PLF 2018 : focus sur les réformes fiscales patrimoniales (1/2)

Publié le 18/10/2017

Le projet de loi de finances pour 2018 met en œuvre deux grandes réformes annoncées qui figuraient dans le programme électoral d’Emmanuel Macron : la réforme de la taxation des revenus du capital, avec l’instauration d’un prélèvement forfaitaire unique au taux de 30%, et le recentrage de l’ISF sur le patrimoine immobilier.

On en sait désormais un peu plus sur le contenu des mesures fiscales qui devraient s’appliquer aux particuliers l’an prochain. Déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 27 septembre dernier (n° 235), le projet de loi de finances pour 2018 prévoit de mettre en œuvre deux réformes d’ampleur : la Flat tax sur les revenus du capital et la réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune.

I – Flat tax sur les revenus du capital

À partir du 1er janvier 2018, serait instauré un  prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital de 30 %. Prévue par l’article 11 du PLF, cette imposition se décompose en un taux forfaitaire d’IR de 12,8 %, auquel s’ajouteront les prélèvements sociaux au taux global de 17,2 % à la suite de la hausse du taux de la contribution sociale généralisée (CSG) prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2018. L’option pour le barème de l’IR sera maintenue pour les contribuables dont le niveau d’imposition résultant de l’application du barème serait plus favorable. La contribution exceptionnelle sur les hauts revenus applicable aux revenus de l’épargne mobilière continuerait de s’appliquer.

Revenus de capitaux mobilier, PEL et CEL

Tous les revenus de capitaux mobiliers sont concernés : intérêts, revenus distribués et revenus assimilés. S’y ajoutent les intérêts des nouveaux plans et comptes d’épargne-logement (PEL et CEL) ouverts à compter du 1er janvier 2018. Par ailleurs, le PLF prévoit de supprimer la prime d’épargne logement pour ces nouveaux PEL et CEL ouverts à compter du 1er janvier 2018.

Assurance-vie : plusieurs régimes vont coexister

Les produits des contrats d’assurance-vie concernés par la réforme sont les produits issus des primes versées à compter du 27 septembre 2017. Toutefois, le taux forfaitaire dérogatoire de 7,5 % continuera de s’appliquer aux produits contenus dans un rachat opéré par un même assuré sur un contrat d’une durée supérieure à 6 ans (contrats souscrits entre le 1er  janvier 1983 et le 31 décembre 1989) ou 8 ans (contrats souscrits depuis 1990)  lorsque le montant total des encours, net des produits, détenu par l’assuré sur l’ensemble de ses contrats n’excède pas un seuil de 150 000 €.

Pour les contribuables dont l’encours atteint le seuil de 150 000 € au 31 décembre de l’année précédant l’année du rachat, les produits issus de nouveaux versements seront imposés à 12,8 % au prorata de l’encours dépassant le seuil.

Les plus-values concernées

Entrent également dans le champ de la Flat tax les plus-values de cession de valeurs mobilières et droits sociaux et autres revenus et gains assimilés : distributions de plus-values perçues de certaines structures d’investissement à risque, profits sur les instruments financiers à terme, gains de cession de titres souscrits en exercice de BSCPE, ainsi que certaines plus-values et créances entrant dans le champ d’application de l’Exit tax. Sont épargnés par la réforme l’exonération des intérêts des livrets A, LDD et LEP ainsi que le régime du PEA et du PEA-PME.

Dividendes et clause de sauvegarde pour les PME innovantes

La réforme préserve l’abattement de droit commun ainsi que l’abattement renforcé pour les cessions de titres de PME de moins de 10 ans en faveur des contribuables qui ont acquis ou souscrit leurs titres antérieurement au 1er  janvier 2018 et qui optent pour une imposition de l’ensemble de leurs revenus du capital au barème de l’IR. L’abattement de 40 % applicable à l’assiette des dividendes sera également maintenu en cas de soumission de ces revenus au barème progressif de l’IR.

