Non-résidents : régimes des plus-values immobilières
Voilà les dernières précisions de l’administration sur le traitement fiscal et social applicable aux plus-values immobilières réalisées par des non-résidents.
L’article 43 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a prévu deux modifications du régime d’exonération des plus-values immobilières réalisées au titre de la cession de biens immobiliers situés en France, applicable aux non-résidents. D’une part, le 1 du I de l’article 244 bis A du Code général des impôts (CGI) prévoit dorénavant l’application, sous conditions, d’une exonération de la plus-value réalisée au titre de la cession de l’ancienne résidence principale située en France par des personnes physiques devenues non résidentes. D’autre part, les conditions d’application de l’exonération spécifique prévue au 2° du II de l’article 150 U du CGI ont été modifiées, en portant de 5 à 10 ans, à compter du transfert par le cédant de son domicile fiscal hors de France, le délai avant l’expiration duquel doit intervenir la cession lorsque le cédant n’a pas la libre disposition du bien au moins depuis le 1er janvier de l’année précédant celle de la cession. Ces dispositions s’appliquent aux plus-values immobilières réalisées au titre des cessions intervenues depuis le 1er janvier 2019. Une série de commentaires administratifs est venue préciser l’application des ces mesures au printemps dernier (BOFIP du 19 avril 2019). Un arrêté, publié fin juillet, est venu préciser les conditions nécessaires à la dispense de CSG et de CRDS applicable aux plus-values immobilières des non-résidents.
Départ de France et exonération fiscale
Lors de la vente ou cession à titre onéreux d’un bien immobilier situé en France ou lors de la vente ou cession à titre onéreux de parts d’une société dont l’actif est principalement constitué d’immeubles situés en France, la plus-value, directe ou indirecte réalisée par un non-résident fait l’objet d’un prélèvement au taux de 19 % quel que soit le pays de résidence du vendeur. Celle-ci sera également soumise aux prélèvements sociaux au taux global de 15,5 %. Le 1 du I de l’article 244 bis A du CGI, dans sa rédaction issue de l’article 43 de la loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, prévoit une exonération de la plus-value réalisée au titre de la cession de l’immeuble qui constituait la résidence principale en France du cédant à la date du transfert de son domicile fiscal hors de France dans un État membre de l’Union européenne ou dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement ayant une portée similaire à celle prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil du 16 mars 2010 concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures, et qui n’est pas un État ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du CGI. Cette exonération s’applique à la double condition que la cession soit réalisée au plus tard le 31 décembre de l’année suivant celle du transfert par le cédant de son domicile fiscal hors de France et que l’immeuble n’ait pas été mis à la disposition de tiers, à titre gratuit ou onéreux, entre ce transfert et la cession. L’exonération ne s’applique donc pas aux cessions portant notamment sur des immeubles qui, au jour du transfert du domicile fiscal hors de France, sont mis en location, sont occupés gratuitement par des membres de la famille du propriétaire ou des tiers ou sont devenus vacants. L’administration fiscale, dans ses commentaires, précise que le principe comporte quatre assouplissements : en cas d’immeuble occupé par le futur acquéreur, en cas d’immeuble cédé par des époux séparés ou divorcés, par des concubins séparés ou par des partenaires ayant rompu un pacs, en cas de cession d’un immeuble en cours de construction réalisée à la suite d’une mutation professionnelle et en cas de cession d’une péniche ou d’un bateau à usage d’habitation principale du cédant. Pour l’administration fiscale, la date de la cession correspond à la date de la signature de l’acte authentique d’achat. La date du transfert du domicile fiscal s’appréhende au regard de chaque situation de fait. Il s’agit de la date à laquelle le contribuable ne peut plus être regardé comme domicilié en France au regard de l’article 4 B du CGI et cesse ainsi d’être soumis en France à une obligation fiscale sur l’ensemble de ses revenus. Les dépendances immédiates et nécessaires de la résidence principale dont la cession est exonérée, sont également exonérées à la condition que leur cession intervienne simultanément avec celle desdits immeubles (chambre de bonne, garage, etc.). Cette exonération est de caractère général, précise l’administration fiscale dans ses commentaires. Elle est acquise lorsque les conditions sont remplies quels que puissent être les motifs de la cession, la nature de l’habitation, le montant du prix de cession ou de la plus-value et l’affectation que l’acquéreur envisage de donner à l’immeuble, même s’il est destiné à être démoli en vue de l’édification de nouvelles constructions. L’immeuble cédé doit constituer la résidence principale du propriétaire lui-même. Il peut toutefois être détenu par l’intermédiaire d’une société de personnes. Est considérée comme résidence principale au sens du 1 du I de l’article 244 bis A du CGI, l’immeuble ou la partie d’immeuble qui constituait la résidence habituelle et effective du propriétaire à la date du transfert de son domicile fiscal hors de France. Les droits relatifs à ces biens peuvent également bénéficier de cette exonération.
