Comparaison de la fiscalité des revenus locatifs
La fiscalité des revenus locatifs relève en matière d’impôt sur le revenu de la catégorie des revenus fonciers ou de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Ces deux régimes présentent des divergences lors de l’établissement du revenu imposable. Cependant le législateur en introduisant dans le cadre des régimes de défiscalisation immobilière l’amortissement en matière de revenus fonciers et en créant des réductions d’impôt a rapproché les deux systèmes d’imposition des revenus locatifs.
Les revenus locatifs se répartissent dans plusieurs catégories de revenus lors de l’imposition à l’impôt sur le revenu. La catégorie qui vient tout de suite à l’esprit est celle des revenus fonciers qui concerne la location d’immeubles nus par des propriétaires ou des usufruitiers, puis si l’immeuble est meublé, les revenus sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. La sous-location d’immeubles loués nus relève des bénéfices non commerciaux alors que la sous-location d’immeubles loués meublés a trait aussi aux bénéfices industriels et commerciaux. Le choix de louer les immeubles nus ou meublés entraîne des différences notables dans le cas du calcul du revenu imposable à l’impôt sur le revenu et de la plus-value lors de la cession de l’immeuble. Cette forme de location a aussi des conséquences en matière de TVA. Au-delà du choix de la structure individuelle, des contribuables préfèrent avoir recours à la société civile immobilière pour loger des activités de location.
Après avoir examiné la détermination des revenus fonciers et des bénéfices industriels et commerciaux et les divergences de ces régimes fiscaux (I), nous étudierons les convergences mises en place par le législateur pour rapprocher les deux régimes (II).
I – Les champs d’application des revenus fonciers et des bénéfices industriels et commerciaux et leurs régimes fiscaux : à la recherche des divergences
La majorité des locations d’immeubles relève des revenus fonciers (A), les autres locations sont soumises aux bénéfices industriels et commerciaux (B).
A – Les revenus fonciers
Ils regroupent les revenus des propriétés bâties et non bâties louées nues1. Ce sont essentiellement les locations des immeubles d’habitation, des exploitations et terres agricoles aux fermiers, des locaux industriels ou commerciaux non équipés et des emplacements de parkings sans prestations accessoires. Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu2. Cette disposition a été mise en place afin de limiter l’hémorragie fiscale liée à l’imposition des revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance. En effet, l’imposition d’un revenu fictif s’accompagnait de la possibilité de déduire les charges ; des déficits étaient créés qui venaient en diminution du revenu global imposable.
Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut foncier et le total des charges de propriété3.
1 – Le revenu brut foncier
Ce sont les recettes effectivement encaissées au cours de l’année d’imposition. Les recettes brutes à retenir sont augmentées du montant des dépenses incombant au propriétaire et mises à la charge du locataire.
Sont à ajouter les subventions et indemnités destinées à financer des charges déductibles ainsi que les recettes provenant de la location du droit d’affichage et du droit de chasse. Les dépôts de garantie ne sont pas à inclure dans le revenu brut foncier. Ils représentent une dette du bailleur à l’égard du locataire4.
À la fin du bail, si les dépôts de garantie sont conservés par le bailleur pour faire face à des loyers impayés ou à des dégradations, ils deviennent des recettes.
En cas de recettes provenant d’années antérieures, le contribuable a le choix entre le régime d’étalement des revenus antérieurs ou le système du quotient par 4 afin de limiter la progressivité de l’impôt sur le revenu.
2 – Le micro-foncier
Ce régime s’applique désormais de plein droit depuis l’imposition des revenus 2001 à tous les contribuables dont le montant brut des revenus fonciers n’excède pas 15 000 €. Le taux de l’abattement forfaitaire est de 30 %. Le régime réel est donc optionnel en deçà de 15 000 € et de plein droit au-delà. L’option s’exerce pour une durée de 3 ans.