L’abattement fixe du cédant qui part en retraite prorogé jusqu’en 2022

Par ailleurs, l’abattement fixe en faveur du dirigeant de PME qui cède ses titres avant de partir à la retraite est prorogé. Les plus-values de cession réalisées à compter du 1er janvier 2018 et jusqu’au 31 décembre 2022,  pourront bénéficier d’un abattement fixe de 500 000 €, quelles que soient les modalités d’imposition de ces plus-values. En revanche, à la différence du dispositif qui prend fin le 31 décembre 2017, l’abattement fixe ne pourra pas se cumuler avec les dispositifs d’abattements proportionnels de droit commun ou renforcé maintenus dans le cadre de la clause de « sauvegarde ».

Conséquences pour les non-résidents

Pour les personnes physiques non résidentes, le taux de la retenue à la source ou du prélèvement applicable à certains revenus de capitaux mobiliers et plus-values de cession de participations substantielles, sera ramené  de 15 ou 21 % à 12,8 %. Pour les plus-values de cession de participations substantielles réalisées par des personnes morales ou organismes non-résidents, le taux du prélèvement est aligné sur celui de l’impôt sur les sociétés.

Actions gratuites

Pour les actions gratuites dont l’attribution aux salariés et dirigeants est autorisée par une décision de l’assemblée générale extraordinaire prise à compter de l’entrée en vigueur de la présente réforme, l’avantage salarial restera imposable au barème progressif avec application, dans la limite de 300 000 € de gains, d’un abattement de 50 %. À la revente, la plus-value sera comme n’importe quelle plus-value éligible, sur option, à la Flat tax de 30 %.

Fin du régime de l’anonymat

Il est mis fin au régime fiscal dérogatoire de l’anonymat applicable à certains bons ou titres détenus au porteur en permettant à l’administration fiscale de connaître l’identité des souscripteurs ou bénéficiaires de l’ensemble des droits financiers. Cette identité est connue des établissements financiers au regard des obligations relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement des activités terroristes, prévues aux articles L. 561-1 et suivants du Code monétaire et financier (CMF), qui les obligent à obtenir l’identité des bénéficiaires de ces bons, titres et valeurs tout au long de la relation d’affaires. Il n’est donc pas cohérent de conserver un « anonymat fiscal ». Cette mesure découle directement de l’engagement international de la France en faveur de la transparence fiscale, notamment concernant la connaissance des bénéficiaires effectifs des revenus. Elle participe en outre de la mise en œuvre de la norme mondiale d’échange automatique d’informations sur les comptes financiers à compter de 2017.

Les nouvelles modalités d’imposition entreront en vigueur à compter de 2018.

II – Réforme de l’ISF : l’IFI  

L’article 12 abroge l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et institue un impôt sur la fortune immobilière (IFI) des personnes physiques détenant un patrimoine immobilier important (soit un actif net supérieur à 1,3 millions d’euros). Assis sur les seuls actifs immobiliers, l’IFI reposera sur le même barème et les mêmes règles dont l’abattement de 30 % sur la résidence principale que l’actuel ISF. La réduction d’impôt ISF DON en faveur des dons aux organismes d’intérêt général sera transposée dans l’IFI.

III – Incitations fiscales

Reconduction du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE)

L’article 8 du PLF met en œuvre l’engagement du président  de la République de  « transformer le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) en prime immédiatement perceptible au moment des travaux et non l’année suivante ». La suppression du CITE, qui figure à l’article 1586 octies du CGI,  est progressive sur 6 mois, pour les dépenses d’acquisition de matériaux d’isolation thermique des parois vitrées, de volets isolants et de portes d’entrée donnant sur l’extérieur.

