Le notariat défend des réformes fiscales nécessaires aux entreprises auprès des parlementaires

Publié le 13/09/2017

Après s’être invité dans la campagne présidentielle, le notariat avance des propositions de réforme aux nouveaux députés et aux futurs sénateurs. Pacte Dutreil, stabilité fiscale, holding animatrice : focus sur les mesures fiscales suggérées pour favoriser la transmission et l’esprit d’entreprise.

Après avoir interpelé les candidats à l’élection présidentielle de mai dernier, le notariat adresse aux nouveaux députés issus des élections législatives de juin dernier ainsi qu’aux futurs sénateurs ses vœux de réformes qui lui semblent importantes à mener.  Leurs propositions – une trentaine – affichent trois ambitions : le développement économique par la simplification du droit et l’allègement de la norme, la solidarité, pour une justice sociale qui « ne peut venir que d’une action positive et choisie », et la sécurité et la paix des personnes, à garantir par les contrats et par la stabilité juridique et fiscale.

Passage en revue des principales propositions fiscales à l’adresse des entrepreneurs. Pour le notariat il convient de lever les obstacles, souvent d’ordre fiscal, à la transmission d’entreprise.

Cession d’entreprise : simplifier la déductibilité des charges d’acquisition

Aujourd’hui, l’État ne reconnaît pas le rachat de titres d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés (IS) comme étant une dépense professionnelle, même si le repreneur exerce son activité principale dans la société dont il vient de faire l’acquisition. Ainsi, pour l’acquisition d’une petite entreprise, le cessionnaire est obligé d’utiliser des schémas juridiques de grandes entreprises avec holding pour obtenir la déductibilité de ses charges d’acquisition. Le principe fondamental de l’égalité du contribuable devant la loi ne peut admettre de discrimination de traitement fiscal lorsqu’il s’agit d’une opération identique dans son objet. Pour y mettre fin, le CSN propose que tout acheteur d’entreprise puisse déduire les frais d’acquisition, droits et intérêts d’emprunt, et ce, quels que soient le statut ou la structure de l’établissement professionnel.

Entreprise : transmission à titre gratuit

• Pour le donataire : sécuriser les pactes Dutreil

Le CSN propose de sécuriser la situation des donataires parties aux pactes Dutreil au regard de leurs obligations purement formelles. Les transmissions par décès ou les donations de parts ou actions de société ont été facilitées par les engagements de conservation des titres de société (ou pacte Dutreil), créées en 2003 et améliorées au gré des lois de finances. Cependant, le respect des conditions de mise en œuvre de ces engagements exige la production d’attestations annuelles postérieures. Le notariat les juge inutiles car le contrôle de la poursuite des engagements est facile à exercer. Pourtant, la sanction de cette obligation est sévère : en cas d’omission de déclaration ou de déclaration hors délai, le contribuable perd le bénéfice du régime de faveur, même si les conditions relatives à l’engagement sont remplies. Dès lors, le chef d’entreprise peut se trouver, lors d’un contrôle purement formel, à devoir rembourser les aides fiscales, outre les pénalités de retard, alors que l’administration fiscale avait, dès l’origine, les moyens de s’assurer du respect des conditions légales.

Pour mettre fin à cette situation, le notariat propose de simplifier les obligations déclaratives attachées au régime Dutreil. Celles-ci pourraient  être remplacées par une simple obligation de transmission de ces déclarations à première demande de l’Administration.

• Pour le donateur : purger les plus-values

Le CSN s’est également penché sur la situation fiscale du donateur d’une entreprise individuelle. En effet, la transmission à titre gratuit d’une entreprise individuelle ou de titres de société de personnes est en principe soumise à l’imposition des plus-values. Le notariat considère cette imposition comme étant antiéconomique, compte tenu du fait que la mutation à titre gratuit ne génère pas de flux financiers.

De plus, il évoque le respect du principe de neutralité fiscale. En effet, la transmission des titres d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés n’est quant à elle pas imposable au titre des plus-values. Dès lors, le notariat préconise de neutraliser les effets fiscaux d’une transmission à titre gratuit, quelque soit la forme de l’entreprise transmise et son assujettissement ou non à l’impôt sur les sociétés. Cette opération doit purger les plus-values réalisées par le précédent propriétaire.

