Les principales dispositions de la loi de finances pour 2017 relatives aux entreprises et aux particuliers
La loi de finances pour 2017 a été définitivement adoptée le 20 décembre 2016. Jeudi 22 décembre 2016, le Conseil constitutionnel a été saisi par au moins 60 sénateurs et au moins 60 députés.
Comme annoncé lors du débat d’orientation des finances publiques, le Gouvernement a décidé de rehausser l’objectif de dépenses de l’État pour 2017 de 5,7 Md € par rapport au niveau prévu dans le programme de stabilité. Les dépenses de l’État hors dette et pensions progressent donc de 3,4 Md € par rapport à la loi de finances initiale pour 2016. Cette progression marque le choix du Gouvernement de préparer l’avenir en apportant une réponse adaptée aux enjeux prioritaires en termes d’éducation, de sécurité et d’emploi. Au total, ce sont près de 7 Md € moyens supplémentaires qui sont alloués à ces secteurs en 2017.
I – La fiscalité des ménages
A – La mise en place du prélèvement à la source
Pour le Gouvernement, la mise en place du prélèvement à la source au 1er janvier 2018 permettra d’avoir un mode de collecte de l’impôt en phase avec les mutations de la société, simple et efficace, car la France ne peut être le dernier pays de l’OCDE à collecter l’impôt avec un an de retard et donc de façon totalement déconnectée de la situation réelle de chacun. Il s’agit d’une mesure pour aider les contribuables notamment « pour mieux affronter certains moments importants de leur vie ». On cite par exemple le cas des nouveaux retraités, des nouveaux divorcés, nouveaux mariés, l’arrivée d’un enfant, etc.
La réforme concerne tous les revenus d’activité (salaires et professions indépendantes), les retraites, les revenus de remplacement et les revenus fonciers. Pour les salaires et les revenus assimilés, l’impôt sera collecté par l’entreprise ou l’organisme versant les revenus, qui appliquera le taux d’imposition transmis de manière automatisée par l’administration fiscale. Toutes les dispositions sont prises pour garantir la confidentialité des informations personnelles des contribuables.
La transition vers le prélèvement à la source sera assurée de manière simple, en ne soumettant pas à l’impôt les revenus de l’année 2017. Toutefois, les réductions et crédits d’impôt attachés à des dépenses effectuées en 2017 seront conservés : ainsi, un don accordé en 2017 à une association ouvrira droit à un avantage fiscal en 2018, sans changement par rapport à la situation actuelle. L’opposition a déjà annoncé son intention de supprimer cette mesure en cas d’alternance en 2017.
Le Conseil constitutionnel a estimé que « compte tenu de l’option ouverte aux contribuables leur permettant de choisir un taux “par défaut” qui ne révèle pas à leur employeur le taux d’imposition du foyer, le législateur [n’avait] pas méconnu le droit au respect de la vie privée ». Par ailleurs, « des mesures spécifiques sont prévues, s’agissant des dirigeants d’entreprise, pour éviter qu’ils puissent procéder à des arbitrages destinés à tirer parti de l’année de transition ».
Enfin, le Conseil a jugé que les entreprises ne joueront qu’un « rôle de collecte », le recouvrement de l’impôt continuant d’être assuré par l’État, et qu’elles n’auront donc pas à être indemnisées à ce titre.
Mais le Conseil constitutionnel a laissé la porte ouverte à de futures contestations du texte, soulignant que d’autres dispositions, sur lesquelles ils n’avaient pas été saisis, pourraient à l’avenir faire « l’objet de questions prioritaires de constitutionnalité ».
B – La baisse de l’impôt sur le revenu
La loi de finances pour 20171 prévoit une quatrième baisse d’impôt consécutive sur le revenu des ménages de 1 Md €, pour porter le total à 6 Md € depuis 2014. Cette nouvelle baisse bénéficiera à plus de 5 millions de ménages.
Un plafond fixé à 18 500 € pour un célibataire est doublé pour les couples et augmenté de 3 700 € par demi-part.
Concrètement, les contribuables bénéficiaires verront leur facture fiscale diminuer dès janvier s’ils sont mensualisés, au lieu d’août ou septembre. S’ils ont opté pour le tiers provisionnel, ils devront patienter jusqu’en février.
En outre, à compter des dépenses engagées en 2017, le crédit d’impôt accordé pour les dépenses de services à domicile sera généralisé à l’ensemble des contribuables, notamment les plus modestes. Ce crédit permet de soustraire du montant de l’impôt une partie de la somme reversée à la personne employée par le contribuable.
En revanche, la loi instaure l’obligation de transparence des plates-formes de l’économie collaborative. La transmission automatique à l’administration fiscale des revenus générés par leurs utilisateurs devra permettre de pré-remplir les déclarations des contribuables, en fonction du type de règle applicable pour chaque type de revenu (fonciers, BIC, BNC, autres). Elle s’appliquera au 1er janvier 2019.
C – Le plafonnement de l’ISF
Par ailleurs, une « clause anti-abus » est introduite pour lutter contre certains cas d’optimisation, lorsque l’interposition de sociétés holdings vise à optimiser le plafonnement de l’ISF alors que les capacités contributives du contribuable sont accrues.