Le taux du crédit d’impôt sera ramené à 15 % au lieu de 30 % pour les dépenses payées à compter du 27 septembre 2017. Ensuite, les dépenses payées à compter du 28 mars 2018 ne seront plus éligibles.  Pour les dépenses payées jusqu’au 31 décembre 2018 et engagées par l’acceptation d’un devis et le versement d’un acompte avant le 27 septembre 2017 ou le 28 mars 2018, pourront bénéficier du crédit d’impôt dans ses conditions antérieures, soit respectivement au taux de 30 % ou de 15%.

Par ailleurs, le projet prévoit d’exclure du bénéfice du CITE, pour les dépenses payées à compter du 27 septembre 2017, les dépenses d’acquisition de chaudières à haute performance énergétique les plus carbonées, celles utilisant le fioul comme source d’énergie. Les dépenses payées jusqu’au 31 décembre 2018 et engagées par l’acceptation d’un devis et le versement d’un acompte avant le 27 septembre 2017 resteront toutefois éligibles. À noter qu’il est prévu de maintenir le taux réduit de 5,5 % de la TVA pour les travaux portant sur la pose, l’installation et l’entretien des matériaux et équipements exclus du bénéfice du CITE. En 2019, il sera recentré en prime de sorte que les contribuables n’auront plus à financer l’intégralité des travaux.

Le dispositif Pinel : recentré et prolongé de 4 ans

L’article 39 réforme le dispositif Pinel de l’article 199 novovicies du CGI en faveur de l’investissement locatif intermédiaire. Il est recentré sur les zones géographiques où la tension entre l’offre et la demande de logements est la plus forte. À compter du 1er janvier 2018, il sera réservé aux seules acquisitions ou constructions de logements réalisées dans les zones A, A bis et B1 du territoire, c’est-à-dire l’agglomération parisienne, la Côte d’Azur, l’agglomération genevoise et certaines grandes agglomérations, ainsi que les départements d’outre-mer pour quatre années supplémentaires.

Prorogation du dispositif du PTZ

L’article 40 prévoit de proroger pour 4 ans, soit jusqu’au 31 décembre 2021, le prêt à taux zéro (PTZ) qui devait s’éteindre au 31 décembre 2017. Il sera recentré, pour les logements anciens, sur les opérations d’acquisition dans les zones qui ne sont pas marquées par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements et, pour les constructions neuves, dans les zones où les besoins en logements sont les plus importants.

IV – Réforme de la taxe d’habitation

L’article 3 du PLF prévoit un allégement progressif de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages au titre de leur résidence principale d’ici 2020. À compter des impositions de 2018, un nouveau dégrèvement sera ajouté aux exonérations existantes, au titre de la résidence principale.

En 2018 et 2019, la cotisation de taxe d’habitation restant à charge de ces foyers, après application éventuelle du plafonnement existant, sera abattue de 30 % puis de 65 %.

Ce nouveau dégrèvement concernera les foyers dont les ressources n’excèdent pas 27 000 € de revenu fiscal de référence (RFR) pour une part, majorées de 8 000 € pour les deux demi-parts suivantes, soit 43 000 € pour un couple, puis 6 000 € par demi-part supplémentaire.

Pour limiter les effets de seuil, le droit à dégrèvement sera dégressif pour les foyers dont les ressources se situent entre ces limites et celles de 28 000 € pour une part, majorées de 8 500 € pour les deux demi-parts suivantes, soit 45 000 € pour un couple, puis 6 000 € par demi-part supplémentaire.

De façon à préserver l’autonomie financière des collectivités, l’État prendra en charge les dégrèvements, dans la limite des taux et des abattements en vigueur pour les impositions de 2017, les éventuelles augmentations de taux ou d’abattements étant supportées par les contribuables. Un mécanisme de limitation des hausses de taux décidées ultérieurement par les collectivités et de prise en charge de leurs conséquences, de manière à garantir un dégrèvement complet, en 2020, pour les foyers concernés, sera discuté dans le cadre de la Conférence nationale des territoires. Dans ce cadre sera également mise à l’étude une refonte plus globale de la fiscalité locale.

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