Liberté de gestion des entreprises et abus de droit : l’éclairage utile du Comité de l’abus de droit fiscal

(À propos de CADF, 10 nov. 2016, nos 2016-50 et 2016-51, concernant la SAS X HOLDING France)
Publié le 04/05/2017

Dans deux affaires récentes (nos 2016-50 et 2016-51) concernant la SAS X HOLDING France, le Comité de l’abus de droit fiscal rappelle la « grille de lecture » qu’il convient de suivre afin d’apprécier si le choix, par une entreprise, de financer un investissement par voie d’endettement plutôt que sur fonds propres, peut valablement être critiqué sous l’angle de l’abus de droit.

1. Dans ces deux avis rendus le 10 novembre 2016 (et concernant en réalité un seul groupe de sociétés), le Comité de l’abus de droit fiscal fournit de précieuses indications sur la frontière entre habileté fiscale et abus de droit1.

2. Schématiquement, deux sociétés françaises ont souscrit plusieurs emprunts auprès d’entités liées à l’étranger – essentiellement la succursale suisse d’une société luxembourgeoise – avant de capitaliser une filiale belge, laquelle a consenti des prêts à une société du même groupe en Espagne. Ces sociétés françaises ont également réinvesti des dividendes en provenance de leurs filiales.

Les charges financières déduites en France au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 – alors que les règles nouvelles visant à lutter contre les financements hybrides2 n’étaient pas encore entrées en vigueur – ont été faiblement imposées au niveau des sociétés du groupe ayant procuré les fonds (en l’occurrence, la succursale suisse d’une société luxembourgeoise), étant observé que, dans un groupe américain, compte tenu des règles de territorialité de l’impôt, il ne s’agit ici tout au plus que d’un décalage dans l’imposition effective, toute remontée de dividendes se traduisant tôt ou tard par une imposition à un taux effectif d’imposition qui avoisine 35 %.

On peut supposer – même si l’avis du Comité ne le mentionne pas expressément – que les charges financières faiblement imposées en Belgique n’ont pas donné lieu à une réduction immédiate de la charge fiscale en Espagne, compte tenu d’une situation fiscale déficitaire.

Cela étant, le Comité n’a eu à tenir compte ni de l’absence de déduction fiscale « effective » en Espagne ni de l’imposition future des intérêts aux États-Unis (en cas de distribution par la société luxembourgeoise), indiquant simplement, et sans doute trop rapidement, que : « L’opération aboutit à une déduction de charges financières en Espagne et en France, et à une absence d’imposition du produit correspondant au Luxembourg, en Suisse et aux États-Unis ». Ce faisant, le Comité paraît considérer que l’absence d’imposition à l’étranger de charges financières déduites en France a bien été prise en compte dans la réflexion mais qu’une telle optimisation fiscale – ici supposée – ne saurait caractériser, à elle seule, un abus de droit.

3. L’administration fiscale a été prompte à ne voir dans ces opérations qu’un « montage fiscal artificiel » répréhensible sur le fondement de l’abus de droit par fraude à la loi.

Dans un premier temps, l’administration fiscale avait entendu imposer les sociétés françaises à raison d’un « dividende notionnel », les augmentations de capital de la filiale belge étant requalifiées en avances financières (abus du régime des sociétés mères visé aux articles 145 et 216 du CGI).

Consciente sans doute de la fragilité de cette thèse compte tenu de l’absence de dividende (absence de « transformation » d’intérêts taxables en dividendes exonérés), et constatant la réelle implication des sociétés françaises dans le développement économique de leur filiale belge3, l’administration fiscale a finalement décidé de porter le débat sur le terrain des charges financières.

Dans cette affaire, c’est donc « l’endettement artificiel » des sociétés françaises que l’administration fiscale critiquait, au motif que l’interposition des sociétés françaises ne visait qu’à maximiser la déduction de charges financières en France au mépris des intentions du législateur.