Plus-values immobilières des non-résidents : une exonération spécifique assouplie
Ce principe souffre une exception prévue au 2° du II de l’article 150 U du CGI qui prévoit une exonération pour les plus-values réalisées au titre des cessions, d’un logement situé en France par des personnes physiques, non-résidentes de France, ressortissantes d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. Les fonctionnaires et agents de l’État en poste à l’étranger, qui sont domiciliés fiscalement en France, peuvent bénéficier de cette exonération.
L’exonération ne s’applique pas lorsque le bien est détenu par l’intermédiaire d’une personne morale, une SCI par exemple. Cette exonération s’applique dans la limite d’une résidence par contribuable et est plafonnée à 150 000 € de plus-value nette imposable. Ce plafonnement à 150 000 € de la plus-value exonérée s’apprécie au niveau du cédant. Les concubins, tout comme les indivisaires, constituent chacun un cédant unique et font à ce titre l’objet d’une taxation distincte en matière d’imposition des plus-values. Par suite, l’appréciation du plafonnement à 150 000 € de la plus-value exonérée s’effectue individuellement au niveau de la quote-part de plus-value réalisée par chacun des concubins ou co-indivisaires. Dans le cas d’un bien cédé conjointement par un couple marié, les époux sont considérés comme des co-cédants. Toutefois, il est admis d’apprécier le plafonnement à 150 000 € de la plus-value exonérée comme en matière d’indivision, c’est-à-dire au niveau de la quote-part du bien, et donc de la plus-value revenant à chacun des époux et non au regard de la plus-value totale réalisée par le couple. Un couple marié pourrait donc prétendre à une exonération plafonnée à 300 000 € sur le montant total de la plus-value dans l’hypothèse où il céderait un bien détenu conjointement. La fraction de la plus-value nette supérieure à 150 000 € est imposable dans les conditions de droit commun. Ce dispositif s’applique sous réserve du respect des conditions suivantes. Le cédant doit avoir été fiscalement domicilié en France de manière continue pendant au moins deux ans à un moment quelconque antérieurement à la cession. La cession doit intervenir au plus tard le 31 décembre de la dixième année suivant celle du transfert par le cédant de son domicile fiscal hors de France. La situation du logement cédé depuis le transfert de domicile fiscal n’a pas d’incidences (mise en location ou libre disposition) ou, sans condition de délai, lorsque le cédant a la libre disposition du bien au moins depuis le 1er janvier de l’année précédant celle de la cession. Le cédant ne doit pas avoir déjà bénéficié de cette exonération depuis le 1er janvier 2006. Par ailleurs, les non-résidents ne peuvent pas bénéficier des exonérations d’impôts prévues en cas de cession de la résidence principale ou lors de la première vente d’un logement qui ne constitue pas une résidence principale.
La plus-value imposable en France est déterminée selon les mêmes modalités que celles applicables aux résidents de France avec notamment la prise en compte d’un abattement pour durée de détention. Ainsi, pour la détermination du montant imposable à l’impôt sur le revenu, l’abattement pour durée de détention est de 6 % pour chaque année de détention au-delà de la 5e et jusqu’à la 21e et de 4 % au terme de la 22e année de détention. Au total, l’exonération d’impôt sur le revenu est acquise au-delà d’un délai de détention de 22 ans. S’agissant des prélèvements sociaux, l’abattement pour durée de détention est de 1,65 % pour chaque année de détention au-delà de la 5e et jusqu’à la 21e, 1,60 % pour la 22e année de détention, 9 % pour chaque année au-delà de la 22e. L’exonération des prélèvements sociaux est acquise au-delà d’un délai de détention de 30 ans.