3 – Le régime réel
Une distinction doit être opérée entre les immeubles urbains et les immeubles ruraux.
a – Les immeubles urbains
Les charges suivantes sont déductibles dans le cadre du calcul du revenu imposable :
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les primes d’assurance ;
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les frais de gestion fixés à 20 € par local (les frais de correspondance et de téléphone) ;
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les frais de rémunération des gardes et concierges ;
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les frais de procédure ;
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les frais de rémunérations, honoraires et commissions versés à un tiers pour la gestion de l’immeuble ;
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les provisions dans le cadre des charges de copropriété : un ajustement est effectué l’année suivante lorsque les charges sont devenues définitives.
Les autres charges déductibles sont :
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les dépenses de réparation et d’entretien. Elles ont pour but de remettre l’immeuble en l’état sans en modifier la consistance. Ont ainsi été considérées comme des dépenses de réparation, le remplacement de fenêtres usagées par des fenêtres neuves, le remplacement d’une installation électrique vétuste par une installation conforme aux normes5 ;
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les taxes foncières ;
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les intérêts d’emprunt ;
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les dépenses d’amélioration afférentes aux locaux d’habitation à l’exclusion des travaux de construction, de reconstruction ou d’agrandissement. La jurisprudence en la matière a été fixée par un arrêt de principe rendu le 17 décembre 19766. Les travaux de construction, non déductibles dans le cadre des revenus fonciers sont caractérisés par la création de nouveaux locaux ou la modification importante du gros œuvre ou des travaux d’aménagement de grande ampleur. Ainsi, la création de 47 pièces d’habitation dans des immeubles qui auparavant n’en comportaient que 26 est assimilée à des travaux de reconstruction. La déduction des dépenses d’amélioration trouve sa justification dans la volonté d’aider à la modernisation des logements. Ont ainsi été considérées comme des dépenses d’amélioration :
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l’aménagement de nouvelles installations sanitaires7,
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la totalité des dépenses d’installation d’un chauffage central,
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la réfection de certains sols.
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b – Les immeubles ruraux
Il s’agit essentiellement des terrains non bâtis et des exploitations agricoles.
La détermination du revenu brut suit les mêmes règles que celles appliquées aux immeubles urbains.
Les dépenses d’amélioration non rentables constituent des charges déductibles.
L’imputation des déficits fonciers sur le revenu global est limitée à 10 700 € (15 300 € dans le cadre de l’amortissement Périssol, v. infra). Ce déficit doit provenir de charges autres que les intérêts d’emprunts. Le surplus (au-delà de 10 700 €) est imputable sur les revenus fonciers pendant 10 ans ainsi que les déficits provenant des intérêts d’emprunt.
4 – Les prélèvements sociaux
Les revenus fonciers sont imposables aux prélèvements sociaux au taux de 17,2 %. La répartition desdits prélèvements est la suivante : contribution sociale généralisée (9,2 %) ; contribution au remboursement de la dette sociale (0,5 %) ; prélèvement de solidarité (7,5 %).
5 – Les cessions d’immeubles dans le cadre des revenus fonciers
En cas de cession des immeubles, c’est le régime des plus-values des particuliers qui s’applique, le taux en vigueur est de 19 % pour l’impôt sur le revenu et de 17,2 % pour les prélèvements sociaux. La plus-value s’obtient en ôtant le prix d’achat du prix de vente. Le prix de cession à retenir est le prix réel tel qu’il est stipulé dans l’acte8. Il convient d’y ajouter toutes les charges et indemnités visées à l’article 683, I, du CGI. En cas de cession d’un bien contre une rente viagère, seule la valeur en capital est à retenir.
Le prix d’achat est le prix effectivement acquitté par le cédant tel qu’il a été stipulé dans l’acte9. Il est majoré sur justificatifs :
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des charges et indemnités visées à l’article 683, I, du CGI ;
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des frais afférents à l’acquisition à titre gratuit définis par décret ;
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des frais d’acquisition à titre onéreux (montant réel ou évaluation forfaitaire à 7,5 % du prix d’achat) ;
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des dépenses de construction, reconstruction, agrandissement ou amélioration qui n’ont pas été prises en compte pour le calcul de l’impôt sur le revenu du vendeur. Si le contribuable est dans l’impossibilité de fournir des justificatifs, les dépenses seront évaluées forfaitairement à 15 % du prix d’acquisition. Cette possibilité n’est ouverte que si la cession intervient plus de 5 ans après l’achat et est réservée aux immeubles bâtis ;
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des frais de voirie, réseaux et distribution imposés par les collectivités territoriales.