Encore fallait-il expliciter quel « objectif poursuivi par le législateur » avait été méconnu, tâche sans nul doute pour le moins délicate pour l’administration fiscale. Faute de texte précis, l’administration fiscale n’a pu viser ici que les articles 209, I, et 38-1 du CGI, dont on sait qu’ils définissent en des termes très généraux la détermination du résultat fiscal des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés.

4. Dans son avis circonstancié, le Comité de l’abus de droit fiscal a émis l’avis que l’administration fiscale n’était pas fondée à mettre en œuvre la procédure de l’abus de droit fiscal.

4.1. Le Comité a tout d’abord écarté l’abus de droit par simulation, en constatant que les emprunts litigieux – de même que les augmentations de capital de la filiale belge – étaient bien réels et non « fictifs ».

En effet, toutes ces opérations ont bien modifié la structure du bilan des entités concernées, les flux financiers ayant suivi les opérations juridiques4. La « réalité économique » de la filiale belge était également avérée : « La société belge (…) dispose d’un patrimoine propre qui n’est pas constitué uniquement de créances qui lui auraient été apportées par les sociétés françaises » et celle-ci « est une société opérationnelle avec des moyens humains et matériels qui n’a pas été constituée pour les besoins de l’opération (…) quatre personnes au sein de la société belge sont dédiées à l’activité financière ».

Dit autrement, la société belge disposait d’une réelle « substance »5 et sa situation – comme celle des sociétés françaises au demeurant – était substantiellement affectée au plan juridique, économique et financier6 par les opérations litigieuses.

On est très loin ici d’augmentations de capital par voie d’apport de créances à des « coquilles » étrangères faiblement imposées et dont la politique d’investissements dans des produits sans risque de même que la politique de remontée de dividendes est définie a priori7. On est loin également d’opérations d’endettement qui résulteraient de simples jeux d’écritures comptables sans modification réelle de la structure du bilan des sociétés concernées et sans flux financier8.

À l’évidence, nous n’étions donc pas, dans cette affaire, dans un cas d’abus de droit par simulation.

4.2. S’agissant de l’abus de droit par fraude à la loi, le Comité n’a pas eu en l’espèce à s’interroger sur les « objectifs poursuivis par le législateur » qui auraient été méconnus9.

En effet, les opérations critiquées pouvaient être justifiées par des motivations autres qu’exclusivement fiscales, ce qui suffisait en l’espèce à écarter l’abus de droit.

À cet égard, le Comité relève que les opérations litigieuses « suivent une logique financière ». Ces investissements financés par emprunt s’inscrivaient en effet dans un projet plus global de restructuration du groupe en Europe, les sociétés françaises ayant souhaité à la fois conserver la « maîtrise » de leurs réserves – qui, sinon, auraient été distribuées à leur mère luxembourgeoise – tout en renforçant leur pouvoir sur le sous-groupe en Espagne. À cette fin, les titres de la société belge ont été apportés en cascade aux sociétés françaises, ce qui a contribué à renforcer leurs fonds propres.

Le Comité constate également que « la localisation de l’activité financière en Belgique lui a permis de profiter de la fiscalité offerte par le régime des intérêts notionnels et de consentir ainsi des prêts à la société espagnole dans des conditions avantageuses, ce qui n’aurait pas été possible depuis la France ». Ce faisant, le Comité reconnaît que le régime belge de déduction des intérêts notionnels peut en lui-même justifier financièrement le choix retenu par le groupe de capitaliser la filiale belge, laquelle a en effet pu prêter des sommes à des conditions financières avantageuses qui n’auraient pas été possibles sinon. La motivation est ici principalement financière et non exclusivement fiscale.

On peut certes regretter l’absence d’harmonisation fiscale au niveau européen voire même la compétition fiscale que se livrent les États membres de l’Union européenne pour attirer toujours plus d’investissements et d’activités quelles qu’elles soient. La France n’est au demeurant pas inerte dans cette compétition fiscale, avec un régime de la fiscalité de l’innovation qui reste compétitif (crédit d’impôt recherche et taux réduit d’imposition sur les brevets). Mais ce n’est pas une raison suffisante pour interdire à des sociétés françaises de bénéficier de régimes fiscaux attractifs à l’étranger.