Sont visés les redevables qui diminuent leurs revenus imposables par capitalisation des revenus de capitaux mobiliers dans une société holding patrimoniale (la « cash box »). La lutte contre le plafonnement semble donc assez circonscrite. Reste que le secrétaire d’État, Christian Eckert, a prévenu que « toute démarche d’optimisation fiscale de l’ISF peut conduire à un contrôle fiscal »… (Les Échos). Instauré en 1989, l’impôt de solidarité sur la fortune est payé par les ménages dont le patrimoine dépasse 1,3 million d’euros.
Le Conseil constitutionnel a insisté sur le fait que « la réintégration dans le calcul du plafonnement des revenus distribués à la société contrôlée par le contribuable implique que l’Administration démontre que les dépenses ou les revenus de ce dernier sont, au cours de l’année de référence du plafonnement et à hauteur de cette réintégration, assurés, directement ou indirectement, par cette société de manière artificielle ». Sous cette réserve, l’article 7 n’est pas contraire au principe d’égalité devant les charges publiques.
II – Les dispositions relatives aux entreprises
A – La baisse du taux normal de l’impôt sur les sociétés
La loi de finances pour 2017 prévoit également la baisse du taux normal de l’impôt sur les sociétés pour parvenir à 28 % en 2020 sur tous les bénéfices de toutes les entreprises. Cette baisse se fera en quatre étapes :
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dès 2017 pour l’ensemble des petites et moyennes entreprises (PME), jusqu’à 75 000 € de bénéfices (pour la fraction de bénéfice comprise entre 38 120 € et 75 000 €) ;
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en 2018, pour l’ensemble des entreprises jusqu’à 500 000 € de bénéfices ;
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en 2019, pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires (CA) inférieur à un milliard d’euros sur l’ensemble de leurs bénéfices ;
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en 2020, pour l’ensemble des entreprises.
B – La prolongation du dispositif des jeunes entreprises innovantes (JEI)
Le dispositif des jeunes entreprises innovantes (JEI) permet à de jeunes PME de moins de 8 ans et dont 15 % des charges sont des dépenses de recherche, de bénéficier d’exonérations fiscales (exonération d’impôt sur les sociétés et d’impôts directs locaux sur délibération des collectivités).
Ce dispositif est reconduit jusqu’au 31 décembre 2019, une étude de la Commission européenne l’ayant classé premier parmi les dispositifs de soutien à la recherche-développement.
C – La prolongation de la prime à l’embauche
La mobilisation en faveur de l’emploi est confirmée par la prolongation jusqu’au 31 décembre 2017 de la prime à l’embauche dans les petites et moyennes entreprises, et se traduit par des moyens nouveaux très importants, de près de 2 Md € avec toujours le même montant maximal de 4 000 €. Le dispositif d’aide a rencontré un gros succès – 1,1 million d’employeurs ont demandé à en bénéficier –, mais son impact sur les emplois créés reste difficile à mesurer, d’après une étude de l’Insee.
Par ailleurs, deux mesures de soutien aux entreprises confrontées à des difficultés économiques du fait de leur situation géographique sont introduites : gel de la dégressivité du régime des zones franches d’activité en outre-mer (art. 28), majoration du taux du crédit d’impôt investissement pour les TPE corses (art. 74).
D – Le recouvrement de la TVA
Le paragraphe I de l’article 105 de la loi met en place une nouvelle procédure de « signalement des achats exposés au risque de fraude à la TVA » dont le non-respect donnerait lieu à l’application d’une amende.
Estimant que le législateur a instauré une sanction manifestement disproportionnée à la gravité des faits qu’il a entendu réprimer, les Sages ont décidé que le paragraphe I de l’article 105 était contraire à la Constitution. En revanche, les dispositions contestées du paragraphe II de l’article 105 prévoyant une voie d’exécution forcée pour le recouvrement de la TVA sont conformes à la Constitution.
E – Le paiement des impôts par les entreprises
Afin d’améliorer la contemporanéité des impositions sur les entreprises, la loi augmente le cinquième acompte de l’impôt sur les sociétés, pour les plus grandes entreprises dont le CA excède 250 millions d’euros (disposition validée par le Conseil constitutionnel) ; elle modifie aussi le paiement de la majoration de taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), avec un nouvel acompte (disposition également validée par le Conseil constitutionnel) ; la loi de finances prévoit aussi d’appliquer un acompte de prélèvement forfaitaire sur les revenus de capitaux mobiliers, effectué à la source.
F – Le renforcement du CICE, crédit d’impôt compétitivité-emploi
Le taux du CICE passe de 6 à 7 % pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2017.
En outre, la loi crée un crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS) en faveur des employeurs ne bénéficiant pas du CICE : associations et fondations notamment (CGI, art. 231 A nouv.). Le taux est plus limité (4 %, « CICE associatif »).
G – Le compte PME innovation
Par ailleurs, le compte PME innovation est mis en place (CPI). Il permettra aux entrepreneurs ayant développé avec succès leur entreprise de réinvestir le produit de leur vente dans des jeunes PME ou des entreprises innovantes.
