JO de la justice : la plaidoirie chronométrée

Publié le 27/07/2024

« Citius, altius, fortius, communiter ». Telle est la nouvelle devise des JO depuis qu’en 2021 on a ajouté communiter, ce qui signifie en français, « Plus vite, plus haut, plus fort, ensemble ». Ce pourrait être aussi la devise des professionnels judiciaires, tant ils sont appelés chaque jour à se dépasser pour servir la justice. Notre dessinateur, Me François Martineau, a imaginé ce que pourraient être des Jeux olympiques de la justice. Nous inaugurons une série de dessins sur ce thème qui illustrera le site tout au long des épreuves.

JO de la justice : la plaidoirie chronométrée
©F. Martineau

 

L’équivalent du cent mètres pourrait être la plaidoirie à une époque où tout est chronométré et où il faut aller toujours plus vite pour traiter le plus de dossiers possible. Ainsi l’audience tend-elle à disparaître, au moins en matière civile. Et quand elle se tient, les magistrats sont souvent préoccupés par la nécessité de rationnaliser le traitement des dossiers.

« Maître, il vous reste une minute »

Me Michèle Bauer avait évoqué dans nos colonnes en 2022 cette question. Elle citait notamment le cas de ce président qui avait posé un chronomètre sur son bureau. « Au fur et à mesure que les secondes défilent sur le chronomètre, le président du conseil de prud’hommes (car j’ai assisté à cela au sein des prud’hommes d’une grande ville), décompte le temps : « Maître, il vous reste 5 minutes », « Maître, il vous reste deux minutes », « Maître, il vous reste, une minute, il faut conclure », et quand on a fini de plaider et que le minuteur sonne, ils pourraient presque dire « Maître les pâtes sont cuites, je répète, les pâtes sont cuites » ». L’article est accessible ici.

Quand l’audience est levée à 6h30 du matin

Malgré ces contraintes d’organisation, bien souvent la justice ne parvient pas à aller suffisamment vite. Alors, soit les délais de procédure s’allongent à l’excès, jusqu’à entraîner la condamnation de l’État pour non-respect du délai raisonnable, soit ce sont les audiences qui se terminent à des heures injustifiables. Ludovic Friat, président de l’Union syndicale des magistrats, raconte ici le déroulement de ce qu’il surnommait ses « Paris-Tokyo ».

Un triste record a été battu le 4 août 2023 à Paris : l’audience s’est achevée à…6h30 du matin.

Des renforts de moyens très attendus

On le sait, tout ceci est dû au manque structurel de moyens de la justice. Celui-ci suscite des révoltes régulières dans les juridictions dont nous rendons compte dans nos colonnes. Ce fut le cas pas exemple à Nanterre en 2022 ou, plus récemment, dans de nombreux tribunaux en manque d’effectifs à cause de la nécessité de renforcer ceux des sites olympiques en prévision des JO (notre article ici). Le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti a pris le problème à bras-le-corps et obtenu une croissance historique des crédits de la justice ces dernières années, qui se traduit notamment par des promotions record de magistrats et de greffiers. Mais il faut attendre que ces renforts arrivent en juridiction pour espérer ressentir les premières améliorations.

JO de la justice : la plaidoirie chronométrée
Dessin : ©F. Martineau
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