Les résultats du contrôle fiscal

Publié le 06/03/2017

Bercy affiche un bilan plus que satisfaisant en matière de contrôle fiscal, dopé notamment par les résultats du service de régularisation des comptes détenus à l’étranger. Les contrôles se font plus ciblés afin d’assurer une meilleure couverture du tissu fiscal.

Comme chaque année, le bilan de l’action menée par les services en matière de lutte contre la fraude fiscale a été présenté. Ce bilan traite successivement des résultats des opérations de contrôle ; du recouvrement des impositions émises ; des poursuites pénales ; des plaintes pour escroquerie fiscale ainsi que des procédures d’opposition à fonction1.

De bons résultats chiffrés

Pour la première fois, les montants de redressement ont dépassé le chiffre des 20 milliards d’euros. Les résultats de 2015 du contrôle fiscal excèdent ceux de 2014 de 1,9 milliard (21,2 milliards d’euros en 2015 contre 19,3 milliards d’euros en 2014). Ces résultats prennent en compte ceux du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR). Le montant total des droits et pénalités perçus en 2015 s’élève à 2,65 Md €, soit 4,55 Md € depuis l’origine. Au 31 décembre 2015, près de 45 000 contribuables détenant des avoirs à l’étranger non déclarés ont déposé une demande de mise en conformité auprès du STDR. Afin d’accélérer le traitement des demandes de régularisation des comptes à l’étranger non déclarés, tout en garantissant un traitement homogène de ces demandes, sept pôles interrégionaux ont été mis en place, depuis le 1er juin 2015, pour renforcer les équipes du STDR : trois pôles localisés en Île-de-France (Paris, Saint-Germain-en-Laye et Vanves) et quatre en province (Lyon, Marseille, Bordeaux et Strasbourg). La part des contrôles répressifs est en hausse depuis 2010 et se stabilise autour de 31 % sur les quatre dernières années. Le montant des droits et pénalités relatifs à ces contrôles est en hausse depuis 2010 et atteint en 2015 la somme de 7,84 Mds €. L’action de la DGFiP dans la lutte contre la fraude fiscale reste soutenue et se traduit dans les chiffres. Le montant des sommes recouvrées progresse en 2015. Il a augmenté de + 12, 5 % entre 2014 et 2015.

Quatre axes de lutte contre la fraude fiscale

La politique du contrôle fiscal menée par la direction générale des finances publiques (DGFiP) repose sur deux objectifs majeurs : une finalité budgétaire qui vise à collecter l’ensemble des impôts et taxes éludés avec rapidité et efficacité, et une finalité répressive qui vise à sanctionner les comportements frauduleux conformément à leur gravité, sur le plan financier, voire pénal. La DGFiP s’est donnée comme priorité le renforcement de la lutte contre les différentes formes de fraude tout en assurant une couverture optimale des enjeux et en veillant à l’amélioration du recouvrement des impôts éludés et à la facilitation des relations avec les contribuables. Cette activité s’inscrit dans une stratégie nationale qui vise à assurer l’égalité devant l’impôt, condition du civisme fiscal et essentielle pour préserver la cohésion sociale et l’efficacité économique. La réalisation de ces objectifs repose sur la professionnalisation et la qualité de toute la chaîne du contrôle fiscal, de la programmation des contrôles à leur recouvrement. En 2015, le gouvernement a poursuivi sa démarche globale de renforcement de la lutte contre la fraude fiscale, selon quatre axes : le renforcement de la lutte contre la fraude à la TVA, l’amélioration des moyens d’investigation du contrôle fiscal, le renforcement de l’action pénale et le développement de la connaissance des flux financiers internationaux. Ainsi, en matière de TVA, le gouvernement a-t-il souhaité renforcer la lutte contre les différents types de fraude en proposant des mesures législatives destinées à lutter contre les fraudes dans les secteurs des ventes de véhicules d’occasion, des sociétés éphémères du bâtiment et des logiciels de caisse frauduleux. Par ailleurs, de nouveaux moyens d’investigation adoptés par le Parlement ont été mis en œuvre par l’administration fiscale. Il s’agit notamment de la possibilité d’opérer une saisie de données sur les serveurs en cas de perquisition fiscale et de l’exercice du droit de communication non nominatif. Concernant les flux financiers internationaux, le vote en loi de finances 2016, du dispositif de reporting pays par pays, en application des accords BEPS, constitue une étape essentielle dans la connaissance de la répartition des bénéfices des grands groupes. Par ailleurs, le gouvernement s’est attaché à développer les échanges d’informations avec ses partenaires. L’administration fiscale exploite de manière croissante le réseau conventionnel de la France constitué de 125 conventions bilatérales et 29 accords d’échanges de renseignement.