Le représentant fiscal
Un représentant fiscal doit être systématiquement désigné. Peuvent avoir la qualité de représentant fiscal une société ou un organisme déjà accrédité de façon permanente par l’administration fiscale, les banques et établissements de crédit exerçant leur activité en France, l’acquéreur du bien s’il a son domicile fiscal en France ou toute autre personne ayant son domicile fiscal en France à l’exclusion des notaires et des avocats. Dans ce dernier cas, le représentant doit être accrédité par l’Administration. L’accréditation doit être demandée auprès de la direction départementale ou régionale des finances publiques correspondant au lieu de situation de l’immeuble ou au siège de la société à prépondérance immobilière en cas de cession de parts. Lorsque le lieu de situation des biens est situé dans Paris intra-muros, l’accréditation doit être demandée auprès de la direction régionale des finances publiques d’Ile-de-France. Lorsque le siège de la société à prépondérance immobilière (cession de parts, actions ou droits) est situé à l’étranger, l’accréditation doit être demandée auprès de la Direction des résidents à l’étranger et des services généraux (DRESG). Il existe cependant une dispense automatique de désignation d’un représentant fiscal dans trois situations. C’est le cas lorsque le cédant est domicilié, établi ou constitué dans un État membre de l’Union européenne (UE) ou dans un autre État partie à l’accord sur l’espace économique européen (EEE) ayant conclu avec la France certaines conventions d’assistance administrative (Islande et Norvège). Cette dispense s’applique également pour les cessions dont le prix est inférieur ou égal à 150 000 €. Ce seuil s’apprécie par cédant. Enfin, pour les cessions bénéficiant d’une exonération de plus-value au regard tant de l’impôt sur le revenu que des prélèvements sociaux compte tenu de la durée de détention du bien (22 ans pour l’impôt sur le revenu et 30 ans pour les prélèvements sociaux), il n’est pas nécessaire de désigner un représentant fiscal.
Exonération de prélèvements sociaux pour les résidents de l’EEE ou de la Suisse
Les prélèvements sociaux sont dus au taux global de 17,2 %. Cependant, concernant les prélèvements sociaux, l’article 26 de la loi n°2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoit une exonération de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), pour les cessions réalisées à compter du 1er janvier 2019, au titre des plus-values immobilières imposées au prélèvement prévu à l’article 244 bis A du CGI réalisées par des personnes qui, par application des dispositions du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, relèvent en matière d’assurance maladie d’une législation soumise à ces dispositions et qui ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français. Dans ce cas, seul le prélèvement de solidarité de 7,5 % est dû dans la mesure ou il est affecté au budget de l’État et non au financement de la sécurité sociale. Pour bénéficier de la dispense de CSG et de CRDS, les non-résidents doivent produire une attestation. Le modèle d’attestation à utiliser pour bénéficier de la dispense de CSG et de CRDS vient d’être communiqué (arr. du 29 juillet 2019. JORF n°0190 17 août 2019). Il s’agit d’une attestation sur l’honneur, dans laquelle le contribuable certifie ne pas être à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français mais relever d’une caisse de protection sociale d’un autre État, en qualité de travailleur salarié ou non-salarié ou en qualité de titulaire d’une pension ou d’une rente de retraite, d’invalidité, d’accident du travail et de maladie professionnelle. Le demandeur doit attester être en possession d’une des pièces justificatives figurant sur la liste de l’Administration et s’engager à la produire à toute demande de l’Administration (formulaire S1 « Inscription en vue de bénéficier de prestations de l’assurance maladie » délivré en application des règlements européens (CE) n° 883/04 et (CE) n° 987/09 et mentionnant l’affiliation de la personne auprès de l’un des États membres de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ou en Suisse ; formulaire A1 « Certificat concernant la législation de sécurité sociale applicable au titulaire » délivré en application des règlements européens (CE) n° 883/04 et (CE) n° 987/09, etc.). Cette attestation est valable pour une durée maximale de trois ans.