Le délai de la garantie décennale est un délai de forclusion et non de prescription
Par une importante décision qui aura les honneurs du rapport annuel, la troisième chambre civile de la Cour de cassation se prononce sur les conséquences, notamment au regard de son interruption, de la nature du délai de garantie décennale.
Se plaignant de désordres dans la réfection de leur terrasse, deux époux obtiennent du constructeur auquel ils avaient confié ces travaux un accord de l’entreprise pour réaliser les travaux de réparation.
Les désordres persistant, ils assignent en indemnisation le constructeur qui appelle en garantie son assureur.
Selon l’article 1792-4-3 du Code civil, en dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux.
Aux termes de l’article 2220 du même code, les délais de forclusion ne sont pas, sauf dispositions contraires prévues par la loi, régis par le présent titre et aux termes de l’article 2240, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrit interrompt le délai de prescription.
En alignant, quant à la durée et au point de départ du délai, le régime de responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs sur celui de la garantie décennale, dont le délai est un délai d’épreuve (Cass. 3e civ., 12 nov. 2020, n° 19-22376), le législateur a entendu harmoniser ces deux régimes de responsabilité.
Il en résulte que le délai de dix ans pour agir contre les constructeurs sur le fondement de l’article 1792-4-3 du Code civil est un délai de forclusion, qui n’est pas, sauf dispositions contraires, régi par les dispositions concernant la prescription, et que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrit n’interrompt pas le délai de forclusion.
Viole ces textes la cour d’appel de Toulouse qui, pour condamner l’assureur, retient, d’une part, que le délai de dix ans prévu à l’article 1792-4-3 du code civil est un délai de prescription, d’autre part, que l’accord intervenu entre maîtres d’ouvrage et le constructeur, constitue une reconnaissance de responsabilité, opposable à l’assureur, laquelle a interrompu le délai décennal de l’action en responsabilité contractuelle de droit commun intentée par les maîtres de l’ouvrage pour des dommages intermédiaires, de sorte que l’action au fond plus de dix ans après réception des travaux est recevable.
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