Pour les ventes d’immeuble à rénover, le prix d’acquisition s’entend de l’existant et des travaux réalisés justifiés par une facture.
Le montant de la plus-value ainsi obtenu (prix de vente – prix d’achat + frais + travaux) est diminué d’un pourcentage variable par année de détention au-delà de la cinquième année de possession (v. infra). La période de référence pour le calcul de l’abattement retient les années entières.
Les moins-values ne sont pas prises en compte sauf dans le cas de vente d’un immeuble acquis par fractions successives.
En ce qui concerne l’impôt sur le revenu, l’abattement est de 6 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième année et jusqu’à la vingt et unième. Il est de 4 % pour la dernière année. L’exonération est acquise à l’issue d’une période de 22 ans.
L’abattement pour les prélèvements sociaux est désolidarisé par rapport à celui de l’impôt sur le revenu. L’exonération est acquise au bout de 30 ans. L’abattement est de 1,65 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième année et jusqu’à la vingt et unième. Il s’élève à 1,60 % pour la vingt-deuxième année de détention et 9 % pour les années restantes. L’exonération est acquise à l’issue d’une période de 30 ans.
B – Les bénéfices industriels et commerciaux
Sont imposables dans cette catégorie de revenus, les locations de logements meublés effectués directement par le bailleur ou par le recours à des plates-formes de location entre particuliers, (« le logement meublé est un logement décent équipé d’un mobilier en nombre et en qualité suffisants pour permettre au locataire d’y dormir, manger, et vivre convenablement au regard des exigences de la vie courante » selon la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 portant accès au logement et à un urbanisme rénové), les locations d’immeubles commerciaux et industriels munis du mobilier et du matériel nécessaires à l’exploitation, les revenus procurés par les immeubles inscrits à l’actif d’une entreprise industrielle et commerciale.
Deux régimes d’imposition coexistent : le micro-BIC et le régime réel.
1 – Le micro-BIC
Le résultat imposable est calculé de manière forfaitaire avant l’éventuelle prise en compte des plus et moins-values issues de la cession des immobilisations.
L’abattement forfaitaire, qui inclut en principe toutes les charges y compris les amortissements linéaires, est de 71 % pour les locations meublées de tourisme répondant à la définition de l’article L. 324-3 du Code du tourisme et les chambres d’hôtes. Les gîtes ruraux pour relever de ce seuil de 71 % doivent être classés « meublés de tourisme ». Ce régime est applicable lorsque le montant des recettes annuelles n’excède pas 176 200 € pour l’année 2020.
L’abattement forfaitaire est de 50 % pour les autres meublés pour un chiffre d’affaires n’excédant pas 72 600 € en 2020. Ces abattements sont d’au moins 305 €.
Les titulaires du régime du micro-BIC ont des obligations comptables allégées (tenue d’un registre récapitulant les achats, et d’un livre-journal présentant les recettes professionnelles). Ils peuvent opter pour un régime réel d’imposition pour une année reconductible tacitement.
2 – Le régime réel
Le bénéfice imposable s’obtient en ôtant des recettes perçues (les loyers courus et les indemnités d’assurance versées en cas de défaut de paiement du locataire), les charges réellement engagées pour l’activité de location en meublé. Contrairement aux revenus fonciers, les titulaires de BIC peuvent déduire l’amortissement calculé par rapport à la valeur vénale de l’immeuble. L’adhésion à un organisme de gestion agréé permet d’éviter d’être imposé sur le montant du bénéfice réalisé augmenté de 25 %.
Deux catégories de loueurs en meublé sont à distinguer : les loueurs professionnels et les loueurs non professionnels.
3 – Les loueurs en meublé professionnels
Deux conditions cumulatives sont à remplir pour bénéficier du statut de loueurs en meublé professionnels : les recettes de cette activité doivent être supérieures à 23 000 € pour l’année pour le foyer fiscal. De plus, ces recettes doivent excéder les autres revenus professionnels du foyer fiscal (TS, pensions et rentes viagères, BNC, BA, BIC autres que la location en meublé, revenus des gérants relevant de l’article 62 du Code général des impôts).