Un dialogue avec le contribuable vérifié plus efficace

L’amélioration des relations avec les contribuables vérifiés constitue un objectif pour la DGFiP. C’est désormais l’un des axes majeurs de la mission de contrôle fiscal. Cette amélioration du dialogue avec le contribuable vérifié est perçue comme complémentaire à la lutte contre les comportements les plus frauduleux. En conséquence, les oppositions à contrôle fiscal se font de plus en plus rares. L’article 1746 du Code général des impôts (CGI) prévoit une amende de 25 % € en cas d’opposition au contrôle fiscal. Les procédures d’opposition au contrôle fiscal sont de moins en moins nombreuses. Elles avaient légèrement augmenté en 2011 et 2012 où on en recensait respectivement 70 et 71, contre seulement 50 en 2010 et 45 en 2009. Ces deux dernières années, ces chiffres sont en nette baisse : 59 en 2014 et 33 en 2015. Autre indicateur d’importance, les délais d’intervention. Ceux-ci, en dépit d’un allongement conjoncturel dû à la mise en place des contrôles des comptabilités informatisées, sont majoritairement réduits. La part des opérations dont la durée sur place est inférieure à 9 mois se maintient à un haut niveau, puisqu’il est respectivement de 84,6 % pour les grandes entreprises et de 97,5 % pour les PME. Les contrôles ciblés constituent des interventions, plus rapides, s’inscrivent dans la démarche d’allégement des contraintes pour les contribuables concernés, tout en renforçant la réactivité de l’administration face aux pratiques frauduleuses mais également en assurant une présence fiscale sur l’ensemble du territoire. Leur part est en léger recul de 0,3 points pour représenter 21 % des opérations réalisées en 2015 (21,3 % en 2014) mais reste à un niveau assez élevé. Ces opérations sont essentiellement réalisées par les directions départementales et régionales. Par ailleurs, le recours à la procédure de régularisation, prévue à l’article L. 62 du LPF qui est offerte depuis 2005 dans le cadre des vérifications de comptabilité des entreprises est stable. Il atteint 7,6 % des contrôles réalisés en 2015. 3 752 entreprises de bonne foi et respectueuses de leurs obligations déclaratives ont ainsi pu régulariser leur situation fiscale en cours de contrôle moyennant le paiement immédiat des impositions dues et d’un intérêt de retard réduit pour un montant global de plus de 623 millions d’euros, soit 7,1 % des rappels totaux.

Des contrôles externes plus ciblés

En 2015, la présence en contrôle externe est en légère baisse : seules 50 168 opérations réalisées contre 51 740 l’année précédente. Ce repli s’est toutefois accompagné d’une évolution favorable en termes d’enjeux financiers sans dégradation de la lutte contre les fraudes les plus graves, preuve pour Bercy d’une meilleure sélectivité de l’action de l’administration fiscale. La part des opérations de contrôle fiscal externe à caractère répressif, qui sanctionnent les fraudes significatives, reste à un niveau élevé en 2015 (30,9 %), stable par rapport à 2014. Cette stabilité des résultats à un niveau élevé montre l’efficacité de l’organisation et des méthodes de travail de la mission de contrôle fiscal dans la détection et le traitement des circuits frauduleux et confirme la consolidation du positionnement des services de recherche à l’origine de 58,8 % de ces affaires. Le montant des droits recouvrés s’élève à 12,2 Md €. La répartition des résultats entre les différents impôts traduit cette année encore une présence toujours marquée sur l’impôt sur les sociétés, avec des droits qui s’élèvent à 4,25 milliards d’euros soit 49 % du total de ceux issus du contrôle externe (contre près de 3,13 milliards d’euros en 2014 et 39 % du total de ceux issus du contrôle externe). Au total, les montants rectifiés proviennent pour 46 % de la vérification de grandes entreprises (chiffre d’affaires supérieur à 152,4 millions d’euros pour les entreprises de vente ou 76,6 millions d’euros pour les prestataires de services). La part des directions nationales, qui contrôlent les grandes entreprises et les contribuables disposant de revenus élevés, et des DIRCOFI en charge des entreprises de taille intermédiaire, est ainsi prépondérante. En 2015, ces directions ont réalisé 35,4 % des contrôles, pour 78,6 % des droits nets.