Sans que le Comité ait eu à insister sur ce point, il convient de noter ici que la société espagnole a bénéficié de prêts supplémentaires, qui ne se substituaient pas à des financements préexistants.

Le Comité relève encore que ces opérations avaient pour objectif de maximiser les résultats des sociétés françaises, l’objectif étant que les charges financières supportées soient plus que compensées par des recettes futures et, dans la durée, de renforcer la position stratégique du groupe en France ainsi que les relations commerciales entre les sociétés du groupe en France et en Espagne. En effet, les sociétés françaises avaient accumulé des réserves importantes dont la rémunération était faible. Plutôt que d’avoir à « subir » une distribution de dividendes qui aurait impacté négativement leur situation nette, la direction du groupe en France a préféré prendre les devants et réinvestir ces réserves en développant une activité financière rendue possible via une prise de participation dans une filiale belge bénéficiant d’un régime fiscal attractif dans ce pays (régime des intérêts notionnels).

Accessoirement, ces opérations permettaient également, en cas de recapitalisation, de prendre indirectement le contrôle de la société espagnole.

Le Comité a déduit de l’ensemble de ces éléments, lesquels traduisent la recherche d’une rationalité économique et non la poursuite d’un but exclusivement fiscal, que, si les opérations en cause peuvent traduire une habileté consistant pour le groupe à utiliser les différents régimes fiscaux applicables dans les pays où ses filiales sont établies, elles ne caractérisent pas, en ce qui concerne les opérations réalisées en France, un abus de droit au sens de l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales.

5. On peut regretter que le Comité de l’abus de droit n’ait pas eu à se prononcer sur « l’objectif du législateur » qui aurait été méconnu10.

Sans doute ce silence vaut-il confirmation implicite que les textes de loi visés par l’administration fiscale étaient trop généraux pour pouvoir cerner les véritables objectifs de leurs auteurs que les sociétés françaises auraient voulu contourner.

Sans doute peut-on également voir dans ce silence la confirmation que sauf exceptions rarissimes où la réalité même des emprunts est sujette à caution11, sous l’empire des textes applicables à l’époque des faits, c’est-à-dire avant l’entrée en vigueur de l’arsenal législatif que l’on connaît aujourd’hui visant à restreindre la déduction des charges financières, l’arme de l’abus de droit se prête mal à la contestation de leur déduction fiscale, question qui relève davantage du domaine de l’acte anormal de gestion.

Or lorsque le redressement est fondé sur un acte anormal de gestion, il ne saurait en principe y avoir abus de droit12. C’est sans doute pourquoi, d’ailleurs, l’administration fiscale n’a pas entendu dans cette affaire invoquer l’acte anormal de gestion.

6. Quoi qu’il en soit, on doute fort que le Comité, s’il avait eu à se prononcer sur cette question, aurait pu trouver une quelconque « contrariété » entre l’objectif poursuivi par les auteurs des articles 209, I, et 38, 1, du CGI et les opérations critiquées.

En effet, il est de jurisprudence constante que l’administration fiscale doit se garder de juger de la politique financière suivie par les entreprises, de reprocher aux dirigeants d’avoir eu recours à l’emprunt alors que les fonds propres auraient été suffisants13. La décision d’augmenter le capital d’une filiale, plutôt que de lui consentir un prêt procède de la liberté de gestion des entreprises dans laquelle l’administration fiscale ne saurait valablement s’immiscer, comme l’a justement rappelé Gilles Bachelier dans ses conclusions sous l’arrêt Andritz14 : « (…) nous rappelons que vous jugez que les entreprises sont libres d’adopter le mode de financement des investissements qu’elles envisagent de réaliser et que, dès lors que les options prises l’ont été dans le cadre de l’entreprise et ne procèdent pas d’un acte anormal de gestion, il n’appartient pas à l’Administration, en l’absence de dispositions législatives expresses, d’apprécier l’opportunité de la décision de l’entreprise de recourir à des avances ou à l’emprunt au lieu d’un apport en capital pour les financer. Cette règle est reconnue depuis fort longtemps par votre jurisprudence15 et elle est admise par la doctrine administrative elle-même »16.