Cession et réinvestissement : supprimer la solidarité fiscale

À la différence des ventes d’entreprise sous forme de cession de titres, l’acquéreur d’une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou libérale peut être rendu responsable avec le vendeur du paiement de certains impôts directs, à concurrence de la valeur du fonds et pendant un temps déterminé. Cette responsabilité contraint, en pratique, à un blocage du prix de vente du fonds de commerce pendant plus de 3 mois afin de réserver ce prix à l’administration fiscale si celle-ci en fait la demande pour les impôts dus à raison de l’exploitation. Le notariat fait le constat que cette immobilisation du prix empêche un réinvestissement de la part du vendeur. De plus, elle est source d’inégalité entre les différentes formes de cession d’entreprise.

Par conséquent, il invite le législateur à supprimer toute solidarité fiscale entre acquéreur et vendeur, quelle que soit la nature de l’entreprise (artisanale, libérale, commerciale ou autre), et de favoriser le réinvestissement du prix de vente dans une nouvelle acquisition.

Favoriser le maintien des entreprises dans les territoires

Les notaires identifient la transmission comme un véritable levier de croissance de l’entreprise et de valorisation du patrimoine, à condition qu’elle soit suffisamment préparée et maîtrisée. Or ils constatent que le manque d’anticipation et la méconnaissance du tissu économique et social d’un secteur fragilisent la transmission d’entreprise. Par ailleurs, ils constatent que lorsqu’elle est réalisée au profit des salariés, la transmission présente un cadre propice  au maintien des emplois locaux et des savoir-faire. Dans ce chapitre, le législateur a créé un droit d’information des salariés. Mais celui-ci paraît « illusoire » et « ne répond pas aux objectifs de reprise de l’entreprise ». Mieux vaut améliorer les conditions de financement de la reprise d’une entreprise par les salariés. Par conséquent, le notariat préconise de revisiter les différents régimes existants en faveur de la transmission d’une entreprise aux salariés en simplifiant les conditions d’application et en prévoyant des avantages fiscaux pour le vendeur et le repreneur. Ils proposent d’instaurer des conditions de prêt et des conditions fiscales plus attractives pour les repreneurs lorsqu’il s’agit de salariés de l’entreprise, sans toutefois en préciser les modalités. Et enfin, ils demandent au législateur d’inciter les dirigeants d’entreprise à privilégier une transmission à un ou plusieurs de leurs salariés en instaurant une exonération des plus-values.

Enfin, les notaires réclament à la nouvelle assemblée des mesures aptes à sécuriser les PME, en premier lieu, la stabilité de la norme.

En finir avec l’insécurité fiscale : la question de la holding animatrice

Les notaires interpellent le législateur sur la nécessaire stabilité juridique et fiscale dans le monde de l’entreprise, qui doit être au cœur des débats parlementaires.

Pour illustrer l’insécurité fiscale comme source de difficultés pour les sociétés dans leur organisation et leur développement, ils s’appuient sur l’utilisation de la holding animatrice, dont il n’existe toujours pas de définition légale. « Les structures d’entreprise utilisent fréquemment la “holding” pour pouvoir acquérir d’autres sociétés ou tout simplement assurer une transmission. Pour utiliser correctement cette société “holding” avec la fiscalité la plus adaptée, ladite “holding” doit être animatrice de sa ou de ses filiales ». L’absence de définition génère un contentieux fréquent entre l’administration et les entreprises et des reprises d’impôts pouvant conduire à un déséquilibre financier et économique.

Dans ce contexte, le notariat invite le Parlement à clarifier la notion
de « holding animatrice » qui exerce une activité commerciale et utilise ses participations dans ce cadre.

La stabilité fiscale comme exigence

De façon générale, le CSN attend du législateur de mettre fin à l’instabilité fiscale. Alors  que la liberté d’entreprendre a valeur constitutionnelle, cette liberté a besoin d’un cadre fiscal pérenne et stable. De plus, l’instabilité des règles fiscales conduit à un recul de l’adhésion des citoyens à l’impôt et nuit en outre à l’attractivité de notre pays. « La stabilité, et la lisibilité doivent être les murs porteurs des principes de sécurité et de confiance légitime prônés par la Cour de justice de l’Union européenne. C’est pourquoi il est proposé d’instaurer comme principe directeur de l’action publique la stabilité des règles fiscales avec un encadrement strict des exceptions ».