Les plus-values dégagées lors de la cession des immeubles sont des plus-values professionnelles : des plus-values à court terme imposables à l’impôt à taux progressif et des plus-values à long terme imposables au taux de 12,8 % (partie IR) avec un abattement de 10 % par année entière de détention au-delà de la cinquième année de détention10. Sous réserve d’une activité exercée depuis au moins 5 ans et de ne pas dépasser les seuils de 90 000 € (prestations de services) et 250 000 € (ventes de marchandises), les plus-values de cessions d’immeubles sont exonérées. Les immeubles des loueurs en meublé professionnels constituent des biens professionnels qui sont exonérés de l’impôt sur la fortune immobilière.
Les déficits dégagés lors de l’exercice de cette activité sont imputables sur le revenu global pendant 6 ans.
4 – Les loueurs en meublé non professionnels
Pour les loueurs en meublé non professionnels, les plus-values sur les cessions d’immeubles sont imposables dans le cadre des plus-values des particuliers (v. supra). Les immeubles sont imposables à l’impôt sur la fortune immobilière.
Les déficits non professionnels sont imputables sur les revenus de même nature pendant 10 ans.
5 – Les prélèvements sociaux
Les bénéfices réalisés par les loueurs en meublé professionnels et les plus-values à court terme sont imposables aux prélèvements sociaux au taux de 9,7 % (contribution sociale généralisée : 9,2 % ; contribution au remboursement de la dette sociale : 0,5 %). Les plus-values à long terme sont imposables au taux de 17,2 %.
Pour les loueurs en meublé non professionnels, les bénéfices réalisés sont soumis aux prélèvements sociaux au taux de 17,2 %.
Après avoir recensé les divergences des régimes d’imposition – les revenus fonciers et les bénéfices industriels et commerciaux –, examinons maintenant les convergences entre ces deux régimes.
II – Les convergences mises en place par le législateur pour rapprocher les deux régimes
Cette convergence se manifeste à travers l’impôt sur le revenu (A) et les autres impôts (B).
A – Les convergences en matière d’impôt sur le revenu
Elles se matérialisent à travers la détermination de l’assiette des revenus (1) et les réductions d’impôt (2).
1 – Les convergences en matière d’assiette : les régimes fiscaux de défiscalisation autorisant la déduction des amortissements dans le cadre des revenus fonciers ou la pratique d’un abattement supplémentaire
Le régime fiscal de l’établissement des revenus fonciers n’autorise pas la déduction des amortissements des immeubles. Aussi, afin d’encourager les investissements immobiliers, le législateur a mis en place des régimes de défiscalisation immobilière qui autorisent la déduction des amortissements sur une partie de l’investissement immobilier réalisé. Le but est d’augmenter les charges et de créer du déficit qui sera reportable sur le revenu global à hauteur de 10 700 €. Le solde déficitaire éventuel est reporté sur les revenus fonciers pendant 10 ans.
Pour les logements neufs acquis entre le 1er janvier 1996 et le 31 août 1999, un amortissement des immeubles mis en location est possible (loi Périssol). Le taux est de 10 % pour les quatre premières années et de 2 % pour les 20 années suivantes, soit un total de 80 % de la valeur d’achat.
Le logement doit faire obligatoirement l’objet d’un bail de 9 ans. En cas de non-respect des engagements, l’avantage fiscal est remis en cause. Le calcul de la plus-value ultérieure lors d’une cession ne retient pas les amortissements pour déterminer la valeur d’origine de l’immeuble.
Ce régime a été modifié par la loi de finances pour 1999 (mise en place du statut de bailleur privé conventionné, loi Besson). À compter du 1er janvier 1999, le contribuable qui a opté pour le statut du bailleur privé conventionné peut pratiquer pour les logements neufs mis en location un amortissement de 8 % du prix d’acquisition pendant les cinq premières années, puis 2,5 % pendant les 4 années suivantes (soit un total de 50 % de la valeur de l’immeuble). Le montant des loyers est plafonné et les locataires sont soumis à des conditions de ressources.