Des contrôles sur pièces sélectifs

À l’instar du contrôle fiscal externe, le contrôle sur pièces (CSP) évolue vers une démarche davantage fondée sur l’initiative et la sélectivité des dossiers à contrôler à partir d’une analyse des zones d’enjeux et de risques pour assurer une meilleure couverture du tissu fiscal. L’objectif consiste à mieux détecter les dossiers frauduleux présentant des enjeux importants en vue notamment de la programmation du contrôle fiscal externe. Pour les contrôles des professionnels, l’objectif consiste à combiner l’amélioration de l’assiette de l’impôt avant contrôle, la couverture du tissu fiscal et le recentrage sur les enjeux importants. Les pôles de contrôle et d’expertise, structures orientées vers le CSP des professionnels, veillent à poursuivre l’amélioration de la couverture du tissu fiscal par une meilleure sélectivité des dossiers et la mutualisation des compétences. Ils ont un rôle de sécurisation des dépenses fiscales. Ainsi plus d’un tiers des dossiers examinés concerne l’instruction des demandes de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée en circuit long (41 %). Les dossiers rectifiés en matière d’impôt sur les sociétés ont diminué en nombre (- 5,6 %) et en montant de droits rappelés (- 14,5 %), en raison de la baisse des résultats de la Direction des grandes entreprises (DGE). La part des droits issus du contrôle automatisé de la liquidation de l’impôt sur les sociétés reste très largement prépondérante (70 %). En matière de taxes sur le chiffre d’affaires, le nombre de dossiers redressés en 2015 a en revanche augmenté (+ 4 %), de même que les droits rappelés (+ 1 %). Pour le contrôle des particuliers, en matière d’impôt sur le revenu, les résultats de l’année 2015 se caractérisent par une diminution du nombre de dossiers contrôlés (- 1 %) mais une forte augmentation en montant des droits rappelés et des pénalités (+ 8 %). La déclaration pré-remplie, enrichie des revenus de capitaux mobiliers en 2008, permet de limiter certaines erreurs déclaratives dont la correction relevait auparavant de la mission de contrôle. Le montant des droits supplémentaires issus du contrôle d’initiative est encore en recul. La généralisation des pôles de contrôle revenus patrimoine (PCRP) depuis le 1er septembre 2016 devraient remédier à cette situation grâce à la mise en place d’équipes dédiées au contrôle. Le contrôle corrélé des revenus et du patrimoine des dossiers à fort enjeu (DFE) est organisé sur une période triennale (2016-2018). Une modification des seuils est intervenue au 1er janvier 2013. Désormais, un foyer fiscal est considéré comme DFE si son revenu brut est supérieur à 270 000 € (au lieu de 220 000), ce seuil étant porté à 500 000 € dans l’hypothèse où le cumul des revenus issus des traitements et salaires et des pensions de retraite représente au moins 75 % du revenu brut, et/ou s’il possède un actif brut ISF supérieur à 3,9 millions (seuil modifié en 2015 pour la période triennale 2016-2018). En fiscalité patrimoniale, les droits rappelés en contrôle en 2015 diminuent de 30 %, tandis que ceux issus de la relance baissent de 12 %. Au plan quantitatif, les résultats issus de la relance des déclarations de succession restent prépondérants et représentent 49 % des rappels et 54 % des droits. Enfin, le volume d’activité en contrôle de l’impôt de solidarité sur la fortune a augmenté de 11 % en 2015 par rapport à l’année 2014. Les résultats financiers en revanche sont en baisse (- 10 %) et restent légèrement au-dessus de la barre de 250 millions.

Focus sur l’activité de la Commission des infractions fiscales

L’article 228 du Livre des procédures fiscales (LPF), subordonne les poursuites pour fraude fiscale à une plainte préalable de l’administration fiscale sur avis conforme de la Commission des infractions fiscales (CIF), le fameux verrou de Bercy. La CIF a examiné, au cours de l’année 2015, 1 086 dossiers de propositions de poursuites correctionnelles pour fraude fiscale dont 1 027 ont donné lieu à un avis favorable au dépôt d’une plainte. Seuls 1 069 dossiers avaient donné lieu à un avis favorable au dépôt d’une plainte 2014, 1 018 en 2013, 987 en 2012, 966 en 2011 et 981 en 2010. Ce chiffre qui était en quasi-progression constante jusqu’en 2014 est donc légèrement plus faible. Seuls 59 dossiers ont donné lieu à un avis défavorable. La grande majorité des infractions ayant motivé en 2015 l’engagement de poursuites correctionnelles se répartissent entre le défaut de déclaration (44,1 %) et la constatation de dissimulations (40,2 %). Certains secteurs socioprofessionnels concentrent les plaintes. Il s’agit du BTP qui concentre près d’un quart des dossiers de fraude fiscale, devant les secteurs du commerce (21,62 %) et des services (21,91 %). Les dirigeants de sociétés salariés ont fait l’objet de plus de 15 % des plaintes autorisées par la CIF. Le nombre de plaintes pour escroquerie fiscale déposées en 2015 a été de 135. Ce chiffre a presque doublé en 6 ans. Il n’était que de 75 en 2009. Le total des droits en jeu est passé de 11,15 millions d’euros à 30,75 millions d’euros.

Notes de bas de pages

  • 1.
    http://www.gouvernement.fr/argumentaire/des-resultats-en-hausse-dans-la-lutte-contre-la-fraude-fiscale.
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