La prise en considération de la volonté de la personne âgée lors de son entrée en établissement d’hébergement

Publié le 18/10/2017

Quitter son « chez soi » pour intégrer un établissement d’hébergement est un pas difficile à franchir pour la plupart des personnes âgées. D’ailleurs, il paraît difficile d’avoir la certitude que cette décision résulte d’un véritable choix personnel. Malgré les garde-fous instaurés par le législateur, de nombreuses difficultés pratiques semblent réduire le consentement de la personne âgée à peau de chagrin.

Selon les derniers chiffres de la DREES, en 2011, 693 000 personnes « âgées »1 résidaient en établissements pour personnes âgées, qu’il s’agisse d’établissements pour personnes âgées dépendantes, de résidences-services (par. ex. : logements-foyers2), de maisons de retraite ou d’unités de soins de longue durée, sachant que l’âge moyen des résidents à leur date d’entrée était de 85 ans3. Il est vrai qu’en dépit des solutions développées par le législateur pour favoriser le maintien à domicile dans les meilleures conditions possibles4, il arrive que le placement en institution apparaisse comme nécessaire lorsque l’état de santé physique et/ou mental de la personne s’avère trop dégradé5. Lutter contre le processus du vieillissement n’est pas chose aisée. Or, le moment de l’entrée en établissement, qui constitue une rupture dans la vie des personnes âgées, serait déterminant dans la façon dont elles vont ensuite ressentir leur vie en institution6. Si l’entrée en structure peut être préparée en amont et résulter d’un véritable choix, il ne faut pas occulter le fait que dans certaines situations, ce placement peut avoir été fait dans l’urgence, par exemple à la suite d’une hospitalisation, ou résulter plutôt d’une décision de l’entourage du principal intéressé, notamment lorsque ce dernier souffre d’une maladie neurodégénérative (maladie d’Alzheimer ou apparentée)7. Ainsi, sans remettre en cause les motivations de l’entourage de la personne âgée et les difficultés que peut représenter un maintien à domicile, cela nous amène à réfléchir sur la façon dont aujourd’hui peut être prise en compte la volonté de l’individu lors de son entrée en établissement d’hébergement. Comment peut-on s’assurer de la réalité du consentement de la personne à quitter son domicile pour intégrer un établissement dédié aux personnes en perte d’autonomie ? N’existe-t-il pas un risque que la personne âgée, potentiellement vulnérable8, ne puisse pas faire valoir son désaccord, soit par crainte, soit par incompréhension ou que son opposition ne soit pas prise en considération ? C’est en ce sens qu’un collectif, composé de professionnels de santé, membres d’associations, retraités, chercheurs, politiques, écrivains… a publié dans le journal Libération du 25 mai 2017, une tribune intitulée « Vieux et chez soi » interpellant les fédérations de directeurs d’établissements pour personnes âgées et revendiquant le droit pour les seniors, trop souvent privés de parole, de rester à domicile sans que puisse leur être imposée une entrée en structure9. Ce manifeste fait également écho aux souhaits du législateur, lors de l’adoption de la loi d’adaptation de la société au vieillissement10, de remettre la personne dite « âgée » au cœur du dispositif la concernant, passant semble-t-il d’un rôle de témoin passif à celui d’acteur principal de son projet de vie. En effet, si des dispositions légales ayant vocation à recueillir le consentement la personne âgée au moment de son entrée en établissement existaient déjà, leurs modalités ont été renforcées lors de l’adoption de la loi de 2015. Malgré ces précautions, la volonté de la personne âgée peut parfois être négligée en raison de l’incapacité qu’éprouvent les professionnels de santé, le représentant légal ou l’entourage familial à traduire ses souhaits. Or, pour se prémunir des choix d’autrui, la personne âgée pourrait recourir au mandat de protection future, outil juridique créé par la loi du 5 mars 200711, afin de faire valoir par anticipation ses volontés quant à son parcours de vie.

Deux possibilités semblent alors s’offrir à la personne âgée pour faire entendre sa voix : d’une part, utiliser le dispositif spécifique de recueil du consentement au moment de son entrée en institution (I), d’autre part, exprimer son projet de vie, en amont, grâce au mandat de protection future (II).

