Tribunal judiciaire de Paris : les renforts arrivent enfin !
Plus de 100 magistrats ont été installés dans leurs nouvelles fonctions au tribunal judiciaire de Paris jeudi 1er septembre. Le président Stéphane Noël a salué l’arrivée de renforts de qualité « absolument nécessaires, tant au civil qu’au pénal ».
Il est des rentrées plus joyeuses que d’autres. La cérémonie d’installation organisée par le tribunal judiciaire de Paris ce jeudi 1er septembre s’est déroulée dans une ambiance réjouie.
Et pour cause, la juridiction accueille pas moins d’une centaine de magistrats. Une manne espérée de longue date par le Président Stéphane Noël qui, à chaque rentrée depuis sa prise de fonctions, n’a de cesse de dénoncer l’insuffisance des moyens de la plus importante juridiction de France. En janvier 2021 par exemple, il regrettait que les renforts reçus au mois de septembre précédent aient été pour l’essentiel affectés au parquet et prévenait : « La capacité de jugement du tribunal de Paris est fortement obérée pour ce premier semestre 2021 par une dégradation sans précédent de ses effectifs, entraînant une diminution de notre capacité de jugement dans de nombreux domaines » (lire notre article ici).
Au mois de janvier 2022, il rappelait que son tribunal comportait en théorie 366 magistrats, mais en pratique seulement 338 : « Ce qui nous met en difficultés en matière civile et nous empêche d’être à la hauteur de la capacité de jugement en matière pénale Nous sommes très loin d’une justice réparée ou en bon état de fonctionnement » (notre compte-rendu de cette rentrée est accessible ici).
Le message a, semble-t-il, été reçu Place Vendôme.
La promotion remarquée de Serge Tournaire
Paris installe en cette rentrée 72 magistrats du siège, auxquels s’ajoutent 5 magistrats temporaires et 4 juristes assistants/assistants spécialisés. Le parquet de Paris quant à lui installe 25 magistrats, ainsi que 4 magistrats au parquet national financier (PNF) et 4 au parquet national antiterroriste (PNAT). Il y a parmi ces installations des changements de poste ou des promotions, on ne compte donc pas 110 nouveaux magistrats, mais les renforts sont néanmoins significatifs. Habituellement en effet, les installations en septembre à Paris tournent plutôt autour de 40 à 50 magistrats au siège.
Parmi les arrivées remarquées, celle du célèbre juge d’instruction Serge Tournaire, qui a traité notamment les affaires Bygmalion et Fillon. Après trois années passées à Nanterre, il rejoint Paris où il est promu premier vice-président en charge de l’instruction. Selon un article du Monde daté du mois de mars, sa nomination aurait été bloquée par le garde des sceaux Eric Dupond-Moretti. Elle figure finalement dans le troisième décret de nomination paru en août.
La vacance de postes au TJ de Paris au 1er novembre 2022 sera de 10 magistrats pour un effectif théorique fixé à 372, étant précisé qu’un poste pourvu n’est pas forcément occupé (maladie, congés, temps partiels, décharges). Les nominations sont consultables dans les décrets des 14 avril, 11 juillet et 12 août. Même le greffe est renforcé, quoique dans des proportions moindres, avec l’arrivée de 6 greffiers au siège et 3 au parquet de Paris ainsi que des fonctionnaires de catégorie C.
L’importance de l’attention à autrui
La procureure de Paris Laure Beccuau a salué le « nombre réjouissant » de magistrats et greffiers installés. En tant que chef du parquet, elle a souhaité à ses collègues d’être heureux de venir travailler le matin. Le propos n’est pas anodin tant les personnels judiciaires dénoncent ouvertement depuis des mois leur souffrance au travail dans toutes les juridictions (voir nos articles ici). Sur le terrain déontologique, elle les incite à développer l’attention à autrui qui constitue à ses yeux le socle de toutes les autres règles. Enfin, concernant le fonctionnement du parquet, elle a proposé de reprendre la maxime des mousquetaires : « un pour tous, tous pour un ».
Côté siège, Stéphane Noël a salué l’arrivée de renforts de qualité « absolument nécessaires tant au civil qu’au pénal », tout en soulignant que les effectifs parisiens n’étaient « pas encore complètement à niveau ». Dans son message d’accueil aux nouveaux arrivants, venus de la France entière, il a insisté sur l’importance du tribunal de Paris par sa taille et le fait que ses décisions sont observées de près.
« En avant, calme et droit »
« Ne nous enfermons pas dans la tour des certitudes, il n’y a pas de pire juge que celui qui ne se remet pas en cause ou ne doute pas » a-t-il prévenu, invitant ses collègues à se souvenir que pour le justiciable la rencontre avec la justice est toujours un moment important et qu’il faut offrir « une image de juges ouverts, épanouis, disponibles », acceptant la critique et les réformes car « l’activité judiciaire porte aussi en elle une partie de la cohésion nationale ».
De même, a-t-il déclaré en se tournant vers la bâtonnière de Paris Julie Couturier et le vice-bâtonnier Vincent Nioré : « Il n’y a pas de bonne justice sans avocat, il est impératif qu’au quotidien les relations entre les magistrats, les avocats et les greffes soient empreintes de délicatesse, de politesse et d’attention de manière réciproque et permanente ».
En conclusion, il a proposé à ses collègues d’adopter la devise du Cadre noir de Saumur, qui est également le titre d’un roman de François Nourissier, « En avant, calme et droit ».
Référence : AJU315737