Une déduction forfaitaire de 26 % est pratiquée pour les revenus fonciers des 6 premières années de logements anciens sous certaines conditions. Ce régime peut reprendre à la suite d’une période de mise à disposition du logement au profit d’un ascendant ou d’un descendant. Cette mise à disposition a été autorisée, pour les logements acquis neufs ou en l’état futur d’achèvement à compter du 9 octobre 2002. Le régime a pris fin le 30 septembre 2006.
Il a été remplacé dans le cadre de la loi portant engagement national pour le logement par le dispositif Borloo ancien pour les locations consenties à compter du 1er octobre 2006. Tous les logements anciens qui ne bénéficient pas encore d’autres régimes spécifiques sont éligibles à ce nouveau régime. Les logements sont loués dans le cadre d’une convention signée avec l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). Ils relèvent du secteur intermédiaire ou ouvrent droit à l’aide personnalisée au logement (APL). La durée de la location est de 6 ans (conventionnement sans travaux) ou de 9 ans (conventionnement avec travaux subventionnés). Les loyers sont plafonnés et les locataires sont soumis à des conditions de ressources. Les locations dans le secteur intermédiaire ouvrent droit à une déduction supplémentaire de 30 % (pourcentage porté à 45 % si la location relève du secteur social). Ces locations sont étendues aux organismes de droit privé ou public qui les destinent à l’hébergement des personnes défavorisées.
La loi portant diverses dispositions relatives à l’urbanisme et à l’habitat supprime le dispositif Besson applicable aux logements neufs pour les investissements réalisés à compter du 1er janvier 2003. Un amortissement Robien est créé à compter de cette date. Il reprend pour l’essentiel les principales dispositions du dispositif Besson. L’amortissement peut être prorogé par période de 3 ans sans pouvoir excéder 6 ans au-delà du premier bail de 9 ans. L’amortissement est de 2,5 % par année supplémentaire soit un amortissement maximum de 65 %. Les plafonds de ressources des locataires sont supprimés alors que les plafonds de loyers sont augmentés. L’avantage fiscal est étendu aux acquisitions de logements anciens depuis le 3 avril 2003 destinés à être réhabilités par le propriétaire en vue de la location et aux locations déléguées. Dans le cadre de la loi de programmation pour la cohésion sociale, un nouveau dispositif a été mis en place (le régime Robien-Borloo) et se substitue au régime Lienemann. Il est applicable pour les investissements réalisés à compter du 1er janvier 2005 et éligibles à l’amortissement Robien. Le taux de la déduction forfaitaire est de 40 %. La location est soumise à des conditions de ressources pour les locataires et à un plafonnement du loyer. Les locations sont consenties pendant une durée de 9 ans à un organisme sans but lucratif ou à une union d’économie sociale qui met le logement à la disposition de personnes défavorisées.
La loi portant engagement national pour le logement, du fait de la non-occupation de certains logements placés sous le régime de la loi Robien et de la pénurie de logements sociaux, a mis en place deux nouveaux régimes pour l’investissement locatif dans le neuf : le Robien recentré et le Borloo neuf.
Le Robien recentré est applicable pour les investissements réalisés à compter du 1er septembre 2006, il se substitue au Robien traditionnel. Le locataire ne doit pas appartenir au foyer fiscal et le loyer ne doit pas excéder un certain plafond. L’amortissement est de 6 % pour les 7 premières années et de 4 % pour les 2 années suivantes, soit un amortissement total de 50 %, sans possibilité de prorogation.
Le Borloo neuf concerne les mêmes types de logements que le Robien recentré. En plus du plafonnement des loyers, les ressources du locataire sont limitées. Il existe une possibilité d’amortissements supplémentaires au-delà de 9 ans en cas de prorogation de la location (2,5 % par année supplémentaire, bail par période de 3 ans sans pouvoir excéder 6 ans, amortissement maximum : 65 %). Une déduction supplémentaire de 30 % est accordée avant déduction de l’amortissement et des charges liées à la location.
Le principe d’une déduction spécifique a été repris dans le cadre de la déduction dite Cosse.
Une convention doit avoir été passée avec l’ANAH entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2022.