I – La procédure de recueil du consentement de la personne âgée lors de son entrée en établissement

Le droit de participation de l’usager au moment de son entrée en établissement pour personnes âgées, catégorie d’établissement social et médico-social12, n’est pas une nouveauté issue de la loi de 2015 mais résulte de celle de 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale13. C’est ainsi que l’article L. 311-3, 2° et 3° du Code de l’action sociale et des familles mentionne le fait que, sous réserve des pouvoirs reconnus à l’autorité judiciaire et des nécessités liées à la protection des majeurs protégés, la personne âgée doit bénéficier du libre choix entre les prestations qui peuvent être servies à domicile et l’entrée en établissement spécialisé et qu’« une prise en charge et un accompagnement individualisés de qualité favorisant son développement, son insertion, adaptés à son âge et à ses besoins, respectant son consentement éclairé doivent systématiquement être recherchés » dès lors qu’elle est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision et qu’à défaut, c’est le consentement de son représentant légal qui doit être recueilli. Pour que ces droits soient effectifs, le législateur s’est entouré de précautions : un certain nombre d’informations doit être délivré à l’usager, ce qui passe par la remise de documents spécifiques (charte des droits et des libertés, règlement de fonctionnement), et un contrat de séjour ou un document individuel de prise en charge, élaboré avec la participation de la personne accueillie, doit être conclu ; les conditions étant aménagées si une mesure de protection juridique a déjà été prononcée (sauvegarde de justice, habilitation familiale, curatelle ou encore tutelle)14. Cependant, formaliser l’information « sur papier » ne signifie pas que le nouveau résident ait compris l’ensemble des renseignements fournis. Une enquête, en date de 2007, fait apparaître une corrélation entre la connaissance des supports d’information et l’existence d’un réseau familial et amical « fort » ainsi qu’avec la catégorie socioprofessionnelle à laquelle appartenait la personne âgée15. Il est vrai qu’une personne qualifiée, librement désignée par la personne âgée ou son représentant légal, peut l’accompagner dans ces différentes démarches16. Mais là encore, il n’est pas certain que la personne âgée fasse appel à cette forme d’accompagnement.

De plus, même si la personne âgée semble consentir à son entrée en établissement, cela ne signifie pas pour autant que sa décision ait été prise seule et de son plein gré. Comme le fait remarquer M. Yann Favier, « vulnérabilité et fragilité constituent des états peu compatibles avec la notion juridique de consentement basée sur le principe d’autonomie de la volonté »17. Pour éviter un consentement « arraché », l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements sociaux et médico-sociaux avait préconisé un certain nombre de recommandations de bonnes pratiques professionnelles adressées aux personnels de ces structures telles que le fait d’avoir un entretien individuel avec la personne âgée, de lui demander si elle a désigné une personne de confiance18 et/ou signé un mandat de protection future, d’évaluer le niveau de compréhension de la situation par la personne, de s’assurer d’un consentement clairement prononcé pour les personnes n’ayant pas ou peu de troubles cognitifs, de noter l’impossibilité de recueillir l’avis de la personne âgée si les troubles sont trop importants…19 S’inspirant en partie de ces conseils, le législateur de 201520 a prévu que désormais le contrat de séjour doit être conclu entre le directeur de l’établissement21 et le résident lors d’un entretien en tête à tête afin de s’assurer notamment du consentement de la personne à être accueillie22. La personne âgée peut demander à se faire accompagner par une personne de confiance23 qu’elle aura préalablement désignée, soit avant son entrée en établissement, soit à la suite de sa prise en charge puisqu’une telle démarche doit lui être systématiquement proposée24. Par ailleurs, elle bénéficie d’un droit de rétractation dans les 15 jours qui suivent la conclusion du contrat de séjour ou l’admission en établissement25. Si en théorie, ces mesures visent à restituer à la personne âgée un certain degré de contrôle sur son existence, le doute peut subsister quant à leur efficacité. Selon Mme Isabelle Corpart, un tel dispositif obligerait à une saisine systématique du juge des tutelles afin de mettre en place une mesure de protection juridique des majeurs dès lors que le résident semble réticent ou s’oppose à son entourage26. Cependant, dans l’attente de la décision du juge des tutelles, qu’adviendra-t-il de la personne âgée ? Que faire si aucune alternative que celle de rester en établissement n’est envisageable ? De plus, même si la demande d’ouverture de la mesure de protection des majeurs peut être présentée par le procureur de la République à la demande d’un tiers27, dans les faits, cela relève d’une démarche volontaire. Le directeur de l’établissement la fera-t-il, au risque peut-être de créer des difficultés relationnelles avec l’entourage du résident si la décision de placement émane plutôt des proches ? À la lecture de l’article L. 3211-6 du Code de la santé publique, il semblerait que cette tâche incombe, depuis 2015, au médecin de l’établissement social ou médico-social qui est tenu, s’il constate une altération des facultés mentales ou corporelles de la personne de nature à empêcher l’expression de sa volonté, de déclencher une mesure de sauvegarde de justice, mesure provisoire, par simple déclaration au procureur de la République, à l’instar de ce qui existait déjà pour le médecin de l’établissement de soins dans lequel se trouve la personne28. Mais la question même du bien-fondé d’une telle démarche se pose : systématiser les mesures judiciaires de protection reviendrait à faire de toutes les personnes âgées des majeurs protégés ce qui est contraire aux principes de subsidiarité et de nécessité de ces mesures posés à l’article 428 du Code civil.

