L’objet social de l’entreprise : à étendre ?

Publié le 24/12/2018

Deux articles de la loi Pacte entendent transformer le texte du Code civil pour que les entreprises participent au bien commun. La société devrait être gérée dans son intérêt et en tenant compte des enjeux sociaux et environnementaux de son activité. Elle pourrait même avoir une « raison d’être » si une clause statutaire le prévoit. D’autres aspects de la loi Pacte sont très importants selon le même objectif. Ils ne font pas l’objet du présent article mais ils s’inscrivent dans sa philosophie : stimulation de l’actionnariat salarié par exemple.

Les détracteurs de la loi ne manquent pas d’argumenter. On peut synthétiser les objections en stigmatisant les théories managériales qui, lorsqu’elles veulent se créer en pratique juridique, annoncent un changement de paradigme où l’intérêt général devient plus fort que le droit de propriété des actionnaires. Présenté comme une philosophie générale de l’entreprise, le projet de loi tente alors de mettre en œuvre une idéologie de la firme avec des concepts flous (pas de définition de l’entreprise ou de la raison d’être, études d’impact inexistantes), une politique législative indigente (quelles sanctions pour le respect du texte nouveau, quelles actions possibles pour la faire respecter) et l’abandon à la jurisprudence pour tenter de fabriquer les moyens acceptables de la pratique gestionnaire. Le législateur serait ramené à un lanceur d’idées hors sol et la véritable création du droit se ferait par la pratique.

Si tous ces éléments sont caricaturaux, ils n’en sont pas moins, comme toute caricature, révélateurs d’une situation vraie mais aussi perfectible. Il est temps que les juristes d’entreprise se prononcent en faveur d’une nouvelle vision stratégique de l’entreprise avec des applications concrètes.

Avec l’article 1832 du Code civil, la société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d’affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. L’article 1833 pose que toute société doit être constituée dans l’intérêt commun des associés et ne fait référence qu’à cela. L’article 1835 poursuit en signalant que les statuts déterminent, outre les apports de chaque associé, l’objet de celle-ci et les modalités de son fonctionnement.

Devant le MEDEF, le ministre de la Transition écologique et solidaire a annoncé dès le 11 décembre 20171 qu’il souhaitait faire évoluer l’objet social des entreprises pour prendre en compte l’intérêt des salariés et celui de l’environnement.

L’ambivalence du terme « société » employé pour désigner une entreprise ou pour désigner une organisation humaine dans son ensemble pourrait faire croire qu’une organisation économique a une visée sociétale et donc plus large que son objet. Or le métabolisme2 d’une firme la conduit à la recherche du profit pour elle-même avant toute chose et si, par bonheur, sa capacité à accumuler du capital peut mener au succès, ce sera avant tout celui de ses associés. Les entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) peuvent, elles, bénéficier d’aides et de financements spécifiques grâce à l’agrément « Entreprise solidaire d’utilité sociale » (ESUS).

Le ministre de l’Économie et des Finances, le ministre de la Transition écologique, le ministre du Travail et le garde des Sceaux ont reçu le 9 mars 2018 le rapport sur les résultats de la mission « Entreprise et intérêt général », lancée en janvier. Le rapport Notat-Senard contient des propositions destinées à alimenter le projet de loi Pacte3. Celui-ci contient toute une série de dispositions intéressantes et très variées, un texte patchwork, parmi lesquelles la réécriture de certains articles du Code civil4. L’entreprise ne se résumerait plus à la réalisation de profits ou la recherche d’économies mais aurait aussi une dimension sociale et environnementale. Voilà que nos hommes politiques viennent de redécouvrir l’eau tiède5. Il n’était nul besoin d’écrire dans un rapport ce que tout le monde sait, à savoir que la firme fonctionne dans un écosystème qu’elle subit et qu’elle modifie en même temps. Relancer un débat sur la place de l’entreprise dans la société fait renaître des oppositions entre acteurs sociaux où il est manifeste que la volonté du législateur est d’engager et diriger des évolutions sociétales par la loi alors que bien plus souvent la loi finit par entériner ce que l’évolution des pratiques sociales a conclu. Une modification juridique ne s’impose pas réellement sauf à répondre à un impératif politique lié aux promesses électorales où le paraître dans la volonté de changement est plus important que les problèmes qui peuvent naître d’une opinion doctrinale.

Le texte prévoit de modifier la définition de l’entreprise dans l’article 1833 du Code civil, afin de rappeler qu’elle a également un rôle social et environnemental dont elle doit tenir compte. L’article 1835 doit également être modifié, pour permettre aux entreprises d’ajouter une « raison d’être » dans leur objet social. Le symbolisme lié à la réécriture des textes mérite un débat où les juristes et organisations patronales redoutent un contentieux. Cette mesure pourrait pousser des personnes juridiques (ONG, élus, salariés, clients) à en vouloir aux entreprises au motif que ses activités sont dommageables à l’environnement ou à la société tout entière. L’économiste Nicolas Bouzou6 estime que la loi déresponsabilise par ailleurs l’entreprise en l’obligeant à avoir un sens social et environnemental qu’elle porte déjà en elle-même si elle le souhaite. En effet, en obligeant les entreprises à préciser leur objet social, le législateur :

  • contraint les juges à décider sur la volonté des parties écrites dans les statuts7 ;

  • contraint l’entreprise à faire passer l’intérêt général avant la liberté d’entreprendre et le respect de la propriété privée8 ;

  • voudrait amorcer la création d’un véritable droit de l’entreprise qui ne serait plus le simple amalgame de différents droits qui revendiquent tous leur autonomie (droit fiscal, droit du travail, droit des sociétés, droit de la consommation, etc.) ;

  • voudrait que la gouvernance des entreprises ne relève plus du seul domaine des actionnaires mais tienne compte des salariés9 et de l’intérêt général10.

Les théories du management ont depuis longtemps abordé le problème mais ne sont pas toutes allées jusqu’à vouloir une réforme des textes aujourd’hui entreprise. Jusqu’ici, le droit a donné aux associés souscrivant au contrat de société la place prépondérante que la théorie des parties prenantes cherche à dépasser11. C’est la mise en œuvre de cette théorie à laquelle nous commençons à assister qui est réalisée par les articles de la loi Pacte relatifs à l’objet social de l’entreprise.

I – Le petit univers et le grand univers

A – Entreprise et société

Diverses rédactions possibles des articles du Code civil proposent de mettre en avant toutes les parties prenantes dans le projet d’entreprise et la préservation des biens communs. La prééminence du rôle des associés est contestée dans la société. L’ambivalence du terme « société » conduit naturellement à envisager une réforme des textes sous l’angle de l’entreprise en forme sociale et en lien sociétal.

1 – Entreprise comme entité

La taille de l’entreprise et sa forme juridique. Une entreprise n’est pas forcément une société au sens du droit commercial puisqu’un entrepreneur individuel gère un patrimoine affecté ou non à une entreprise. Le rapport Notat-Senard fait la place belle aux grandes sociétés en imaginant un droit de l’entreprise uniquement lié au droit des sociétés. Or, une théorie de l’entreprise ne peut revendiquer ce seul axe de réflexion. L’entreprise individuelle existe et la naissance d’une entreprise, même de grande taille, est en effet toujours la rencontre d’individualités bien concrètes et qui ne sont donc pas des fictions juridiques.

En considérant l’intérêt collectif comme un associé à part entière dans le lien entrepreneurial, le sens des mots est perdu avec la contrainte insidieuse sur la pensée de chaque fondateur ou créateur à une vision collective. L’affectio societatis doit exister aussi longtemps que dure la société mais sa disparition est insuffisante pour motiver la dissolution de la société12. La mésentente existant entre les associés et par suite la disparition de l’affectio societatis ne constituent un juste motif de dissolution qu’à la condition de se traduire par une paralysie du fonctionnement de la société. Si les difficultés rencontrées ne sont pas jugées suffisamment graves pour paralyser le fonctionnement social, la demande doit être rejetée par le juge13. Peut-on dès lors penser que l’intérêt collectif ou général, absent jusqu’alors des statuts, conduit à considérer toute société comme en survie en attendant que l’État, seul habilité à représenter l’intérêt général, demande sa dissolution pour insuffisance ?

L’entreprise comme employeur. L’entreprise comme entité est par ailleurs un ensemble organisé où traditionnellement les détenteurs de capital utilisent la force de travail des salariés selon une vision caricaturale. La théorie managériale de l’entreprise a montré que ce regard sur la grande entreprise n’est pas forcément juste dans la mesure où les managers ne sont pas nécessairement propriétaires d’actions mais sont aussi des salariés. S’il est exact que le salarié perd son emploi en cas de « faillite » de l’entreprise et qu’il existe bien un risque à ce niveau, le salarié bénéficie d’une prise en charge sociale par la société globale (AGS, plan de reclassement, indemnité chômage, etc.). L’actionnaire ne bénéficie en revanche d’aucune compensation quand ses titres ne valent plus rien.

2 – Entreprise et société globale

La place du lien social. La proposition de loi Entreprise nouvelle et nouvelles gouvernances, est fort marquée idéologiquement14. L’article 1er de la proposition de loi voulait « connecter ainsi la société et l’entreprise et inciter ses dirigeants à internaliser les externalités négatives qu’elle peut produire ». La pollution figure au premier rang des externalités négatives que l’intérêt collectif voudrait que les entreprises assument mais elles le font déjà ! Le principe du pollueur payeur a été adopté depuis 1972 avec l’article L. 110-1 du Code de l’environnement. La révolte contre l’écotaxe a montré qu’il fallait d’abord convaincre de l’intérêt de la lutte contre la pollution avant d’imposer un système contraignant15. Cette révolte a aussi permis de penser qu’il valait mieux agir insidieusement en faisant intégrer par les « révoltés » les contraintes auxquelles ils se soumettront volontairement.