La déduction spécifique au titre des revenus fonciers est de 15 % à 70 % (85 % pour les logements à des personnes défavorisées) selon le niveau de tension du marché locatif (zones A bis, A, B1 et B2 du dispositif Duflot-Pinel) pendant la durée du bail.
Les bénéficiaires sont des personnes physiques ou des associés d’une société soumise à l’IR et imposables dans le cadre des revenus fonciers.
Sont visées par le dispositif, les locations d’immeubles neufs ou anciens loués nus et affectés à l’habitation principale des locataires.
Pour les conventions conclues à compter du 1er juillet 2020, la déduction est réservée aux logements qui présentent un certain niveau de performance énergétique.
2 – La convergence des régimes grâce à l’utilisation des réductions d’impôt pour les revenus fonciers et les BIC
Le régime de réduction d’impôt Scellier a vu le jour à compter du 1er janvier 2009. Le législateur préfère désormais la réduction d’impôt à l’amortissement ou à la déduction forfaitaire de charges en plus des charges traditionnelles. Le tout, nous le rappelons était destiné à créer du déficit foncier. Le choix du législateur est dû à la volonté de limiter l’avantage fiscal à un pourcentage des dépenses engagées alors que dans le cadre du déficit créé, les titulaires des plus hauts revenus bénéficiaient d’une économie d’impôt plus importante s’ils atteignaient la tranche marginale supérieure de l’impôt sur le revenu. Le Scellier concerne les constructions qui peuvent bénéficier de l’amortissement Robien. Pour l’année 2009, le contribuable avait le choix entre le Robien recentré et le régime Scellier. La réduction d’impôt est calculée sur le prix de revient du logement plafonné à 300 000 €. Elle est égale à 25 % du prix pour les immeubles acquis ou construits en 2009 ou 2010. À compter de 2011, nous assistons à « un verdissement » de la réduction d’impôt en fonction du niveau de performance énergétique du logement (22 % pour le label BBC basse consommation d’énergie ou 13 % si le logement n’a pas le label BBC). En 2012, les taux sont ramenés respectivement à 13 % ou 6 %. Son étalement s’opère sur 9 ans. Le régime a disparu le 31 décembre 2012.
Un nouveau régime est mis en place à compter du 1er janvier 2013 jusqu’au 31 décembre 2016, le Duflot. Il est destiné à favoriser la construction de logements locatifs dans le secteur intermédiaire. Les locataires sont soumis à des conditions de ressources et les loyers sont plafonnés. Les zones où peuvent se construire de tels logements sont délimitées afin de répondre à la demande et de ne pas déséquilibrer le marché locatif. Il s’agit de logements neufs édifiés selon les normes BBC. L’avantage fiscal est de 18 % de 300 000 € par contribuable. Ce plafond concerne les investissements d’une année. Le nombre de logements construits n’excède pas deux par an. La réduction d’impôt est étalée sur 9 ans. Le logement doit être loué nu pour une durée minimale de 9 ans.
Le dispositif dit Pinel a réaménagé le régime dit Duflot. Cette réduction d’impôt se caractérise tant par la modulation des durées de location (6 ou 9 ans, sur option irrévocable du contribuable), que par la modulation corrélative des taux de réduction d’impôt (métropole, 12 ou 18 % du prix de revient du bien ; outre-mer, 23 ou 29 %).
Le dispositif permet aussi la souscription d’un bail au profit d’un ascendant ou un descendant, hors foyer fiscal, du contribuable ou de l’un des associés de la société investisseur et la prorogation de l’engagement de location initial, pour une ou deux périodes triennales, dans la limite globale de 12 années, moyennant un avantage fiscal complémentaire de 3 ou 6 % par période triennale.
En pratique, la réduction d’impôt s’élève à 2 % du prix de revient du logement par an, pour la durée locative initiale, de 6 ou de 9 ans.
En cas de prorogation de l’engagement de location, la réduction d’impôt s’élève à 21 % du prix de revient du logement, à l’issue d’une durée de location totale de 12 ans.