Par ailleurs, dans l’hypothèse où la personne âgée fait déjà l’objet d’une mesure de protection juridique, les mêmes interrogations vont se présenter : qui peut affirmer l’existence de son consentement à la mesure de placement ? En réalité, les apports théoriques de la loi de 2015 concernant la population des personnes âgées se heurtent aux mêmes difficultés pratiques que le dispositif de protection des majeurs29. Aussi, s’il n’est pas possible de connaître la volonté de la personne âgée, c’est à son représentant légal qu’appartiendra la décision d’intégrer une structure spécialisée, et en cas de désaccord entre le mandataire judiciaire et le majeur vulnérable, ce sera au juge, ou au conseil de famille s’il a été constitué, que reviendra le soin de trancher. Les liens étroits, voire entremêlés, existant entre les majeurs protégés et les personnes âgées30, en tant que population potentiellement vulnérable, ont tendance à inciter le législateur à transposer les solutions déjà prévues dans le cadre de la protection juridique des majeurs à la prise en charge des personnes âgées alors que des interrogations existent déjà, à la suite de la mise en place de la loi du 5 mars 200731, sur la délimitation des missions du mandataire judiciaire à la protection des majeurs et sur le recueil du consentement des personnes protégées souffrant d’une altération de leurs facultés mentales32. Cela est d’autant plus dommageable que 60 % des personnes âgées vivant en institution souffrent de démences séniles liées généralement à la maladie d’Alzheimer33. La loi de 2015 aurait donc pu constituer pour le législateur une occasion d’émanciper le dispositif applicable aux seniors du droit des majeurs protégés.

Pour remédier à ces difficultés, certaines associations proposent que la problématique du 100 % consentement soit abordée dans le cadre du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge34, nouvelle instance de réflexion et de propositions issue de la loi de 201535. Il serait peut-être alors intéressant à tout le moins de revenir sur la notion de consentement en elle-même, évoquée dans le dispositif de prise en charge des personnes âgées mais non préalablement définie, ce qui entretient des difficultés de traduction pratique pour le juriste36. En attendant, pour préserver ses droits personnels, l’une des solutions consisterait peut-être pour la personne âgée à anticiper ses choix de vie grâce au mandat de protection future.

II – L’expression anticipée de la volonté de la personne âgée par le biais du mandat de protection future

Instrument d’expression de la volonté, le mandat de protection future est une figure juridique nouvelle, issue de la loi de 200737, basée sur le volontariat et encore trop peu usitée38. S’il n’existe pas de définition légale, il faut considérer « qu’il s’agit d’un contrat par lequel une personne en charge une autre de la représenter, pour le cas où, à l’avenir, elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts »39. Cette mesure, destinée à éviter la mise en place d’une protection judiciaire, peut porter aussi bien sur les actes de la vie civile, personnelle et patrimoniale. Cela signifie donc qu’un individu pourrait, par exemple, formuler ses souhaits concernant des directives de fin de vie ou des préférences concernant son lieu de vie, sa vie personnelle et sociale pour le futur. Par conséquent, il est possible d’imaginer qu’une personne réfractaire à l’idée d’intégrer une structure pour personnes âgées se serve de cet outil pour faire connaître ses volontés.