La même proposition de loi consacrait « l’enracinement de l’entreprise dans la société » avec des dispositions telles que la reconnaissance de principe d’un écart maximal décent16 de rémunération entre les dirigeants et les salariés, l’introduction en France des « sociétés à mission »17 et la création d’un indicateur de responsabilité sociale et environnementale18 des entreprises à côté des indicateurs de performance économique. Selon cette optique, on ne sait plus très bien ce qui différencie une société d’une association 1901 avec la rédaction d’un nouvel article 1833-1 : « Est une société à mission la société dont les statuts comportent la mention d’un objet social étendu, autre que le partage des bénéfices ou la réalisation d’une économie, et consistant à assigner à l’activité de la société un objectif social, environnemental, scientifique ou humain d’intérêt collectif ».

B – Intérêt social et intérêt sociétal

L’intérêt propre de l’entreprise. L’émergence de la théorie des parties prenantes conduit à modifier l’objet social de la firme en intérêt sociétal tel qu’écrit dans ses statuts. L’idée de réécrire l’article 1833 est déjà apparue avec la loi Macron en 2015, idée finalement écartée19. Bien qu’il ait estimé le texte constitutionnel, le Conseil d’État montre aujourd’hui20 son interrogation sur « le contenu et la portée de la notion de raison d’être », et estime que les conséquences juridiques des modifications envisagées du Code civil et du Code de commerce « notamment du point de vue de la responsabilité des sociétés et des dirigeants », sont insuffisamment étudiées.

La conception ancienne (1804) de l’objet social rédigée dans le Code civil relève du libéralisme pur où l’intérêt social n’est rien d’autre que l’intérêt commun des associés qui lui-même se réduit à être la somme de leurs intérêts particuliers. Cette conception renvoie à la validation des décisions au sein de la firme à l’unanimité ou la majorité qualifiée des seuls associés. Mais comme le soutient Dominique Schmidt21, « le pouvoir exclusif d’exprimer la volonté sociale n’est pas donné à la majorité pour lui permettre la satisfaction de ses intérêts particuliers. En effet, la majorité n’a de pouvoir que pour rechercher la réalisation du but social » de l’entreprise. De l’intérêt propre de l’entreprise à l’intérêt de toutes les parties prenantes (salariés, créanciers, fournisseurs, etc.), il n’y a qu’un pas que défend ce qu’on a pu appeler l’École de Rennes22 (Jean Pailusseau23 et Claude Champaud).

Le champ d’application de l’intérêt social retrouve avec le nouveau texte une dimension perdue. L’intérêt social d’une entité est celui que se donne cette entité et ne peut être réduit à l’intérêt des associés. Avec l’arrêt Fruehauf24, une conception très large de l’intérêt social a pu naître voilà déjà longtemps mais n’a pu se réaliser pleinement car la décision avait un caractère politique marqué en lien avec l’embargo décidé par le gouvernement américain contre la Chine. Dans cette affaire, les actionnaires français de Berliet refusaient la décision du groupe américain Fruehauf de ne pas livrer des camions en Chine par l’intermédiaire de sa filiale France. L’intérêt des actionnaires français de Fruehauf France permettait de rendre service aux actionnaires américains de Fruehauf tout en considérant l’intérêt des salariés et du fournisseur Berliet25.

Conséquence dommageable pour le fisc mais non pour l’entreprise, une conception plus large de l’intérêt social peut faire perdre de son intérêt à la théorie fiscale de l’acte anormal de gestion. Constitue un acte anormal de gestion « celui qui met une dépense ou une perte à la charge de l’entreprise, ou qui prive cette dernière d’une recette, sans que l’acte soit justifié par les intérêts de l’exploitation commerciale26 ». L’administration fiscale et le juge fiscal ne s’immiscent dans la gestion de l’entreprise que pour extourner les dépenses correspondant à des décisions prises hors l’intérêt de l’entreprise et si le champ d’application des décisions de gestion s’élargit, la théorie de l’acte anormal de gestion perd nécessairement du terrain. Des charges considérées jusqu’ici comme étrangères à l’intérêt de l’entreprise pourraient devenir normales si elles sont effectuées dans un but social ou écologique. De même, un abandon de créance au profit d’un client impliqué dans le secteur social ou écologique pourrait ne plus être sanctionné. La mise à jour récente du BOFiP concernant le prêt de main-d’œuvre semble aller dans ce sens27. La voie de la renonciation au profit n’est peut-être pas complètement ouverte pour autant.

Critique de l’intérêt propre de l’entreprise. Il paraît discutable de promouvoir l’idée qu’il y aurait un intérêt propre à l’entreprise et supérieur à celui de la volonté réunie de ses associés. Lorsque cette volonté est très diluée parce que le nombre des actionnaires est important, on peut certes concevoir que cette volonté est peu perceptible mais on ne saurait en déduire pour autant qu’elle doive être comprise comme abandonnée par les actionnaires. Quel que soit le nombre des actionnaires, la volonté des associés doit toujours être prépondérante car ils ont un droit de propriété sur l’actif net et un droit au dividende. En cherchant à créer un droit de l’entreprise, on érige une construction idéologique pour donner à la fiction juridique la qualité d’un intérêt supérieur qui ne se justifie pas. Une entreprise est toujours la création de la volonté humaine d’un ou plusieurs individus et non détachable de ces individus. La plupart des sociétés ne sont que des fictions juridiques, ainsi en est-il des petites SARL, souvent de famille, des EURL et des SASU. La longue résistance du législateur français à la création d’un patrimoine affecté jusqu’à la création de l’EIRL est la cause de l’existence de tant d’entreprises où dans l’esprit de son dirigeant, la société qu’il a créée n’est pas une personne autonome mais un instrument de travail personnel.

1 – Observations sur les critiques du Conseil d’État

Dans son avis28 consultatif sur le projet de loi Pacte, le Conseil d’État a présenté ses observations. En effet, sous le titre « Repenser la place des entreprises dans la société », le projet de loi modifie les articles 1833, 1844-10 et 1835 du Code civil et par voie de conséquence les articles L. 225-35 et L. 225-64 du Code de commerce.

La raison d’être de l’entreprise, une conviction avant tout. Le Conseil d’État observe que rien n’interdit aujourd’hui à une société d’inscrire dans ses statuts une « raison d’être ». La raison d’être n’est pas la raison sociale de l’entreprise et, en complément de cette remarque, on peut noter que cette faculté29 paraît finalement s’inscrire dans le prolongement des pratiques de communication des entreprises. Faire part de ses valeurs auprès des clients ou en interne auprès du personnel est devenu un must depuis plusieurs années mais doit-on pour autant inscrire dans les statuts des éléments abstraits, généraux, fédérateurs et davantage liés au marketing qu’à la gestion d’une entreprise ? L’inscription dans les statuts de la raison d’être fait partie de la communication d’entreprise et donc d’une communication marchande. Il s’agit de conférer de la crédibilité aux produits mis sur le marché et de légitimer l’entreprise dans son processus de production. L’inscription des valeurs dominantes et de la philosophie de l’entreprise dans les statuts exprimant une raison d’être permet de déduire des contenus tels que la qualité des produits, l’innovation, la position sur les prix, etc. Le Conseil d’État considère que l’inscription de la raison d’être n’est pas dépourvue de portée normative dans la mesure où, pour les entreprises qui auront fait ce choix, l’inscription dans les statuts obligera à s’y conformer. De même, la nouvelle rédaction des articles L. 225-35 et L. 225-64 du Code de commerce invite le conseil d’administration ou le directoire à « prendre également en considération la raison d’être de la société » et le cas échéant donc, à en tirer des conséquences dans leurs décisions de gestion. Faute d’une étude d’impact sur le sujet, les conséquences de l’introduction de la raison d’être dans les statuts ne pourront être appréhendées que par la pratique et la jurisprudence.

Le principal danger de l’inscription d’une raison d’être dans les statuts serait la contradiction entre la valeur affichée et les faits. Indiquer par exemple que les valeurs humaines sont prépondérantes au sein de l’entreprise peut conduire à des choix difficiles de la direction générale entre la compression des effectifs, la réduction du temps de travail et la limitation des salaires en cas de réduction de la demande. Indiquer que l’innovation est une valeur importante alors que l’entreprise est convaincue de pratiques d’obsolescence programmée mettrait également les dirigeants en difficulté. Cela étant, il semblerait que ce soit plutôt l’intérêt à agir lors d’une action en responsabilité qui passe d’un périmètre restreint à un périmètre large. En effet, faire entrer un levier de communication dans les clauses du contrat d’associés peut donner à toutes les cibles de communication les moyens d’engager la responsabilité des dirigeants et des associés.

Comme une nouvelle loi-cadre prédictive. On observera que toutes les notions proposées par le nouveau texte sont volontairement énoncées d’une manière tellement générale qu’il reviendra à la jurisprudence et non au législateur d’en préciser les contours. Cette démarche assumée introduit un doute dans l’esprit des créateurs d’entreprise : sont-ils finalement en présence de commandements de la loi ou de simples conseils ? En effet, faire la recommandation dans la loi d’un intérêt social, sociétal, général ou environnemental revient à seulement réprouver moralement certains comportements quand des sanctions30 ne sont pas prévues.

L’inobservation du nouvel article 1833, alinéa 2, ne serait pas sanctionnée par la nullité de la société. En revanche, il s’agit d’une disposition impérative ; toute décision sociale prise en violation de ce texte pourrait donc être annulée31, sans préjudice de la mise en jeu de la responsabilité du dirigeant à l’origine de la décision.

