Journal d’un pénaliste au temps de la COVID-19 (6)

Publié le 11/08/2020

L’actualité ne se repose jamais. Notre pénaliste Loeiz Lemoine non plus. Des rebondissements dans l’affaire Traore à la disparition de Gisèle Halimi, en passant par l’activisme féministe et le feuilleton des mises en cause de responsabilité dans la crise sanitaire, les sujets de débat ne manquent pas en cette période estivale. Revue de détail. 

 

Vendredi 24 juillet – La vérité n’a aucune importance, pourvu que les dossiers rentrent !

Journal d'un pénaliste au temps de la COVID-19 (6)
Mee Too – sexual harassment poster concept

Alice Coffin, élue EELV à Paris, sur Russia Today : « Ne pas avoir un mari, ça m’expose plutôt à ne pas être violée, ne pas être tuée, ne pas être tabassée. » C’est vrai, on n’y pense pas assez, mais puisqu’il y a des maris qui violent, tuent, tabassent, le plus simple est de n’en pas avoir. On me dit dans l’oreillette que pour cette personne, ceci vaut aussi pour les pères, et en fait plus généralement pour les hommes. Les femmes n’en ont pas besoin, les enfants non plus. Bon ben comme ça c’est plus simple, tout d’un coup.

Quelques jours plus tard : « Je sens une légère papa panique, au Monde et chez d’autres confrères. Ce sentiment est palpable à chaque fois que sur les plateaux on explique que se débarasser (SIC) de la figure du père est une des meilleures choses qui puisse arriver à l’humanité. #balancelePere ».

Se débarrasser de la figure du père est une des meilleures choses qui puisse arriver à l’humanité, on ne se lasse pas de le répéter.

Claire Hédon (nouveau défenseur des droits) sur Inter, très mesurée et évitant toute essentialisation : « Je n’aime pas ce terme général [NDA les violences policières] qui voudrait accuser l’ensemble de la police. Il y a un travail de formation des forces de sécurité, de réflexion au sein de la police pour changer certaines pratiques. »

Réplique d’Arié Alimi, toujours aussi nuancé sur ce sujet : « Madame, les affinités politiques n’obligent pas à trahir la parole de l’institution dont on vous a confié la charge. Ce faisant vous trahissez également les victimes d’un système de violence auquel vous contribuez dorénavant. #CédricChouviat @clairehedon ». Ça me désole de lire ça. J’apprécie Arié Alimi, malgré de profonds désaccords, et je suis navré de voir la vérité s’effacer devant le militantisme. Claire Hédon conteste qu’il existe un « système », c’est-à-dire, si on comprend mon confrère, que les violences dans la police (il le dit aussi du racisme) soient ontologiques. Du coup, quand Madame Hédon nuance la problématique, tout de suite ce sont les gros mots : trahison. Et pourquoi ? Parce qu’elle aurait je ne sais quelle partie liée avec (j’imagine) la majorité présidentielle ? Alors que si l’une des positions est idéologique, c’est bien celle d’Arié Alimi.

Il s’exprime, la liberté d’expression ne se discute pas, le débat est là, très bien. Mais croit-il, espère-t-il, que ceci va faire avancer le problème d’un iota ? Non bien sûr, mais comme il n’est pas la moitié d’un con, il ne le souhaite même pas… le but de toute cette mouvance n’est pas de résoudre des problèmes, mais bien de créer des oppositions et un manichéisme qui nous renvoie au vieux et désespérant « choisis ton camp, camarade ».

Interview d’une des égéries de la défense des femmes, en tant qu’elles ont toujours raison et les hommes, systématiquement tort, j’ai nommé Me Nathalie Tomasini : « Quand on a à la Justice un homme qui a défendu les agresseurs, il est évident qu’on ne se sente pas en sécurité » . Il est littéralement ahurissant de lire de pareilles inepties !