Pour que cet acte puisse être valable, le mandant doit avoir anticipé suffisamment à l’avance40 une hypothétique dégradation de ses capacités : en effet, lors de la rédaction, le mandant ne doit faire l’objet ni d’une mesure de tutelle, ni d’une habilitation familiale41. Dans l’hypothèse où il est sous curatelle, l’assistance de son curateur est requise. Comme pour les mesures de protection traditionnelles, l’événement déclencheur de la mise en œuvre du mandat sera une impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté42 ; il est donc possible que le mandat ne soit jamais mis en œuvre. Le cas échéant, le mandataire devra se présenter au greffe du tribunal d’instance muni du mandat et d’un certificat médical attestant de l’état de santé du mandant43.

Bien que constituant une véritable alternative aux mesures institutionnelles de protection, l’une des difficultés posées par le mandat de protection future était l’absence de disposition quant à sa publicité dans le décret du 5 décembre 200844. Cet acte, qui peut être conclu par acte notarié ou sous seing privé – choix d’opportunité laissé entre les mains de son auteur – ne faisait donc l’objet d’aucune information aux tiers, renseignement pourtant fort utile lors d’une entrée en établissement pour personnes âgées ou lorsque le juge est saisi d’une demande de mise sous protection judiciaire45. Les regrets exprimés par les différents auteurs de doctrine46 et par le notariat47 ont conduit le législateur de 201548 a intégré un nouvel article rédigé comme suit : « Le mandat de protection future est publié par une inscription sur un registre spécial dont les modalités et l’accès sont réglés par décret en Conseil d’État »49. La sécurisation du mandat de protection future dépendra donc de l’arrivée de ce décret. Elle aurait également pu passer par la mention en marge des actes d’état civil comme pour les mesures de protection judicaire50.

En outre, même si le mandat s’étend à la protection de la personne, de la même façon que pour les autres mesures, les textes légaux prévoient d’abord que la personne prendra seule les décisions relatives à sa personne dans la mesure où son état le permet51. Ce n’est qu’à défaut que le mandataire pourra être sollicité puisque le mandant aura pu prévoir expressément que le mandataire exercera les missions que le Code de la santé publique ou le Code de l’action sociale et des familles confie au tuteur ou à la personne de confiance52, ce qui comprend notamment le consentement à l’entrée en établissement pour personnes âgées. Mais attention, les pouvoirs du mandataire sont strictement limités à ce qui a été prévu dans l’acte écrit. Il est donc important, pour l’individu envisageant ses vieux jours, d’être précis quant aux décisions déléguées. De même, en dépit des volontés exprimées dans le mandat de protection future, il est possible d’envisager le fait que la personne mandatée considère qu’au vu de la situation physique ou psychique du mandant, les choix du mandant s’avèrent compliqués à honorer. Aussi, que faire si la personne âgée a exprimé son désir de rester chez elle mais qu’un tel choix compromet sa santé ou sa sécurité ? En réalité, il semble que le respect du projet de vie de la personne âgée, consigné dans le mandat de protection future, passe également par le développement des mesures permettant le maintien à domicile, qu’il s’agisse du lieu d’habitation originel ou non. Le législateur de 2015 s’est inscrit dans cette volonté puisqu’il a revalorisé l’allocation personnalisée d’autonomie53, prévu l’adaptation du logement de la personne, favorisé l’essor de nouvelles formes d’habitats intermédiaires ou regroupés54 ou encore professionnalisé l’accueil familial55. Cependant, s’il n’est pas contesté que la loi de 2015 a favorisé la possibilité pour les individus de rester dans leur environnement (ou un environnement proche), des progrès restent à faire en la matière. Ainsi, des pistes autour de la création de places d’accueil temporaire en établissements restent à explorer56. De même, la généralisation de la démarche Paerpa (parcours de santé des personnes en risque d’autonomie), qui a pour objectif de maintenir la plus grande autonomie des personnes âgées de 75 ans et plus dans leur cadre de vie habituel, est à l’étude57. Enfin, l’accompagnement des personnes âgées à domicile devrait être plus soutenu. Si désormais, il est possible de financer la formation et le soutien des bénévoles dans le cadre de la mobilisation nationale contre l’isolement des personnes âgées58, le statut du proche aidant mériterait, plus qu’une définition59, d’être valorisé sur le plan financier.