Avec l’entrée de l’intérêt social ou sociétal dans l’entreprise, c’est la limite du contrat-échange qui est affirmée au bénéfice du contrat-organisation. Le modèle du contrat-organisation a été mis en lumière par le professeur Paul Didier32. Il existe deux types de contrats : les contrats-échange qui « ont pour objet une permutation au terme de laquelle le bien de A se trouve entre les mains de B et le bien de B entre les mains de A ». Les contrats-organisation qui « instituent une coopération entre A et B ; lesquels mettent en commun des choses qui jusque-là leur étaient propres et les emploient à une activité conjointe ». Précisément, le contrat de société ne peut exprimer, selon les seuls termes de l’article 1832, l’organisation sociétaire. La société par actions devrait donc se penser en termes de contrat-organisation alors que jusqu’ici, elle ne l’a été qu’en termes de contrat-échange, soit la rétribution d’une part de capital par un apport en numéraire. La distinction entre les parties prenantes qui sont partenaires de l’entreprise (ceux qui ont un contrat explicite avec la firme) et les parties prenantes qui réinsèrent l’entreprise dans la société en tant que telle (associations, ONG, collectivités territoriales…) permet de penser la firme comme un sous-ensemble d’un écosystème plus vaste.

L’avis du Conseil d’État. Dans son avis sur la loi Pacte33, le Conseil d’État a indiqué que le droit actuel « positif ne réduit pas le contrat de société à un seul objectif [le bénéfice ou la réalisation d’une économie] et que « nombre d’entreprises de droit français ont d’ores et déjà choisi d’agir en ce sens, sans que le Code civil y fasse obstacle ». Le Conseil d’État estime aussi que la rédaction du texte étant d’application généralisée à toutes les entreprises civiles et commerciales, « ce choix pourrait être de nature à pénaliser des petites structures, dotées d’une faible capacité d’expertise » dans leurs décisions de gestion sociale et environnementale. Le Conseil d’État estime enfin qu’un simple manquement à l’obligation très générale de considération des « enjeux sociaux et environnementaux » ne saurait constituer le fondement d’une action pénale au sens de l’article L. 242-6 du Code de commerce préservant l’intérêt social propre de l’entreprise.

C’est donc sur le registre d’une injonction douce que le législateur intervient avec le nouveau texte, précision donnée que des injonctions du même type ont déjà été faites pour tenir compte de l’intérêt général34 et du bien commun.

L’avis du gouvernement. Le gouvernement estime que l’impact juridique35 du nouveau texte sera limité : « L’obligation d’une prise en considération correspond en effet à une obligation de moyens devant être observée à l’occasion des décisions de gestion. Ce principe doit guider la gestion de la société, elle oblige le dirigeant à examiner en amont d’une décision de gestion donnée les effets éventuels de celle-ci en matière sociale et environnementale ».

Mais, ajoute l’étude d’impact, « la substance de cette prise en considération n’est pas précisée, ni dans la nature des actes à accomplir ni dans leurs modalités », et ce changement ne crée pas de nouveau régime de responsabilité délictuelle. « Toute responsabilité, de la société comme de ses dirigeants, qui serait recherchée sur le fondement de l’absence de prise en considération des enjeux sociaux et environnementaux devrait s’inscrire dans l’une des hypothèses reconnues par le droit commun des sociétés (existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité) ». En revanche, les sociétés qui auront défini leur « raison d’être » en y intégrant des enjeux sociaux et environnementaux devront s’y conformer sous peine de prendre le risque de subir une action en responsabilité visant à faire reconnaître leur faute.

L’impact juridique quant à l’introduction de la notion jurisprudentielle d’intérêt social au sein de l’article 1833 du Code civil devrait être nul puisqu’il ne s’agit que de reprendre explicitement une notion actuellement appliquée par la jurisprudence. Quant à la responsabilité des dirigeants, elle pourrait s’accentuer encore par rapport au dispositif déjà bien lourd en se reposant sur la méconnaissance d’un principe de gestion ou sur une faute de gestion. Mais dans le cas d’une éventuelle contradiction entre l’intérêt social et certains enjeux sociaux et environnementaux, la primauté du respect de l’intérêt social est affirmée afin de ne pouvoir donner aux parties prenantes une cause d’action en responsabilité.

2 – La consécration de la théorie des parties prenantes

Les gestionnaires impulsent les juristes. Le manager est celui qui résout les contradictions entre toutes les parties prenantes au sein de l’entreprise et il est normal qu’il assigne au juriste l’objectif d’une théorie globale de l’entreprise là où il ne fait que raisonner contrat par contrat entre chaque partie et l’entreprise. Selon les initiateurs du projet de loi, la raison d’être « vise à rapprocher les chefs d’entreprise et les entreprises avec leur environnement de long terme ». La raison d’être vient en quelque sorte en opposition avec la raison d’avoir et surtout d’accumuler à court terme pour privilégier la gestion à long terme de l’entreprise. L’objectif purement financier du bénéfice est ainsi combattu par l’objectif de pérennité économique. La méconnaissance de la raison d’être par un dirigeant constituerait une violation des statuts de nature à engager sa responsabilité à l’égard de la société et des associés36.

Actuellement, la notion d’intérêt social apparaît déjà dans les textes. Elle indique que, dans les rapports entre associés, le gérant de société civile et, sous réserve des clauses statutaires déterminant leurs pouvoirs, les gérants de société en nom collectif et de SARL peuvent faire tout acte de gestion dans l’intérêt de la société37. La loi punit aussi pour abus de biens sociaux le gérant de SARL ou les dirigeants de société anonyme qui font des biens ou du crédit de la société un usage qu’ils savent contraire « à l’intérêt de celle-ci »38. Les juges prennent également en compte l’intérêt social pour sanctionner l’abus de majorité, abus commis par des associés majoritaires ayant adopté une décision à leur seul avantage, au détriment des minoritaires et au mépris de l’intérêt de la société. Le renforcement de la notion était-il donc indispensable ?

La mesure des enjeux sociaux et environnementaux dans les décisions de gestion va contraindre les dirigeants à s’interroger sur ces enjeux. La difficulté de cette prise en compte est l’adaptation à chaque firme en considération de sa taille et de la nature de son activité. Une firme, prise isolément, n’a certainement qu’un impact limité sur la pollution et à partir de quel seuil doit-on s’en préoccuper ? Ne faudrait-il pas plutôt considérer un secteur d’activité tout entier à partir duquel une norme de pollution est établie ? Les enjeux sont-ils considérés avec attention en fonction des coûts et admettra-t-on les provisions pour risques conséquents ? Le recours à des solutions moins polluantes joue sur les prix de l’offre et toutes les firmes pourront-elles se les offrir sauf à encourager le regroupement d’entreprises ?

La méconnaissance des enjeux sociaux et environnementaux ne serait pas sanctionnée par un régime spécifique de responsabilité extracontractuelle du dirigeant. Toute action en responsabilité pour absence de prise en considération de ces enjeux continuerait de répondre aux conditions de responsabilité prévues par le droit commun des sociétés (existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux). La seule constatation d’un dommage social ou environnemental ne suffirait donc pas à mettre en jeu la responsabilité d’un dirigeant s’il n’était pas établi que ce dommage résulte de sa méconnaissance fautive d’un tel enjeu.

La théorie des parties prenantes. Une partie prenante (stakeholder) est définie comme un acteur (fournisseur, salarié, État, etc.) qui a un intérêt à jouer un rôle dans la conception stratégique et le modèle de gouvernance de la firme. Il s’oppose à l’actionnaire (shareholder) qui n’aurait comme intérêt que de suivre la valeur du cours de l’action et d’obtenir des dividendes. Des auteurs39 ont montré que la spécification dans le contrat de société de l’objet social étendu permet de désamorcer les critiques habituellement adressées à la théorie des parties prenantes et d’ouvrir de nouvelles perspectives pour la gouvernance. Le « côté peu opératoire » de la théorie est ainsi légèrement gommé et l’environnement juridique ne constitue plus un blocage au développement de la théorie économico-managériale. Celle-ci précède le droit et il revient aux faits économiques et juridiques de constituer un ensemble construit explicatif en retour. Comme souvent pour les théories en construction, l’applicatif précède l’explicatif.

Jusqu’ici, les responsabilités du management s’inscrivent dans le cadre de contrats avec les différentes parties prenantes au sein de la firme et dans le cadre de devoirs juridiques imposés dans les domaines de la concurrence, de l’environnement, de la consommation et du droit du travail. Pour les tenants de la théorie des droits de propriété, deux dimensions sont essentielles : le droit au rendement40 et le droit de contrôle41. La menace portée sur ces deux droits est rigoureusement exclue pour le capitalisme classique mais, à noter que l’article 1833 du Code civil dans sa nouvelle version n’empêche pas le principe de profitabilité. Il porte atteinte en revanche au principe de contrôle. La flexible purpose corporation américaine admet que les dirigeants poursuivent explicitement des objectifs autres que celui du profit, comme des objectifs caritatifs ou environnementaux mais sous réserve de l’approbation d’une majorité qualifiée d’actionnaires et des conditions de retrait aux actionnaires non convaincus par la démarche. Ces conditions manquent cruellement au texte français pour le « faire passer » en pratique d’autant que le patronat semble prêt à en discuter42 mais la pratique pourra s’approprier facilement l’introduction de clauses palliatives de ce type. Par ailleurs, l’objet social d’une entreprise est souvent une clause assez vague des statuts puisque la délimitation de la sphère d’activité de la société est toujours suivie d’une mention explicite à des opérations se rattachant directement ou indirectement à l’activité. Les conséquences d’actes non visés par l’objet social peuvent être importantes. Les actes accomplis en dépassement de l’objet social peuvent encourir la nullité, la responsabilité personnelle du dirigeant peut être engagée en cas de problème sur des actes accomplis en dehors de l’objet et l’assurance peut ne pas couvrir un sinistre qui ne concerne pas directement l’activité déclarée par l’entreprise. Dans ces conditions, prévoir un objet social étendu est plutôt protecteur de l’activité des entreprises. Au demeurant, l’extension de l’objet social apparaît pour beaucoup d’entreprises comme étant déjà leur cœur de métier et n’ajoute rien finalement. Pour exemples : le développement de technologies vertes, la formation de salariés, l’insertion.