Cette solution est identique que l’on se situe dans l’ordre fiscal interne ou international, le Conseil d’État interdisant à l’Administration de faire usage de l’article 57 du CGI relatif au transfert indirect de bénéfices pour s’immiscer dans le choix opéré par une entreprise étrangère de financer par avances en compte courant plutôt que par augmentation de capital l’activité de sa filiale française17.

Ce principe a également été rappelé récemment pour contrer les tentatives de l’Administration de s’immiscer dans le mode de financement par les établissements de crédit et leurs succursales françaises18.

7. Enfin, cette solution est l’occasion de rappeler la jurisprudence constante du Conseil d’État qui a reconnu le droit, pour un contribuable, d’emprunter la voie fiscalement la moins onéreuse19.

À ce titre, dans ses conclusions rendues sous l’arrêt Axa du 7 septembre 2009, le rapporteur public Laurent Olléon a rappelé que :

« (…) vous avez clairement exclu, par cette jurisprudence [arrêt Janfin], de condamner l’optimisation fiscale, c’est-à-dire cette habileté dont parlait Maurice Cozian et qui tend à minimiser la charge fiscale »20.

Ce principe a d’ailleurs eu l’occasion d’être rappelé dans une décision récente du Conseil constitutionnel qui a censuré l’article 100 de la loi de finances pour 2014 qui visait, comme le faisait l’administration fiscale dans le cas présent, à modifier de manière trop extensive la définition des actes constitutifs d’un abus de droit visée à l’article L. 64 du LPF. Le Conseil avait alors censuré le texte incriminé en retenant la position des requérants selon laquelle cet article méconnaissait la liberté du contribuable de choisir, pour une opération donnée, la voie fiscale la moins onéreuse proclamée à l’article 2 de la Déclaration de 178921.

La jurisprudence communautaire, en indiquant que « l’assujetti a le droit de choisir la structure de son activité de manière à limiter sa dette fiscale », opère rigoureusement le même contrôle pour que soit protégée cette liberté de choix du contribuable22.

Dans le même sens, en matière d’impôt sur les sociétés, la Cour de justice a eu l’occasion d’indiquer que la circonstance qu’une filiale ait été créée dans un État membre dans le but de bénéficier d’une législation plus avantageuse et dans le but avoué de bénéficier du régime fiscal favorable que procure un tel établissement ne constitue pas, par elle-même, un abus23. L’avocat général avait souligné que le niveau d’imposition constitue un élément qu’une société peut légitimement prendre en compte dans le choix de l’État d’accueil dans lequel elle envisage de créer une filiale24.

Pour conclure sur ce point, et comme a pu le résumer très clairement le commissaire du gouvernement, Pierre Collin, dans ses conclusions sous l’arrêt Sagal :

« (…) ce que la procédure d’abus de droit vise à combattre, ce n’est pas la simple optimisation fiscale ou le simple fait, pour une société de passer des actes isolés et courants qui lui permettront de réduire au maximum sa dette fiscale. Nul ne songerait, par exemple, à contester le droit d’une société de chercher à minimiser son résultat fiscal »25.

Ce n’est donc pas l’habilité fiscale qui doit être sanctionnée, mais bien un acte n’ayant d’autre motif que fiscal et entraînant la perception de bénéfices en contradiction avec l’esprit d’un texte.

En l’occurrence, les sociétés françaises n’avaient finalement fait qu’appliquer « l’orthodoxie financière » voulue par le législateur en matière de « sous-capitalisation »26, sans avoir à prendre en compte – ce que nul ne saurait leur reprocher – le nouvel arsenal législatif entré en vigueur ultérieurement, visant à limiter davantage encore la déduction des charges financières27.