Par ailleurs, il peut arriver que le mandat de protection future n’apporte pas de solutions à la situation rencontrée. En cas de besoin, le juge pourra alors être amené à prononcer une mesure de protection juridique complémentaire ; le mandat de protection future n’étant pas exclusif des autres mesures de protection. Pour éviter de complexifier la situation de la personne protégée en multipliant les intervenants, le magistrat pourra confier cette mission au mandataire de protection future ou autoriser ce dernier à accomplir des actes déterminés non couverts par le mandat60. Lorsque la personne âgée n’est pas du tout en mesure de s’exprimer, ce sera alors le consentement du mandataire initial, investi judiciairement de ses nouveaux pouvoirs, qui sera recueilli par le directeur de l’établissement61. En revanche, s’il y a opposition entre la personne âgée et la personne désignée, l’intervention du juge (ou du conseil de famille s’il a été constitué) s’avérera nécessaire62. Le mandat de protection future aura alors pour seul intérêt de faire connaître au magistrat l’avenir que s’était imaginé la personne âgée lorsqu’elle était encore dotée de toutes ses facultés.

En définitive, si le regard de la société change concernant le « grand âge »63 – ce qui se traduit, par exemple, par l’apparition de visages du « quatrième âge »64 dans le monde de la mode, domaine autrefois réservé aux jeunes minois65 – il ne faut pas pour autant oublier que le public des personnes âgées reste un public potentiellement vulnérable. Aussi, sans tomber dans la création d’un « droit de la gérontologie »66, qui reviendrait à catégoriser une partie de la population67, la préservation des droits fondamentaux de la personne âgée nécessite déjà que les volontés éventuellement formulées puissent être connues avant l’entrée en établissement pour espérer pouvoir les respecter autant que possible. Mais la promotion de l’autonomie de la personne passe également par des aménagements du droit commun des usagers. En effet, la recherche du consentement « à tout prix » lors de l’accueil en établissement, parfois difficile à appréhender dans les faits en raison de l’état physique ou mental de la personne âgée, devrait peut-être être abandonnée au profit de l’affirmation d’une participation systématique de la personne âgée à la prise de décision68, dispositif ayant le mérite d’être plus souple et adapté au cas par cas, notamment dans les situations où, de toute façon, l’intégration dans un établissement d’hébergement s’avérera nécessaire.