La réforme du Code civil comme une mesurette. « La modification du Code civil est une mesure intelligente, mais cela reste symbolique43. On fait de l’eau tiède, on ne va pas assez loin. Il aurait fallu aller jusqu’au bout de l’idée en créant par exemple le statut d’entreprise à mission comme c’est le cas aux États-Unis ». Pour faire contrepoids à la maximisation du profit sous l’angle de l’objet social ordinaire (ce qui est souvent résumé par le code NAF), l’objet social étendu s’impose aux actionnaires qui ne peuvent dès lors pas sanctionner une politique allant en deçà de leurs dividendes attendus. La responsabilité de l’associé reste quant à elle limitée à ses apports mais la valeur de l’action peut être diminuée par une politique trop généreuse des dirigeants. Aucun garde-fou particulier n’est envisagé à ce titre sauf à réorienter l’objet social lui-même ; l’autre solution consiste pour les actionnaires mécontents à vendre leurs titres. L’objet social étendu pose alors le problème de l’actionnaire « militant », celui qui se résout à gagner moins ou à perdre si les objectifs de l’extension de l’objet social sont atteints ou dépassés.

Les questions inexplorées par la loi et dont la pratique pourrait s’emparer. D’abord, qui pourra accorder un quitus de bonne gestion pour l’entreprise OSE ? Ensuite, comment le faire ? La directive n° 2014/95/UE du Parlement européen s’engage sur la publication d’informations non financières et d’informations relatives à la diversité44 (art. 19, 19 bis et 20). L’ordonnance n° 2017-1180 du 19 juillet 2017 assure la transposition en droit interne de la directive RSE et détermine le nouveau dispositif de reporting extra-financier. Un nouvel article L. 225-102-1 du Code de commerce dispose que toutes les sociétés dont les titres sont ou ne sont pas admis sur un marché réglementé doivent insérer une déclaration de performance extra-financière dans le rapport de gestion de l’entreprise dès lors qu’elles excèdent des seuils qui sont fixés par décret. À noter, en cas d’absence de déclaration au sein du rapport de gestion, l’ordonnance prévoit que toute personne intéressée peut saisir le juge des référés pour y avoir accès. Certes, ces éléments sont importants pour les grandes entreprises mais ne résolvent pas les problèmes des entreprises non visées par l’ordonnance et pour lesquelles le contrôle de gestion s’impose. C’est une démarche volontaire qui s’impose pour elles. Il faut prévoir notamment l’établissement d’un contrôle de gestion indépendant des autorités de direction de l’entreprise si on suit le schéma européen mais rien n’interdirait un rapport élaboré au sein de l’entreprise pour celles qui ne sont pas concernées par l’ordonnance de 2017. Cela introduirait un débat initiateur de réforme au sein de l’entreprise. Les auteurs déjà cités supra45 préconisent la création d’un « conseil de mission » constitué d’experts et donc non assujetti aux seuls représentants des actionnaires, ni à toutes les parties prenantes. Il faudrait préciser ses moyens et ses pouvoirs et notamment sa saisine par AG ou par le CA ainsi que la communication de son rapport. Consulté sur toute décision portant sur les actifs ou les charges liées à l’OSE, il évaluerait les risques pour l’entreprise à entreprendre ou à continuer un OSE. L’abandon de l’OSE dans les statuts pourrait aussi lui être demandé pour consultation mais dans toutes les hypothèses, il paraît normal que l’actionnaire garde le dernier mot en tant que responsable du risque qu’il prend.

Reste que pour intéresser les actionnaires à une démarche RSE ou OSE, le meilleur moyen consiste à leur montrer dans un rapport de gestion l’intérêt financier qui existe à la mener. C’est donc un document plus mathématique que littéraire qui doit être établi sauf pour les démarches pro-bono bien sûr. Par exemple, CMS Francis Lefebvre Avocats porte ainsi une action de mécénat de compétences. Hormis ce cas, un document soumis aux actionnaires doit pouvoir évaluer le coût et le profit généré par les décisions prises dans le cadre OSE par rapport aux charges et produits d’exploitation courants. Seule une vision financière associée à une évaluation de l’image de l’entreprise46 aux gains de parts de marché est de nature à motiver l’actionnaire non « militant ». La notion de résultat comptable qualifiant la performance47 de l’entreprise devra s’élargir à la prise en compte d’indicateurs très variés : qualité du produit et du service, mobilisation des agents, performance du processus de fabrication, productivité des moyens de production, satisfaction de la clientèle, compliance face aux règles juridiques. À la performance comptable objective s’ajoute une vision non comptable et subjective car le concept possède autant de significations qu’il existe de parties prenantes qui l’utilisent. Incontestablement, la performance passe d’un état48 « outil de mesure » à un état « outil de management ». Le juriste en possession de ces éléments fournis par le tableau de bord général de la firme pourra les utiliser pour établir la preuve d’un processus de décision conforme ou non à l’intérêt social de l’entreprise.

II – Un texte plus ambitieux qu’il n’y paraît

A – Un nouveau capitalisme

1 – Entreprise à mission

L’entreprise à mission n’est pas un concept nouveau. Des exemples historiques illustrent la situation. Ainsi Carl Zeiss Stiftung (Allemagne 1896) est un atelier d’optique et de mécanique de précision avec utilisation d’une fondation comme actionnaire des ateliers. La mission de l’entreprise est définie dans la constitution de la fondation au sein de l’article premier49 où l’on relève l’intérêt prononcé pour les collaborateurs et des devoirs sociaux plus élevés que ceux tenant aux seuls propriétaires. L’intérêt pour le développement du bassin d’emploi, dirait-on aujourd’hui, y est aussi indiqué.

Un autre exemple ancien concerne le groupe privé propriétaire des chaînes de grands magasins « John Lewis » et de supermarchés « Waitrose » (John Lewis Partnership – Royaume-Uni 1929). C’est ici la création d’un trust50 pour permettre la mise en place d’une distribution de dividendes aux salariés et la mise en place d’une gouvernance organisée entre le trust et le partnership pour favoriser outre le partage des bénéfices, le partage de l’information et du pouvoir de décision.

Des exemples contemporains. Plus récemment, Kepler’s (Californie) se présente comme un modèle hybride de librairie lancé à la suite de la révolution numérique et la concentration des librairies ayant engendré la fermeture de Kepler’s Books. La technique consiste dans l’utilisation de la Flexible purpose corporation pour abriter la librairie. L’objectif de la FPC est de permettre à la communauté des lecteurs, c’est-à-dire les clients, de devenir actionnaires de la librairie. L’actionnariat par les clients suppose un réel intérêt de la part de la clientèle pour un modèle unique, voire un intérêt dans l’ordre de l’affectif, et donc pour l’absence de produits de substitution, éléments assez rares en général. La Flexible purpose corporation montre que les associés peuvent requalifier l’objet de leur entreprise et étendre l’objet social de la société mais nul besoin de ce type de société pour pouvoir modifier son objet social en France sauf à respecter les procédures internes (AGE) et de publicité.

Give something back (Californie) réalise la commercialisation de fournitures de bureau à un prix compétitif avec la volonté de redistribuer une part importante des bénéfices à des associations caritatives. C’est l’une des premières entreprises à avoir utilisé la forme sociale de Benefit corporation instaurée en Californie. La mission de l’entreprise s’exerce à travers cette structure juridique aux buts généreux51.

En France, une entreprise comme Nutriset SAS précise dans ses statuts sous un article intitulé « Objet social étendu », ses engagements. Ceux-ci ne contiennent finalement que des développements assez évidents quant à son objet social pour une entreprise dont l’activité est la conception, la réalisation et la commercialisation de produits agroalimentaires à utilisation spécifique, destinée notamment à l’aide alimentaire52. Là où l’intérêt pour une mission est remarquable est l’inscription dans les statuts de l’engagement à « pondérer la prise de risque avec une gestion stricte et cohérente tout en étant acteur de la société civile » (art. 2 bis). Cette idée très générale n’est toutefois pas expliquée.

Sans doute plus adaptée au marché et à ses exigences, la forme de la société coopérative d’intérêt collectif paraît être une solution plus saine que la SAS. Co-conseil53 en est un exemple. L’ambition de ce type d’entreprise est de permettre aux organisations de l’économie sociale et solidaire (ESS) en ayant le besoin, mais n’en ayant pas les moyens, d’avoir accès à des prestations de conseil en stratégie qui leur sont adaptées, de qualité au moins équivalente aux prestations classiques, mais à un prix qui leur est abordable.