J’ai peur que cette consœur ne soit pas idiote (son cabinet est 12 fois plus connu que le mien), c’est donc pure démagogie, pour s’adresser à la clientèle de niche sur laquelle repose son activité. Elle s’est illustrée dans l’affaire Jacqueline Sauvage, que j’évoquai brièvement ici  et elle avait réussi à obtenir du président de la République, qui n’avait pas brillé par son courage en cette circonstance, une grâce dont beaucoup de condamnés rêveraient et qui avait contredit toutes les juridictions ayant eu à statuer dans cette affaire : deux cours d’assises puis un juge de l’application des peines récalcitrant.

Eric Dupond-Moretti n’est pas « un homme qui a défendu les agresseurs », c’est un avocat qui a défendu des personnes poursuivies. Que l’homme de la rue ne le comprenne pas, passe encore, mais une professionnelle, cela dépasse l’entendement. Vraiment ? Non, pas vraiment, car derrière ces déclarations tonitruantes et sous couvert de militantisme, il y a un intérêt bien compris  : la vérité n’a aucune importance, pourvu que les dossiers rentrent.

Samedi 25 juillet – Arash Derambrash condamné, Sorbonne complice ?

Réaction du compte Twitter « Vérité pour Adama », qu’on devrait débaptiser puisqu’il ne recherche pas la vérité, mais la condamnation des gendarmes pour sa mort (…) et son innocence pour les faits de viols dont un codétenu l’a accusé : Adama est victime d’un côté, innocent de l’autre, c’est tout ce qui compte. Pas de nuance, pas de gris, juste du noir et du blanc, du binaire : il est forcément victime, il ne peut être qu’innocent. Aucune cause ne gagne à ce jeu-là. Chacun se trouve invité à prendre parti, au lieu que la recherche de la vérité soit la cause commune, pour reprendre la formule de Montaigne.

Dans la même veine, communiqué de presse de Yacine Bouzrou, l’avocat de la famille Traore, pour expliquer que « la CIVI n’a ni le pouvoir ni la compétence de dire si une infraction pénale est avérée », alors qu’au contraire il n’y a d’indemnisation que si les faits « présentent le caractère matériel d’une infraction pénale ». On insinue qu’il s’agirait d’une vengeance et que si les faits avaient eu lieu, Adama Traore n’aurait pas été libéré… en feignant d’ignorer que la dénonciation des faits est postérieure à sa mort. Bref.

Epilogue dans l’affaire Derambarsh : la section disciplinaire de l’université Panthéon Sorbonne l’exclut définitivement de tout établissement d’enseignement public, annule sa soutenance et en conséquence son doctorat. La décision, dont la motivation est aussi précise que complète, est accablante et fait ressortir l’indigence de la défense présentée. A suivre, la décision de l’ordre des avocats.

Coup de chapeau aux 4 avocats qui se sont dévoués pour le défendre alors qu’il est comme le cambrioleur qui laissé son ADN, ses empreintes, sa carte d’identité et son téléphone sur les lieux, en plus des vidéos : il est très difficile alors de plaider la relaxe. Quand des vérifications purement factuelles ont montré 92% de pompage, j’admire (franchement, mais sans les envier toutefois) les avocats capables de plaider qu’il n’y a pas eu plagiat, je n’ai pas cette souplesse d’esprit.

Nouvel article très complet dans Le Point . Et réaction de l’ex docteur dans Le Monde : « c’est une machination ». J’y aurais jamais pensé !  Et il ajoute : « Si moi je suis dans la fraude – je ne le suis pas –, alors la Sorbonne est complice puisqu’elle a validé toutes les étapes de ma thèse ».

On ne saurait mieux dire et la décision (40 pages très étayées, qui font ressortir la faiblesse de ses explications) relève notamment deux dysfonctionnements :

1°) le blocage jusqu’en 2047, sans justification, de l’accès à la thèse,

2°) une trop grande proximité entre le doctorant et le jury, évoquant une « communauté d’intérêts manifeste ».

Tout est dit.