Notes de bas de pages

  • 1.
    Sur les difficultés d’identifier à quel moment la personne peut être dite « âgée », v. Ferré-André S., « Introduction au droit gérontologique », Defrénois 30 janv. 2009, n° 38880, p. 121 ; Malaurie P., « Le grand âge », Defrénois 30 janv. 2009, n° 38887, p. 220. En matière de prise en charge en établissement, l’article L. 113-1 du Code de l’action sociale et des familles aiguille néanmoins sur le seuil à retenir puisque « Toute personne âgée de 65 ans privée de ressources suffisantes peut bénéficier (…) d’un accueil chez des particuliers ou dans un établissement. Les personnes âgées de plus de 60 ans peuvent obtenir les mêmes avantages lorsqu’elles sont reconnues inaptes au travail ».
  • 2.
    La dénomination a été modifiée à la suite de la loi n° 2015-1776 du 28 déc. 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement : JO, 29 déc. 2015, p. 24268.
  • 3.
    Volant S., 693 000 résidents en établissements pour personnes âgées en 2011, Études et Résultats, n° 899, 2014, DREES, p. 6.
  • 4.
    Ainsi, des prestations individuelles de solidarité liées à la perte d’autonomie ont été instituées en ce sens (prestation spécifique dépendance, ensuite remplacée par l’allocation personnalisée d’autonomie). V. L. n° 97-60, 24 janv. 1997 tendant, dans l’attente du vote de la loi instituant une prestation d’autonomie pour les personnes âgée dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l’institution d’une prestation spécifique dépendance : JO, 25 janv. 1997, p. 1280 – L. n° 2001-347, 20 juill. 2001 relative à la prise en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées et à l’allocation personnalisée d’autonomie : JO, 21 juill. 2001, p. 11737 – L. n° 2015-1776, 28 déc. 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, préc.
  • 5.
    Il s’agit de la raison principale justifiant l’entrée en établissement dans quasiment les trois quarts des situations. V. Marquier R., Vivre en établissement d’hébergement pour personnes âgées à la fin des années 2000, Dossiers Solidarité et Santé, n° 47, 2013, DREES, p. 4.
  • 6.
    Somme D., « Participation et choix des résidents dans le processus d’entrée en institution », p. 35, in Les personnes âgées entre aide à domicile et établissement, ministère des Affaires sociales, dossiers solidarité et santé, janv.-mars 2003, ministère de l’Emploi et de la Solidarité, 2002, La Documentation française, p. 106.
  • 7.
    Une enquête en 2000 fait apparaître que seuls 35 % des résidents d’EHPA avaient participé à la demande d’entrée en établissement. V. Somme D., « Participation et choix des résidents dans le processus d’entrée en institution », p. 38, préc. V. égal. Moisdon-Chataigner S., « Une mesure de protection juridique adaptée aux spécificités de la maladie d’Alzheimer », Dr. famille 2017, étude 6, p. 9.
  • 8.
    Congrès des notaires de France, Les personnes vulnérables, 102e Congrès des notaires de France, Manchecourt : Maury-Imprimeur, 2006, p. 262. D’ailleurs, en droit pénal, l’âge de la victime de l’infraction peut être un critère utilisé pour caractériser la vulnérabilité de cette dernière et ainsi être un facteur d’aggravation de la peine, ou être une condition constitutive de l’infraction. V. Cour de cassation, Les personnes vulnérables dans la jurisprudence de la Cour de cassation, Rapp. 2009, 2010, La Documentation française, p. 291 et s. ou Favier Y., « Vulnérabilité et fragilité : réflexions autour du consentement des personnes âgées », RDSS 2015, p. 702.
  • 9.
    « Vieux et chez soi », Libération, 25 mai 2017.
  • 10.
    L. n° 2015-1776, 28 déc. 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, préc.
  • 11.
    L. n° 2007-308, 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs : JO, 7 mars 2007, p. 4325.
  • 12.
    CASF, art. L. 312-1, 6°.
  • 13.
    L. n° 2002-2, 2 janv. 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale : JO, 3 janv. 2002, p. 124.
  • 14.
    CASF, art. L. 311-4.
  • 15.
    Prévot J. et Weber A., « Participation et choix des personnes âgées vivant en institution », Retraite et Société 2009/3, p. 181.
  • 16.
    CASF, art. L. 311-5.
  • 17.
    Favier Y., « Vulnérabilité et fragilité : réflexions autour du consentement des personnes âgées », préc.
  • 18.
    CSP, art. L. 1111-6.
  • 19.
    Anesm, Recommandations de bonnes pratiques professionnelles, Qualité de vie en EHPAD (volet 1), De l’accueil de la personne à son accompagnement, févr. 2011, p. 25, disponible sur www.anesm.sante.gouv.fr.