2 – Les raisons d’un objet social étendu

Un simple packaging juridique. Ajouter un objet social étendu est une inscription juridique de l’engagement dans une mission sociétale ou environnementale. Cet engagement des actionnaires est ainsi clairement défini, connu et donc opposable. L’engagement est en effet public puisque les statuts sont publiés au greffe et disponibles aussi en interne pour les salariés que cela intéresse. Là, il faut bien prendre en considération que la plupart des salariés viennent chercher un revenu dans leur travail et moins la reconnaissance d’une mission. Il ne faut donc pas attendre des salariés des résultats équivalents à une formation de type team building de l’inscription d’un objet social étendu dans les statuts. Cela favorise néanmoins la nécessité pour chaque coéquipier d’agir au service de la mission entrepreneuriale en ayant l’assurance que les actions ainsi prises seront reconnues. Elles ne seront toutefois pas forcément acceptées si elles apparaissent comme contraires à l’intérêt du salariat. Le syndicalisme français n’est pas prêt à abandonner ses intérêts pour dorer le blason du capitalisme. Au demeurant, l’objet social de l’entreprise est au XXIe siècle ce que le paternalisme était au XIXe. L’idée qui primait alors reste celle qui prévaut aujourd’hui dans le sens où le patronat veut des salariés satisfaits de leur entreprise et consciencieux au travail. Le modèle de l’emploi change avec un objectif identique. Au début du XXe siècle, l’économiste Heinz Potthoff54 élabore une doctrine de la « relation de travail » qui repose sur l’engagement de la personne du salarié envers son entreprise et non sur un échange d’un travail contre un salaire. Les membres de l’entreprise étaient considérés comme formant une association solidaire et le pouvoir de l’employeur résultait de l’adhésion à la communauté. C’est une doctrine du consentement au travail qui repose davantage sur une relation de travail que sur un contrat. Le contrat de travail classique change lui aussi dans le même temps avec à terme la prolifération du contrat de mission. Dans le même ordre d’idées, Siham Hadjam55, fondatrice et CEO de la société Cyconia – plate-forme qui agrège des outils utiles à l’amélioration de la qualité de vie des collaborateurs (QVT) –, relate comment, en conférant à l’objet social de son entreprise la dimension sociale de la RSE, elle a su gagner la confiance des investisseurs.

Une véritable motivation humaniste. Avoir un OSE clairement défini permet à chaque salarié de se sentir concerné sans se perdre dans les enjeux de la responsabilité sociétale en général. Il est difficile de se sentir responsable de l’ensemble des défis environnementaux et sociaux mais il est possible de faire une part du travail à son niveau individuel en renforçant ses convictions personnelles par une identification plus précise.

En externe, inscrire un OSE dans les statuts permet de sécuriser la mission en cas d’ouverture du capital à des investisseurs extérieurs. Sans même cela, c’est compter sur la capacité de la firme à collaborer avec des partenaires qui pourraient être suspicieux face à une société dominante sur son marché et en forte progression.

La dimension sociale de l’entreprise renvoie à l’existence d’autrui mais le caractère libéral de la firme souligne l’aspect individuel de la liberté d’entreprendre. La catégorie des droits sociaux figure donc nécessairement parmi les droits fondamentaux. La réécriture des articles du Code civil présente une dimension pratique du concrétisme56 en droit. La norme posée par le texte n’existe pas encore (OSE) et il revient aux acteurs sociaux de la mettre en œuvre. Un processus de concrétisation de l’objet social étendu se diffuse à partir du texte, sanctionné par les acteurs sociaux et le juge. L’OSE réclame tout à la fois le respect par les acteurs et la protection de la part de l’État. La recherche de l’équilibre des intérêts des parties prenantes sera certainement amenée à affirmer un principe de proportionnalité dans la protection des intérêts : la limitation du droit d’une partie pourra protéger d’autres intérêts si elle est nécessaire, appropriée et proportionnelle au but recherché. Un exemple permettra de rendre compte de la situation. La revendication des droits sociaux fondamentaux57 par les organisations syndicales peut prendre appui sur la loi Pacte pour les défendre avec plus d’acuité.

La recherche d’un leadership professionnel générateur de maintien de la productivité. Les entreprises intègrent déjà les démarches RSE et donc les parties prenantes et les questions environnementales dans leurs actions mais l’idée est qu’il faut réformer le capitalisme pour pouvoir le sauver. Les investissements dans les activités polluantes, non éthiques ou peu sociales risquent de devenir plus faibles que par le passé. En même temps, la conscience des salariés et des consommateurs est un élément puissant qui pousse les marchés vers d’autres démarches que le profit à court terme. Une nouvelle gouvernance dans l’entreprise se fait jour en conséquence58. La certification dite B Corp59 ne se cache pas d’être « the most powerful way to build credibility, trust, and value for your business ». La fidélisation du consommateur et du salarié liés par des valeurs communes de respect social constitue un gage de pérennité de l’entreprise. Les grandes entreprises semblent redécouvrir ce que les petites savent depuis longtemps mais il est évident qu’il faudra définir à terme des indicateurs et des outils pour définir les performances financières et non financières des entreprises engagées sur l’OSE et des investisseurs60 qui les accompagnent.

B – L’avenir du nouveau texte

1 – Pour un droit de l’entreprise réflexif et critique

Une réforme holistique. Les objectifs de la loi Pacte consistent à placer les entreprises au centre de la société afin de mieux associer les salariés aux résultats et surmonter les freins à la croissance des entreprises. En ces termes, nul doute que la volonté du législateur est forte et l’autorité constitue donc le foyer d’émergence des valeurs. Le devoir être du texte a une importance considérable. Il s’agit moins d’un commandement appuyé de menaces que de fournir aux parties prenantes des instruments pour réaliser leurs objectifs61. La norme inscrite dans la loi fait désormais référence aux faits sociaux alors que les articles modifiés du Code civil n’étaient jusque-là que des normes positivistes.

La réforme semble avoir pris conscience que l’entreprise constitue un ordre juridique en soi. L’entreprise, en tant qu’organisation humaine, est en soi un ordre juridique selon plusieurs auteurs62 : « Au-delà du fonctionnement imbriqué des contrats, on peut donc percevoir l’entreprise comme l’ensemble des relations interindividuelles (notamment de pouvoir) impliquées par les contrats qui lui servent de support en droit positif. L’entreprise peut alors être perçue comme l’auto-organisation du pouvoir exercé pour assurer son fonctionnement. Si l’entreprise ne peut exister que par le droit positif, sans lequel elle ne pourrait disposer des droits de propriété et passer les contrats qui lui servent de support, et qui lui donnent le pouvoir de mener son action, elle est beaucoup plus que ce qu’en dit le droit de chaque État ». Le contrôle du pouvoir de l’entreprise se fait par l’État qui la laisse libre de l’exercer sur l’environnement économique, notamment mondial, à condition de respecter les normes sociales et écologiques qu’il souhaite promouvoir par des actions internes aux entreprises. Cela évite à l’État de reconnaître un autre ordre juridique que le sien. Il crée par la loi les moyens de l’auto-développement du bien commun au cœur de la firme – dans sa structure de pouvoir décisionnel – pour enclencher un processus en interaction constante avec son environnement social et écologique. Sous la pression des problèmes sociaux et des enjeux écologiques, l’État est amené par fautes de moyens et par idéologie libérale, à externaliser le respect du bien commun vers un autre ordre juridique. Il le surveille sans le reconnaître par la production de normes et l’obligation de s’y référer en interne dans le processus décisionnel de l’entreprise63.

La portée expérimentale du nouveau texte. Les théories des parties prenantes n’ont pas jusqu’ici une dimension pratique64 à laquelle le nouveau texte leur ouvre l’accès et un positivisme juridique65 trop strict s’opposerait sans doute à l’immixtion du champ disciplinaire de la gestion d’entreprise. La difficulté est donc grande pour aboutir à une portée juridique expérimentale de la nouvelle écriture des articles du Code civil. L’introduction de l’objet social étendu dans la loi n’est qu’un levier. Un équilibre est alors à trouver vers un droit de propriété moins exclusif et pourtant sacré66. L’actionnaire veut voir sécurisés la propriété et le pouvoir qu’il détient sur celle-ci. Les parties prenantes apparaissent donc immédiatement comme des offenseurs avec lesquels les managers doivent négocier. L’instrument de la négociation volontaire semble plus avantageux que les stratégies d’obstruction systématique ou de l’apparence d’un consensus, d’autant que la lame de fond est forte67 pour intégrer à l’entreprise les dimensions de maintien de l’emploi, de renoncement à des techniques polluantes et pour une gouvernance partagée. Pour ce faire, le droit des sociétés doit plutôt favoriser l’engagement des actionnaires sur le long terme : politique de recherche et développement défiscalisée, favoriser les bénéfices non distribués mais réinvestis, pénalisation du dividende trop élevé, protection de la majorité de contrôle agissant pour la pérennité de l’entreprise, stocks options moins élevés, intéressement des salariés et partage de la valeur ajoutée, transparence sur les écarts de rémunérations. Sur tous les sujets, la norme légale peut s’imposer d’autorité. Et là où le droit de la puissance publique ne veut pas s’imposer pour des raisons politiques, le droit négocié peut jouer son rôle. Peut-être paradoxalement, la théorie du contrat retrouve-t-elle alors tout son intérêt.

La force du droit de propriété est atteinte dans son pouvoir mais pas dans son existence. Y aurait-il abandon de la sanctuarisation du droit de propriété avec la rédaction nouvelle des articles du Code civil ? Ou plus simplement, subordination du droit de propriété au bien commun ? En allant dans le même sens qu’un auteur68, on rappellera que la rédaction de l’article 544 du Code civil pose déjà une limite au droit de propriété en permettant qu’il soit limité par l’usage des lois, c’est-à-dire l’expression du bien commun. Peut-être sommes-nous en train de redécouvrir ce que l’écriture de Portalis portait déjà en donnant une signification sociale et écologique au droit de propriété. À l’époque où la propriété immobilière était dominante, les limites sociales admises au droit de propriété ont porté sur les servitudes, les mines ou les forêts. Maintenant que la fortune mobilière est importante, il devient nécessaire d’en assujettir l’usage au bien commun dans un contexte de vie dégradé par les pollutions et l’enrichissement sans cause économique. Tant qu’il ne s’agit pas de privation de la propriété de l’action, il ne saurait y avoir indemnisation et tant que l’action s’investit dans le bien commun, il ne saurait y avoir expropriation. C’est dans ce retour aux racines fondamentales de la fonction sociale du droit de propriété que se situe le débat actuel. Le Code civil s’inscrit dans le contexte plus large du contrat social.

