Vincennes : le défi des passoires thermiques

Publié le 30/01/2024
Vincennes, immobilier, Val-de-Marne
Leonid Andronov/AdobeStock

Dans le Val-de-Marne, comme dans l’ensemble de la région francilienne, la rénovation énergétique des passoires thermiques constitue un enjeu prioritaire pour les années à venir. Avec près de 44 % de passoires thermiques, la ville de Vincennes est un cas d’école.

Les passoires thermiques constituent à la fois un défi dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique et pour le droit à l’accès à un logement décent. Avec la réforme de MaPrimeRénov’ en 2024, le gouvernement a fait de la lutte contre les passoires thermiques une de ses priorités.

La notion de passoires thermiques

5 millions de logements présentant les étiquettes les plus basses au diagnostic de performance énergétique (DPE) attendent d’être rénovés. Ces logements étiquetés E ou G sont situés principalement en Île-de-France, dans la Creuse, le Cantal, la Lozère et dans les Alpes-de-Haute-Provence. La start-up Hello Watt, spécialisée dans l’accompagnement à la transition énergétique a dressé le portrait-robot de ces passoires thermiques. Il s’agit d’un appartement de 67 m2 construit en 1953 et chauffé à l’électricité. Si 60 % des logements sont généralement des appartements, seulement 52 % des passoires thermiques correspondent à cette catégorie. Ainsi, la proportion d’appartements parmi les passoires thermiques est inférieure à la moyenne pour l’ensemble des logements. La proportion des passoires thermiques chauffées au fioul est significativement élevée, atteignant 18,5 % (contre 7 % pour la moyenne des logements). En théorie, une passoire thermique consomme environ 400 kWh/m2/an. Dans la pratique cependant, on constate que la moyenne se situe plutôt autour de 100 kWh/m2/an. Cela s’explique en partie par le fait que les ménages résidant dans les passoires thermiques chauffent moins leur logement.

Une réglementation contraignante

Soucieux de contraindre les propriétaires à rénover leurs biens lorsqu’ils présentent des caractéristiques énergétiques défavorables, le gouvernement a mis en place un calendrier progressif d’interdiction de location pour les biens classés F ou G. À compter du 1er août 2022, la hausse des loyers des biens classés F et G n’est plus autorisée. En 2023, les biens consommant plus de 450 kWh m2 par an en énergie finale ne peuvent plus être loués. En 2025, cette interdiction s’étend à tous les logements de la classe G et en 2028, à tous les biens de la classe F. En 2034, elle concernera également les biens classés E. Le coût d’une rénovation énergétique pour une passoire thermique peut fortement varier en fonction des types de travaux réalisés. Ainsi pour une maison de 150 m² classée G, l’isolation des combles, des murs par l’extérieur et le remplacement de la chaudière par une pompe à chaleur peuvent significativement améliorer le DPE. De tels travaux coûtent environ 40 000 euros, mais en 2023 les aides peuvent couvrir jusqu’à 20 000 €, selon les chiffres de la plateforme Hello Watt.

Financer la rénovation énergétique

Les moyens consacrés aux aides à la rénovation énergétique des logements augmenteront en 2024 de 1,6 milliard d’euros pour atteindre le chiffre inédit de 5 milliards d’engagements. Le dispositif MaPrimeRénov’, permet aux propriétaires de financer les travaux d’isolation, de chauffage, de ventilation ou d’audit énergétique de leur bien. Il sera recentré sur les opérations de rénovations globales. Les travaux réalisés devront permettre de gagner au moins deux classes sur le DPE. Le taux de prise en charge des travaux pourra atteindre 90 % pour les revenus les plus modestes. Le plafond de prise en charge des travaux est doublé passant de 35 000 euros à 70 000 euros pour les rénovations les plus performantes permettant de gagner quatre classes au DPE. Le montant de l’aide à l’installation de pompes à chaleur air/eau géothermiques est multiplié par deux, passant de 1 000 à 2 000 euros pour les ménages aux revenus modestes et intermédiaires, à condition que le logement soit initialement classé entre A et E. L’accompagnement par Mon Accompagnateur Rénov’, devient obligatoire dans tous les dossiers.

L’Île-de-France au centre de toutes les attentions

La région Île-de-France est particulièrement concernée. Selon une étude publiée par l’Institut Paris Région et l’Insee en octobre 2022, on y dénombre pas moins de 2,3 millions de résidences principales étiquetées E, F et G, soit 45 % du parc francilien de résidences principales. Cette étude a été réalisée sur des données de 2018, c’est-à-dire antérieurement à la réforme du DPE. Applicable depuis le 1er juillet 2021, la refonte du DPE offre une plus grande fiabilité et une meilleure lisibilité. Il a notamment pour objectif d’identifier plus facilement les passoires thermiques, pour mieux y remédier. Cependant avec des données actualisées comme celle sur lesquelles a travaillé la start-up Hello Watt, en 2023, dans le cadre de sa dernière étude sur les passoires thermiques, on retrouve des proportions similaires. On constate ainsi une sur-représentation des villes de la région parisienne dans les classements effectués par Hello Watt. C’est en Île-de-France que l’on retrouve une majorité de villes avec le plus de passoires thermiques. Vincennes (44 %), Colombes (43 %), Paris (42 %) et Saint-Maur-des-Fossés (41 %) sont les communes où la proportion de passoires thermiques, logements classés F et G, dépasse les 40 %, souligne l’étude Hello Watt.