Le dispositif Denormandie est calqué sur la réduction Pinel pour les logements anciens situés dans certaines communes pour les opérations dites cœur de ville. Il a été prorogé jusqu’au 31 décembre 2022 et rendu applicable sur tout le périmètre des communes éligibles. Le montant des travaux doit être au moins égal à 25 % du prix d’achat de l’immeuble. Il s’agit de la réhabilitation d’un logement ancien ou de la transformation d’un local en logement d’habitation. Le locataire ne doit pas appartenir au foyer fiscal de l’investisseur. Les ressources du locataire ne doivent pas dépasser certains plafonds fixés en fonction des zones d’habitation et les loyers mensuels sont aussi plafonnés. Le bail doit être consenti dans un délai de 1 an à compter de l’achèvement des travaux pour une durée de 6, 9 ou 12 ans. La réduction d’impôt est égale selon la durée du bail à 12 %, 18 % ou 21 % du prix d’achat (pour un montant maximum de 300 000 €), selon la durée du bail consenti.
L’ensemble de ces réductions d’impôt est soumis au plafonnement des « niches fiscales » à hauteur de 10 000 €. L’avantage fiscal de l’ensemble des niches ne doit pas excéder 10 000 €11. Ce seuil peut être un frein dans le cadre de la défiscalisation immobilière.
Les locations meublées non professionnelles12 connaissent aussi ce phénomène des réductions d’impôt (11 %) d’un montant de 300 000 € à reporter sur une durée de 9 ans. La location meublée Censi-Bouvard a été prorogée pour les résidences d’étudiants, les résidences pour personnes âgées ou handicapées. Il est préférable d’investir dans les résidences étudiantes car les normes sont moins contraignantes que dans les résidences pour personnes âgées ou handicapées.
Les résidences de tourisme sont désormais exclues du dispositif. Dans le cadre de ces régimes de réduction d’impôt, le contribuable conserve la possibilité de pratiquer un amortissement uniquement sur la valeur de l’immeuble qui excède 300 000 €.
A contrario, un nouveau dispositif est mis en place pour les travaux de réhabilitation effectués dans des logements de plus de 15 ans situés dans des résidences de tourisme entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2019 (la décision doit être prise par l’assemblée des copropriétaires, le logement est loué pendant 5 ans après les travaux, la réduction d’impôt de 20 % repose sur un montant plafonné à 22 000 € soit un maximum de 4 400 €).
Ces différentes réductions d’impôt qui concernent les revenus fonciers et les bénéfices industriels et commerciaux ont été vivement critiquées par la Cour des comptes dans son rapport paru en 2019, La gestion des dépenses fiscales en faveur du logement. La multiplication des régimes de défiscalisation présente un coût non négligeable pour les finances publiques et la politique fiscale du législateur est erratique. Pour les contribuables, le gain fiscal est souvent dilué dans le prix d’achat de l’immeuble.
B – La convergence dans le cadre d’autres impôts
Après l’examen des convergences voulues par le législateur en matière d’impôt sur le revenu (base imposable et réductions d’impôt), nous poursuivons notre démarche en examinant successivement d’autres impôts : l’impôt sur les sociétés (1) et la TVA (2).
1 – L’impôt sur les sociétés : l’utilisation des SCI
Dans le cadre de l’utilisation de la SCI soumise à l’IR, l’associé est imposable en fonction de son statut fiscal13. Les particuliers lors de la location d’immeubles nus sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers. Si des titulaires de bénéfices industriels et commerciaux ou de bénéfices agricoles ont inscrit les parts qu’ils détiennent dans la société de personnes à l’actif du bilan de leur entreprise, leur quote-part de résultats sera calculée comme les résultats d’une entreprise commerciale. La prise en compte de l’amortissement de l’immeuble loué sera retenue. Le calcul de la quote-part du résultat revenant à une société soumise à l’IS suivra là encore les règles de l’impôt sur les sociétés et l’amortissement de l’immeuble sera pris en compte lors du calcul du résultat.
A contrario, il convient d’être prudent dans le cadre d’immeuble nu logé dans une SCI et mis gracieusement à la disposition du gérant. Cette mise à disposition gratuite est possible dans le cadre des revenus fonciers et n’entraîne pas de redressement sur d’éventuels manques à gagner.
