant, à l’information préalable des créanciers publics avant exécution de toute décision judiciaire de restitution et à l’indemnisation prioritaire des parties civiles sur les biens confisqués à la personne condamnée, afin d’assurer le paiement de leurs créances, notamment fiscales, douanières, sociales ou de dédommagement. Enfin, l’AGRASC mène toute action d’information ou de formation destinée à faire connaître son action et à promouvoir de bonnes pratiques en matière de saisies et de confiscations, tant auprès des partenaires nationaux qu’internationaux.

L’affectation du produit des biens saisis

Les produits des confiscations sont ensuite versés au budget général de l’État, à la MILDECA, pour le fonds de prévention en matière de stupéfiants, à des associations de prévention du proxénétisme et de la traite des êtres humains, par l’intermédiaire de la Direction générale de la cohésion sociale, aux victimes parties civiles qui remplissent les conditions pour être indemnisées sur l’assiette des biens confisqués, à la direction générale de la police nationale pour financer la protection des repentis et des collaborateurs de justice, aux juridictions et services d’enquête luttant contre la criminalité et la délinquance organisées. Depuis le 4 août 2021, un mécanisme de restitution des biens dits mal acquis aux populations spoliées a été introduit dans la législation nationale. Il prévoit désormais la possibilité d’affecter le produit de ces biens au financement de l’action de coopération et de développement au profit des populations des pays concernés. En outre, la loi du 8 avril 2021 prévoit désormais l’affectation sociale à des associations d’utilités publiques des immeubles confisqués. Ainsi les biens saisis et leurs produits peuvent désormais également contribuer à l’aide aux plus démunis et aux actions de coopération et de développement internationales.

Une vente d’exception à Bercy

Pour ses dix ans, le 5 novembre dernier l’agence a organisé, en partenariat avec la Direction nationale des interventions domaniales (DNID), une vente aux enchères de prestige, dans les locaux de Bercy. C’est une illustration du partenariat entre l’AGRASC et la DNID, qui s’est consolidé ces dernières années pour valoriser au mieux les biens mis en vente. La DNID constitue un interlocuteur de premier plan pour le ministère de la Justice pour la mise en vente des biens saisis et confisqués. Ce service à compétence nationale est rattaché au responsable de la direction de l’Immobilier de l’État de la direction générale des finances publiques (DGFiP). Tous les ans, plus de 10 000 biens sont mis en vente pour un montant de 13,5 millions d’euros, soit environ 20 % du total des ventes mobilières du Domaine. Plus de 300 biens de nature très différente ont été proposés aux enchères : des véhicules de prestige (Lamborghini, Ferrari, Jaguar, Porsche…), des bijoux, pièces d’or et lingots, des montres (Richard Mille et Breitling), de la maroquinerie, des vins prestigieux (Romanée-Conti, Petrus…) et beaucoup d’autres lots saisis par la justice. Les biens proposés provenaient de saisies ou de confiscations judiciaires dans le cadre de procédures pénales. Ouverte au public, cette vente a atteint un record pour un tel événement, 2,98 millions d’euros. C’est aussi un nombre record de 6 800 participants qui se sont disputé les 310 lots mis en vente pour une mise à prix totale de 1,4 million d’euros. Cette vente ne comportait pas seulement des biens de luxe : un lot proposant un Thermomix et un sèche-cheveux a été acheté 1 800 euros. Cependant, l’enchère la plus importante a été remportée par une montre Richard Mille pour un montant de 295 000 euros, suivie par un véhicule, une Lamborghini Aventador jaune qui est partie à 227 000 euros. Autres adjudications remarquées : près de 160 000 euros pour des lingots de palladium et 53 000 euros pour un diamant. Les grands crus ont également trouvé preneur : une bouteille Romanée-Conti a été vendue 16 500 euros et des bouteilles Petrus 1988 sont parties à 3 000 euros chacune.

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