La nouvelle écriture de deux articles du Code civil est une simple lutte contre la pleonexia69 financière. Celle-ci est le désir pour l’actionnaire de prendre toujours plus que ce qui lui revient et de rejeter le moins lorsque l’objet économique se dégrade. Une analyse fonctionnelle de la propriété financière se fait jour au détriment d’une analyse statique. En conséquence, ce qui rapporte le plus à l’entreprise immédiatement (décision de coupure dans les coûts augmentant l’excédent brut d’exploitation par exemple) pourrait être estimé préjudiciable à l’intérêt d’une partie prenante (fournisseur dans l’exemple) et justifier une action en responsabilité (sauf insuffisance brute d’exploitation au moment où la décision est prise).

La principale caractéristique des actions de sociétés réside dans les droits qui y sont attachés à savoir, le droit d’être informé de la situation de l’entreprise, le droit de participer aux votes au sein des assemblées et le droit de recevoir des dividendes et de participer aux bénéfices mis en réserve (attributions gratuites et boni de liquidation). L’alignement des droits des salariés sur ceux des actionnaires est déjà entrepris de longue date sur ces différents points. L’information financière des parties prenantes est aussi assez généralement pourvue pour peu que l’information soit recherchée ou expertisée. Dans ce contexte, l’actionnaire a peu à craindre d’une réforme car il reste à la base de la théorie de l’entreprise, c’est-à-dire comme maître du cycle d’investissement. Son pouvoir est seulement atteint dans la portion prélevée sur le cycle d’exploitation.

2 – La fonction sociale de l’entreprise

De la réparation des dommages à l’internalisation des risques. La prise en compte des dommages causés par l’entreprise aux parties prenantes devient une internalisation des contraintes, et donc une prévention des dommages causés par la firme. Issue d’une réflexion des dirigeants ex ante, la décision de gestion présentant un risque social ou écologique n’est plus le constat ex post d’un dommage. On notera toutefois que l’entreprise prévoyante aura toujours pris le soin de provisionner les risques en comptabilité.

Véritable ordre juridique au sein d’un ordre plus grand, l’entreprise sociale mérite un contenu. La firme doit être capable de produire ses propres règles économiques et sociales, pas seulement dans leur rapport avec le marché mais aussi dans leur rapport avec la société globale en intégrant la dimension du bien commun. La corégulation70 ou l’auto-régulation en droit instaure un dialogue entre les parties prenantes et coproduit des codes de conduite. Comme l’indique le CISE71, elle « fait peur aux entreprises, qui perdent une partie de leur pouvoir et de leur contrôle sur leur production. C’est pourquoi les entreprises qui se sont engagées dans des initiatives multipartites sont souvent les multinationales les plus avancées dans le domaine de la responsabilité sociale ». Les applications de la corégulation concernent par exemple les fournisseurs de la firme pour un approvisionnement responsable en termes écologique et de respect des droits sociaux. Ceux-ci concernent alors les normes du travail, la santé et la sécurité au travail et l’équité salariale. La corégulation et l’autorégulation visent la responsabilisation72 des entreprises. L’État compte moins légiférer pour s’en remettre au marché en influençant la stratégie des entreprises par l’impact sur le consommateur de labels du commerce équitable, l’information par des lanceurs d’alerte, la création de fonds éthiques ou d’investissements socialement responsables73 ou encore l’existence de chartes de bonne conduite. De cette façon, la firme intègre dans son propre ordre de fonctionnement ce que le droit aurait pu lui imposer d’autorité mais avec la garantie d’une souplesse plus grande et d’une malléabilité au changement. Toutes choses que la loi ou le règlement ne peuvent faire qu’avec une débauche de moyens de réflexion (élaboration des textes) et de contrôle (inspections).

La contrainte par la loi demeure néanmoins dans des hypothèses où le droit international fait obstacle à l’application de règles responsables. En réaction à la catastrophe du Rana Plaza – un immeuble abritant des ateliers de confection textile dont l’effondrement avait provoqué la mort de près de 1 200 personnes –, la loi n° 2017-39974 a instauré un devoir de vigilance des sociétés-mères et des entreprises donneuses d’ordre. Transposée à de plus petites entreprises, les règles de cette loi donnent un aperçu du processus de réflexion dans laquelle une firme peut s’engager à son échelle pour inclure la dimension sociale dans ses décisions de gestion. La loi demande de s’interroger sur l’identité des risques et aussi d’évaluer régulièrement la situation des filiales et des sous-traitants. Selon les termes d’un auteur75, « ce droit manifeste la montée en puissance d’une logique d’activation de l’entreprise dans le champ normatif, qui plutôt que la sanction et la réparation a posteriori, cherche à faire émerger une norme par laquelle l’entreprise s’engage à adopter un comportement conforme à certains impératifs sociaux ».

De quelques conséquences non exhaustives. La stratégie de corégulation décidée avec la nouvelle écriture des articles du Code civil déplace l’engagement de la responsabilité de l’entreprise du dommage causé par une décision de gestion vers les manquements dans le processus de gestion qui ont abouti à cette même décision.

L’objet social étendu suppose donc que l’exercice de l’activité profitable se pénètre de préoccupations sociales. L’impact des accords nationaux interprofessionnels76 sur les démarches de responsabilité sociale des entreprises rend compte du phénomène. De même, l’ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 201777 relative au renforcement de la négociation collective renforce la négociation collective directement au niveau de l’entreprise quelle que soit sa taille. « Il s’agit de dispositifs juridiques voués à une approche stratégique et gestionnaire des relations sociales, dont la particularité est qu’elles ne sont plus assumées par l’employeur seul au risque du contentieux, mais contractualisées avec les salariés »78.

La participation des salariés à la gestion de l’entreprise a le mérite d’être un principe constitutionnel79, et donc se présente comme un argument d’autorité juridique, mais aussi au cœur de la dimension sociale de la firme en lien avec une de ses parties prenantes majeures. La réserve spéciale de participation permet aux salariés d’une entreprise de prendre part financièrement aux résultats de celle-ci. Les entreprises de plus de 50 salariés ont l’obligation de constituer une telle réserve. En deçà de 50 salariés, la constitution de la réserve n’est pas obligatoire, mais l’entreprise peut librement en instaurer le système. Le calcul de la participation est fonction du total des salaires, du montant des capitaux propres, de la valeur ajoutée dégagée et du résultat fiscal. Nul ne doute que l’objet social de l’entreprise constitue un fort encouragement à la réserve de participation pour tous.

Reste que toutes les entreprises jouent leur activité sur un marché en concurrence. L’avantage compétitif d’un comportement RSE de l’entreprise ne va pas de soi80 et peut même conduire à la négociation d’accords inter-entreprises pour la production de normes décidées par les firmes et finalement protectrices.

Conclusion

Le nouveau texte est encore très loin de fournir les bases d’une théorie juridique de l’entreprise. La définition de l’entreprise est inspirée du contrat ou de l’institution81. La conception contractuelle fonde le droit des sociétés et réussit en matière de création de la société ou pour définir la responsabilité patrimoniale des associés. Le contrat de travail du salarié ajoute à cet aspect. La conception institutionnelle corrige les droits des associés et place l’intérêt de la société avant celui des associés. L’entreprise est ici une « organisation », c’est-à-dire un lieu de contact entre salariés, détenteurs de capital et dirigeants. L’objet social de l’entreprise rend compte du sens que la communauté veut donner à son action mais ne donne pas encore les outils de la cohérence pour la construire. C’est sans doute pour cette raison qu’on peut se poser la question de savoir si l’OSE ou la RSE sont un effet de mode avec poudre aux yeux ou une révolution managériale82.

La notion de responsabilité de la firme envers les parties prenantes est fondée sur le droit de regard de ces diverses parties prenantes sur l’activité entrepreneuriale. Ce droit est limité jusqu’à présent par des règles imposées en fonction des situations observées et des contrats en cours mais avec un OSE, ce droit devient généraliste et global pour toute partie prenante même hors cadre d’une relation organisée avec la firme. Une autre dimension apparaît dans le même temps : suffit-il de poser la responsabilité en termes de réparation d’un préjudice causé à l’environnement ou à la société globale ou doit-on poser la responsabilité de prévention pour risques ?

Le rôle central du consommateur reste primordial car la principale fonction d’une entreprise est de créer de la valeur en produisant les biens et services demandés par la société. Un consommateur mieux formé et mieux informé, ayant des objectifs éthiques de surcroît, ne peut pas laisser le management indifférent. Si certaines firmes se sont laissées aller à simplement « vernir » leurs activités avec du sponsoring, du mécénat ou du marketing tendance, d’autres ont vraiment pris en main leur objet social étendu dès la conception de leurs produits (fabrication écologique, innovations sociales ou technologiques, distribution économe en CO2, etc.). Le problème est pour ce qui les concerne de mesurer leur action, de faire connaître leur avantage social et de rester dans des coûts égaux à leurs concurrents.

