Tribunal de Pontoise : « Il n’a en réalité pas de problème avec les policiers, mais avec l’alcool »

Publié le 21/02/2024

Quand il boit, Sami, 34 ans, fait n’importe quoi. Et ça arrive souvent, alors Sami est jugé à Pontoise le 29 décembre 2023 pour une série de cinq faits survenus dans l’année. Énervé, le prévenu a refusé d’être extrait des geôles. Le procès se déroule donc sans lui.

Tribunal de Pontoise : « Il n’a en réalité pas de problème avec les policiers, mais avec l’alcool »
Tribunal de Pontoise (Photo : ©J. Mucchielli)

27 février 2023 : Sami à son domicile de Magny-en-Vexin fait un raffut qui alerte les voisins. Alors qu’il menace de se défenestrer, les pompiers – qui le connaissent bien – interviennent à son domicile. Il se débat, les insulte et leur crache dessus. Celui qui porte plainte ne le connaissait pas.

5 juin 2023 : Sami est en arrêt cardiorespiratoire lorsque les pompiers pénètrent dans son domicile pour lui porter secours. Lorsqu’il reprend connaissance, il se débat de toutes ses forces, met des coups de pied, de poing et de tête et mord le bras droit de l’un des pompiers. Une photo de la morsure est versée au dossier, ainsi que les témoignages des collègues du plaignant.

« Impulsif, intolérant à la frustration »

30 juillet 2023 : Dans une rue de Magny-en-Vexin, les policiers croisent Sami au volant de son véhicule en marche. Ils le contrôlent et lui demandent de souffler dans l’éthylotest. Il refuse car, selon lui, « je ne conduisais même pas ». Ils l’embarquent et, au commissariat, Sami refuse toujours de souffler.

13 octobre 2023 : Sami est dans un parc municipal, à Magny-en-Vexin. Il a un comportement étrange, abordant les passants, s’adressant aux enfants, notamment à une petite fille de 10 ans qui promène son chien. Sami prend le chien et le jette en l’air, puis adopte une attitude belliqueuse à l’égard du groupe de promeneurs qui se forme. Les gendarmes interviennent et l’interpellent.

À la gendarmerie, il est entendu sur ces faits et les précédents. Il dit ne pas s’en souvenir, qu’il était alcoolisé à chaque fois. Un psychiatre l’examine et dit qu’il est impulsif, intolérant à la frustration et instable psychologiquement.

« Monsieur refuse d’être extrait »

3 décembre 2023 : Après une énième interpellation, Sami est transporté à l’hôpital d’Argenteuil pour y être examiné et soigné. Il insulte les infirmières et en frappe deux. Les policiers qui le maîtrisent essuient des outrages et une rébellion. En garde à vue, il reconnaît les faits, mais a un comportement si agressif que les policiers tentent de le placer sous contention. De une heure à 2 h 30 du matin, Sami est intenable et s’en prend à tout le monde au commissariat. Ces derniers faits interviennent alors que sa femme vient d’accoucher de leur troisième enfant.

29 décembre 2023 : Au tribunal de Pontoise, la présidente constate : « Monsieur refuse d’être extrait. » Les escortes hochent la tête. Des geôles, proviennent des cris indistincts qui pourraient bien être ceux de Sami.

« — Je suis un peu embêté, car je n’ai pas pu le rencontrer, tente son avocat.

— Ce n’est pas la faute du tribunal, en plus c’est un renvoi.

— Et je vais vous demander un autre renvoi.

—  Je pense que ce dossier doit être maintenu, déclare la procureure.

— Nous allons juger ce dossier », décide la présidente, avant de le résumer en six minutes.

Litanie reprise en deux minutes par la procureure, qui demande 18 mois de prison dont 6 mois avec sursis probatoire (obligation de soins psychologiques et en addictologie). Comme il est en récidive, elle demande un mandat de dépôt.

« Ne l’incarcérez pas, il y a d’autres solutions »

Tout mais pas ça, c’est ce que plaide l’avocat de Sami. « Ne l’incarcérez pas, il y a d’autres solutions. » Les faits sont caractérisés, il ne le conteste pas et note que son client s’est excusé. « Il n’a en réalité de problème ni avec les pompiers, ni avec les policiers, ni avec les infirmières, mais avec l’alcool, et sa femme ici présente souhaite que des soins lui soient imposés. » La femme se redresse et lance un sourire implorant-crispé au tribunal.

Ce sera le cas, à sa sortie de prison : 15 mois dont six mois avec sursis probatoire. À l’obligation de soins, le tribunal a ajouté une obligation de travail. Ce sera écrit sur le papier que l’escorte va remettre à Sami lorsqu’elle descendra dans les geôles pour y chercher un autre détenu.

 

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