Cette semaine chez les Surligneurs : Le « service public de la petite enfance » d’A. Hidalgo, fausse bonne idée ?
A quoi pense exactement Anne Hidalgo quand elle évoque sa volonté de créer un « service public de la petite enfance » ? Attention, mettent en garde les Surligneurs, un tel projet a des implications juridiques insoupçonnées ! La France peut-elle vraiment négocier seule avec le Royaume-Uni un accord sur la pêche comme le prétend Nicolas Dupont-Aignan ? Telles sont quelques uns des passionnants décryptages que proposent les Surligneurs cette semaine.
Anne Hidalgo veut créer un service public de la petite enfance, une promesse un peu rapide
L’insuffisance du nombre de places en crèche est criante en France. Cela entrave l’accès au travail pour les femmes, et c’est ce qui a conduit Anne Hidalgo, candidate PS à la présidence de la République, à promettre de créer, si elle est élue, un “service public de la petite enfance”.
Crèches municipales ou crèches privées, l’offre ne couvre que partiellement les besoins, et les parents doivent recourir aux assistantes maternelles, système bien plus coûteux et subventionné par la Caisse d’allocations familiales. Face à cette offre très bigarrée, la réponse consistant à créer un “service public de la petite enfance” n’est pas en soi critiquable juridiquement. Reste que, dit comme cela, c’est insuffisant, et cela ne renseigne pas sur les implications juridiques.
Un service public national est géré par l’État, qui en assume donc les dépenses, alors que jusque-là les communes étaient seules mises à contribution. Cela signifie que l’État reprendra sous son giron les crèches existantes et surtout qu’il s’engage à en créer d’autres, autant qu’il en faudra. Car service public national signifie aussi égalité devant le service public : toute personne devra avoir accès à ce service public où qu’elle se trouve sur le territoire, à un coût raisonnable. Il faudra donc déployer un réseau de crèches là où, actuellement, il en manque.
Qu’adviendrait-il des 1900 crèches privées existantes ? Ces crèches sous contrat seraient donc subventionnées par l’État, de façon à en réduire le coût pour les parents. Et comme pour les écoles aussi, il y aurait des crèches hors contrat, de luxe ou très marquées sur le plan idéologique ou religieux. On le voit, cette promesse lancée par la candidate socialiste nécessite d’être précisée, car ses implications vont bien au-delà de la seule ouverture de nouvelles crèches.
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Nicolas Dupont-Aignan souhaite que la France négocie seule avec le Royaume-Uni un nouvel accord sur la pêche
Sauf que c’est impossible. La France ne peut pas négocier seule un accord sur la pêche avec le Royaume-Uni, car cela relève des pouvoirs de l’Union européenne. C’est donc à la Commission européenne de trouver une solution, même si le gouvernement français, premier concerné, peut aider à y parvenir. C’est ce que le secrétaire d’État aux Affaires européennes, Clément Beane, a tenté de faire ce jeudi à Paris en recevant le ministre britannique du Brexit, David Frost. Mais à la fin, c’est bien l’Union européenne qui concluera un nouvel accord, si cela devait s’avérer nécessaire.
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Une bonne fois pour toutes, comment distinguer Conseil de l’Europe, Conseil européen et Conseil ?
Ces derniers jours, le Conseil de l’Europe a fait circuler sur les réseaux sociaux une campagne visant à promouvoir la tolérance, et qui faisait incidemment la promotion du voile islamique comme élément de liberté de la femme. Une campagne rapidement dénoncée par divers partis politiques et responsables associatifs en France, et finalement retirée des réseaux sociaux par le Conseil de l’Europe. Cette campagne faisait partie d’un programme plus large de promotion de la tolérance ayant reçu des fonds de la Commission européenne. Il n’en fallait pas plus pour que sur les plateaux télé et les réseaux sociaux, la plus grande confusion se répande sur qui avait fait quoi et qu’on mélange tout de go Conseil de l’Europe et Conseil européen. Alors une bonne fois pour toutes, comment ne plus faire la confusion ? Réponse sur le site des Surligneurs.
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La Convention européenne des droits de l’homme donne-t-elle priorité à la loi, comme l’affirme le candidat LR Philippe Juvin ?
Pour ce candidat à la primaire des Républicains, ancien député européen et actuel maire de la Garenne-Colombes, la Cour européenne des droits de l’homme ne respecte plus la lettre de l’article 8 de la Convention qui protège la vie privée et le droit à une vie familiale normale. Cependant, cet article, s’il vise bien la loi dans son paragraphe 2, ne le fait pas pour donner priorité au niveau national mais pour vérifier l’existence d’une loi pour justifier une ingérence. La Cour européenne des droits de l’homme reste donc dans son rôle en exerçant son contrôle sur l’ingérence et son caractère proportionné. Il faut en effet lire l’article 8 § 2 en entier, car après avoir dit que l’ingérence peut être justifiée lorsqu’elle est prévue par une loi, cette ingérence n’est possible que si elle poursuit un objectif légitime et qu’elle est nécessaire dans une société démocratique. La Cour ne fait que contrôler ce point, conformément à la lettre de la Convention.
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Réviser l’article 55 de la Constitution pour prévoir la primauté du droit national sur le droit européen : inutile ?
Nombreuses sont les propositions de révision de la Constitution formulées par les candidats à la présidentielle. Cette fois, c’est au tour du sénateur Les Républicains Bruno Retailleau, qui ne fait pas partie des cinq candidats à la primaire, d’envisager une modification de l’article 55 de la Constitution. L’objectif serait de donner la priorité aux lois adoptées postérieurement aux traités, et donc revenir à la jurisprudence du Conseil d’Etat de 1968 dite des “semoules de France”. Pour le juge administratif, le législateur devait être considéré comme agissant en toute connaissance de cause et en tant qu’organe d’expression de la volonté générale. Toutefois, deux obstacles se dressent face à cette proposition. La première est européenne, la réforme serait contraire à l’article 4 paragraphe 3 du traité sur l’Union européenne, qui prévoit sans ambiguïté l’exécution du droit de l’Union par les États membres. La seconde est interne : modifier l’article 55 ne suffit pas, il faut également aborder la question de l’article 88-1 de la Constitution. Celui-ci indique que “La République participe à l’Union européenne”, ce que le Conseil constitutionnel interprète comme imposant à la France… de respecter le droit de l’Union. La révision placerait ainsi le juge français face à un dilemme : doit-il donner la priorité à l’article 55, ou à l’article 88-1 de la Constitution ?
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Référence : AJU253571