  • 20.
    L. n° 2015-1776, 28 déc. 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, préc.
  • 21.
    Le directeur de l’établissement peut, en cas de besoin, être assisté par le médecin coordinateur de l’établissement.
  • 22.
    CASF, art. L. 311-4, al. 3.
  • 23.
    La personne de confiance peut être un parent, un proche ou le médecin traitant. Sa désignation est possible en dépit de l’existence d’une mesure de protection juridique des majeurs, que celle-ci intervienne avant l’ouverture de la mesure ou après.
  • 24.
    CASF, art. L. 311-5-1.
  • 25.
    CASF, art. L. 311-4-1.
  • 26.
    Corpart I., « Les droits et libertés des personnes âgées et vulnérables renforcés par la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement », RJPF 2016/6, p. 8.
  • 27.
    C. civ., art. 430.
  • 28.
    Pour le médecin prodiguant des soins à la personne, la déclaration au procureur de la République ne représente qu’une faculté.
  • 29.
    Hérin C., « Le renforcement des droits des personnes âgées », p. 10, in La prise en charge de la dépendance à l’horizon de la loi d’adaptation de la société au vieillissement, JDSAM 2014, p. 9 et s.
  • 30.
    Les personnes âgées seraient toutes des « majeurs à protéger » [Niemec A., « La détection de la maltraitance des personnes âgées : une nouvelle mission institutionnelle ? », p. 129 in Disant M. et Pollet D. (dir.), Les lanceurs d’alerte, 2017, LGDJ, VIII-424 p.].
  • 31.
    L. n° 2007-308, 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, préc.
  • 32.
    En principe, la personne protégée prend seule les décisions relatives à sa personne, dans la mesure où son état le permet (C. civ., art. 459) et reçoit un certain nombre d’informations de la part de la personne ou organisme chargé de la mesure de protection (C. civ., art. 457-1). Si elle n’est pas en mesure de prendre une décision personnelle éclairée, le juge ou le conseil de famille, a pu prévoir que, même en cette matière, elle bénéficiera d’une assistance, voire sera représentée. Le mandataire doit néanmoins s’efforcer de recueillir l’assentiment de son protégé dans toutes les décisions le concernant et les travailler en amont, notamment par le biais du document individuel de prise en charge (CASF, art. L. 471-6). Sur les questions de droit à l’information du majeur protégé lui permettant de donner un consentement libre et éclairé concernant les décisions relatives à sa personne et les difficultés de mise en œuvre, v. Batteur A., JCl. Civil, Art. 457-1 à 463, V° majeurs protégés, curatelle et tutelle, effets personnels, 2016, fasc. 10, n° 47. V. égal. sur ce point : Anesm, Recommandations de bonnes pratiques professionnelles, Participation des personnes protégées dans la mise en œuvre des mesures de protection juridique, juill. 2012, p. 25, disponible sur www.anesm.sante.gouv.fr.
  • 33.
    Watremetz L., « Le débat opposant les EHPAD au domicile est réactivé par l’appel “Vieux et chez soi” », 2017, Hospimédia.
  • 34.
    Ibid.
  • 35.
    D. n° 2016-1441, 25 oct. 2016 relatifs à la composition et au fonctionnement du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge : JO, 26 oct. 2016. Sur cette instance, v. Collin E., « La loi portant adaptation de la société au vieillissement de la population : une prise de conscience équivoque », JCP A 2016, p. 29.
  • 36.
    Favier Y., « Vulnérabilité et fragilité : réflexions autour du consentement des personnes âgées », préc.
  • 37.
    L. n° 2007-308, 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs : JO, 7 mars 2007, p. 4325.
  • 38.
    Rougier I et Waquet C., Financement par les organismes de sécurité sociale des mandataires à la protection des majeurs, Rapp. n° 2014-071R, IGAS, 2014, p. 55. Selon cette étude, le conseil supérieur du notariat estimait à 5 000 le nombre de mandats contractés et le ministère de la Justice dénombrait un total de 1 053 mandats de protection future ayant pris effet entre 2009 et 2012.
  • 39.
    Mazeaud-Leveneur S., JCl. Civil, Art. 477 à 494, V° majeurs protégés, mandat de protection future, 2017, fasc. unique, n° 5.
  • 40.
    Il convient d’anticiper sa « dépendance juridique ». V.  Ferré-André S., « Introduction au droit gérontologique », préc. Pourtant, près de 80 % des mandants ont plus de 80 ans [v. Rougier I. et Waquet C., Financement par les organismes de sécurité sociale des mandataires à la protection des majeurs, Rapp. n° 2014-071R, IGAS, 2014, p. 55].
  • 41.
    C. civ., art. 477.