Comme l’ont montré d’éminents auteurs28, même si l’habileté fiscale est aujourd’hui sous le feu des critiques, tant en France qu’au niveau international avec le projet BEPS, on ne saurait sans tomber dans l’arbitraire et l’imprévisible se prévaloir d’une « moralité fiscale » fondée sur « l’acceptabilité du comportement » pour fonder des redressements29.

Notes de bas de pages

  • 1.
    CADF, 10 nov. 2016, nos 2016-50 et 2016-51 : Dr. fisc. 2017, 5-6, comm. 150.
  • 2.
    CGI, art. 209, I, b.
  • 3.
    V. CE, 9e et 10e ss-sect., 17 juill. 2013, n° 352989, SARL Garnier Choiseul Holding : Dr. fisc. 2013, 41, comm. 477, concl. Aladjidi F., note Deboissy F. et Wicker G. ; RJF 2013, n° 1064. V. égal. « Le régime des sociétés mères : état des lieux et perspectives », Actes du XXVIIe colloque annuel du CEFEP, Blanluet G. (dir.), in Dr. fisc. 2014, 41, comm. 564 et s.
  • 4.
    CAA Versailles, 7e ch., 28 janv. 2016, n° 13VE00986, min. c/ Sté LVMH Moët Hennessy Louis Vuitton. V. Acard C., « Fiscalité financière », Dr. fisc. 2016, 37, étude 477, n° 7.
  • 5.
    Dans le même sens, v. CE, 9e et 10e ss-sect., 15 avr. 2011, n° 322610, min. c/ Sté Alcatel : Dr. fisc. 2013, 29, comm. 381, cité not. par Bodkam-Tognetti E., dans Dr. fisc. 2014, 41, comm. 566 : « Lorsque la filiale a une existence autonome et une substance propre, l’opération n’a pas un but exclusivement fiscal, quand bien même sa localisation répond à un souci d’optimisation fiscale ».
  • 6.
    V., sur cette notion de « substance », centrale dans la question de l’abus de droit, l’article de Fernoux P., « Substance, effets multiples et montage purement artificiel : une approche commune de la fraude à la loi », Dr. fisc. 2008, 23, comm. 358. V. égal. l’avis rendu par le Comité de l’abus de droit fiscal dans les affaires nos 2013-04 à 2013-09, où le Comité avait estimé que l’interposition d’une holding en Belgique n’était pas abusive dès lors que la société était dotée de substance en ce qu’elle disposait d’un patrimoine propre et poursuivait un objectif patrimonial.
  • 7.
    V., pour un contre-exemple (parmi d’autres) de société dépourvue de toute substance : CE, 8e et 3e ss-sect., 18 mai 2005, n° 267087, min. c/ Sté Sagal : Dr. fisc. 2005, 44-45, comm. 726, concl. Collin P. ; RJF 8-9/05, n° 910. V. égal., pour un exemple caricatural de tentative de « transformation » d’intérêts taxables en dividendes exonérés, CE, 9e et 10e ss-sect., 11 mai 2015, n° 365564, SA Natixis banques populaires : RJF 8-9/15, n° 718, concl. Bokdam-Tognetti E. ; BDCF 8-9/15, n° 109.
  • 8.
    V. pour un exemple l’arrêt du CE du 13 janvier 2017 dont la portée doit sans doute être relativisée au vu de sa motivation, la contrariété du schéma critiqué avec l’objectif poursuivi par le législateur n’ayant pas, semble-t-il, été soulevée par la requérante : CE, 10e et 9e ch., 13 janv. 2017, n° 391196, SAS Ingram Micro : Dr. fisc. 2017, 4, act. 63, confirmant CAA Versailles, 3e ch., 14 avr. 2014, nos 12VE01779 et 14VE01972, SAS Ingram Micro : Dr. fisc. 2015, 46, comm. 681, concl. Coudert B., note Meier É. et Torlet R. ; RJF 8-9/15, n° 720. V. égal. Kruger H., « Haro sur les ORA : La liberté de financement des entreprises est-elle soluble dans l’abus de droit ? », Dr. fisc. 2015, 46, étude 670 ; Dr. fisc. 2016, 13, étude 249, note Mme Acard C., Genestier N. et Exerjean G.