Et d’ailleurs une personne mal intentionnée (le monde est tellement méchant) ressort un tweet de Francis Szpiner en 2015 : « Fier d’avoir fait partie du jury qui a décerné à Arash Derambarsh le grade de docteur en droit. »

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Photo : ©Evannovostro/AdobeStock

Incendie de la cathédrale de Nantes, suite : « Le bénévole soupçonné aux prémices de l’enquête présenté à un juge (…) L’avocat du suspect, Me Quentin Chabert, n’a pas pu être joint samedi soir. » Quelle surprise.

Claude Askolovitch à propos d’Eugénie Bastié qui débarque sur Cnews : « Eugenie Bastié, qui a de la culture et du talent, mais pèche par esprit de système, devrait éviter cette facilité.  Une piètre télé n’ajoutera rien à sa gloire, même si cela paye. Mais un quinquagénaire qui a eu sa part de (très) mauvais choix n’est pas le meilleur juge. »

Et c’est vrai que, ayant bouffé à toutes les gamelles et notamment à i-Télé qui n’est autre que l’ancien nom de C-News, ayant soutenu Meddy Meklat y compris après la découverte de ses tweets antisémites et homophobes, assimilé les musulmans d’aujourd’hui aux juifs des années 30, et tracé un signe égal entre Zemmour et le connard qui lui a courageusement craché dessus dans la rue, Askolovitch a péché avec constance par esprit de système et par idéologie, et on a envie de lui dire : en effet tu n’es pas le meilleur juge et donc foin de prétérition, épargne nous (et épargne lui) tes avis sur ses choix professionnels.

Tiens qu’est-ce qui passe à la télé ? « Les secrets de François Truffaut ». Emballé par un documentaire sur Truffaut (que j’adore) et Godard (d’après moi le pire imposteur de l’histoire du cinéma, le Jeff Koons de la pellicule), je commence à regarder : bon déjà, présentation : Léa Salamé… admettons. Puis longue et scolaire annonce du plan, comme dans un devoir, en manière de teasing. Et là, qui vois-je en plus d’un chevrotant Jean-Pierre Léaud, pour parler de Truffaut ? Vincent Delerm et Nicolas Bedos… j’ai éteint avant de sombrer dans une dépression sévère (mais qu’est-ce que ces deux mecs peuvent bien avoir à raconter sur Truffaut ???) .

Dimanche 26 juillet – Certains aiment voir tomber les puissants

Dans GQ, compte rendu du livre qu’Ysabel Baudis consacre à l’affaire du même nom. Médias, rumeurs, présomption d’innocence, tout y passe. Mon principal souvenir de cette affaire, avait quelque chose de terrifiant, je dirais même totalitaire : interviewé à la télé, Dominique Baudis (qui en interviewa tant d’autres), transpirait abondamment. Cette manifestation physiologique fut vécue par beaucoup comme un signe de culpabilité. Je revois un confrère (un confrère !) m’expliquant que c’était évident, vu comment il transpirait, qu’il avait quelque chose à se reprocher. Je crois que certains aiment voir tomber les puissants.

Le maire EELV nouvellement élu de Colombes, explique que « les gendarmes français qui ont obéi aux ordres en mettant en œuvre la rafle du Vél d’hiv (…) sont les ancêtres de ceux qui aujourd’hui avec le même zèle, traquent les migrants, les sans-papiers et les déboutés des droits humains (déboutés du droit d’asile ?) ». Je préfère entendre ça qu’être sourd, mais tout juste. Cette comparaison entre les gendarmes (plutôt les policiers, mais passons) de Vichy et ceux de la République est une connerie et une honte. Celle des familles juives arrêtées pour cette seule raison afin d’être déportées, avec des personnes qui, pour fuir la misère ici ou là, sont en France illégalement, est tout aussi fausse et encore un peu plus scandaleuse.