Ce compte offrira un cadre fiscal avantageux sur les plus-values lorsque les entrepreneurs s’engagent dans un cycle vertueux de financement de l’écosystème des start-ups, en apportant non seulement leurs capitaux mais également en s’engageant à leur faire profiter de leur expérience d’entrepreneur et leur réseau.
Ce dispositif, qui ne comporte pas de plafond, permet de reporter l’imposition sur les plus-values à la fin du cycle de cession-remploi dans des PME éligibles.
H – Les actions gratuites
La loi durcit également la fiscalité des actions gratuites qui s’appliquera pour les seules distributions votées après le 1er janvier 2017 en assemblée générale des sociétés et au-delà d’un seuil de 300 000 € annuel. Les gains supérieurs à cette limite ne pourront pas en bénéficier et seront imposés suivant les règles des traitements et salaires.
Par ailleurs, afin de préserver l’effet attendu des plans décidés suite à la loi Macron, et dans un souci de stabilité fiscale, ces nouvelles dispositions ne seront applicables qu’aux actions gratuites dont l’attribution aura été autorisée par une décision de l’assemblée générale extraordinaire postérieure à la publication de la loi de finances.
III – Mesures diverses
A – Le régime des impatriés IR
Il ne s’agit pas ici d’une mesure concernant le régime des impatriés ISF mais des impatriés IR. Elle concerne les salariés étrangers venant travailler en France ainsi que les Français revenant dans l’Hexagone après avoir exercé à l’étranger.
Afin de favoriser la relocalisation ou l’implantation d’activités, le bénéfice du régime des impatriés est étendu de cinq à huit ans. Une décision censée « renforcer l’attractivité de la France après le Brexit ».
En complément, les entreprises seront exonérées de taxe sur les salaires entrant dans le champ du régime des impatriés. Ces dispositions s’appliquent aux salariés prenant leurs fonctions en France à compter du 6 juillet 2016.
B – La suppression de taxes et de niches fiscales
Dans un esprit de simplification du paysage fiscal, l’article 83 de la loi de finances supprime plusieurs taxes dont le produit est faible. Parmi elles : la taxe sur les boues d’épuration urbaines et industrielle, créée par la loi sur l’eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006. L’article prévoit aussi que le gouvernement remettra au Parlement, avant le 30 juin 2017, un rapport portant sur les taxes à faible rendement (Localtis).
C – Autres mesures fiscales
On peut noter aussi la modification du barème du bonus-malus automobile2, la reconduction de la prime globale de 10 000 € en cas de mise à la casse d’un véhicule diesel immatriculé avant le 1er janvier 2001, et le maintien du bonus en faveur des véhicules hybrides rechargeables.
Le crédit d’impôt transition énergétique (CITE) est aussi reconduit jusqu’au 31 décembre 2017 et la loi de finances prévoit la possibilité de le cumuler avec l’éco-prêt à taux zéro en supprimant la condition de ressources.
Par ailleurs, la loi de finances instaure une hausse de 0,2 % à 0,3 % de la taxe sur les transactions financières, qui permettra de renforcer les moyens de l’Agence française de développement. Son élargissement aux transactions intrajournalières (« intraday ») a été reporté à 2018 (disposition validée par le Conseil constitutionnel).
Avait également été mis en place une « taxe Google » qui visait les pratiques d’optimisation fiscale des multinationales pour s’assurer que leurs activités en France soient imposables. Mais cette disposition a été retoquée par le Conseil constitutionnel au motif que l’administration fiscale ne peut avoir « le pouvoir de choisir les contribuables qui doivent ou non entrer dans le champ d’application de l’impôt sur les sociétés ».
La « taxe Youtube », quant à elle, vise toutes les plates-formes de vidéos en ligne.
D – La prorogation des dispositifs d’investissement locatifs Pinel et Censi-Bouvard
Les dispositifs d’investissement locatifs Pinel et Censi-Bouvard sont prorogés jusqu’au 31 décembre 2017. Le premier offre une réduction d’impôt de 12 à 21 % selon la durée de location.
Le second concerne les achats de logement dans les résidences-services et ouvre droit à une réduction d’impôt maximale de 33 000 € sur neuf ans.
La loi prolonge aussi le Censi-Bouvard uniquement pour les résidences seniors et étudiantes. Pour les résidences de tourisme, il est créé à la place une réduction d’impôt de 20 % pour les travaux de rénovation énergétique, de ravalement ou d’adaptation aux personnes handicapés votés en assemblée générale (jusqu’à 22 000 € de travaux, soit une réduction maximale de 4 400 €).
Notes de bas de pages
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1.
L. fin. 2017 n° 2016-1917, 29 déc. 2016 : JO, 30 déc. 2016 – Cons. const., 29 déc. 2016, n° 2016-744 DC.
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2.
L’abaissement du seuil d’application du malus de 131 à 127 grammes d’émission de dioxyde de carbone par kilomètre avec un malus de 50 € pour les modèles de véhicules émettant 127 grammes de CO2/km porté jusqu’à 10 000 € à partir de 191 grammes de CO2/km.