Notes de bas de pages

  • 1.
    Husson S., « Ces articles du Code civil qui enflamment le patronat », La Croix, 14 déc. 2017.
  • 2.
    Ce terme peut paraître inapproprié mais il est destiné à bien marquer le fait qu’une entreprise respecte des schémas d’organisation et de fonctionnement tournés vers le maintien de son existence et de sa prospérité.
  • 3.
    Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises.
  • 4.
    C. civ., art. 1833 et C. civ., art. 1835.
  • 5.
    V. dans ce sens, blog de Bruno Dondero, agrégé des facultés de droit (droit privé) et professeur à l’université Paris 1 (Panthéon-Sorbonne) : « Les entreprises avaient une “raison d’être”… et elles ne le savaient pas ! », 10 mars 2018.
  • 6.
    Bouzou N., « C’est la pire des déresponsabilisations ! », L’opinion, 13 sept. 2018.
  • 7.
    Danet J.-B., Objet social de l’entreprise : « Les juges vont pouvoir se mêler des statuts », l’Opinion, 16 mars 2018.
  • 8.
    Koenig G., « Peu importe que l’on entreprenne à des fins égoïstes ou altruistes », l’Opinion, 22 juin 2018.
  • 9.
    Nouvel objet social de l’entreprise : le gouvernement pourrait frapper fort : Hatchuel A., « Tel qu’il est organisé, le capitalisme ne répond plus aux aspirations des travailleurs », l’Opinion, 18 déc. 2017.
  • 10.
    Hatchuel A., « Tel qu’il est organisé, le capitalisme ne répond plus aux aspirations des travailleurs », l’Opinion, 18 déc. 2017 : « Si le dirigeant d’une entreprise d’énergie souhaite se désengager du charbon, pour favoriser d’autres énergies, et que cela fait baisser le cours de l’action, il aura du mal à le faire, car les actionnaires peuvent lui en tenir rigueur. Alors qu’au final, il favorisera l’intérêt général ».
  • 11.
    Segrestin B., Levillain K., Hatchuel A. et Vernac S., « “L’objet social étendu” : une voie pour réaligner le droit et la théorie des parties prenantes », Finance Contrôle Stratégie, 17 mars 2014, mis en ligne le 27 oct. 2014, http://journals.openedition.org/fcs/1528 ; DOI : 10.4000/fcs.1528.
  • 12.
    Cass. ch. mixte, 16 déc. 2005, n° pourvoi : BICC n° 634, 15 févr. 2006.
  • 13.
    Cass. 3e civ., 16 mars 2011, n° 10-15459 : BICC n° 746, 15 juill. 2011.
  • 14.
    Proposition de loi Entreprise nouvelle et nouvelles gouvernances, v. exposé des motifs, extrait : « L’entreprise, en tant que forme sociale permettant l’organisation collective de la production et de l’innovation, doit être regardée comme un bien commun. Son efficacité participe de l’intérêt général. La juste détermination de ses droits, de ses devoirs, de ses pouvoirs et de sa gouvernance intéresse les salariés et, au-delà, l’ensemble des citoyens ».
  • 15.
    L’État s’arroge le droit de corriger les imperfections du marché en provoquant une « internalisation » des coûts liés aux externalités négatives par la taxation.
  • 16.
    Proposition de loi Entreprise nouvelle et nouvelles gouvernances, art. 8.
  • 17.
    Proposition de loi Entreprise nouvelle et nouvelles gouvernances, art. 9.
  • 18.
    Proposition de loi Entreprise nouvelle et nouvelles gouvernances, art. 11.
  • 19.
    AN, compte rendu intégral de la deuxième séance du vendredi 13 février 2015, discussion du projet de loi Croissance, activité et égalité des chances économiques, extrait :
  • 20.
    M. Tourret, rapporteur : « Est-il cependant raisonnable de procéder, monsieur le ministre, à un tel changement au détour d’un amendement, qui ne présente pas, par ailleurs, de lien direct avec le projet de loi dont nous sommes saisis ? Toucher au Code civil, c’est toucher à la constitution civile de la France, comme le disait le doyen Carbonnier. Les effets juridiques de la modification de l’article 1833 ont-ils été évalués ? Je ne le pense pas. En outre, quel serait l’impact de la nouvelle rédaction sur la notion d’abus de majorité ou de minorité ? Ce n’est pas analysé – la question est pourtant très importante. Par ailleurs, l’élargissement de l’objet social aurait-il des conséquences, au niveau pénal, sur la définition de l’abus de bien social ? Il faudrait à l’évidence étudier ces questions avec soin avant d’envisager d’adopter un tel amendement.
  • 21.
    En outre, il y a une certaine contradiction à affirmer dans la même phrase que l’intérêt de la société est supérieur et qu’il s’exerce par ailleurs dans le respect d’un autre intérêt, fût-ce l’intérêt général. À quoi donc cet intérêt est-il supérieur ? Certainement pas à l’intérêt général ! La rédaction de l’amendement, qui aboutit à ce qu’on appelle une aporie, est sans doute perfectible. Je pense que ses auteurs en conviendront, et je les invite donc à le retirer.
  • 22.
    M. le président. Quel est l’avis du gouvernement ?
  • 23.
    M. Emmanuel Macron, ministre. Même avis ».
  • 24.
    CE, avis consultatif sur le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, 19 juin 2018, loi Pacte, séance du jeudi 14 juin 2018, nos 394599-395021.
  • 25.
    Schmidt D., Les droits de la minorité dans la société anonyme, 1970, Sirey, p. 69.
  • 26.
    Tchotourian I., Doctrine de l’entreprise et école de Rennes : La dimension sociétale, politique et philosophique des activités économiques affirmée – Présentation d’un courant de pensée au service de l’homme, colloque international « L’entreprise dans la société du XXIe siècle » organisé par l’université de Rennes 1, l’Institut de gestion de Rennes (IGR) et le CNRS, 27 mai 2011.
  • 27.
    Paillusseau J., La SA, technique d’organisation de l’entreprise, thèse, 1967, Sirey.
  • 28.
    CA Paris, 22 mai 1965, Fruehauf – France : JCP 1965, 14274 bis, concl. Nepveu ; D. 1968, p. 147, note Contin R.
  • 29.
    Les motifs de l’arrêt sont signifiants à cet égard, v. aussi Contin R., « L’arrêt Fruehauf et l’évolution du droit des sociétés », D. 1968, chron., p. 45.
  • 30.
    Concl. Poussière sous CE, 5 janv. 1965, n° 62099 : DF 1970, n° 3 bis, p. 23.
  • 31.
    Dans l’hypothèse où le montant refacturé est significativement inférieur au coût de revient du salarié prêté, la mise à disposition réalisée dans les conditions de l’article L. 8241-3 du Code du travail ne sera ni remise en cause sur le fondement de l’acte anormal de gestion, ni qualifiée de libéralité susceptible d’être assimilée à un revenu distribué, BOI-BIC-CHG-40-40-20 : http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/541-PGP.html ?identifiant=BOI-BIC-CHG-40-40-20-20180404.
  • 32.
    CE, avis consultatif sur le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, 19 juin 2018, loi Pacte, séance du jeudi 14 juin 2018, nos 394599-395021.
  • 33.
    C. civ., art. 1835.
  • 34.
    CE, avis consultatif sur le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, 19 juin 2018, § 103. Le Conseil d’État relève que le projet de loi n’assortit le principe de gestion diligente et raisonnable d’aucune sanction autre que celle relevant, le cas échéant, des mécanismes de droit commun de la responsabilité contractuelle ou délictuelle, et notamment pas répressive. Le caractère général de l’obligation ne méconnaît pas les exigences découlant de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 (Cons. const., 23 mars 2017, n° 2017-750 DC, loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre).
  • 35.
    C. civ., art. 1844-10, al. 3 ; C. com., art. L. 235-1, al. 2.
  • 36.
    Didier P., « Brèves notes sur le contrat-organisation », in L’avenir du droit. Mélanges en l’honneur de François Terré, 1999, Dalloz-PUF-Éditions du Jurisclasseur, p. 635-642.
  • 37.
    CE, avis, nos 394.599 et 395.021, séance du jeudi 14 juin 2018, nos 93 et s.
  • 38.
    Cons. const., 4 août 2016, n° 2016-737 DC, loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, cons. 30 ; Cons. const., 13 août 2015, n° 2015-718 DC, loi de transition énergétique, cons. 19 ; Cons. const., 8 avr. 2011, n° 2011-116 QPC, M. Michel Z. et a., cons. 5.
  • 39.
    Étude impact NOR ECOT1810669L/Bleue-1, p. 535.
  • 40.
    V. not. C. com., art. L. 223-22 et C. com., art. L. 225-251.
  • 41.
    C. civ., art. 1848, pour les sociétés civiles ; C. com., art. L. 221-4 et, sur renvoi de l’article L. 223-18, alinéa 4, pour les sociétés en nom collectif et les SARL.
  • 42.
    C. com., art. L. 241-3 et C. com., art. L. 242-6.
  • 43.
    Segrestin B., Levillain K., Hatchuel A. et Vernac S., « “L’objet social étendu” : une voie pour réaligner le droit et la théorie des parties prenantes », Finance Contrôle Stratégie, 17 mars 2014.
  • 44.
    Maintien du cours de l’action et de sa profitabilité.
  • 45.
    Droit de prendre toutes les décisions concernant l’utilisation des actifs.
  • 46.
    Université d’été du Medef, Jouy-en-Josas, Novethic, 27 août 2018. Parmi les sujets abordés, le rôle de l’entreprise dans la société. Un débat de fond que le Medef doit « accepter », selon son nouveau président Geoffroy Roux de Bézieux.
  • 47.
    Propos de Geneviève Férone Creuzet rapportés par Sébastien Pommier, « Les trous noirs de la loi Pacte », L’express L’expansion, 29 mai 2018.
  • 48.
    Cela concerne les EIP (entités d’intérêt public) à savoir toutes les entreprises dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé, ainsi que les banques et les compagnies d’assurance. Les PME (petites et moyennes entreprises) ne sont pas soumises à cette nouvelle obligation. Sont considérées comme PME conformément à la définition établie dans la législation européenne (recommandation n° 2003/361 de la Commission) les entreprises autonomes de moins de 250 salariés, et de moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires ou de moins de 43 millions d’euros de total du bilan.
  • 49.
    Segrestin B., Levillain K., Hatchuel A. et Vernac S., « “L’objet social étendu” : une voie pour réaligner le droit et la théorie des parties prenantes », Finance Contrôle Stratégie, 17 mars 2014.