Je prédis que ce succès des écolos aux municipales, qui les incite à se croire aussi gros qu’un bœuf, se dégonflera (je n’ose espérer une explosion) lors des prochaines élections, tant ils ont été prompts à montrer leur vrai visage. Les personnes authentiquement préoccupées d’écologie ne sont pas forcément favorables à ce qu’on accueille tous ceux qui voudraient demeurer en France, ou à abolir la différence entre réfugiés et migrants (ce qui reviendrait à faire disparaître toute idée de droit d’asile) : ça n’a aucun rapport, sauf pour eux, avec l’écologie, au sens de la préservation de la planète.

Quelques jours plus tard, il se dégonfle, dans un communiqué : il n’a pas voulu dire ça, et n’a jamais (puisqu’on vous le dit !) assimilé la police de Vichy et celle qui poursuit les migrants, ni leur sort et celui des juifs. Les gens, c’est connu, comprennent toujours tout de travers.

Mardi 28 juillet – Gisèle Halimi ou le féminisme total

Et voici une nouvelle d’une très grande importance : « Quand bien même le traitement de données personnelles effectué dans le cadre de l’application StopCovid serait pour l’essentiel conforme au droit de la protection des données, la CNIL met en demeure le ministère des solidarités et de la santé de se mettre en conformité sur quelques derniers éléments. »

Rappel statistique : si dans les pays (totalitaires) qui nous environnent, 30 à 40% de la population (tous des moutons) utilise des applications équivalentes (sous peine de mort, d’où le taux élevé), dans notre beau pays de liberté et de résistance au fascisme rampant, le taux est de l’ordre de 2%. Il était donc vital que la CNIL ajoute une mise en garde, ce n’est à aucun titre du temps et de l’énergie perdus. Pas plus que ce commentaire.

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Photo : ©Richochet64/AdobeStock

Réaction absolument adorable d’une consœur sur FB : « je suis tombée ( aïe) sur votre journal que j’ai dévoré avec délectation. (….) C’est peu dire que j’attends avec impatience, sur mon lieu paisible de villégiature, la suite de vos aventures intellectuelles. » Ça se fait de publier ses propres louanges ? 

Mort de Gisèle Halimi, 93 ans. Une sacrée femme, qui a montré toute sa vie un très grand courage et qui elle a pris des coups plus souvent qu’à son tour. Comme le monde a changé depuis qu’elle défendait une jeune fille qui s’était fait avorter à la suite d’un viol… c’en est vertigineux. Une grande figure du barreau, son engagement personnel ne faisait qu’un avec son engagement professionnel.

J’avais été marquée notamment par son intervention à la suite de ce qu’on a appelé l’affaire du voile de Creil en 1989, qui avait entrainé sa démission de SOS RACISME. Sa position, pourtant éclairée de source directe sur la question du patriarcat, diffère grandement de certain courant féministe actuel, « indigéniste » et « décolonial ». Pourtant, qui oserait affirmer que Gisèle Halimi n’était pas une vraie, une authentique féministe, qui s’est exposée un peu plus directement et à plus grand risque, que beaucoup de féministes en carton qui refusent de voir tous les progrès (peut-être insuffisants, mais pas nuls) des 40 dernières années ? Son féminisme, comme par exemple celui d’Elisabeth Badinter, n’était pas à géométrie variable, il était total.

Aptonyme : en cherchant des coordonnées, je tombe sur le nom d’un confrère qui s’appelle Leplaideur. Du coup j’hésite à entrer dans les ordres.

Mercredi 29 juillet – Vous avez dit « violences policières » ou « violences policières » ?

Darmanin, le poids des mots, le choc des propos : « Quand j’entends le mot ‘violence policière’, moi, personnellement, je m’étouffe ». Moi, quand j’entends ça, j’ai en tête le leit-motiv dont John Goodman accable le pauvre Steve Buscemi dans The big Lebowski : « shut the fuck up, Donny ! ». Ce choix est délibéré et peut-être prémédité, comme s’il avait prévu de faire un « bon mot » dans son intervention. C’est une erreur et il produira l’effet diamétralement opposé à celui qui était recherché.