  • 9.
    On sait qu’il faut que deux conditions soient cumulativement réunies pour mettre en œuvre la procédure d’abus de droit par fraude à la loi, à savoir (i) la poursuite d’un but exclusivement fiscal et (ii) la recherche du bénéfice d’une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs : CE, 8e et 3e ss-sect., 7 sept. 2009, n° 305586, min. c/ SA Axa : Dr. fisc. 2009, 39, comm. 484, concl. Olléon L., note Meier E. et Torlet R. ; RJF 11/09, n° 1138 – CE, 8e et 3e ss-sect., 7 sept. 2009, n° 305596, Sté Henri Goldfarb : Lebon, p. 350 ; Dr. fisc. 2009, 39, comm. 484, concl. Olléon L., note Meier E., et Torlet R. ; RJF 12/09, nos 1138 et 1139 ; BF 12/09, inf. 1113 ; BJS févr. 2010, n° 42, p. 184, note Serlooten P. – v. Fouquet O., « Fraude à la loi : l’explicitation du critère “subjectif” » : Dr. fisc. 2009, 39, act. 287.
  • 10.
    V. supra note 9. À noter ici que le Conseil d’État ne s’est pas prononcé sur cette question fondamentale dans la décision précitée du CE du 13 janvier 2017, au motif que cette question – et cela peut surprendre – n’aurait pas été soulevée devant les juges du fond.
  • 11.
    V. CE, 10e et 9e ch., 13 janv. 2017, n° 391196, SAS Ingram Micro : rappelée ci-dessus, dont la portée est toutefois discutable.
  • 12.
    V. en ce sens, CE, 10e et 9e ss-sect., 6 oct. 2010, n° 299986, Kalpokdjian : RJF 1/11, n° 77, concl. Boucher J. ; BDCF 1/11, n° 6. Rappr. CE, 3 juin 1992, n° 73236, Ets Eugène et Henri Dyant : RJF 7/92, n° 1037 ; Dr. fisc. 1992, 46, comm. 2151, concl. Fouquet O.
  • 13.
    Cozian M., Les grands principes de la fiscalité des entreprises, 4e éd., 1999, Litec, p. 92 ; CE, 8e ss-sect., 20 déc. 1963, n° 52308 : Dr. fisc. 1964, 13, comm. 156, concl. Martin M. ; Dupont 1964, p. 175 ; Dr. fisc. 1964, 13, comm. 156.
  • 14.
    Cité infra, note 13.
  • 15.
    CE, 20 déc. 1963, n° 52308 : Dupont 1964, p. 175, concl. Martin M. ; Dr. fisc. 1964, 13, comm. 156.
  • 16.
    D. adm. 4 C-521, 30 oct. 1997, n° 5.
  • 17.
    CE, sect., 30 déc. 2003, n° 233894, SA Andritz : Dr. fisc. 2004, 16, comm. 427, concl. Bachelier G., note Masquart P. ; RJF 3/04, n° 238, p. 83, chron. Olléon L. ; BGFE 2/04, p. 12, obs. Chahid-Nouraï N. ; BGFE 2/04, p. 166, concl. Bachelier G.
  • 18.
    CE, 10e et 9e ss-sect., 11 avr. 2014, n° 344990, min. c/ Sté Bayerische Hypo und Vereinsbank AG ; CE, 10e et 9e ss-sect., 11 avr. 2014, n° 346687, Sté Banca di Roma Spa ; CE, 10e et 9e ss-sect., 11 avr. 2014, n° 359640, Sté Caixa Geral de Depositos : Dr. fisc. 2014, 23, comm. 365, concl. Hedary D. ; Dr. sociétés 2014, comm. 138, note Pierre J.-L. ; RJF 2014, n° 667 – CE, 10e et 9e ss-sect., 17 juin 2015, nos 369722, 369724 et 369725, min. c/ Sté AIG Management France SA : Dr. fisc. 2015, 38, comm. 569, concl. Crépey É. ; v. Acard C., « Fiscalité financière », Dr. fisc. 2015, 38, comm. 557, n° 14.
  • 19.
