Dessine-moi la justice !

Publié le 17/02/2023

C’est devenu une triste habitude. Inquiétante aussi. Lorsque les médias s’emparent d’une affaire judiciaire, chaque rebondissement de celle-ci se transforme en événement médiatique, dont le retentissement se trouve décuplé par les réseaux sociaux. Victimes et suspects se retrouvent emportés dans la tourmente, laquelle vient s’ajouter à la tragédie.

L’arrêt médiatique est déjà prononcé 

C’est ainsi que l’accident impliquant le véhicule de Pierre Palmade, survenu il y a tout juste une semaine, n’a cessé d’occuper la une ces derniers jours. On disserte des addictions, le grand public découvre la pratique dite du chemsex, autrement dit le mélange de drogues et d’activité sexuelle, on s’émeut de l’état des victimes, on s’indigne du sort de l’enfant à naître et l’ont disserte des responsabilités des uns et des autres. La justice n’en est qu’au début de l’enquête que déjà le tribunal médiatique a fait l’entier tour du dossier et prononcé son arrêt.

Un couple justice/médias parfois hautement toxique

Tout le monde sait que le couple justice et médias peut s’avérer parfois extrêmement toxique, mais nul n’a jusqu’ici trouvé le remède au poison. Peut-être faut-il aller le chercher dans une meilleure compréhension de la justice, par exemple, en expliquant dans ce dossier pourquoi le droit n’accorde la personnalité qu’à la naissance ? La déontologie est aussi une aide précieuse, comme l’a montré, dans l’affaire Lola, la réaction unanimement saluée de l’avocat de la suspecte. Rappelons aussi que l’article 11 du Code de procédure pénale qui autorise, par dérogation au secret de l’enquête, le procureur à communiquer sur une affaire « afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public » vient d’être assoupli pour offrir davantage de marge de manoeuvre aux enquêteurs. Il vaut parfois mieux que la justice délivre elle-même des informations plutôt que de laisser prospérer des rumeurs, mais cette faculté doit trouver sa limite, tant au regard du secret nécessaire aux investigations que vis à vis du respect des droits de la défense.

Dessine-moi la justice !
Dessin ©T. Mary
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