Un gérant d’une SCI avait loué sa maison d’habitation pendant qu’il était parti en vacances pendant 15 jours l’année N. Le dispositif fut reconduit pour la même période l’année N+1 et la durée de la location fut enfin portée à 1 mois l’année N+2. L’administration des impôts a estimé qu’à partir de l’année N+2, la location meublée avait un caractère habituel. La société a donc été soumise à l’impôt sur les sociétés pour le loyer perçu pour le mois de location. La location représentait 100 % des recettes. Cet assujettissement à l’IS a entraîné un redressement sur les 11 autres mois car l’immeuble avait été mis gratuitement à disposition du gérant14.
L’option pour l’impôt sur les sociétés est utilisée pour les contribuables qui sont dans les tranches marginales supérieures de l’impôt sur le revenu. Les études fiscales relèvent le plus souvent que l’option pour l’IS est parée de toutes les vertus. Le seul inconvénient est celui de la cession de l’immeuble qui relève des plus-values professionnelles imposables au taux normal de l’impôt sur les sociétés.
2 – La taxe sur la valeur ajoutée
En matière de TVA, les locations d’immeubles nus à usage d’habitation sont exonérées de TVA sans possibilité d’option afin de ne pas augmenter les prix des loyers. Ce qui n’est pas le cas de la location des locaux industriels ou commerciaux non équipés pour lesquelles le contribuable a la possibilité d’opter pour la TVA. Pour le preneur, il est assujetti à la TVA et il peut récupérer cet impôt. Pour le bailleur, il pourra récupérer la TVA sur les travaux qu’il pourra effectuer.
En ce qui concerne les locations en meublé d’habitation, elles sont aussi exonérées de TVA comme les locations d’immeubles nus. Un but identique est recherché : ne pas augmenter le prix des loyers. Seules sont assujetties à la TVA, les locations pour lesquelles sont proposées des prestations de services en sus de la location (petit-déjeuner, nettoyage, fourniture de linge de maison, réception). C’est le cas des résidences de tourisme. Le bailleur peut ainsi récupérer la TVA lors de l’achat de l’immeuble. Cependant, une cession de l’immeuble pour lequel le bail commercial liant le bailleur à une société de prestations de services est terminé entraînera un reversement de la TVA pour les années qui restent à courir jusqu’à la dix-neuvième année qui suit l’achat de l’immeuble. Cette disposition pénalisante est souvent passée sous silence lors de la vente de programmes immobiliers concernant les locations meublées.
Les locations d’immeubles munis d’équipements professionnels, les locations de garage et de parking ne dépendant pas de locaux d’habitation, les locations de terrains aménagés, les campings relèvent de plein droit de la TVA.
L’immobilier locatif constitue toujours un des placements financiers préféré des Français. Le rapport varie en fonction du type d’investissement réalisé ; il faut néanmoins mettre en garde les investisseurs qui doivent privilégier le gain économique avant le gain fiscal.
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- Leprovaux J., « Quel avenir pour l’assurance-vie ? »
- 116e Congrès des notaires de France : les notaires veulent être au cœur de la vie
Notes de bas de pages
-
1.
CGI, art. 14.
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2.
CGI, art. 15, II.
-
3.
CGI, art. 28.
-
4.
CE, ass. plén., 8 mai 1981, n° 19171 : Dr. fisc. 1981, 29, comm. 1472, concl. Lobry P.
-
5.
CAA Paris, 27 mai 1997 : Dr. fisc. 1998, comm. 67.
-
6.
CE, ass. plén., 17 déc. 1976 : Lebon, p. 558.
-
7.
CE, ass. plén., 17 déc. 1976 : Lebon, p. 558.
-
8.
CGI, art. 150, VA.
-
9.
CGI, art. 150, YB.
-
10.
CGI, art. 151 septies, B.
-
11.
CGI, art. 200, 0A.
-
12.
CGI, art. 199 sexvicies.
-
13.
CGI, art. 238 bis, K.
-
14.
CE, 28 déc. 2012, n° 347607, SCI Le Mas des sources : Dr. fisc. 2013, comm. 189.