On peut discuter la pertinence de l’expression violences policières lorsqu’elle suggère que tout emploi de la force publique constitue en soi des violences. Cependant il existe bien « des » violences policières et nous en avons eu récemment cent exemples. De même, il y a « des » ministres de l’intérieur : ceux qui soutiennent la police quoi qu’elle fasse, contre vents et marées, par principe et sans nuance, comme Pasqua qui en était l’exemple chimiquement pur : allez-y les gars, quoi que vous fassiez je vous couvre. (…). Ne parlons pas de Castaner dont je n’ai jamais compris qu’on ait pu lui confier de telles fonctions, pour lesquelles il n’avait manifestement pas les épaules.

Il nous faudrait une personne qui aurait une autorité suffisante pour tenir les deux bouts de la chaine : je vous soutiendrai toujours dans vos missions, contre les agressions, les guet-apens, etc., mais je ne laisserai rien passer quand vous commettrez des fautes, de la violence aux propos racistes en passant par les mauvais traitements aux déférés dans les geôles du palais de justice. Et là qu’est-ce qu’on a ? Un pauvre jeu de mot aussi bête que révoltant. Mais qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ?

Courrier international : « des rieslings et des gewurtzraminers, [ces] succulents et subtils vins blancs qui font la renommée de la région [vont] finir en gel hydroalcoolique pour les mains ». Horreur, malheur !

Journal d'un pénaliste au temps de la COVID-19 (6)
Jean-Michel Hayat, Premier président de la Cour d’appel de Paris – Rentrée solennelle de la Cour le 13 janvier 2020. (Photo : P. Cluzeau)

Appel de la Procureure générale contre la décision de Vincent Nioré. Evidemment. Ne pas le faire aurait été se contredire gravement, et laisser entendre qu’elle aurait subi des pressions ou reçu des instructions, que notre garde des Sceaux a dû bien se garder de lui donner, même de façon subliminale. Je le regrette pour notre ami en particulier et pour la défense en général car il y a là une vraie question de principe, lourde de conséquences potentielles.

Je n’ai pas de défiance a priori contre les magistrats de la cour d’appel et je serai presque rassuré quand on apprendra que le Premier président lui-même va s’occuper de cette affaire dans laquelle il avait, de ce qu’on en sait, pris une position plus que mesurée. Par ailleurs je sais, de source sûre, directe et même personnelle, à quel point il est soucieux des droits de la défense (avec un fayotage pareil, s’il ne confirme pas la relaxe… vraiment je ne comprends plus rien). Rappelons que cette poursuite, plus précisément analysée ici   (NDLR : notre enquête est accessible là) a été initiée par la Procureure générale après qu’elle a essayé de tordre le bras du bâtonnier qui refusait « d’écarter » Vincent Nioré en tant que son représentant.

La Nouvelle République (que je lisais pendant mon service militaire – édition de Bourges) à propos d’une nouvelle conseillère municipale EELV à Poitiers : cette « féministe intersectionnelle » veut « que Poitiers soit une ville inclusive ! » (comme l’écriture, avec des points médians partout ?) « Il faut déconstruire » : tout le langage de la sociologie militante (pléonasme), ce qui est très étrange pour une écologiste, dont la préoccupation devrait être de préserver.

Elle veut aussi réfléchir à la place des femmes dans l’espace public, nous dit le journal, notamment « en proposant, par exemple, des temps en non-mixité dans les infrastructures sportives. » Nous y voilà. La magnifique Mona Ozouf définit la France comme « une patrie littéraire et une patrie féminine », et rappelait ces mots de David Hume : « la France est le pays des femmes. » Ceci va avec une mixité qui ne date donc pas d’hier et qui caractérise la présence heureuse du féminin dans l’espace public.