  • 42.
    C. civ., art. 425.
  • 43.
    CPC, art. 1258 à 1262.
  • 44.
    D. n° 2008-1276, 5 déc. 2008 relatifs à la protection juridique des mineurs et des majeurs et modifiant le Code de procédure civile : JO, 7 déc. 2008, p. 18646.
  • 45.
    Le mandat de protection future mis à exécution postérieurement à l’ouverture d’une curatelle, parce qu’inconnu au moment du prononcé de celle-ci, primera sur cette dernière. V. Cass. 1re civ., 4 janv. 2017, n° 15-28669 : Bull. civ. I ; D. 2017, p. 191, note Noguéro D. ; Defrénois 28 févr. 2017, n° 125u1, p. 245, note Batteur A. ; Dr. famille 2017, comm. 49, p. 54, note Maria I. ; JCP G 2017, 352, note Peterka N. ; LPA 7 mars 2017, n° 124n6, p. 12, note Niel P.-L. et Morin M. ; RTD civ. 2017, p. 100, note Hauser J.
  • 46.
    Avena-Robardet V., « Protection juridique des majeurs : du nouveau ! », AJ fam. 2016, p. 3 ; Combret J. et Baillon-Wirtz N., « La réforme de la protection juridique des majeurs du 5 mars 2007 a dix ans : quel bilan ? », JCP N 2017, étude 1119, p. 19 ; Corpart I., « Les droits et libertés des personnes âgées et vulnérables renforcés par la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement », préc. ; Noguéro D., « Priorité affichée du mandat de protection future sur la mesure judiciaire malgré le défaut de publicité par le refus de nullité et de révocation », D. 2007, p. 191 ; Peterka N., « Le mandat de protection future : bilan et perspectives », Defrénois 30 avr. 2017, n° 126j8, p. 497.
  • 47.
    Congrès des notaires de France, Familles, solidarités, numérique : le notaire au cœur des mutations de la société, 113e Congrès des notaires de France, 2017, ACNF, p. 580.
  • 48.
    L. n° 2015-1776, 28 déc. 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, préc.
  • 49.
    C. civ., art. 477-1.
  • 50.
    Corpart I., « Les droits et libertés des personnes âgées et vulnérables renforcés par la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement », préc.
  • 51.
    C. civ., art. 459.
  • 52.
    C. civ., art. 479.
  • 53.
    Il s’agit d’une allocation individuelle de solidarité destinée à une prise en charge des besoins des personnes en perte d’autonomie (CASF, art. L. 232-1 et s.).
  • 54.
    Collin E., « La loi portant adaptation de la société au vieillissement de la population : une prise de conscience équivoque », préc.
  • 55.
    CASF, art. L. 441-1 et s.
  • 56.
    Corpart I., « Les droits et libertés des personnes âgées et vulnérables renforcés par la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement », préc.
  • 57.
    Ibid.
  • 58.
    CASF, art. L. 14-10-5. Monalisa a pour objectif de lutter contre l’isolement des personnes âgées et repose sur l’intervention de bénévoles à leur domicile afin de leur procurer de la compagnie.
  • 59.
    CASF, art. L. 113-1-3.
  • 60.
    C. civ., art. 485.
  • 61.
    Il faut revenir à l’application de l’article L. 311-3, 2° et 3° du Code de l’action sociale et des familles.
  • 62.
    C. civ., art. 459.
  • 63.
    Malaurie P., « Le grand âge », préc. Comme l’auteur l’indique, nombreux sont les exemples en littérature associant la vieillesse « aux décrépitudes et dégradations du corps, du cœur, de l’esprit et de l’âme ». Pour n’en citer qu’un, le général De Gaulle qualifiait la vieillesse de « naufrage » [De Gaulle C., Mémoires de guerre, t. 1, La chute, 1954, 2000, Pléiade, p. 65]. De toute façon, une telle évolution est nécessaire puisque l’espérance de vie augmente tout comme le nombre de personnes vieillissantes (V. exposé des motifs de la loi n° 2015-1776 du 28 déc. 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, préc.).
  • 64.
    Binet J.-R., dir., Droit et vieillissement de la personne, Actes du colloque organisé par la faculté de droit et de science économique de Besançon les 18 et 19 oct. 2007, 2008, Litec, p. 245.
  • 65.
    Le plus célèbre étant peut-être celui d’Iris Apfel.
  • 66.
    Ferré-André S., « Introduction au droit gérontologique », préc.
  • 67.
    Ce qui n’est pas souhaitable, v. sur ce point : Corpart I., « Les droits et libertés des personnes âgées et vulnérables renforcés par la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement », préc. ; Hérin C., « Le renforcement des droits des personnes âgées », préc.
  • 68.
    Sur cette idée, v. Favier Y., « Vulnérabilité et fragilité : réflexions autour du consentement des personnes âgées », préc. ; Malaurie P., « Le grand âge », préc.
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