  • 50.
    V. Magali Sartre, directrice du développement durable du groupe Bel, qui explique comment la gouvernance a un rôle clé à jouer pour placer la politique RSE au cœur du business modèle, YouTube, EFL, 25 sept. 2018.
  • 51.
    La performance définie en terme financier ne suffit plus vu sa dimension court-termiste de maximisation d’un profit matérialisé par les dividendes versés. V. tableau de bord prospectif de Kaplan et Norton, Harvard Business Review, 1992. V. aussi Salgado M., « La performance : une dimension fondamentale pour l’évaluation des entreprises et des organisations », 2013.
  • 52.
    Salgado M., « La performance : une dimension fondamentale pour l’évaluation des entreprises et des organisations », 2013.
  • 53.
    « The objects of the Carl Zeiss Stiftung are:
  • 54.
    A. within the Works
  • 55.
    1. To cultivate the branches of precise technical industry, which have been introduced into Jena by the Optical Works and the Glass Works with the co-operation of the founder of the Stiftung, and thereby maintain the said industrial establishments under an impersonal title of proprietorship; that is to say:
  • 56.
    2. Permanent solicitude for the economic security of the above undertakings as well as for the conservation and further development of their industrial labour organisation – as a source of subsistence for a large number of people and as an efficient member in the service of scientific and practical interests;
  • 57.
    3. To fulfil higher social duties than personal proprietors would permanently guarantee, towards the totality of co-workers in its employ, in order to better their personal and economic rights.
  • 58.
    B. outside the Works
  • 59.
    1. To promote the general interests of the branches of precise technical industry as indicated above not only within the sphere of action proper of the Stiftung’s Works but also outside of it ;
  • 60.
    2. To take part in organisations and measures designed for the public good of the working population of Jena and its immediate neighbourhood;
  • 61.
    3. To promote the study of natural and mathematical sciences both as regards research and teaching (…) ».
  • 62.
    La mission est précisée dans le deed of settlement du trust :
  • 63.
    « 1. The two Settlements in Trust made by John Spedan Lewis in 1929 and 1950 established a business known as the John Lewis Partnership, to be owned in trust for the benefit of its members, who are Partners from the day they join. » (Constitution de John Lewis Partnership, Part. 1, 2014) « 1. The Partnership’s ultimate purpose is the happiness of all its members, through their worthwhile and satisfying employment in a successful business. Because the Partnership is owned in trust for its members, they share the responsibilities of ownership as well as its rewards – profit, knowledge and power. » (Constitution de John Lewis Partnership, Part. 2, 2014).
  • 64.
    « Serve and delight our customers so they can thrive », « give time and profit in order to strengthen our community and spread hope », « Grow employees and help them realize their full potential », and « inspire others to give, serve and grow ».
  • 65.
    On y trouve tous les poncifs tels que « être la référence sur les questions de nutrition », « mettre tout en œuvre pour honorer les besoins des acteurs de l’aide humanitaire », « la remise en cause comme outil de performance », « entretenir sa culture d’entreprise », « conduire des stratégies pionnières ».
  • 66.
    Société créée sous l’impulsion de quatre cabinets de conseil en stratégie (Algoé, Colombus Consulting, Kea&Partners et Weave) et avec le soutien de Syntec Conseil en Management, dans le but d’augmenter leur impact socio-économique en développant un modèle de co-investissement avec des investisseurs sociétaux.
  • 67.
    Cité par Supiot A., Critique du droit du travail, 1994, PUF, Les voies du droit et Hunout P., L’entreprise et le droit du travail : une comparaison franco-allemande, 1993, CIRAC.
  • 68.
    V. YouTube, EFL, « La RSE en actions : épisode 2 », 25 sept. 2018.
  • 69.
    La thèse principale du concrétisme consiste à affirmer que seules les choses existent.
  • 70.
    Parlement européen, Document de travail, Droits sociaux fondamentaux en Europe, Direction générale des études, févr. 2000.
  • 71.
    V. par ex. Danone avec son projet « Une personne, une voix, une action » présenté à l’AG actionnaires du 28 avril 2018 et consistant à remettre une action par salarié avec un dividende affecté d’un multiplicateur.
  • 72.
    B Corps are accelerating a global culture shift to redefine success in business and build a more inclusive and sustainable economy. Le label B Corp est accordé par l’ONG B Lab après un audit.
  • 73.
    V. pour un exemple le rapport de la commission ESG (Environnemental, social et gouvernance) de l’AFIC (Association française des investisseurs pour la croissance) à propos du dialogue entre investisseurs et gérants, oct. 2017, qui donne la définition de quelques indicateurs.
  • 74.
    En référence à Hart H.L.A., Le concept de droit, 2006, Publications des facultés universitaires Saint-Louis ; La Torre M., « Le modèle hiérarchique et le Concept de droit de Hart », Revus, 21, 2013, p. 117-139 ; Panaccio C.-M., « H.L.A. Hart : l’Homme et le Philosophe », Revue interdisciplinaire d’études juridiques, 2007/2, vol. 59, p. 221-241.
  • 75.
    Robé J.-P., « L’entreprise en droit », Droit et société 1995, n° 29, La médiation, p. 117-136 ; Les amis de l’École de Paris, L’entreprise oubliée par le droit, séance du 1er juin 2001.
  • 76.
    Teubner G., Le Droit, un système autopoïétique, 1993, PUF.
  • 77.
    Il suffit pour s’en convaincre de lire l’excellent article de Jean-Pascal Gond et Samuel Mercier, « Les théories des parties prenantes : une synthèse critique de la littérature », 25 févr. 2003, in Researchgate ou Décider avec les parties prenantes, 2006, La Découverte, « Recherches », p. 157-172.
  • 78.
    Le positivisme désigne le « principe méthodologique de pureté d’après lequel une science véritable du droit ne saurait être encombrée de concepts, lois ou données venus d’autres champs disciplinaires, de provenance philosophique, morale, économique ou politique », définition proposée par Olivier Jouanjan, « Une alternative à l’opposition positivisme/jusnaturalisme ? », in Rousseau D. et Viala A. (dir.), Le droit, de quelle nature ?, 2010, LGDJ, Grands colloques.
  • 79.
    DDHC 1789, art. 17.
  • 80.
    V. par ex. Segrestin B. et Hatchuel A., Refonder l’entreprise, févr. 2012, Seuil, Rep. Idées.
  • 81.
    Millet L., Contribution à l’étude des fonctions sociale et écologique du droit de propriété, thèse, 2015, Paris I Panthéon-Sorbonne, p. 347 et s. Le caractère non absolu du droit de propriété par rapport au droit romain est abordé p. 365 et s.
  • 82.
    Pour un exemple sociologique, v. Mauss M., Sociologie et Anthropologie, 1991, PUF.
  • 83.
    L’Accord interinstitutionnel « Mieux légiférer » donne au § 18 et s. les définitions de la corégulation et de l’autorégulation au niveau européen, 2003/C 321/01, JO n° C 321, 31 déc. 2003, p. 1-5.
  • 84.
    Centre international de solidarité ouvrière, Canada, voir le site à la page CQCAM.
  • 85.
    Berns T., Docquir P.-F., Frydman B., Hennebel L. et Lewkowicz G., Responsabilités des entreprises et corégulation, 2007, Bruylant.
  • 86.
    L’investissement socialement responsable (ISR) consiste à investir dans des fonds d’investissement qui prennent en compte, en plus des critères financiers classiques, le comportement de l’entreprise dans le domaine social et environnemental.
  • 87.
    Cette loi crée l’obligation, pour les sociétés par actions employant, en leur sein ou dans leurs filiales, au moins 5 000 salariés en France ou au moins 10 000 salariés dans le monde, d’établir un plan de vigilance, de le mettre en œuvre et de le publier.
  • 88.
    Francoual P., L’entreprise sociale, essai de renouvellement des théories de l’entreprise à la croisée du droit des groupements et du droit du travail, thèse, déc. 2017, université Toulouse 1, p. 221.
  • 89.
    Caron M. et Regulski C., La responsabilité sociale de l’entreprise. Responsabilité sociale des entreprises et contractualisation des relations de travail. Réflexions à partir de trois accords nationaux interprofessionnels français, 2011, Presses universitaires du Septentrion, p. 181-193.
  • 90.
    V. le rapport au président de la République relatif à l’ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective : JO n° 0223, 23 sept. 2017, texte n° 28. « Faire confiance aux entreprises et aux salariés en leur donnant la capacité d’anticiper et de s’adapter de façon plus simple, rapide et efficace, grâce à la négociation collective ».
  • 91.
    Francoual P., L’entreprise sociale, essai de renouvellement des théories de l’entreprise à la croisée du droit des groupements et du droit du travail, thèse, déc. 2017, université Toulouse 1, p. 235.
  • 92.
    Odoul-Asorey I., Droits fondamentaux et contentieux social. Le principe de participation des travailleurs devant le Conseil constitutionnel, colloque, 18 mars 2016, Institut du travail de Bordeaux.
  • 93.
    Quairel-Lanoizelée F., La responsabilité sociale des entreprises est-elle-soluble dans la concurrence ?, 2011, Presses universitaires du Septentrion, p. 129-149.
  • 94.
    V. par ex. Lhuilier G., « Le “paradigme” de l’entreprise dans le discours des juristes », Annales, année 1993, 48-2, p. 329-358.
  • 95.
    Capron M. et Quairel-Lanoizelée F., Mythes et réalités de l’entreprise responsable, 2004, La Découverte.
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