Le logement un important gisement d’économies d’énergie pour le Val-de-Marne

Dans le Val-de-Marne, environ 4,8 % des logements comportent une étiquette G, soit 37 603 logements. Au total, les passoires thermiques représentent 13, 7 % du parc immobilier privé du Val-de-Marne, soit 79 474 logements, des proportions que l’on retrouve sensiblement identiques dans l’ensemble de l’Île-de-France. Dans le Val-de-Marne, sur les quelque 575 600 logements recensés en 2006, plus de quatre biens immobiliers sur dix ont été construits entre 1949 et 1974. Cette proportion est supérieure à la moyenne régionale (34,4 %), à celle de la petite couronne (41,8 %) et surtout à celle de la France métropolitaine (28,6 %). La part des logements construits avant 1949 est, dans le département (24,8 %) comme en Île-de-France (22,5 % hors Paris), très inférieure à la moyenne de la France métropolitaine (32,6 %). Elle représente cependant près d’un logement sur quatre. On dénombre donc 67 % des logements qui ont été construits avant la première réglementation thermique qui date de 1974 contre 60 % pour l’ensemble de la France métropolitaine. Le logement y représente donc un important gisement d’économies d’énergie.

Vincennes, une zone tendue, très urbanisée avec des loyers élevés et de nombreuses passoires thermiques

Le cas de Vincennes est emblématique des défis à relever pour le territoire en matière de logement et de rénovation énergétique. D’après la carte interactive via l’Observatoire des territoires, qui recense le prix du m² charge comprise dans chaque commune de France, en décembre 2022, Vincennes fait partie des villes les plus chères d’Île-de-France, avec un loyer mensuel moyen de 27,40 €/m² 9,38 euros le m² pour un appartement. La ville est située en zone tendue avec un encadrement des loyers à la relocation comme dans toute l’Île-de-France. Développée autour d’un pavillon de chasse devenu résidence royale, Vincennes a été très tôt urbanisée. Elle est désormais totalement urbanisée, avec très peu de foncier disponible. Sa densité est très forte. Vincennes compte 49 697 habitants sur 1,92 km². C’est cependant moins qu’en 1962 où on dénombrait 50 436 Vincennois. Le projet d’aménagement et de développement durable du PLU vincennois s’est fixé pour objectif de maintenir le niveau de population. Cette orientation a pour objectif d’éviter une densification supplémentaire de la ville et une saturation de ses équipements et de ses espaces publics. Les habitations de la commune occupent majoritairement des appartements (95 %) et minoritairement des maisons (5 %). La ville compte 12, 01 % de logements sociaux en 2022. Avec un parc immobilier essentiellement composé d’un bâti ancien, la ville de Vincennes compte logiquement un grand nombre de passoires thermiques (44 %). La réhabilitation de ces biens constitue donc un enjeu majeur. C’est pourquoi, la ville affiche sa volonté d’accompagner au mieux les opérations de rénovation énergétique du bâti.

Agir pour la rénovation énergétique : une préoccupation ancienne

Dès 1999, Vincennes a créé avec Montreuil l’agence locale Montreuil-Vincennes Énergie, dans le but d’agir en matière d’économies d’énergie, de rénovation et de transition énergétique. Devenue l’ALEC-MVE (Maîtrisez votre énergie), cette structure accompagne aujourd’hui les habitants d’une grande partie de l’Est parisien, et est un espace conseil de proximité de France Rénov’ – service public national pour la rénovation de l’habitat.

Un dispositif innovant pour repérer des déperditions caloriques par les toitures

Les particuliers qui veulent savoir si leurs habitations sont convenablement isolées par le haut peuvent se référer à la thermographie aérienne que Vincennes a fait réaliser sur son territoire. Il s’agit d’une représentation graphique des déperditions caloriques par les toitures, réalisées grâce à des photographies aériennes. Cet outil innovant constitue un outil de prédiagnostic et une base pour envisager des travaux d’amélioration des bâtiments.

Accompagner les copropriétés dans leur rénovation énergétique

La ville de Vincennes, dans le cadre de l’Acte II de son Agenda 21, en partenariat avec l’Agence locale de l’énergie et du climat de l’Est parisien – MVE, propose aux Vincennois le guide : « Réussir sa rénovation en copropriété, les étapes clefs ». Ce guide qui décrit les étapes indispensables pour mener à bien ce projet, est destiné aux acteurs de la copropriété qui souhaitent s’engager dans une démarche de rénovation énergétique et bénéficier d’exemples de projets engagés à Vincennes.

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