Dans Libé, revoila Nathalie Tomasini, dans un « hommage » à Gisèle Halimi. En temps normal, je me serais épargné des souffrances inutiles et mâtinées d’envie de meurtre. Cependant, je suis esclave de mes devoirs, or douze et  quinze personnes attendent que je m’exprime sur certains sujets avant de décider ce qu’il faut en penser. Allons-y sans ambages : l’indécence est à son comble. Ce prétendu hommage est une page de publicité personnelle, elle ne parle que d’elle, de ses dossiers, de ce qu’elle a fait et de ce qu’elle fera.

Pardon Gisèle, pardon.

Quant à Libé, vous chiez pas la honte. Je pose la question : est-ce qu’il n’y avait pas, dans tout le barreau féminin, notamment pénal, des avocates plus aptes à rendre un véritable hommage à cette grande et si courageuse avocate ?

Je ne décolère pas.

Jeudi 30 juillet – Covid19 : une plainte pour délaissement, vraiment ?

L’UNEF non plus ne déçoit jamais ! Au lieu de perdre leur temps à étudier, ces jeunes gens ont eu l’idée, « En vue de la journée internationale de lutte pour le droit des femmes [de renommer] l’ensemble des amphis de la fac avec des noms de femmes influentes ! Du coup voilà un petit aperçu :

@RokhayaDiallo

@AyaNakamuraa

@laveritepradama

@Beyonce »

Je range cette « information » dans une catégorie que j’inaugure : « sans commentaires, ces infos qui parlent d’elle-même ».

France-Soir : « Le directeur de l’APHP a accusé Didier Raoult de « faux témoignage » lors de son audition. Ce dernier riposte aujourd’hui dans le journal la Provence. En sa qualité de directeur de l’IHU, il déclare avoir porté plainte à l’encontre de Martin Hirsch, devant le procureur de la République de Paris pour dénonciation calomnieuse. » Bon ben cette crise sanitaire aura eu au moins un avantage, que personnellement je trouve non négligeable : donner du boulot aux pénalistes.

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Two exhausted surgeons with hands on their heads as a sign of congestion

Tiens en parlant de ça , Le Monde   se fait l’écho du dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile, pour des faits de « délaissement ayant provoqué la mort », « violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner », « discrimination » et « entrave aux soins » dont vingt-huit parents ou ayants droit de treize personnes décédées du Covid-19 ont saisi, avec l’association Coronavictimes, le doyen des juges d’instruction de Paris.

Contrairement à l’omission de porter secours, le délaissement est une infraction de commission et non un délit d’omission. D’après la jurisprudence, il s’entend donc « d’un abandon positif, manifestant une volonté de rupture définitive de prise en charge de la part de l’agent. » L’élément intentionnel se caractérise par la conscience et la volonté d’abandonner définitivement une personne vulnérable dont le prévenu ou l’accusé avaient la charge. L’intention, en l’espèce, suppose la volonté de commettre matériellement  l’infraction.

Encore une fois, on a affaire à une interprétation imaginative et extensive. Difficile d’être plus précis sans avoir lu la plainte. Par ailleurs la question se pose de savoir qui elle vise (elle est contre X pour le moment, évidemment), et si elle va s’en prendre à des responsables ou à ceux qui étaient sur le terrain, les fantassins des EHPAD, qui étaient au contact des malades. En effet, le délaissement, contrairement à l’abstention de porter secours, qui concerne tout le monde, ne peut viser que les personnes qui ont la charge de la personne délaissée. Particularité : contrairement aux infractions involontaires, le résultat (décès notamment) confère à l’infraction un caractère criminel…

Imagine-t-on une infirmière, obligée de faire un choix drastique, par exemple en ne faisant pas hospitaliser une personne âgée, se retrouver en cours d’assises pour répondre de sa mort et encourir 20 ans de réclusion criminelle ? Ça me parait plutôt raide.

 

Si vous avez manqué les épisodes précédents, ils sont ici : épisode 1épisode 2épisode 3épisode 4épisode 5épisode 6épisode 7épisode 8, épisode 9 , épisode 10épisode 11, épisode 12épisode 13 , épisode 14.

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