    Le Conseil d’État s’est prononcé sur ce point, qu’il s’agisse du choix de procéder à un apport en capital suivi d’une réduction plutôt qu’à un abandon de créance taxable qui aurait eu la préférence du vérificateur (CE, 8e et 9e ss-sect., 20 mars 1989, n° 56087, Sté Malet Matériaux : Dr. fisc. 1990, 11, comm. 533 ; RJF 5/89, n° 548, concl. Martin P., « Report déficitaire : augmentation de capital par incorporation de comptes courants d’associés suivie d’une réduction de capital », p. 271), ou du choix de faire absorber une société par une autre de plus petite taille plutôt que l’inverse comme un vérificateur l’eût trouvé plus naturel et incidemment plus intéressant pour le Trésor public (CE, 7e et 9e ss-sect., 21 mars 1986, n° 53002, SA Auriège : Dr. fisc. 1986, 31, comm. 1432, concl. Fouquet O. ; RJF 5/86, n° 470).
  • 20.
    Olléon L., concl. sous CE, 8e et 3e ss-sect., 7 sept. 2009, n° 305586, min. c/ SA Axa.
  • 21.
    Cons. const., 29 déc. 2013, n° 2013-685 DC ; L. fin. 2014 n° 2013-1278, 29 déc. 2013 : Dr. fisc. 2014, nos 1-2, comm. 70, cité par Gouthière B., Les impôts dans les affaires internationales, 11e éd., Francis Lefebvre, § 71800.
  • 22.
    Dans son arrêt Halifax, la Cour a retenu, en matière de TVA qu’« il résulte de la jurisprudence que le choix, pour un entrepreneur, entre des opérations exonérées et des opérations imposées peut se fonder sur un ensemble d’éléments, et notamment des considérations de nature fiscale (…) Lorsque l’assujetti a le choix entre deux opérations, la sixième directive ne lui impose pas de choisir celle qui implique le paiement du montant de la TVA le plus élevé. Au contraire, ainsi que l’a rappelé l’avocat général au point 85 de ses conclusions, l’assujetti a le droit de choisir la structure de son activité de manière à limiter sa dette fiscale » (CJUE, 21 févr. 2006, n° C-255/02, Halifax plc, Leeds Permanent Development Services Ltd, County Wide Property Investments Ltd, pt 73).
  • 23.
    CJCE, 12 sept. 2006, n° C-196/04, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas : Rec. CJCE 2006, I, p. 7995, pt 38 ; Dr. fisc. 2006, 39, act. 176.
  • 24.
    V. note 13. Pt 51 des conclusions.
  • 25.
    Collin P., « La prise de participation sans justification économique ou financière dans une société holding luxembourgeoise exonérée d’impôt et dépourvue de toute substance caractérise-t-elle un abus de droit (suite) ? », concl. sous CE, 18 mai 2005, n° 267087, Sté Sagal : BDCF 8-9/05, p. 69 à 74.
  • 26.
    CGI, art. 212.
  • 27.
    On pense ici plus spécifiquement au dispositif anti-hybride visé à l’article 212, I, du CGI introduit par la loi de finances pour 2014, mais également aux initiatives au niveau international qui se sont depuis multipliées (recommandations de l’OCDE dans le cadre des travaux sur le « BEPS », actions 2 et 4, et Dir. Cons. UE n° UE 2016/1164, 12 juill. 2016 dite « anti-évasion fiscale »), rendant la question de la déduction des charges financières particulièrement délicate pour ne pas dire d’une complexité inouïe.
  • 28.
    « Actualité et enjeux de l’optimisation fiscale internationale », Actes du colloque du 16 mai 2013, université Paris Descartes-université de Genève : Dr. fisc. 2013, 39, comm. 436 à 441.
  • 29.
    Turot J., « Demain, serons-nous tous des Al Capone ? À propos d’une éventuelle prohibition des actes à but principalement fiscal », Dr. fisc. 2013, 36, comm. 394.
X